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21/05/2024 | FRANCE | N°23/13150

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 3, 21 mai 2024, 23/13150


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 3



ARRÊT DU 21 MAI 2024



(n° 212 , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/13150 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIBZ7



Décision déférée à la cour : ordonnance du 29 juin 2023 - président du TC de PARIS - RG n° 2023023012





APPELANTE



S.A.S. URBAN STEEL GROUP, RCS de Paris n°881239370, prise en la

personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 3

ARRÊT DU 21 MAI 2024

(n° 212 , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/13150 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIBZ7

Décision déférée à la cour : ordonnance du 29 juin 2023 - président du TC de PARIS - RG n° 2023023012

APPELANTE

S.A.S. URBAN STEEL GROUP, RCS de Paris n°881239370, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant Me Paul BUISSON de la SELARL BUISSON & ASSOCIES, avocat au barreau du Val d'Oise

INTIMEE

S.A.S. T.A.L.E.K, RCS de Paris n°415308568, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Jessica CHUQUET de la SELEURL CABINET CHUQUET, avocat au barreau de PARIS, toque : E0595

Ayant pour avocat plaidant Me Thomas MLICZAK, de l'AARPI TMH AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 mars 2024, en audience publique, rapport ayant été fait par Anne-Gaël BLANC, conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre

Anne-Gaël BLANC, conseillère

Valérie GEORGET, conseillère

Greffier lors des débats : Jeanne PAMBO

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-Christophe CHAZALETTE, président de chambre et par Jeanne PAMBO, greffier, présent lors de la mise à disposition.

********

La société Talek exerce une activité de holding.

La société Urban Steel Group réalise des programmes immobiliers. Elle construit notamment des logements sociaux en milieu rural et plus particulièrement à [Localité 5], dans la Somme, par l'intermédiaire d'une de ses filiales, la société [Localité 5] 2020.

Le 20 octobre 2020, la société Urban Steel Group a lancé un emprunt obligataire de 10 300 obligations d'une valeur nominale de 100 euros destiné à lever des fonds pour cette opération.

Le 4 décembre 2020, la société Talek a souscrit 10 000 de ces obligations, pour un montant total de 1 000 000 d'euros remboursable au 30 juin 2022 outre les intérêts.

Une augmentation du capital de la société [Localité 5] a été envisagée à laquelle devaient notamment prendre part des sociétés liées à la société Talek. Celle-ci n'a pas abouti.

Par courrier du 30 septembre 2022, la société Talek a adressé à la société Urban Steel Group une mise en demeure de lui régler la somme de 1 216 542 euros, au titre du remboursement du nominal de 1 000 000 d'euros augmenté des intérêts.

Le 6 février 2023, la société Urban Steel Group a effectué un paiement de 229166,66 euros.

Par acte extrajudiciaire du 27 avril 2023, la société Talek a fait assigner la société Urban Steel Group devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris aux fins de :

recevoir l'intégralité des moyens, demandes et prétentions de la société Talek ;

condamner la société Urban Steel Group à payer à la société Talek la somme, en principal, de 1 174 167 euros, outre les intérêts de retard contractuellement prévus, lesquels sont arrêtés au 30 avril 2023 à la somme de 124 567 euros, soit la somme totale de 1 298 733 euros à parfaire au jour de l'ordonnance à intervenir avec anatocisme et à laquelle il convient de déduire la somme de 229 166,66 euros réglée, soit 1 069 566, euros à parfaire ;

condamner la société Urban Steel Group à payer à la société Talek la somme de 50 000 euros de provision pour résistance abusive ;

condamner la société Urban Steel Group à payer à la société Talek la somme de 15  000 en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par ordonnance contradictoire du 29 juin 2023, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :

condamné la société Urban Steel Group à payer à la société Talek, à titre de provision, la somme, en principal, de 1 174 167 euros, outre les intérêts de retard contractuellement prévus, lesquels sont arrêtés au 29 juin 2023 à la somme de 148 050 euros, soit la somme totale de 1 322 217 euros à parfaire au jour de l'ordonnance, avec anatocisme et à laquelle il convient de déduire la somme de 229 166,66 euros réglée, soit 1 093 050,34 euros à parfaire ;

condamné la société Urban Steel Group à payer à la société Talek la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile, débouté pour le surplus ;

dit n'y avoir lieu à référé sur la demande en dommages et intérêts ;

rejeté la demande de délais ;

rejeté toutes demandes plus amples ou contraires des parties ;

condamné en outre la société Urban Steel Group aux dépens de l'instance.

Par déclaration du 21 juillet 2023, la société Urban Steel Group a relevé appel de cette décision en critiquant l'ensemble des chefs de son dispositif.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 28 février 2024, la société Urban Steel Group demande à la cour de :

infirmer l'ordonnance de référé rendue le 29 juin 2023 en ce qu'elle a :

condamné la société Urban Steel Group à payer à la société Talek, à titre de provision, la somme, en principal, de 1 174 167 euros, outre les intérêts de retard contractuellement prévus, lesquels sont arrêtés au 29 juin 2023 à la somme de 148 050 euros, soit la somme totale de 1 322 217 euros à parfaire au jour de l'ordonnance, avec anatocisme et à laquelle il convient de déduire la somme de 229 166,66 euros réglée, soit 1 093 050,34 euros à parfaire ;

condamné la société Urban Steel Group à payer à la société Talek la somme de 8 000 euros, au titre de l'article 700 code de procédure civile ;

rejeté la demande de délais ;

rejeté toutes demandes plus amples ou contraires des parties ;

condamné en outre la société Urban Steel Group aux dépens de l'instance.

statuant à nouveau,

à titre principal :

juger qu'il existe une contestation sérieuse ;

dire n'y avoir lieu à référé sur les demandes de la société Talek ;

débouter la société Talek de son appel incident et notamment sa demande de condamnation provisionnelle pour résistance abusive ;

débouter la société Talek de l'ensemble de ses demandes ;

à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour ne considérait pas l'existence d'une contestation sérieuse :

fixer la créance de la société Talek à son encontre à la somme provisionnelle de 770 833,34 euros ;

ordonner la mise en place de délais de paiement sur 24 mois, assortis d'intérêts au taux légal, dont à déduire les versements effectués par elle depuis l'ordonnance dont appel, ces versements étant imputables au premier chef sur le capital dû et non sur les intérêts ;

en toute hypothèse :

condamner la société Talek à lui payer et lui verser la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société Talek aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 5 mars 2024, la société Talek demande à la cour de :

recevoir l'intégralité de ses moyens, demandes et prétentions ;

confirmer l'ordonnance de référé rendue le 29 juin 2023 par le président du tribunal de commerce de Paris en ce qu'elle a :

condamné la société Urban Steel Group à payer à la société Talek, à titre de provision, la somme, en principal, de 1 174 167 euros, outre les intérêts de retard contractuellement prévus, lesquels sont arrêtés au 29 juin 2023 à la somme de 148 050 euros, soit la somme totale de 1 322 217 euros à parfaire au jour de l'ordonnance, avec anatocisme et à laquelle il convient de déduire la somme de 229 166,66 euros réglée, soit 1 093 050,34 euros à parfaire ;

condamné la société Urban Steel Group à payer à la société Talek la somme de 8 000 euros, au titre de l'article 700 code de procédure civile ;

rejeté la demande de délais ;

rejeté toutes demandes plus amples ou contraires des parties ;

condamné en outre la société Urban Steel Group aux dépens de l'instance ;

condamner la société Urban Steel Group à lui payer à titre provisionnel la somme, en principal, de 1 174 167 euros, outre les intérêts de retard contractuellement prévus, lesquels sont arrêtés au 11 mars 2024 à la somme de 247 854 euros, soit la somme totale provisionnelle de 1 422 021 euros à parfaire au jour de l'ordonnance à intervenir avec anatocisme et à laquelle il convient de déduire la somme de 229 166,66 euros réglée, soit 1 192 854,34 euros à titre provisionnel et à parfaire ;

infirmer l'ordonnance de référé rendue le 29 juin 2023 par le président du tribunal de commerce de Paris en ce qu'elle a :

dit n'y avoir lieu à référé sur la demande en dommages et intérêts ;

en conséquence, statuant à nouveau,

condamner la société Urban Steel Group à lui payer la somme de 50 000 euros de provision pour résistance abusive ;

en tout état de cause,

condamner la société Urban Steel Group à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société Urban Steel Group aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 mars 2024.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Sur ce,

Sur la demande de provision

En application de l'article 873, alinéa 2, du code de commerce, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier.

Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé auxprétentions du requérant n'apparaît pas immédiatement vain, et laisse subsister un doute sur le sens de la décision, qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point, si les parties entendaient saisir le juge du fond.

Par ailleurs, en application de l'article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

En outre, l'article L.213-5 du code monétaire et financier prévoit que les obligations sont des titres négociables qui, dans une même émission, confèrent les mêmes droits de créance pour une même valeur nominale. Les obligations constituent ainsi un titre de créance donnant droit, selon les termes et les modalités du contrat d'émission, au remboursement du principal de l' emprunt et au service d'un intérêt.

Il est acquis que, le 4 décembre 2020, la société Talek a souscrit 10 000 obligations émises par la société Urban Steel group, pour un montant de 1 000 000 d'euros, que cet emprunt prévoyait le remboursement du nominal par l'émetteur, le 30 juin 2022, et que, malgré la mise en demeure en ce sens qui lui a été adressée le 30 septembre suivant, la société Urban Steel Group n'a pas remboursé les sommes dues dans leur intégralité, seul un paiement de 229 166,66 euros ayant été effectué.

Pour contester son obligation de remboursement, la société Urban Steel Group se prévaut du retard pris dans l'avancée du chantier et de ses difficultés subséquentes. Elle fait valoir que la société Talek serait indirectement responsable de ce retard du fait des agissements de sociétés qui lui sont liées et qui ont refusé, de mauvaise foi, une augmentation de capital malgré leur engagement. Elle souligne également que la souscriptrice a été informée des risques liés à son activité de promotion immobilière.

Cependant, le refus d'augmentation de capital allégué concerne des tiers au litige. Surtout, si ce refus, à le supposer avéré, a pu contribuer à une avancée moins rapide du chantier et, dès lors, à d'éventuelles difficultés de remboursement de la société intimée, il ne saurait l'exonérer de son obligation à ce titre en l'absence de toute stipulation contractuelle le prévoyant, la simple information sur les risques liés à son activité en termes de solvabilité n'instaurant aucunement une telle condition et ce, de manière évidente sans qu'il y ait lieu à interprétation.

Par ailleurs, pour contester le paiement provisionnel des intérêts, lasociété Urban SteelGroup soutient que, en l'absence de signature par elle du document intitulé 'Termes et conditions des obligations d'un montant nominal maximum global de 1 300 000 euros - émission obligataire USG [Localité 5] 11% juin 2022' , les stipulations qui y figurent concernant le principe et le taux des intérêts applicables à l'emprunt litigieux lui sont inopposables. Elle invoque l'article 1367 du code civil qui prévoit notamment que la signature est nécessaire à la perfection d'un acte juridique, identifie son auteur et manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte.

Cependant, une clause de renvoi, apparente, claire et précise, figurant dans un document contractuel signé, aux termes de laquelle le signataire reconnaît avoir eu connaissance des conditions générales, est efficace. Or, le bon de souscription signé tant par la société Urban Steel Group que par la société Talek renvoie expressément au document 'Termes et conditions' susmentionné, qui a été émis par l'intimé et dont l'appelante reconnaît avoir pris connaissance, de telle sorte que son contenu constitue la loi des parties notamment sur les intérêts applicables.

Or l'article préliminaire de ce document stipule que 'par le terme 'Taux d'Intérêt' les parties désignent 11% l'an' et l'article 5.1 détaille les périodes et modalités de calcul des intérêts de l'emprunt comme des intérêts de retard. Une simulation chiffrée de ce calcul figure par ailleurs en annexe 3 de l'acte.

Ces stipulations justifient le principe et le montant des intérêts réclamés.

Il se déduit de ce qui précède que les contestations élevées par l'appelante n'apparaissent pas de nature à laisser subsister un doute sur le sens de la décision éventuelle du juge du fond tant sur le remboursement du nominal que sur les intérêts.

La décision sera dès lors confirmée sur le montant et le principe de la provision allouée.

Sur les délais de paiement

L'article 1343-5 du code civil dispose que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Au cas présent, l'appelante conclut à l'infirmation de l'ordonnance qui a rejeté sa demande de délais au motif que le refus de l'augmentation de capital susmentionné aurait retardé le chantier.

Cependant, comme le souligne l'intimée, ce faisant, alors qu'elle ne produit aux débats aucun document comptable, elle n'établit pas que sa situation financière justifie l'octroi de délais de paiement, le simple retard des travaux n'étant pas, à lui seul, de nature à montrer que celle-ci est nécessairement obérée.

La décision de première instance sera confirmée de ce chef.

Sur la résistance abusive

L'octroi de dommages et intérêts pour résistance abusive relève du juge des référés qui peut dans ce cadre apprécier l'existence d'une faute et d'un préjudice en résultant.

La décision du premier juge, qui a dit n'y avoir lieu à référé de ce chef, au motif que cette demande excéderait ses pouvoirs sera dès lors infirmée.

Cependant, la société Talek ne démontre pas qu'elle a subi un préjudice en lien avec la résistance abusive qu'elle dénonce.

La demande tendant à voir condamner la société appelante au paiement de dommages et intérêts de ce chef sera donc rejetée.

Sur les demandes accessoires

La décision sera confirmée sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Urban Steel Group sera également condamnée aux dépens de l'appel ainsi qu'au paiement de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'elle dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant ;

Rejette la demande de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

Condamne la société Urban Steel Group au paiement à la société Talek de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne la société Urban Steel Group aux dépens de l'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 23/13150
Date de la décision : 21/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-21;23.13150 ?
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