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21/05/2024 | FRANCE | N°21/03079

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 13, 21 mai 2024, 21/03079


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 13



ARRET DU 21 MAI 2024



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03079 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDEA4



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Janvier 2021 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Paris - RG n° 19/10374



APPELANTE



S.A.R.L. DIRECT INTERIM

[Adresse 8]

[Lo

calité 6]

Représentée par Me Jean-baptiste ROZES de l'AARPI SHERPA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0575



INTIMES



Monsieur [B] [T]

[Adresse 4]

[Localité 7]

Repré...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 13

ARRET DU 21 MAI 2024

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03079 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDEA4

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Janvier 2021 - TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de Paris - RG n° 19/10374

APPELANTE

S.A.R.L. DIRECT INTERIM

[Adresse 8]

[Localité 6]

Représentée par Me Jean-baptiste ROZES de l'AARPI SHERPA AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0575

INTIMES

Monsieur [B] [T]

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représenté par Me Serge PEREZ de la SCP PEREZ SITBON, avocat au barreau de PARIS, toque : P0198

Monsieur [U] [R]

[Adresse 1]

[Localité 7]

Ayant pour avocat postulant Me Sylvie KONG THONG de l'AARPI Dominique OLIVIER - Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

Ayant pour avocat plaidant Me Séverine GUYOT de la SCP LYONNET DU MOUTIER ' VANCHET ' LAHANQUE, avocat au barreau de PARIS

SCP HENRI BERRUER anciennement dénommée la SCP NELLY BENICHOU-JEROME LEGRAIN-HENRI BERRUER agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux y domiciliés

[Adresse 2]

[Localité 7]

Ayant pour avocat postulant Me Sylvie KONG THONG de l'AARPI Dominique OLIVIER - Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

Ayant pour avocat plaidant Me Séverine GUYOT de la SCP LYONNET DU MOUTIER ' VANCHET ' LAHANQUE, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de Chambre, chargée du rapport, et devant Mme Estelle MOREAU, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre

Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de Chambre

Mme Estelle MOREAU, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Florence GREGORI

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 21 mai 2024 prorogé au 21 mai 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre et par Florence GREGORI, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

Mme [G] [F] a été embauchée, du 1er mars 2007 au 22 septembre 2010, en qualité de responsable de l'agence de la Sarl Direct Interim exerçant une activité d'intérim dans le secteur du BTP située [Adresse 3].

Soupçonnant son ancienne salariée de s'être livrée à des actes de détournement de sa clientèle et de débauchage d'intérimaires avec lesquels elle travaillait habituellement au profit de son nouvel employeur, la société Ingénierie Performance exerçant également une activité d'intérim, la société Direct Interim a mandaté M. [B] [T], avocat, afin que soient recueillies des preuves de ces agissements, notamment par le moyen de constats d'huissier.

Le président du tribunal de grande instance de Paris a rendu le 20 octobre 2010 deux ordonnances commettant M. [U] [R], huissier de justice, aux fins d'effectuer deux constats, l'un dans les bureaux de la société Direct Interim situés [Adresse 3] après ouverture de 9 courriels se trouvant sur la messagerie Hotmail de Mme [F] et l'autre au siège de la société Ingénierie Performance afin d'y constater la présence éventuelle de Mme [F], interroger les intérimaires présents sur le nom des entreprises utilisatrices et le nom de leur employeur actuel et prendre copie de documents précis.

Deux procès verbaux de constat ont été établis les 25 et 29 octobre 2010, sur la base desquels la société Direct Interim a assigné la société Ingénierie Performance devant le tribunal de commerce de Paris le 26 décembre 2011 en paiement de la somme de 752 450 euros en réparation d'actes de concurrence déloyale commis à son égard.

La société Ingénierie Performance a engagé une instance en rétractation des deux ordonnances du 20 octobre 2010 devant le président du tribunal de grande instance de Paris qui, par une première décision du 4 décembre 2013, a :

- rétracté l'ordonnance sur requête ayant autorisé le constat dans les locaux de la société Direct Intérim et dit que les documents recueillis par l'huissier à cette occasion ne pourront pas être utilisés contre la société Ingénierie Performance, considérant que la requête et l'ordonnance n'avaient pas été portées à la connaissance de la société Ingénierie Performance,

- rétracté la seconde ordonnance du 20 octobre 2010 ayant autorisé le constat dans les locaux de la société Ingénierie Performance, mais uniquement en ce qu'elle a autorisé l'huissier de justice à interroger les intérimaires présents sur les entreprises utilisatrices et leur ancien employeur, cette autorisation apparaissant excessive et inutile,

- débouté la société Ingénierie Performance du surplus de ses demandes.

Sur appel de la société Ingénierie Performance et par arrêt du 3 septembre 2015, la cour d'appel de Paris a :

- infirmé, dans la limite des dispositions frappées d'appel, cette première ordonnance du 4 décembre 2013,

- rétracté les dispositions non déjà rétractées de l'ordonnance sur requête du 20 octobre 2010 ayant autorisé la saisie par un huissier de justice de pièces et documents dans les locaux de la société Ingénierie Performance,

- dit que cette rétractation rend non avenues les opérations effectuées le 29 octobre 2010 par l'huissier de justice désigné par le juge des requêtes,

- ordonné la destruction des pièces et documents obtenus par ce moyen.

Par une seconde ordonnance du 4 décembre 2013, statuant à la demande de Mme [F], le président du tribunal de grande instance de Paris, pour le même motif, a :

- rétracté l'ordonnance ayant autorisé le constat dans les locaux de la société Ingénierie Performance,

- ordonné la restitution des documents recueillis par l'huissier.

Selon jugement du 5 octobre 2016, le conseil de prud'hommes de Paris a :

- débouté Mme [F] de sa demande de requalification de sa démission de ses fonctions au sein de la société Direct Interim en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de sa demande d'indemnités à ce titre,

- condamné la société Direct Interim à lui verser une somme de 30 000 euros au titre des heures supplémentaires impayées,

- condamné Mme [F] à verser à la société Direct Interim une somme de 10 000 euros en réparation de la violation de la clause de non concurrence prévue dans le contrat de travail.

Le désistement par Mme [F] de son appel à l'encontre de cette décision a été constaté par arrêt de la cour d'appel de Paris du 7 novembre 2018, après signature d'un protocole d'accord.

Le 22 octobre 2018, un protocole d'accord a été signé entre la société Direct Interim et la société Ingénierie Performance prévoyant une indemnisation de la première à hauteur de 250 000 euros, dans le litige pour concurrence déloyale pendant devant le tribunal de commerce, lequel a constaté leur désistement réciproque par jugement du 2 novembre 2018.

C'est dans ces circonstances que la société Direct Interim a, par actes du 16 octobre 2015, assigné devant le tribunal judiciaire de Paris, en responsabilité civile, M. [T] pour manquement à son obligation de diligence à l'occasion du dépôt des requêtes aux fins de constat ainsi que M. [R] et la Scp Benichou-Legrain-Berruer pour avoir omis de remettre les deux requêtes et les deux ordonnances du 20 octobre 2010 à la société Ingénierie Performance et à Mme [F].

Par jugement du 6 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :

- condamné M. [T] à verser à la société Direct Interim une somme de 12 531,50 euros,

- condamné M. [T] aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné M. [T] à verser à la société Direct Interim une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Direct Interim à verser à M. [R] et la Scp Benichou-Legrain-Berruer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 15 février 2021, la société Direct Interim a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 15 janvier 2024, la Sarl Direct Interim demande à la cour de :

- la juger recevable et bien fondée en son appel,

en conséquence,

- infirmer le jugement en ce que le tribunal n'a pas retenu la faute de M. [R],

- confirmer le jugement en ce que le tribunal a retenu le manquement de M. [T] à son obligation de diligence dans la rédaction des requêtes,

- dire et juger que M. [T] a manqué à son obligation d'assistance, de diligence, de conseil et de surveillance en ne s'assurant pas que M. [R] laisse une copie des requêtes et ordonnances sur requêtes à la société Ingénierie Performance et à Mme [F], en application de la jurisprudence en vigueur à l'époque s'agissant de l'article 495 alinéa 3 du code de procédure civile,

- dire et juger que si M. [T] n'avait pas failli à ses devoirs d'assistance, de diligence, de conseil et de surveillance lors de la défense de ses intérêts et si M. [R] n'avait pas failli dans sa mission et avait effectivement adressé les deux requêtes déposées le 20 octobre 2010 et les deux ordonnances du 20 octobre 2010 à la société Ingénierie Performance comme à Mme [F] :

elle n'aurait pas été contrainte d'accepter un protocole d'accord transactionnel avec la société Ingénierie Performance sur la base d'une indemnisation très partielle de son préjudice économique, à savoir une indemnisation à hauteur de la somme de 250 000 euros alors même que le préjudice économique effectivement subi s'élève à la somme de 752 450 euros,

le tribunal de commerce de Paris aurait d'une façon quasi-certaine condamné solidairement la société Ingénierie Performance et Mme [F] à lui payer des dommages et intérêts pour le préjudice par elle subi et fait droit à l'intégralité de ses autres demandes,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [T] à lui rembourser la somme de 12 531,50 euros au titre des honoraires de ce dernier, des honoraires de l'avocate l'ayant défendue à l'occasion des recours exercés contre l'ordonnance de requête concernant la société Ingénierie Performance et du coût de la consultation de l'avocat au conseil sur l'opportunité d'un pourvoi,

- infirmer le jugement en ce qu'il n'a pas condamné M. [T] à lui rembourser la totalité des frais et débours qu'elle a versés dans le cadre des procédures de contestation des requêtes,

en conséquence,

- condamner solidairement MM. [T] et [R], ce dernier solidairement avec la Scp Benichou-Legrain-Berruer, à lui payer :

la somme de 401 960 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de la perte de chance de 80% d'obtenir réparation de l'intégralité du préjudice économique subi [(752 450 euros - 250 000 euros) x 80%)],

la somme totale de 51 607,97 euros au titre des frais, honoraires et débours de procédure,

- débouter M. [R] de sa demande de condamnation à son encontre pour procédure abusive,

- dire et juger que les sommes allouées seront assorties des intérêts au taux légal à compter de l'assignation et porteront capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

- condamner solidairement MM. [T] et [R], ce dernier solidairement avec la Scp Benichou-Legrain-Berruer, à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement MM. [T] et [R], ce dernier solidairement avec la Scp Benichou-Legrain-Berruer, aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Jean-Baptiste Rozès.

Dans ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 19 décembre 2023, M. [B] [T] demande à la cour de :

- déclarer la société Direct Interim mal fondée en son appel,

- l'en débouter,

- le déclarer recevable et bien-fondé en son appel incident,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamné à payer à la société Direct Interim les sommes de 12 531,50 euros à titre de dommages et intérêts et de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- confirmer ce jugement pour le surplus,

- condamner la société Direct Interim à lui payer une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions, notifiées et déposées le 10 août 2021, M. [U] [R] et la Scp [U] [R] anciennement Scp Nelly Benichou, [Z] [P], [U] [R], huissiers de justice associés, demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a :

débouté la société Direct Interim de ses demandes formées à leur encontre,

condamné la société Direct Interim à leur verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [R] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

en conséquence, statuant à nouveau,

- condamner la société Direct Interim à payer une somme de 10 000 euros de dommages et intérêts au titre de procédure abusive au bénéfice de M. [R],

y ajoutant,

- condamner la société Direct Interim à leur payer une somme de 10 000 euros supplémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Direct Interim aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Kong Thong, en application de l'article 699 du code de procédure civile,

en toute hypothèse,

- prononcer la mise hors de cause de la Scp Henri Berruer.

La clôture de l'instruction a été prononcée le 16 janvier 2024.

SUR CE,

Sur la responsabilité de MM. [R] et [T]

- sur la faute de M. [R], huissier de justice devenu commissaire de justice

Le tribunal a considéré que M. [R] ne peut se voir reprocher de n'avoir laissé copie de la requête et de l'ordonnance qu'aux sociétés supportant l'exécution des deux décisions du 20 octobre 2010, alors que s'il existait des divergences d'interprétation de l'article 495 du code de procédure civile, il s'est conformé à la position retenue par la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 4 juin 2015, ayant jugé que cet article qui impose de laisser copie de la requête et de l'ordonnance à la personne à qui elle est opposée, ne s'applique qu'à la personne qui supporte l'exécution de la mesure, qu'elle soit ou non défendeur potentiel au procès envisagé, lequel arrêt n'est pas constitutif d'un revirement de jurisprudence et que dans ces conditions la garantie de la société Benichou-Legrain-[R] est sans objet.

La société Direct Interim soutient que M. [R] a commis une faute dans l'exercice de sa mission, aux motifs que :

- M. [R] a omis de remettre les deux requêtes et les deux ordonnances du 20 octobre 2010 à la société Ingénierie Performance et à Mme [F], ce qui a entraîné la rétraction définitive de l'ordonnance ayant autorisé le constat dans ses locaux, par deux ordonnances distinctes, dont elle n'a pas relevé appel sur avis motivé de Me Thomas Lyon-Caen, avocat aux Conseils,

- l'interprétation de l'article 495 alinéa 3 du code de procédure civile faisait l'objet d'un débat au moment de la réalisation des constats car il manquait de clarté et M. [R] ne peut évoquer 'l'application conforme de ce texte' en se référant aux arrêts de la Cour de cassation du 4 juin 2015 alors que la jurisprudence antérieure à ces arrêts retenait de manière constante que l'ordonnance devait être portée à la connaissance de la personne désignée dans cette dernière comme étant celle à l'encontre de laquelle un procès est susceptible d'être engagé, quand bien même la mesure ordonnée devait être exécutée chez un tiers ( Civ. 2e , 9 avril 2009, n°08-12.503- Civ. 2e , 10 janvier 2008, n°06-21.816 ; Civ. 2e 5 mai 2011, n°10-20.437),

-Me Lyon-Caen, avocat aux Conseils, dans son analyse du 14 janvier 2014 indique expressément que ni l'arrêt du 5 mai 2011 ni aucune autre décision judiciaire ne pouvait laisser penser à une remise en cause de cette solution jurisprudentielle constante,

- la Cour de cassation, le 4 juin 2015, a opéré indéniablement un revirement de jurisprudence,

- la responsabilité des professionnels du droit s'apprécie au regard du droit positif existant à l'époque des faits et le revirement opéré par les arrêts précités ne peut permettre à l'huissier de se décharger de sa faute commise antérieurement à ce revirement.

M. [R] et la Scp [R] sollicitent en premier lieu la mise hors de cause de la Scp [R] au motif que lors des opérations de constat, M. [R] exerçait à titre individuel et que la solidarité prévue à l'article 16 de la loi du 29 novembre 1966 ne peut donc pas jouer.

Ils ajoutent qu'aucune faute ne peut être reprochée à M. [R] en ce que :

- il a fait une application textuelle conforme de l'article 495 alinéa 3 du code de procédure civile en délivrant la copie de la requête et de l'ordonnance seulement à la personne subissant la mesure,

- la Cour de cassation, dans ses arrêts du 4 juin 2015, déjà précédés de la même analyse par la cour d'appel de Paris, a fait une application textuelle de l'article 495 alinéa 3 et mis fin à des jurisprudences discordantes sans qu'il s'agisse d'un revirement de jurisprudence puisqu'elle n'a fait que rappeler la solution conforme au texte et il ne peut lui être reproché d'avoir fait une telle application conforme,

- la société Direct Interim a délibérément accepté la rétraction des deux ordonnances au visa de l'article 495 alinéa 3, sans tenter de faire réformer les décisions de référé sur le point de savoir si les requêtes et ordonnances devaient être remises à toutes les personnes concernées par le contentieux et ce choix procédural est une erreur dont elle doit supporter les conséquences,

- peu importe que ces arrêts constituent ou pas un revirement de jurisprudence puisque le juge civil devant statuer selon la jurisprudence alors en vigueur, il aurait adopté le même raisonnement, les décisions rendues par la Cour de cassation le 4 juin 2015 étant d'application immédiate.

La responsabilité du professionnel du droit est une responsabilité de droit commun qui suppose la preuve d'une faute, d'un dommage et d'un lien de causalité entre l'une et l'autre.

Les éventuels manquements du professionnel du droit à ses obligations professionnelles s'apprécient au regard du droit positif existant à l'époque de son intervention.

Dans son rapport annuel 2016, la Cour de cassation a indiqué :

'Au cours des derniers mois, la Cour de cassation a fait évoluer sa jurisprudence relative aux ordonnances rendues sur requête sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile. Ces décisions font suite au revirement de jurisprudence opéré par deux arrêts du 4 juin 2015 (2e Civ., 4 juin 2015, pourvoi n° 14-14.233, Bull. 2015, II, no 145 ; 2e Civ., 4 juin 2015, pourvoi n° 14-16.647, Bull. 2015, II, no 145). Après avoir jugé que le défendeur potentiel au procès devait recevoir, préalablement à l'exécution de la mesure ordonnée, la copie de la requête et de l'ordonnance dans les conditions prévues par le troisième alinéa de l'article 495 du code de procédure civile (2e Civ., 10 janvier 2008, pourvoi no 06-21.816, Bull. 2008, II, no 6 ; 2e Civ., 9 avril 2009, pourvoi no 08-12.503), la Cour de cassation retient désormais que cette obligation de remise préalable de la copie ne s'impose qu'à la personne qui supporte l'exécution de la mesure, que celle-ci soit ou non défendeur potentiel au procès envisagé, c'est-à-dire, concrètement, la personne chez laquelle les opérations ordonnées se déroulent.'

Avant le revirement de jurisprudence ainsi opéré par deux arrêts publiés du 4 juin 2015 et au moment où l'huissier de justice devenu commissaire de justice a réalisé en octobre 2010 les deux constats autorisés par ordonnances sur requêtes, l'article 495, alinéa 3, du code de procédure civile, qui impose de laisser copie de la requête et de l'ordonnance 'à la personne à qui elle est opposée' était interprété dans le sens que cette copie devait être adressée au défendeur potentiel au procès envisagé ainsi qu'il ressort des arrêts de 2008 et 2009 mentionnés dans le rapport annuel de la Cour de cassation précité.

Dès lors, M. [R] a manqué à son obligation de diligence en ne procédant pas de la sorte vis à vis de la société Ingénierie Performance et de Mme [F] comme l'imposait la jurisprudence en vigueur, ce qui a entraîné la rétractation des deux ordonnances du 20 octobre 2010 ayant autorisé le constat dans les locaux de l'agence de la société Direct Interim à l'égard de la société Ingénierie Performance et le constat dans les locaux de cette dernière à l'égard de Mme [F] et il ne peut s'exonérer de sa faute en invoquant un revirement jurisprudentiel intervenu plus de quatre ans après la réalisation des constats rendus inefficaces en raison du manquement retenu à son encontre.

Le commissaire de justice reproche vainement à la société Direct Interim de ne pas avoir fait appel des ordonnances de rétractation rendues en décembre 2013 alors qu'elle a pris le soin d'interroger Me Thomas Lyon-Caen, avocat aux Conseils, lequel lui a répondu le 14 janvier 2014 que l'arrêt de la Cour de cassation du 5 mai 2011 sur lequel elle l'interrogeait n'était pas de nature à remettre en cause la position prise par la Cour de cassation dans son arrêt du 9 avril 2019.

En conséquence, la cour retient la faute de M. [R], en infirmation du jugement.

En revanche, il ressort des procès verbaux de constat que M. [R] exerçait à titre individuel à la date où il les a réalisés et la solidarité prévue à l'article 16 de la loi du 29 novembre 1966 ne peut donc pas jouer entre lui et la Scp [U] [R] de sorte que la société Direct Interim doit être déboutée de toute demande à l'encontre de la Scp Berruer.

- sur la faute de M. [T], avocat

Le tribunal a jugé que M. [T] a manqué à son obligation de diligence en ce que :

- ayant saisi le président du tribunal de grande instance de Paris de deux requêtes aux fins de constat, il lui appartenait de présenter à l'appui des pièces et des moyens justifiant qu'il soit procédé par la voie non contradictoire, ou, s'il lui semblait que les éléments dont il pouvait disposer étaient insuffisants à apporter cette preuve, de conseiller à sa cliente la voie du référé,

- la cour d'appel de Paris, saisie d'un appel contre l'ordonnance de rétractation de l'ordonnance sur requête autorisant des investigations au sein de la société Ingénierie Performance, a justement relevé dans son arrêt du 3 septembre 2015 le défaut de caractérisation, notamment dans la requête, des circonstances autorisant une dérogation au principe de la contradiction pour rétracter les dispositions de l'ordonnance qui n'avaient pas été déjà rétractées.

La société Direct Interim soutient que M. [T] a manqué à ses obligations d'information, de conseil, de diligence et de surveillance du commissaire de justice et engagé aussi sa responsabilité du fait de sa qualité de mandant au titre des fautes commises par son mandataire, en ce que :

- M. [T] n'a pas énoncé expressément dans sa requête les circonstances susceptibles d'autoriser une dérogation au principe de la contradiction, conduisant la cour d'appel à rétracter l'ordonnance rendue,

- il ne peut se décharger de sa responsabilité en soutenant que sa cliente ne lui avait pas transmis suffisamment d'éléments pour qu'il puisse motiver sa requête car il lui appartenait de solliciter toutes informations et pièces nécessaires à la défense de ses intérêts et, le cas échéant, de lui déconseiller l'emprunt d'une voie de droit vouée à l'échec au profit de la voie du référé,

- il n'a pas veillé à ce que M. [R] laisse copie de la requête et de l'ordonnance aux personnes auxquelles elles étaient opposées à savoir la société Ingénierie Performance et Mme [F], alors qu'ayant mandaté un commissaire de justice dans le cadre d'une procédure pour le compte de son client, il était tenu de surveiller son mandataire et qu'il est désormais responsable contractuellement envers son client, tiers au contrat de mandat, des fautes commises par M. [R] qu'il avait missionné.

M. [T] réplique qu'il n'a commis aucune faute en ce que :

- la société Direct Interim ne précise pas les motifs qu'il aurait pu utilement développer à l'appui de la requête pour justifier du caractère non contradictoire de la désignation d'un commissaire de justice aux fins de constat qu'elle réclamait,

- dès lors que la société Direct Interim ne disposait pas d'éléments permettant de justifier un recours à la procédure non contradictoire de l'ordonnance sur requête, il ne peut être tenu pour responsable des irrégularités relevées à l'occasion des recours,

- les deux requêtes qu'il a présentées ont été validées par le président du tribunal de grande instance de Paris le 20 octobre 2010 et il n'est pas responsable de l'argumentation qui a été développée devant la cour et a conduit à la rétractation des ordonnances ni des aléas judiciaires qui conduisent certaines juridictions à statuer en sens contraire les unes des autres,

- il a, en réalité, exposé dans sa requête les motifs pour lesquels la mesure était demandée non contradictoirement, la cour d'appel ayant infirmé l'ordonnance non pas en l'absence de motivation mais en l'absence de pièces justifiant le recours à une procédure non contradictoire,

- il n'était pas tenu d'assurer un contrôle du travail du commissaire de justice qui est seul responsable de ses actes et qui n'a, au demeurant, commis aucune erreur puisque la personne qui doit recevoir copie de l'ordonnance est celle qui supporte l'exécution de la mesure soit la personne chez laquelle le constat est effectué et non le défendeur potentiel au procès envisagé,

- la société Direct Interim a fait le choix de ne pas faire appel de l'ordonnance du 4 décembre 2013 ayant rétracté l'ordonnance autorisant le constat du 25 octobre 2021 dans ses locaux alors que celle-ci aurait été infirmée en appel et si elle ne l'avait pas été, l'arrêt rendu aurait été cassé par la Cour de cassation au vu de sa jurisprudence issue des arrêts du 4 juin 2015.

La demande d'autorisation de procéder à un constat sur requête implique une motivation sur la nécessité de recourir à une procédure non contradictoire. La Cour de cassation est exigeante sur ce point : cette motivation, qui ne peut être de pure forme ou résulter d'une clause de style, doit résulter soit de la requête à condition que l'ordonnance y renvoie, soit de l'ordonnance, puisque le juge des requêtes doit effectuer cette recherche au besoin d'office.

La cour d'appel de Paris, dans son arrêt du 3 septembre 2015, rappelant que cette vérification qui lui incombait devait être effectuée en se fondant sur les seuls motifs de la requête et de l'ordonnance et sur les pièces produites au soutien de la requête, a relevé que la société Direct Intérim s'était 'bornée à exposer que les faits relatés caractérisent' à l'évidence la commission depuis plusieurs mois d'actes de concurrence tant interdite que déloyale commis à la fois par Mme [G] [F] et par la société Ingénierie Performance et qui causent à la requérante les plus graves préjudices, la société Direct Intérim a le plus grand intérêt à faire effectuer toutes constatations utiles à ce sujet, en vue des procédures à intervenir(') et que pour être efficace et éviter la dissimulation sinon la disparition des pièces probantes, la mesure en cause est d'abord légitime puisqu'elle a pour objet d'établir les infractions aux règles de la concurrence commises au détriment de la requérante et ensuite qu'elle ne peut être sollicitée contradictoirement'.

Elle a considéré que 'cet exposé, censé justifier une dérogation au principe du contradictoire, ne constituait en réalité qu'une paraphrase des articles 145 et 493 du code de procédure civile, alors qu'il incombait à la société Direct Intérim de caractériser, à partir d'une articulation de faits précis appuyés sur des pièces annexées à la requête, quelles étaient les raisons concrètes qui rendaient nécessaire une dérogation à ce principe du contradictoire' et que 'pour sa part le juge signataire de l'ordonnance du 20 octobre 2010 s'est contenté de viser les articles 145 et 493 du code de procédure civile, la requête et les pièces qui y étaient annexées, adoptant ainsi les motifs pourtant insuffisants de cette requête'.

Elle a enfin jugé que 'les éléments produits devant elle n'ont pas été exposés au juge le 20 octobre 2010 ou n'étaient pas encore survenus à cette date, de sorte que les explications nouvellement présentées au cours de l'instance en référé-rétractation, ne peuvent remédier à l'absence de caractérisation, dans la requête et l'ordonnance, des circonstances autorisant une dérogation au principe de la contradiction'.'

Il s'en déduit que l'avocat a manqué à son obligation de diligence quant à la motivation des circonstances rendant nécessaires d'autoriser les mesures de constat sollicitées de manière non contradictoire et à la production de pièces au soutien de cette motivation et ce, dès le stade des requêtes qu'il avait reçu mandat d'effectuer alors que l'obtention d'une dérogation au principe de la contradiction est la condition nécessaire au succès des constats envisagés, afin de créer un effet de surprise et d'éviter un risque de dépérissement, de disparition, de destruction ou de falsification des pièces visées dans les requêtes du 20 octobre 2010.

M. [T] ne peut s'exonérer de la responsabilité qui lui incombe seul à ce titre en sa qualité de professionnel du droit en reprochant à sa cliente de ne pas lui avoir fourni les informations et pièces nécessaires qu'il lui revenait de solliciter et ce, alors que le reproche fait par la cour d'appel pour rétracter les dispositions non déjà rétractées de l'ordonnance ayant autorisé un constat au siège de la société Ingénierie Performance était celui d'une absence d'articulation de faits précis appuyés sur des pièces annexées à la requête, diligence qui ne relevait que de l'avocat.

En revanche, il ne peut être reproché à l'avocat de ne pas avoir exercé une surveillance sur l'accomplissement par le commissaire de justice, autre professionnel du droit, des formalités nécessaires à l'efficacité des constats dont il a le monopole de l'exercice.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a retenu un manquement par M. [T] à son obligation de diligence dans la rédaction des requêtes du 20 octobre 2010.

- sur le lien de causalité et les préjudices

- sur le préjudice économique constitutif d'une perte de chance

Le tribunal a jugé que le manquement de l'avocat a empêché la société Direct Interim de se prévaloir des éléments recueillis par le commissaire de justice le 29 octobre 2010 mais que les pièces produites ne permettaient pas de justifier que le préjudice subi par la société Direct Interim à savoir la perte de chance d'obtenir une indemnisation complémentaire de la part de la société Ingénierie Performance puisse être évalué à une somme supérieure à celle de 250 000 euros obtenue à l'occasion de la transaction signée par les deux sociétés.

La société Direct Interim soutient que :

- les éléments recueillis par M. [R] dans ses procès-verbaux des 25 et 29 octobre 2010 étaient de nature à démontrer les actes de concurrence déloyale commis par la société Ingénierie Performance et par Mme [F] et la violation par cette dernière de la clause de non-concurrence insérée dans son contrat de travail,

- elle n'a nullement renoncé à son action contre M. [R] et M. [T] puisqu'au contraire il est prévu dans le protocole signé le maintien de cette action avec l'agrément des parties signataires du protocole et elle est donc recevable en son action, MM [R] et [T] ne pouvant lui opposer la renonciation à ses droits faite à l'égard de la société Ingénierie Performance dans ledit protocole,

- sa chance de gagner le procès intenté contre la société Ingénierie Performance devant le tribunal de commerce de Paris doit être estimée à 80% puisque si MM. [R] et [T] n'avaient pas failli à leurs missions, le tribunal de commerce aurait d'une façon quasi-certaine condamné la société Ingénierie Performance à lui payer les dommages et intérêts sollicités en réparation du préjudice subi et elle n'aurait pas été contrainte d'accepter un protocole d'accord transactionnel avec cette société sur la base d'une indemnisation très partielle de son préjudice économique, à hauteur de la somme de 250 000 euros, alors que le préjudice économique effectivement subi correspond à l'intégralité des sommes demandées devant le tribunal de commerce de Paris soit la somme de 752 450 euros,

- l'assiette de son préjudice est constituée de la perte de la marge brute calculée sur la seule base de l'activité de Mme [F] et sur deux années estimée à 289 000 euros et de la perte du fonds de commerce exploité [Adresse 5] estimé à 463 450 euros, dont est retranchée la somme perçue au titre du protocole d'accord,

- son préjudice s'élève à 401 960 euros [(752 450 - 250 000) x 80 %],

- MM. [T] et [R] doivent être condamnés solidairement à la garantir et à la relever indemne de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre à la suite de la saisine du conseil des prud'hommes de Paris par Mme [F].

M. [R] réplique que le préjudice de la société Direct Interim n'est pas certain, né et actuel, en ce que :

- le montant réel du préjudice qui aurait été alloué par le tribunal de commerce ne peut être déterminé puisque l'appelante ne communique pas la procédure et les pièces produites devant ce tribunal permettant d'apprécier les faits et donc la perte de chance,

- la société Direct Interim a été indemnisée du préjudice subi par le protocole d'accord signé avec la société Ingénierie Performance et rien ne démontre que l'indemnité qu'aurait octroyée le tribunal de commerce aurait été supérieure à 250 000 euros si les constats avaient été communiqués,

- la société Direct Interim invoque un préjudice hypothétique, celle-ci s'étant désistée de son instance et de son action devant le tribunal de commerce après avoir été indemnisée à hauteur de 250 000 euros par la société Ingénierie Performance et ayant gagné son procès contre Mme [F],

- il n'existe en toute hypothèse aucun lien de causalité entre sa prétendue faute et le prétendu préjudice allégué puisque la société Direct Intérim, n'ayant pas fait appel principal ou incident des décisions de rétractation, est à l'origine de son propre dommage,

- subsidiairement, il ne saurait être condamné à indemniser la société Direct Interim de son entier préjudice alors que l'annulation des procès-verbaux de constat procède de deux causes, dont l'une lui est totalement étrangère, sa responsabilité devant être partagée avec M. [T] et sa part de responsabilité fixée à 25% du dommage.

M. [T] réplique que :

- la société Direct Interim a obtenu devant le conseil des prud'hommes le débouté de sa salariée au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et sa condamnation à des dommages et intérêts pour non respect de sa clause de non-concurrence,

- il est fondé à invoquer la renonciation à un droit que renferme la transaction conclue avec la société Ingénierie Performance de sorte que la demande de la société Direct Interim est irrecevable,

- la société Direct Interim ne justifie pas que la rétractation des ordonnances a compromis ses chances de succès devant le tribunal de commerce puisqu'elle ne démontre pas que la production des constats lui aurait procuré une indemnisation supérieure à celle obtenue par transaction, sachant qu'à partir du moment où la concurrence déloyale était retenue au vu des éléments de preuve en sa possession, le montant de l'indemnisation ne dépendait plus que du préjudice dont il était justifié,

- elle a choisi de ne pas poursuivre la procédure devant le tribunal de commerce et ne peut soutenir qu'elle a perdu une chance d'obtenir une décision plus favorable,

- l'indemnisation d'une perte de chance ne peut être égale qu'à une partie de la somme prétendument perdue,

- la société Direct Interim procède par affirmations puisque les chiffres qu'elle invoque pour calculer son préjudice économique ne sont pas justifiés par des éléments comptables certifiés et que l'ensemble de son chiffre d'affaires aurait dû être pris en compte et non seulement celui de l'antenne de la rue Clapeyron,

- il n'existe aucune raison d'évaluer le fonds de commerce à cinq ans d'activité et surtout, l'activité qui était traitée par l'agence de la rue Clapeyron a été transférée au siège social à la suite de la cession de son droit au bail commercial sans perte de chiffre d'affaires.

A titre liminaire, il est relevé que la demande de la société Direct Interim de garantie solidaire de MM. [T] et [R] de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre à la suite de la saisine du conseil de prud'hommes de Paris par Mme [F] n'est pas mentionnée dans le dispositif de ses dernières conclusions qui seul saisit la cour.

La société Direct Intérim est recevable à agir contre l'avocat et le commissaire de justice en indemnisation d'une perte de chance de percevoir une indemnisation plus favorable de son préjudice consécutif à la concurrence déloyale dont elle s'estime victime puisqu'elle a expressément mentionné dans le protocole signé qu'elle acceptait de faire des concessions en raison de la diminution de sa chance de succès devant le tribunal de commerce du fait de son impossibilité de produire les constats d'huissier mais qu'elle maintenait son action en responsabilité à l'encontre de l'avocat et de l'huissier en leur réclamant l'intégralité de son préjudice de sorte qu'elle n'a aucunement renoncé à son droit agir à leur encontre et que MM. [T] et [R] ne peuvent se prévaloir de la renonciation à un droit que renferme la transaction conclue avec la société Ingénierie Performance.

Il a déjà été jugé supra qu'aucune faute ne pouvait être reprochée à la société Direct Interim pour ne pas avoir fait appel principal ou incident des ordonnances de rétractation.

Le préjudice relevant de la perte de la possibilité de produire au soutien d'une action en concurrence déloyale les constats établis de manière non contradictoire constitue nécessairement une perte de chance, comme le reconnaît la société Direct Performance, liée à la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable, celle d'obtenir la reconnaissance de la concurrence déloyale réclamée et l'indemnisation réclamée à ce titre. Il convient d'évaluer cette perte de chance au regard des éléments de preuves résultant des constats établis et des documents collectés en exécution desdits constats.

Le 1er mars 2007, la société Direct Intérim, entreprise de travail temporaire, avait engagé Mme [G] [F] en qualité de cadre responsable d'agence, selon un contrat qui prévoyait notamment qu'en cas de départ de la salariée, elle 'devra restituer tous les documents, dossiers, fichiers, fournis par l'entreprise ainsi que tous les documents qu'elle aura pu constituer dans le cadre de son activité durant le temps passé au service de la société et s'en interdire la divulgation à qui que ce soit' et que Mme [F] 's'interdisait, en cas de rupture du contrat de travail, d'exercer dans les départements de [Localité 9] et de la région parisienne et 'pendant une durée de deux années à compter de la cessation des relations de travail, toute activité directement ou indirectement pour son compte ou celui d'un tiers à quelque titre que ce soit, salarié ou non salarié, de s'intéresser à une entreprise de travail temporaire ou similaire et plus généralement à toute société susceptible de faire concurrence à notre société'.

Le 21 juin 2010, Mme [F] a présenté sa démission à la société Direct Intérim et elle a cessé définitivement ses fonctions à l'issue de son délai de préavis, le 22 septembre 2010.

Aux termes de son assignation en justice, la société Direct Interim qui avait laissé Mme [F] seule dans l'agence à compter de septembre 2009 en raison d'une mésentente grave avec les deux autres salariées ayant conduit à leur transfert au siège de la société et réintégré les deux salariées dans l'agence le lundi suivant le départ de cette dernière, faisait valoir que :

- les deux salariées avaient immédiatement constaté la disparition des dossiers clients au nombre d'une vingtaine et du contrat-cadre conclu en 2008 par la société Direct Interim avec son principal client le groupe Spie Batignoles ainsi que ses annexes, une absence totale de demandes de détachement de salariés de la part d'entreprises utilisatrices et de demandes de missions ou de contacts par les intérimaires et une chute brutale du nombre d'intérimaires en mission à compter du début du mois de septembre,

- elles attestaient avoir appris par téléphone de plusieurs entreprises utilisatrices et de certains intérimaires que Mme [F] les avait informés depuis plusieurs semaines de prétendues très graves difficultés financières de la société Direct Interim et de son état de cessation des paiements, qu'elle continuait de prospecter les entreprises utilisatrices et détacherait des intérimaires auprès de ces entreprise pour le compte d'une autre société de travail temporaire dénommée Ingénierie Performance,

- elles avaient reçu 4 intérimaires venus à l'agence se plaindre de faits démontrant un détournement des contrats de mission de salariés en cours de détachement,

- le gérant avait découvert sur la messagerie de Mme [F] un courriel adressé aux 28 responsables commerciaux et chefs de chantiers des entreprises utilisatrices clientes le jour même de son départ dans lequel elle les invitait à 'découvrir sa nouvelle aventure' en l'appelant sur le téléphone portable professionnel de la société qu'elle quittait en attendant la communication de ses nouvelles coordonnées.

Forte de la découverte de ces éléments démontrant des actes systématiques de détournement de sa clientèle et de débauchage des intérimaires avec lesquels elle travaillait régulièrement, la société Direct Interim a sollicité et obtenu la désignation de M. [R] dont les constats avaient permis d'établir que :

- la tentative de dissimulation par la société Ingénierie Performance de la présence de Mme [F] dans ses locaux au jour du constat,

- l'existence de deux projets de convention soit un contrat d'apporteur d'affaires entre elle et Mme [F] fixant les conditions sa rémunération en contrepartie de l'apport de clientèle durant la période précédent son embauche et un contrat d'embauche,

- le débauchage massif de 66 intérimaires portés sur le répertoire des salariés à son service par la société Ingénierie Performance à la date du 20 octobre 2010, dont 58 apparaissant détachés depuis une date antérieure au départ de sa salariée le 22 septembre 2020 et parmi lesquels 45 étaient encore en mission de détachement pour le compte de la société Direct Interim pendant la première quinzaine de septembre 2010,

- le fait que 10 entreprises utilisatrices parmi les plus importantes des 21 entreprises figurant sur son listing étaient dorénavant clientes de la société Ingénierie Performance.

Ainsi, les fautes commises par l'avocat et le commissaire de justice ayant conduit à la rétractation des deux ordonnances du 20 octobre 2020 ont fait perdre à la société Direct Interim la possibilité de se prévaloir des constats réalisés et des pièces collectées démontrant le débauchage de l'unique salariée de son agence de la [Adresse 10] malgré une obligation de non-concurrence de cette dernière pendant deux ans sur les arrondissements de [Localité 9] et les départements périphériques, le démarchage systématique des entreprises utilisatrices, le caractère massif du débauchage des intérimaires qui travaillaient pour elle et l'interruption de leurs contrats de détachement en cours au profit de la société Ingénierie Performance.

Dès lors, les manquements de MM. [T] et [R] qui ont privé la société Direct Interim du contenu de ces constats qui lui auraient permis, en sus des éléments de preuve qu'elle avait pu recueillir, s'agissant notamment de la disparition de ses fichiers et dossiers ayant désorganisé l'agence, d'établir de manière incontestable l'ampleur de la concurrence déloyale dont elle a fait l'objet, sont en lien de causalité avec la perte de chance subie par la société Direct Interim d'obtenir du tribunal de commerce de Paris la reconnaissance d'actes de concurrence déloyale de la société Ingénierie Performance par la juridiction qu'elle avait saisie.

Au vu des éléments supplémentaires qu'elle avait obtenus grace aux constats et de la contradiction qui y aurait été apportée par les parties défenderesses, cette perte de chance doit être fixée à 80 %, comme le demande la société Direct Interim.

La cour a demandé, par message du 24 avril 2025 adressé par le biais du réseau privé virtuel des avocats à l'avocat de la socité Direct Interim de communiquer aux débats par le biais du même réseau, au plus tôt compte tenu de la date de délibéré, les pièces 31 à 35 et 38 dont cette société fait état dans ses conclusions et qui ne correspondent pas à celles portant ces numéros dans son bordereau de communication, ces numéros correspondant en réalité aux pièces annexées à son assignation devant le tribunal de commerce de Paris du 26 décembre 2011 soit les états de marges mensuelles de Mme [F] de 2008 à 2010, le tableau récapitulatif de cette marge et l'acte de cession du droit au bail du 29 septembre 2011.

Les avocats des intimés ont été invités à présenter des observations au plus tard une semaine après l'envoi desdites pièces.

La société Direct Interim a communiqué les pièces réclamées le 30 avril 2024.

M. [T] a adressé des observations le 7 mai suivant aux termes desquelles il fait valoir que:

- la cour ne peut prendre en compte des pièces produites postérieurement à l'audience de plaidoirie et qui n'ont pas été soumises à un débat contradictoire en son temps,

- ces pièces concernent exclusivement la marge brute réalisée par Mme [F] à l'époque où elle était salariée de la société Direct Interim et la cession à titre gratuit du droit au bail que cette société détenait pour le local situé [Adresse 3] et sont insuffisantes à établir son préjudice,

- la marge brute d'une entreprise n'est pas attachée à une seule salariée et le chiffre d'affaires qu'elle générait ne disparaît pas à son départ et pouvait être réalisé par ses remplaçants,

- la société Direct Interim n'a jamais produit ses bilans, ses chiffres d'affaires et ses marges brutes ce qui rend impossible toute comparaison avec la période précédent le départ de sa salairée et tout chiffrage voire la preuve d'un éventuel préjudice,

- elle se garde bien de produire des éléments comptables certifiés,

- la valeur du fonds de commerce est calculée sur la base d'un chiffre d'affaires annuel moyen qui n'est justifié par aucune pièce comptable et surtout, il n'a jamais existé de fonds de commerce rue Clapeyron, s'agissant d'une simple agence dont le chiffre d'affaires était intégré à celui de la société Direct Interim et fermer cette agence afin de regrouper tous les salariés au siège ne fait aucunement disparaître le fonds de commerce.

La société Direct Interim faisant état dans ses conclusions de pièces numérotées dont le contenu ne correspondait pas aux pièces numérotées mentionnées dans son bordereau de communication, la cour se devait de lui réclamer les pièces fondant ses prétentions indemnitaires et il ne peut lui être reproché de l'avoir fait en cours de délibéré alors qu'elle a respecté le principe de la contradiction en invitant les parties à présenter leurs observations sur ces pièces, ce que M. [T] a pu faire.

La société Direct Interim qui était propriétaire de deux agences d'interim, la première au lieu de son siège social et la seconde [Adresse 3] où travaillait seule Mme [F], a dû fermer cette agence le 30 juin 2011 car sa rentabilité était devenue médiocre en raison de la disparition justifiée de la quasi-totalité des contrats de mission qu'elle signait auparavant et rapatrier ses deux commerciales au siège, son droit au bail des locaux de l'agence fermée ayant été cédé pour un euro symbolique.

Elle fixe l'assiette de sa perte de chance, d'une part, sur la marge brute générée par sa salariée unique Mme [F] selon la formule de calcul prévue dans le contrat de travail de cette dernière afin d'évaluer les commissions auxquelles elle avait droit soit : marge brute = chiffre d'affaires net - prix de revient intérimaire et, d'autre part, sur la valeur du fonds de commerce qu'elle soutient avoir perdu.

Il ne peut être soutenu que la société Direct Interim a déjà été indemnisée de ce préjudice par le conseil des prud'hommes alors que cette dernière a été déboutée de sa demande d'indemnisation au titre de la concurrence déloyale en l'absence de preuve suffisante du préjudice allégué et qu'elle n'a obtenu qu'une indemnité de 10 000 euros au titre du non-respect par son ancienne salariée de la clause de non-concurence insérée dans son contrat de travail.

Toutefois, les états de marge brute mensuelle de Mme [F] de mars 2007 à septembre 2010 produits ne sont pas des documents comptables établis par un expert-comptable mais des documents établis par l'appelante qui ne sont pas probants et qui ne reflètent pas le résultat net annuel de la société dans son ensemble.

A défaut même de justifier des marges brutes ou du résultat net obtenus sur la période de deux ans correspondant à la période d'interdiction de concurrence conformément à la clause inserée dans le contrat de travail de son ancienne salariée sur laquelle elle calcule sa perte de chance, la société Direct Interim ne rapporte pas la preuve que l'indemnisation à laquelle elle pouvait prétendre aurait dépassé le montant de 250 000 euros obtenu aux termes de la transaction conclue avec la société Ingénérie Performance.

De même, la société Direct Interim évalue la perte du fonds de commerce à la somme de 463 450 euros de la manière suivante : chiffre d'affaires annuel moyen HT des années 2007 à 2010 soit 2 317 249 euros x 20 % .

Toutefois, elle ne justifie aucunement ni de la perte effective du fonds de commerce, le local étant simplement constitué de bureaux où Mme [F] travaillait seule et l'activité ayant été transférée au siège social ni en toute hypothèse du chiffre d'affaires HT sur lequel elle fonde sa demande indemnitaire puisqu'elle ne verse aucun bilan comptable établi par son expert-comptable, en sorte qu'elle n'établit pas davantage que le tribunal de commerce lui aurait alloué de ce chef un montant supérieur à celui de 250 000 euros obtenu à titre transactionnel.

Dès lors, elle ne justifie d'aucun préjudice de perte de chance d'obtenir devant le tribunal de commerce un montant supérieur à celui perçu au titre de la transaction en réparation des actes de concurrence déloyale subis.

En conséquence, le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté la société Direct Interim de sa demande d'indemnisation au titre d'une perte de chance.

- sur les honoraires et frais de procédure

Le tribunal a condamné M. [T] à rembourser à la société Direct Interim :

- la somme de 5 531, 50 euros, soit la moitié du coût des honoraires perçus par l'avocat pour les deux requêtes, retenant que le coût du dépôt des requêtes devant le président du tribunal de grande instance a été exposé en pure perte s'agissant de celle ayant donné lieu à des investigations dans les locaux de la société Ingénierie Performance,

- les honoraires de l'avocate l'ayant défendue à l'occasion des recours exercés contre l'ordonnance sur requête concernant la société Ingénierie Performance, ramenés à 4 000 euros, compte tenu du fait qu'une partie de ceux-ci concernait l'autre ordonnance,

- le coût de la consultation de l'avocat aux Conseils sur l'opportunité d'un pourvoi, représentant 3 000 euros.

En revanche, le tribunal a laissé à la charge de la société Direct Interim les coûts des procédures devant le conseil de prud'hommes et le tribunal de commerce qui n'ont pas été exposés en pure perte.

La société Direct Interim soutient que MM. [T] et [R] doivent être condamnés in solidum à lui payer la somme de 51 607,97 euros au titre des frais, honoraires et débours.

M. [R] réplique que la société Direct Interim est à l'origine de son propre dommage puisqu'elle n'a pas fait appel des décisions de référé-rétractation, que la somme demandée par la société Direct Interim a été portée à 15 000 euros de plus que dans l'assignation, sans justification et qu'en tout état de cause sa responsabilité doit être limitée aux actes le concernant et à 25% du dommage, à l'exclusion des factures relatives à la procédure commerciale, à la procédure prud'homale et à la consultation de l'avocat à la Cour de cassation, qui ne traite pas exclusivement de l'article 495 alinéa 3 du code de procédure civile.

M. [T] rétorque que :

- la société Direct Interim s'est désistée de toutes les instances qui lui auraient permis d' obtenir le remboursement de ses frais de procédure sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et l'avocat ne peut être tenu responsable de l'abandon de ces demandes, d'autant plus que ces procédures se sont révélées favorables à la société tant qu'il la représentait,

- ses écritures ont permis à la société Direct Interim d'avoir gain de cause dans la procédure prud'homale et ses honoraires n'ont pas été payés vainement puisque c'est lui qui a initié la procédure devant le tribunal de commerce,

- les honoraires payés l'ont été toutes taxes comprises, en sorte que ces sommes ne correspondent pas à la véritable dépense de la société Direct Interim puisque cette dernière a récupéré 20% de TVA sur l'ensemble des sommes mentionnées,

- l'ordonnance et le constat effectué dans les locaux de la société Direct Interim n'ont pas été remis en cause par Mme [F] et ont pu servir les intérêts de la société Direct Interim,

- la somme de 5 531,50 euros ne correspond pas à la moitié du coût des honoraires qu'il a perçu par les deux requêtes, celle-ci s'élevant à 1 782,50 euros,

- le fait que la société Direct Interim ait été remplie de tous ses droits, comme elle le reconnaît dans son protocole d'accord, implique qu'elle a également été remplie de ses droits à remboursement de ses frais de justice.

Les premiers juges ont considéré à bon droit que la réclamation du montant des honoraires versés en pure perte en raison des fautes commises peut constituer une demande d'indemnisation recevable.

Les fautes commises tant par le commissaire de justice qui ont conduit à la rétractation des ordonnances autorisant les constats dans les locaux de la société Direct Interim et la société Ingénierie Performance que par l'avocat qui a conduit à la rétractation des dispositions non déjà rétractées de l'ordonnance sur requête ayant autorisé la saisie par un huissier de justice de pièces et documents dans les locaux de la société Ingénierie Performance ont toutes deux conduit à la destruction des documents recueillis par le commissaire de justice et rendu ses opérations non avenues et le constat établi dans les locaux de la société Direct Interim a été expressément écarté des débats par le conseil de prud'hommes.

Dès lors, MM. [T] et [R] sont responsables in solidum en raison de leur fautes du préjudice subi du fait des frais et honoraires que la société Direct Interim a déboursés à ce titre en pure perte, TVA comprise qu'elle n'a pu récupérer contrairement à ce que prétend M. [T], soit les frais de constat de M. [R] pour un montant de 4 698,68 euros (3 231,39 +1 467,29), les honoraires de M. [T] pour un montant de 9 250 euros, les honoraires de Me [X] mandatée pour les procédures de référé-rétractation et l'appel d'une des ordonnances de rétractation pour un montant de 5 210 euros (2 990 + 2 220) et les honoraires de consultation de Me Lyon-Caen avocat aux Conseils pour un montant de 4 794 euros (1 794 + 3 000) correspondant à l'opportunité de faire appel des ordonnances du 4 décembre 2013 et à celle d'exercer un pourvoi à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 3 septembre 2015 soit la somme totale de 23 952,68 euros.

Les autres frais d'avocats dont le remboursement est réclamé à titre de dommages et intérêts soit ne sont pas explicités dans les factures soit correspondent aux frais relatifs à la procédure prud'homale ou à la procédure commerciale qui n'ont pas été engagés en pure perte puisque ces procédures se sont terminées par des transactions.

MM. [T] et [R] ayant tous deux commis une faute ayant concourru au préjudice de la société Direct Interim doivent être condamnés in solidumà payer à la société Direct Interim une somme de 23 952,68 euros à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et capitalisation des intérêts dus pour une année entière à compter de cette date, en infirmation du jugement, sans qu'il y ait lieu à un partage de responsabilité entre MM. [T] et [R] à raison de 25% pour ce dernier ainsi qu'il le prétend.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par M. [R]

M. [R] succombant, sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive est infondée et doit être rejetée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dispositions relatives aux dépens et aux frais de procédure de première instance sont confirmées, dans la limite de l'appel de la société Direct Interim qui ne porte pas sur sa condamnation à verser à M. [R] et la Scp Benichou-Legrain-Berruer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens d'appel doivent incomber in solidum à MM. [T] et [R], parties perdantes, lesquels sont également condamnés in solidum à payer à la société Direct Interim une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a :

- débouté la Sarl Direct Interim de sa demande d'indemnisation en réparation de la perte de chance d'obtenir réparation de l'intégralité du préjudice économique subi,

- condamné M. [T] aux dépens,

- condamné M. [T] à verser à la Selarl Direct Interim la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau, dans cette limite,

Déboute la Sarl Direct Interim de toute demande à l'encontre de la Scp Henri Berruer,

Dit que M. [B] [T] et M. [U] [R] ont commis une faute professionnelle,

Déclare recevable la demande de la Sarl Direct Interim d'indemnisation de son préjudice économique,

Condamne in solidum M. [B] [T] et M. [U] [R] à payer à la Sarl Direct Interim en réparation de son préjudice lié aux honoraires et frais exposés en pure perte une somme de 23 952,68 euros à titre de dommages et intérêts, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour et capitalisation pour les intérêts dus pour une année entière,

Condamne in solidum M. [B] [T] et M. [U] [R] aux dépens, dont distraction au profit de Maître Jean-Baptiste Rozès,

Condamne in solidum M. [B] [T] et M. [U] [R] à payer à la Sarl Direct Interim une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 21/03079
Date de la décision : 21/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-21;21.03079 ?
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