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16/05/2024 | FRANCE | N°21/20342

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 16 mai 2024, 21/20342


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 16 MAI 2024



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/20342 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEWTM



Décision déférée à la Cour : jugement du 28 septembre 2021 - tribunal judiciaire de BOBIGNY - RG n° 16/11982



APPELANTS



Monsieur [W] [N]

[Adresse 3]

[Localité 18]

Né le [

Date naissance 10] 1987 à [Localité 35]

Représenté par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

Assist...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 16 MAI 2024

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/20342 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEWTM

Décision déférée à la Cour : jugement du 28 septembre 2021 - tribunal judiciaire de BOBIGNY - RG n° 16/11982

APPELANTS

Monsieur [W] [N]

[Adresse 3]

[Localité 18]

Né le [Date naissance 10] 1987 à [Localité 35]

Représenté par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

Assisté par Me Frédéric ROUSSEL, avocat au barreau de PARIS

Madame [Y] [O] épouse [N]

[Adresse 14]

[Localité 28]

Née le [Date naissance 8] 1956 à [Localité 34] (MAROC)

Représentée par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

Assistée par Me Frédéric ROUSSEL, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [B] [N]

[Adresse 14]

[Localité 28]

Né le [Date naissance 12] 1946 à [Localité 24] (MAROC)

Représenté par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

Assisté par Me Frédéric ROUSSEL, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [L] [N]

[Adresse 17]

[Localité 15]

Né le [Date naissance 2] 1979 à [Localité 31] (MAROC)

Représenté par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

Assisté par Me Frédéric ROUSSEL, avocat au barreau de PARIS

Madame [A] [N] épouse [X]

[Adresse 4]

[Localité 18]

Née le [Date naissance 11] 1990 à [Localité 35]

Représentée par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

Assistée par Me Frédéric ROUSSEL, avocat au barreau de PARIS

Madame [K] [F]

[Adresse 3]

[Localité 18]

Née le [Date naissance 1] 1990 à [Localité 33]

Représentée par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

Assistée par Me Frédéric ROUSSEL, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

Monsieur [T] [I]

[Adresse 20]

[Localité 28]

Représenté par Me Jérôme CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1216

Assisté par Me Aurélie VIMONT, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [G] [H]

[Adresse 6]

[Localité 28]

Né le [Date naissance 7] 1987 à [Localité 32]

Représenté par Me Marie JANET de la SCP BLUMBERG & JANET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0249

Assisté par Me Sandrine ZAYAN, avocat au barreau de PARIS

CPAM DE LA SEINE-SAINT-DENIS

[Adresse 5]

[Localité 22]

n'a pas constitué avocat

S.A.M.C.V. MAIF venant aux droits de la FILIA-MAIF

[Adresse 9]

[Localité 19]

Représentée par Me Marie JANET de la SCP BLUMBERG & JANET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0249

Assistée par Me Sandrine ZAYAN, avocat au barreau de PARIS

S.A.S. EURO DOMMAGES ASSURANCES

[Adresse 21]

[Localité 13] (BELGIQUE)

Représentée par Me Jérôme CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1216

Assistée par Me Aurélie VIMONT, avocat au barreau de PARIS

FONDS DE GARANTIE DES ASSURANCES OBLIGATOIRES DE DOMMAGES intervenant au nom de la liquidation de L'ENTREPRISE INSURANCE COMPAGNY

[Adresse 16]

[Localité 23]

Représentée par Me Jérôme CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1216

Assisté par Me Aurélie VIMONT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 novembre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Nina TOUATI, présidente de chambre, chargée du rapport, et Mme Dorothée DIBIE, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Dorothée DIBIE, conseillère

Mme Sylvie LEROY, conseillère

Greffier lors des débats : Mme Emeline DEVIN

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Nina TOUATI, présidente de chambre et par Emeline DEVIN, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 4 juillet 2012 à l'intersection de la [Adresse 37] et de l'[Adresse 26] à [Localité 28] (93), M. [W] [N], qui circulait sur un scooter d'une puissance de 125 cm3, appartenant à M. [G] [H], assuré auprès de la société Filia-Maif auprès de laquelle ce dernier avait souscrit une police d'assurance PACS ( assurance du conducteur et des siens), est entré en collision avec le véhicule conduit par M. [D] [I], appartenant à son fils, M. [T] [D] et assuré auprès de la société de droit étranger Enterprise Insurance Company, représentée en France par la société Eurodommages assurances, et aujourd'hui placée en liquidation judiciaire.

M. [W] [N] a été gravement blessé dans l'accident qui a entraîné, notamment, une cécité bilatérale ; les deux véhicules ont été endommagés.

Par un arrêt du 27 février 2017, la cour d'appel de ce siège a confirmé le jugement rendu par le tribunal d'instance du Raincy le 26 mai 2014 concernant l'indemnisation du préjudice matériel de M. [T] [I], propriétaire du véhicule conduit par son père, M. [D] [I], le jour de l'accident.

Elle a, en revanche, :

- « dit irrecevables les demandes de M. [W] [N] tendant à statuer sur son absence de faute et son droit à indemnisation en relation avec l'accident du 4 juillet 2012, comme ne se rattachant pas par un lien suffisant aux demandes originaires relatives à la réparation du dommage matériel subi par M. [T] [I], présentées devant le tribunal d'instance par M. [T] [I] et la société Eurodommages assurances »,

- « dit irrecevables les demandes de M. [T] [I] et de la société Eurodommages tendant à statuer sur les fautes qu'ils reprochent à M. [N] dans l'accident du 4 juillet 2012 comme ne se rattachant pas par un lien suffisant aux demandes originaires relatives à la réparation du dommage matériel subi par M. [T] [I] ».

Par actes d'huissier en date des 21 et 24 octobre 2016, M. [H] et la société Filia-Maif ont assigné M. [D] [I] et la société Eurodommages, afin qu'ils soient condamnés à indemniser le préjudice matériel de M. [H] et à rembourser à la société Filia-Maif, subrogée dans les droits de M. [W] [N], les avances sur indemnités versées en exécution de la garantie des dommages du conducteur souscrite par M. [H].

M. [W] [N], ses parents, Mme [Y] [O] épouse [N] et M. [B] [N], ses frère et soeur, M. [L] [N] et Mme [A] [N] épouse [X], ainsi que sa compagne, Mme [K] [F] (les consorts [N]-[F]) sont intervenus volontairement à l'instance afin d'obtenir l'indemnisation de leurs préjudices.

Par ordonnance en date du 12 septembre 2017, le juge de la mise en état a ordonné une mesure d'expertise médicale de M. [W] [N], confiée au Docteur [R], neurologue, qui a déposé son rapport le 28 mai 2018.

La société Maif, venue aux droits de la société Filia-Maif à la suite d'une opération de fusion-absorption, est intervenue volontairement à l'instance, de même que le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages.

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis (la CPAM) est intervenue à la procédure pour réclamer le remboursement de ses débours.

Par jugement du 28 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Bobigny a :

- dit recevables les interventions volontaires de la société Maif, et des consorts [N]-[F],

- débouté M. [H], les consorts [N]-[F] et la CPAM de leurs demandes, y compris celles en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum les consorts [N]-[F] aux dépens de l'instance comprenant notamment les frais d'expertise.

Par déclaration du 23 novembre 2021, les consorts [N]-[F] ont interjeté appel de ce jugement en critiquant expressément chacune de ses dispositions.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions des consorts [N]-[F], notifiées le 25 octobre 2023, aux termes desquelles ils demandent à la cour, au visa de la loi du 5 juillet 1985, de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 28 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Bobigny,

Statuant à nouveau :

- dire et juger M. [W] [N], victime directe, bien fondé en ses demandes, fins et conclusions et l'y recevoir,

- dire et juger les consorts [N]-[F] recevables et bien fondés en leurs demandes, fins et conclusions,

- dire et juger M. [D] [I], la société Eurodommages et le FGAO mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter intégralement,

En conséquence,

- dire et juger que M. [W] [N] n'est à l'origine d'aucune faute ayant contribué à la réalisation ou à l'aggravation de son dommage dans l'accident de la voie publique du 4 juillet 2012,

- dire et juger, en conséquence, que M. [W] [N] ne saurait se voir imposer une minoration, ou une exclusion de son droit à réparation par application de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985,

Subsidiairement :

- dire et juger qu'il résulte de l'indétermination éventuelle des causes de l'accident, la conservation par M. [W] [N], victime directe, de son droit à l'indemnisation totale des préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux en résultant, en application des dispositions de la loi du 5 juillet 1985,

Très subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour retiendrait une faute quelconque de M. [W] [N] dans la réalisation de l'accident dont s'agit,

- dire et juger que la minoration du droit à réparation de M. [W] [N] ne sera que de moitié,

En conséquence :

Pour M. [W] [N], victime directe :

- condamner solidairement M. [I], la société Eurodommages et le FGAO à payer à M. [W] [N] la somme de 3 118 959,52 euros au titre de la liquidation de ses postes de préjudice patrimoniaux et extra-patrimoniaux, temporaires et permanents, ainsi ventilée :

POSTES

MONTANTS

PREJUDICES PATRIMONIAUX TEMPORAIRES

Frais de santé actuels

799,30 euros

Frais divers :

- frais d'équipement

- honoraires médecin-conseil

- honoraires d'experts judiciaires

- tierce personne temporaire

651 euros

3 832 euros

1 500 euros

113 152 euros

PREJUDICES PATRIMONIAUX PERMANENTS

Dépenses de santé futures

- frais orthopédie dento-faciale

- frais d'équipement électronique (capitalisés)

2 700 euros

22 458,81 euros

Assistance par tierce personne future

- arrérages échus

- capitalisation

334 908 euros

1 742 245,74 euros

Incidence professionnelle

- arrérages échus

- capitalisation

12 170,40 euros

356 827,27 euros

PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX TEMPORAIRES

Déficit fonctionnel temporaire

30 815 euros

Souffrances endurées

45 000 euros

Préjudice esthétique temporaire

18 000 euros

PREJUDICES EXTRA-PATRIMONIAUX PERMANENTS

Déficit fonctionnel permanent

408 900 euros

Préjudice d'agrément

10 000 euros

Préjudice sexuel

15 000 euros

Déduction provisions versées

0 euro

TOTAL à régler en capital

3 118 959,52 euros

- dire et juger que la somme de 3 118 959,52 euros sera réglée en capital et portera intérêts au taux légal à compter de l'appel interjeté,

Subsidiairement, s'agissant du poste patrimonial après consolidation d'assistance par tierce personne future, et dans l'hypothèse où la cour déciderait de convertir le capital en rente viagère, hors arrérages échus,

- dire et juger qu'il sera recouru à l'indice de revalorisation des rentes publié annuellement, en application des dispositions de l'article 43 de la loi du 5 juillet 1985,

Pour les victimes indirectes :

- condamner solidairement M. [D] [I], la société Eurodommages et le FGAO à payer aux consorts [N] et Mme [F] la somme de 90 000 euros au titre de leur préjudice d'affection, ainsi ventilée :

- Mme [Y] [O] épouse [N] (mère) : 20 000 euros

- M. [B] [N] (père) : 20 000 euros

- Mme [A] [N] épouse [X] (soeur) : 15 000 euros

- M. [L] [N] (frère) : 15 000 euros

- Mme [F] (concubine) : 20 000 euros,

En tout état de cause,

- déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à M. [D] [I], à la société Eurodommages, au FGAO, à la société Maif, à M. [H] ainsi qu'à la CPAM,

- condamner solidairement M. [D] [I], la société Eurodommages ainsi que le FGAO au paiement de la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance, dont distraction au profit de Maître Maryline Lugosi, avocat aux offres de droit, en application de l'article 699, du code de procédure civile

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Vu les conclusions de M. [D] [I], de la société Eurodommages et du FGAO, notifiées le 24 octobre 2023, aux termes desquelles ils demandent à la cour, au visa de la loi du 5 juillet 1985 et de l'article L. 211-25 du code des assurances, de :

- déclarer que les fautes de conduite de M. [W] [N] sont de nature à exclure son droit à indemnisation, notamment au regard du témoignage de M. [U] et de l'arrêt du 27 février 2017 qui a consacré l'absence de faute de M. [I] :

- circulation en deux-roues motorisé sans casque

- remontée de file sans replacement dans sa voie de circulation en toute sécurité

- vitesse excessive non adaptée aux circonstances

- dépassement par la gauche d'un véhicule ayant manifesté son intention de

tourner à gauche,

- conduite sans permis,

- déclarer que cette exclusion du droit à indemnisation selon les articles 4 et 6 de la loi du 5 juillet 1985 est opposable aux victimes par ricochet, à la société Filia-Maif et à la CPAM,

Par conséquent :

- confirmer la décision dont appel en ce qu'elle a considéré que les fautes de conduite commises par M. [W] [N] étaient d'une gravité telle qu'elles excluaient son droit à indemnisation selon l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, exclusion opposable aux victimes par ricochet, à la société Filia-Maif, la CPAM et à M. [H],

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté toutes les parties de leurs demandes dirigées à l'encontre du FGAO et de M. [D] [I],

- rejeter l'appel incident de la société Maif et M. [H], les débouter de toutes leurs demandes,

- condamner les parties succombantes à verser au FGAO la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

En tout état de cause :

- prendre acte que le FGAO ne peut être condamné et que la décision à intervenir peut simplement lui être déclarée opposable,

Très subsidiairement, si la cour devait ne pas exclure totalement le droit à indemnisation de M. [W] [N],

- déclarer que les fautes de conduite de M. [W] [N] sont de nature à réduire son droit à indemnisation de 75% (soit 25% de droit à indemnisation), et que cette réduction est opposable aux victimes par ricochet, à la société Filia-Maif et à la CPAM, sachant que la victime directe bénéficie d'un droit de préférence,

- fixer, en deniers ou quittance, le préjudice de M. [W] [N] après réduction de son droit à indemnisation de la façon suivante :

- dépenses de santé actuelles : 199,82 euros

- frais divers dont tierce personne temporaire : 25 872,75euros

- dépenses de santé futures : 4.536,20 euros

- tierce personne après consolidation : en capital 61 560 euros puis à compter du 1er janvier 2023 rente annuelle de 9 000 euros payable à terme échu, mensuellement, revalorisée de plein droit conformément aux articles 43 de la loi du 5 juillet 1985 et L.434-17 du code de la sécurité sociale et suspendue en cas d'hospitalisation, d'institutionnalisation ou de placement d'une durée supérieure à 45 jours,

- perte de gains professionnelles actuels : néant

- perte de gains professionnels futurs : néant

- incidence professionnelle : 61 397,08 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 7 703,75 euros

- souffrances endurées : 11 250 euros

- préjudice esthétique temporaire : 1 250 euros

- déficit fonctionnel permanent : 102 225 euros

- préjudice d'agrément : débouté

- préjudice sexuel : débouté, subsidiairement 1 250 euros,

- fixer, en deniers ou quittance, le préjudice des victimes par ricochet de la façon suivante, après réduction du droit à indemnisation de la victime directe qui leur est opposable :

- préjudice des parents : 5 000 euros chacun

- préjudice de la concubine : débouté

- préjudice des frère et soeur : 2 500 euros chacun,

- rejeter, vu le droit de préférence de la victime et la réduction de son droit à indemnisation, les demandes de la société Filia-Maif,

- dire que le recours de la CPAM, qui a pour assiette le préjudice de droit commun de la victime, ne saurait excéder 80 159,15 euros,

- réduire l'indemnité sollicitée par les consorts [N] au titre de l'article 700 du code de procédure civile à de plus justes proportions,

- rejeter le surplus des demandes,

- déclarer la décision opposable au FGAO.

Vu les conclusions de M. [H] et de la société Maif, venant aux droits de la société Filia-Maif, notifiées le 24 octobre 2023, aux termes desquelles ils demandent à la cour, au visa de la loi du 5 juillet 1985, des articles 29 et 30 de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985, des articles L. 121-12, L. 131-2 paragraphe 2 et L.211-25 du code des assurances, de :

- recevoir la société Maif et M. [H] en leur appel incident et les y déclarer recevables et bien fondés ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable l'intervention volontaire de la société Maif,

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [H] et la société Maif de leurs demandes, y compris celles au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

En conséquence et statuant à nouveau :

- juger que M. [W] [N] n'a commis aucune faute de nature à exclure ou réduire son droit à indemnisation,

- juger à tout le moins que les circonstances exactes de l'accident sont indéterminées et qu'en conséquence, le droit à indemnisation de [W] [N] est intégral,

En tout état de cause :

Au titre du préjudice matériel de M. [H] :

- infirmer le jugement,

Et statuant à nouveau :

- déclarer recevable et bien fondé M. [H], propriétaire du véhicule cyclomoteur de type scooter Piaggio immatriculé [Immatriculation 25] en ses demandes,

- condamner in solidum M. [D] [I], la société Eurodommages et le FGAO à lui payer la somme de 1 060 euros TTC,

- déclarer l'arrêt à intervenir opposable au FGAO,

Au titre du recours subrogatoire de la société Maif :

- infirmer le jugement,

Et statuant à nouveau,

- déclarer recevable et bien fondée la société Maif en ses demandes,

- condamner in solidum M. [D] [I], la société Eurodommages et le FGAO à lui payer la somme de 175 775,71 euros, somme à parfaire,

- mettre en mémoire les autres sommes que la société Maif va être amenée à régler contractuellement à M. [W] [N] après consolidation de son dommage au titre du contrat PACS et lorsque le droit à indemnisation sera définitivement tranché,

Y ajoutant,

- condamner in solidum M. [D] [I], la société Eurodommages et le FGAO à leur payer la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens de la première instance,

- condamner in solidum M. [I], la société Eurodommages et le FGAO à leur payer la somme supplémentaire de 6 000 euros en cause d'appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens de l'instance,

- déclarer l'arrêt à intervenir opposable au FGAO.

La CPAM, à laquelle la déclaration d'appel a été signifiée le 3 janvier 2022, par acte d'huissier, remis à personne habilitée, n'a pas constitué avocat.

La cour a invité en cours de délibéré :

- le FGAO à justifier du cadre de son intervention à la suite de la liquidation judiciaire de la société Enterprise Insurance Company, en précisant le fondement juridique de celle-ci,

- la société Eurodommages à justifier de sa qualité et du cadre de son intervention,

- la société Maif à conclure sur le moyen tiré de ce qu'il résulte des articles 1134, devenu 1103, et 1382, devenu 1240, du code civil, L. 131-1 et L. 131-2, alinéa 2, du code des assurances et du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, que la limitation, en raison de sa faute, du droit à indemnisation du conducteur victime d'un accident de la circulation est, sauf stipulation contraire du contrat d' assurance garantissant l'indemnisation des préjudices résultant d'une atteinte à sa personne, sans effet sur le montant des prestations à caractère indemnitaire dues par son assureur au titre de cette garantie. Il en résulte que ce conducteur victime peut, dans la limite du montant de ses préjudices, percevoir en sus de l'indemnité partielle due par le responsable de l' accident les prestations à caractère indemnitaire versées au titre de son assurance de personne (2ème Civ., 16 juillet 2020, pourvoi n° 19-16.696).

Vu la note en délibéré du FGAO et de la société Eurommages en date du 5 décembre 2023,

Vu la note en délibéré de la société Maif en date du 13 décembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le droit à indemnisation de M. [W] [N]

Le tribunal a retenu qu'il était établi que M. [W] [N] circulait à une vitesse excessive, supérieure à celle autorisée en agglomération, en remontant une file de voitures par la gauche, qu'il conduisait un scooter sans être titulaire du permis de conduire requis et qu'il ne portait pas de casque.

Il a estimé que seule la faute de la victime, d'une gravité telle qu'elle l'exposait sans raison valable à un danger dont il aurait dû avoir conscience, avait produit le dommage qui en était résulté, ce qui justifiait l'exclusion de son droit à indemnisation et celui de ses proches et conduisait au rejet des demandes de M. [H], de son assureur et de la CPAM.

Les consorts [N]-[F], qui concluent à l'infirmation du jugement, soutiennent qu'aucune faute de conduite en lien avec le dommage n'est établie à l'encontre de M. [W] [N].

Ils estiment que le témoignage de M. [U] concernant la vitesse excessive du scooter piloté par M. [W] [N] repose sur une appréciation purement subjective, en l'absence de toute mesure de la vitesse par un cinémomètre, et font observer qu'aucune infraction n'a été retenue par les services de police dans leur rapport d'enquête.

Ils contestent également que M [W] [N] circulait à une vitesse inadaptée aux circonstances contrairement aux exigences de l'article R. 413-17 du code de la route en relevant que les forces de l'ordre étaient seules à même de qualifier cette infraction en dehors de tout recours à un appareil cinémométrique.

Ils ajoutent que la présence de traces de choc à l'avant gauche du véhicule conduit par M. [D] [I] n'accrédite pas d'autre thèse que celle d'un changement de trajectoire entamé par M. [I] dans des circonstances telles qu'elles ont rendu impossible toute manoeuvre d'évitement par M. [W] [N].

Se référant au croquis établi par les services de police, et à des clichés photographiques extraits du site Google Map, ils exposent que la circulation à l'intersection de la [Adresse 37] et de l'[Adresse 26] est régulée par un feu tricolore, que la chaussée située en avant de ce feu est constituée de deux voies en sens identique séparées par une ligne brisée et qu'aucun panneau d'interdiction de dépasser n'est apposé en amont de ce feu tricolore.

Au vu des dispositions de l'article R. 414-11, alinéa 2, du code de la route, ils soutiennent qu'à l'approche d'une intersection régulée par des feux de signalisation, et en l'absence de panneau de signalisation ou de marquage au sol interdisant une telle manoeuvre, le dépassement par la gauche de véhicules par M. [W] [N], n'était pas interdit.

S'ils admettent que M. [W] [N] n'était pas titulaire du permis de conduire, ils affirment qu'il n'est pas démontré que cette faute est en lien de causalité avec son dommage.

S'agissant du port du casque, ils soulignent que M. [H] a confirmé que M. [W] [N] portait un casque de protection et relèvent que ce casque a été retrouvé à côté de la victime ; ils ajoutent qu'aucune expertise n'a été réalisée concernant le système de fermeture de ce casque de type bol alors que, selon des sites spécialisés, le système de boucles à clips est sujet au desserrage lors de chocs violents.

Ils affirment, en outre, que la nature des blessures est compatible avec le port d'un casque lors d'un choc frontal et qu'en tout état de cause, le port d'un casque n'aurait en rien modifié l'emplacement et la nature des lésions.

A titre subsidiaire, ils estiment que les circonstances de l'accident étant indéterminées, aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de M. [W] [N].

M. [H] et la société Maif, qui concluent également à l'infirmation du jugement, développent des arguments similaires.

M. [I], la société Eurodommages et le FGAO concluent à la confirmation du jugement concernant l'exclusion du droit à indemnisation de [W] [N].

Ils reprochent à M. [W] [N] d'avoir :

- circulé à une vitesse excédant la vitesse maximale autorisée de 50 km/h en agglomération, ainsi qu'il résulte du témoignage de M [U], des déclarations de M. [D] [I] et de la violence du choc,

- en tout état de cause, roulé à une vitesse inadaptée aux conditions de la circulation,

- remonté une file de véhicules en empruntant l'axe médian alors que pour qu'un dépassement soit régulier, le véhicule qui dépasse n'est pas dispensé du respect des distances de sécurité et doit pouvoir se replacer dans la circulation sans gêner les autres usagers,

- dépassé par la gauche un véhicule ayant manifesté son intention de tourner à gauche, estimant que l'arrêt du 27 février 2017 consacrant le droit à indemnisation intégrale de M. [I] aurait autorité de chose jugée sur l'absence de faute commise par ce dernier;

- circulé sans casque de protection, ou à tout le moins sans casque régulièrement attaché,

- circulé sans être titulaire du permis de conduire permettant la conduite d'un scooter de 125 cm3.

Ils soutiennent que ces fautes justifient l'exclusion du droit à indemnisation de M. [W] [N], cette exclusion étant opposable aux victimes par ricochet en application de l'article 6 de la loi du juillet 1985 ainsi qu'à la société Maif et la CPAM subrogés dans les droits de la victime.

Sur ce, il convient d'abord d'observer que l'arrêt du 25 février 2017 qui a confirmé le jugement du tribunal d'instance du Raincy en ses dispositions relatives à l'indemnisation du préjudice matériel de M. [T] [I] n'a pas d'autorité de chose jugée s'agissant de l'indemnisation des préjudices de M. [W] [N] et de ses proches qui ont un objet distinct.

Il résulte de l'article 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 que lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice.

En présence d'une telle faute, il appartient au juge d'apprécier si celle-ci a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages que ce conducteur a subi, en faisant abstraction du comportement des autres conducteurs.

Toute faute du conducteur victime, même simple, pouvant justifier la diminution ou l'exclusion de son droit à indemnisation, lorsque cette faute a concouru à la réalisation de son dommage, les motifs du jugement relatifs à la circonstance que M. [W] [N] se serait exposé sans raison valable à un danger dont il aurait dû avoir conscience, laquelle se rapporte à la caractérisation de la faute inexcusable des victimes non conductrices, sont inopérants.

Par ailleurs, aux termes de l'article 6 de la loi du 5 juillet 1985, « le préjudice subi par un tiers du fait des dommages causés à la victime directe d'un accident de la circulation est réparé en tenant compte des limitations ou exclusions applicables à l'indemnisation de ces dommages », ce dont il résulte que la faute du conducteur victime est opposable aux victimes par ricochet.

Enfin, en application de l'article 5, alinéa 2, de la loi du 5 juillet 1985, lorsque le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur n'en est pas le propriétaire, la faute de ce conducteur peut être opposée au propriétaire pour l'indemnisation des dommages causés à son véhicule.

En l'espèce, il résulte du rapport d'enquête pénale que l'accident s'est produit le 4 juillet 2012, vers 21h15, en agglomération, à l'intersection de la [Adresse 37] et de l'[Adresse 26].

Selon les constatations des services de police et les clichés photographiques extraits du site Google Map versés aux débats, la [Adresse 37] sur laquelle circulaient M. [D] [I], au volant d'un véhicule Renault Megane, et M. [W] [N], au guidon d'un scooter Piaggio de 125 cm3, est une route bidirectionnelle composée d'une voie dans chaque sens de circulation.

L'accès à cette intersection est commandé par des feux de signalisation et il n'est pas contesté que la vitesse maximale autorisée est de 50 km/h en agglomération.

Les services de police, sur la base de leurs constatations et des déclarations recueillies, ont décrit les circonstances de l'accident de la manière suivante : « Au moment et à l'endroit où s'est produit l'accident, le véhicule léger B [le véhicule conduit par M. [D] [I]] circulait [Adresse 37] en direction de la porte de [Localité 30], ce dernier s'est engagé pour tourner à gauche à l'intersection vers la [Adresse 36]. Puis une motocyclette A [le scooter Piaggio piloté par M. [W] [N]], qui circulait également [Adresse 37], en direction de la pointe de [Localité 30], doublait la file de véhicules par la gauche puis est venue percuter violemment l'avant gauche du véhicule qui s'était engagé à gauche pour tourner [Adresse 36]. Puis la motocyclette a fini sa course dix mètres plus loin dans une barrière du mobilier urbain devant la pizzeria mobile « pizza Mania » [Adresse 37]. D'après les témoins et le conducteur du véhicule B, le conducteur de la motocyclette ne portait de casque ».

Les fonctionnaires de police ont établi un croquis de l'accident sur lequel ils ont situé le point de choc à proximité des débris, au milieu du carrefour, dans le prolongement de la voie de circulation des véhicules venant en sens inverse ; ils ont figuré la position du scooter après le choc au niveau des barrières de sécurité situées à l'angle de la [Adresse 37] et de l'[Adresse 26] et la position de la victime à proximité d'une flaque de sang, au niveau d'un passage protégé situé après l'intersection.

Ils ont constaté qu'une barrière en acier du mobilier urbain, implantée à l'angle de la [Adresse 37] et de l'[Adresse 26], avait été endommagée et pliée lors de l'accident.

Ils ont mentionné dans la fiche de renseignement relative au véhicule conduit par M. [D] [I], que la portière avant-gauche du véhicule était rayée et enfoncée, que la vitre du rétroviseur avant-gauche était brisée et son cache en plastique arraché, que l'aile avant-gauche était enfoncée et cassée et le pare-choc avant arraché.

Ils ont indiqué dans la fiche de renseignement relative au véhicule conduit par M. [W] [N] que la motocyclette était totalement à l'état d'épave et que le carénage était brisé et « défoncé ».

Les deux patrouilles de police intervenues sur place ont indiqué que la victime ne portait pas de casque de protection et qu'aucun casque n'avait été retrouvé à proximité de sa personne.

Les fonctionnaires de police ont toutefois indiqué qu'un casque avait ensuite été retrouvé à une trentaine de mètres des lieux de l'accident, devant des véhicules en stationnement, sur le parking du magasin « Elyse [Localité 35] cuir et fourrures », derrière un muret situé au n° 58 de la [Adresse 37], et que ce casque avait été appréhendé et remis à l'officier de police judiciaire de permanence.

M. [D] [I], entendu par les services de police sur les lieux de l'accident a déclaré : « J'étais dans ma voiture. J'avais mis mon clignotant de gauche car j'allais tourner à gauche pour aller [Adresse 36]. Je me suis engagé à gauche, la voie étant libre, puis j'ai été surpris par une moto qui venait de derrière moi et qui m'a percuté violemment sur la gauche. Puis la moto est partie tout droit dans une barrière en face . Le conducteur de la moto n'avait pas de casque et je ne l'ai pas vue arriver, elle roulait vite».

M. [U] qui circulait dans le même sens, [Adresse 27], derrière les deux véhicules impliqués dans l'accident, a été entendu le 4 juillet 2012 et a indiqué : « J'étais dans ma voiture, deux trois voitures derrière la Megane qui a eu l'accident. J'ai vu cette Megane à l'arrêt qui a bien passé au feu vert pour tourner à gauche. Je n'ai pas souvenir si la Megane avait mis son clignotant vu la rapidité des faits. J'ai vu le conducteur de moto sans casque doubler toutes les voitures par la gauche, puis après il s'est jeté sur la Megane. La moto devait rouler entre 60 et 70 km/h. »

Entendu à nouveau par les fonctionnaires de police le 5 juillet 2012, M. [U] a précisé que le scooter circulait à cheval sur les deux voies, selon lui à une vitesse de 70-80 km/h, qu'il avait freiné beaucoup trop tard et percuté la voiture qui était à l'arrêt, au niveau de l'aile avant-gauche, qu'à la suite du choc, le cyclomotoriste était passé par dessus le scooter, avait percuté la rambarde de sécurité devant la pizzeria et était tombé sur la route à côté du passage piéton ; il a confirmé que le cyclomotoriste n'était pas casqué.

La vitesse excessive d'un véhicule pouvant être établie par tous moyens sans que le recours à un cinémomètre ne soit exigé, les déclarations de M. [U] qui présentent toute garantie de crédibilité permettent de démontrer que M. [W] [N] circulait à une intersection en agglomération à une vitesse excédant la limite maximale autorisée de 50 km/h, ce que confirment la violence du choc et les déclarations de M. [D] [I] qui relève qu'il n'a pas vu arriver le scooter qui roulait vite.

En tout état de cause, ces éléments permettent de démontrer que M. [W] [N] circulait à une vitesse excessive au regard des conditions de circulation aux abords d'une intersection et qu'il n'est pas demeuré maître de sa vitesse, contrairement aux exigences de l'article R. 413-17 du code de la route.

Ces fautes de conduite sont en lien avec le dommage subi par M. [W] [N], l'énergie cinétique acquise en raison de sa vitesse excessive ayant contribué à la réalisation de son préjudice.

Par ailleurs, si les dépassements de véhicules ne sont pas interdits à l'approche d'une intersection commandée par des feux de signalisation, il incombe à tout conducteur qui effectue un tel dépassement de s'assurer, conformément aux exigences de l'article R. 414-4 du code de la route, qu'il a la possibilité de reprendre sa place dans le courant normal de la circulation sans gêner celle-ci.

Il résulte des éléments précités, qu'en entreprenant à vive allure le dépassement par la gauche d'une file de véhicules, en roulant à cheval sur les deux voies de circulation de la [Adresse 37], route bidirectionnelle, sans s'assurer qu'il pouvait le faire en toute sécurité alors qu'un véhicule le précédant avait entrepris une manoeuvre de changement de direction pour tourner à gauche, M. [W] [N], a commis une faute qui est en lien avec le dommage qu'il a subi.

L'absence de port d'un casque de sécurité par M. [W] [N] lors de l'accident résulte des déclarations concordantes de MM. [D] [I] et [U] sur ce point.

On relèvera que trois infirmières présentes sur les lieux de l'accident mais n'ayant pas assisté à la collision, ont confirmé qu'elle n'avaient vu aucun casque à proximité de la victime, l'une d'elles, Mme [V] ayant indiqué : « Je précise que je n'ai vu aucun casque sur les lieux de l'accident et vu les blessures de la victime, c'est impossible qu'elle ait porté un casque ».

Si un casque ne présentant aucun dégât à l'exception de quelques rayures, a été retrouvé par une personne non identifiée, non à proximité de la victime, mais à trente mètres des lieux de l'accident, sur le parking d'un magasin, derrière un muret, les déclarations de M. [H] devant les services de police selon lesquelles M. [W] [N] portait ce casque attaché lorsqu'il a emprunté son scooter sont sujettes à caution.

On relèvera que M. [H], sur question des fonctionnaires de police, a d'ailleurs indiqué : « Je ne comprends pas comment le casque a pu se retrouver devant la boutique où il a été retrouvé, sans dégât et attaché, c'est illogique ».

Il est ainsi établi que M. [W] [N] ne portait pas de casque de protection au moment de l'accident, contrairement aux exigences de l'article R. 431-1 du code de la route qui dispose qu'en circulation, tout conducteur ou passager d'une motocyclette, d'un tricycle à moteur, d'un quadricycle à moteur ou d'un cyclomoteur (ce qui inclut les scooters de 125 cm3) doit être coiffé d'un casque homologué et que ce casque doit être attaché.

Cette faute de conduite a concouru à la production du dommage de M. [W] [N], lequel a présenté, au vu du certificat médical initial annexé à la procédure pénale, un traumatisme crânien sévère avec coma.

Les fonctionnaires de police ont relevé enfin que M. [W] [N] conduisait un scooter de 125 cm3 sans être titulaire du permis de conduire, précisant lors de l'audition de M. [H] qu'il fallait pour conduite ce type d'engin être titulaire du permis B et avoir effectué une formation de 7 heures.

Cette conduite sans permis qui explique les nombreuses fautes de conduite commises par M. [W] [N] qui ne disposait d'aucune formation théorique ou pratique à la conduite d'un deux roues de 125 cm3, a concouru à la production de son dommage.

Compte tenu de leur nature, de leur nombre et de leur gravité, ces fautes, qui ont contribué à la réalisation des préjudices de M. [W] [N], justifient l'exclusion de son droit à indemnisation.

Cette exclusion est opposable aux proches de M. [W] [N], à M. [H], propriétaire du scooter endommagé, ainsi qu'à la société Maif et à la CPAM, subrogées dans les droits de la victime directe qu'elles ont indemnisée.

Le jugement qui a débouté les consorts [N]-[F], la CPAM, M. [H] et la société Maif de leurs demandes sera ainsi confirmé.

Sur les demandes annexes

Il résulte des explications et documents fournis par note en délibéré que la société Enterprise Insurance Company, établie à [Localité 29], assureur du véhicule conduit par M. [D] [I], a été placée en liquidation judiciaire le 26 octobre 2016 à la suite du retrait de son agrément par la commission des services financiers de [Localité 29].

Le FGAO est intervenu, non en application de l'article L. 421-9 du code des assurances, qui dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1609 du 27 novembre 2017 ne visait que la défaillance des entreprises d'assurance agréées en France et soumises au contrôle de l'Etat français, mais en application de l'article L. 421-1 du code des assurances qui disposait, dans sa rédaction applicable au litige, qu'en cas d'accident de la circulation survenu en France, le FGAO indemnise les dommages résultant d'atteintes à la personne lorsque l'assureur du responsable est totalement ou partiellement insolvable, dans les situations non couvertes par les dispositions de la section 6 du présent chapitre.

Conformément aux dispositions de l'article R. 421-15 du code des assurances, le présent arrêt peut seulement être déclaré opposable au FGAO.

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.

Les consorts [N]-[F] qui succombent en leur recours supporteront la charge des dépens d'appel.

L'équité ne commande pas d'allouer à l'une ou l'autre des parties une indemnité au titre des frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et par mise à disposition au greffe,

- Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- Condamne M. [W] [N], Mme [Y] [O] épouse [N], M. [B] [N], M. [L] [N], Mme [A] [N] épouse [X] et Mme [K] [F] aux dépens d'appel,

- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- Déclare le présent arrêt opposable au Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 21/20342
Date de la décision : 16/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-16;21.20342 ?
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