RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 11
L. 743-22 du Code de l'entrée et du séjour
des étrangers et du droit d'asile
ORDONNANCE DU 03 MAI 2024
(1 pages)
Numéro d'inscription au numéro général et de décision : B N° RG 24/02008 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CJKOT
Décision déférée : ordonnance rendue le 02 mai 2024, à 11h22, par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Créteil
Nous, Stéphanie Gargoullaud, présidente de chambre, à la cour d'appel de Paris, agissant par délégation du premier président de cette cour, assistée de Catherine Charles, greffier aux débats et au prononcé de l'ordonnance,
APPELANTS :
1°) LE PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE PRÈS LE TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CRETEIL
MINISTÈRE PUBLIC, en la personne de Marie Daphnée Perrin, avocat général
2°) LE PRÉFET DU VAL-DE-MARNE,
représenté par Me Joyce Jacquard du cabinet Actis Avocats, avocats au barreau du Val-de-Marne
INTIMÉ:
M. [S] [L]
né le 10 Mars 1995 à [Localité 3], de nationalité algérienne
RETENU au centre de rétention de [Localité 4]
assisté de Me Ruben Garcia, avocat au barreau de Paris et de Mme [R] [Y] (Interprète en arabe) tout au long de la procédure devant la cour et lors de la notification de la présente ordonnance, serment préalablement prêté,
ORDONNANCE :
- contradictoire,
- prononcée en audience publique,
- Vu l'ordonnance du 02 mai 2024, à 11h22, du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Créteil accueillant le moyen de nullité soulevé, déclarant la procédure diligentée à l'encontre deMonsieur [S] [L] irrégulière, disant n'y avoir lieu à prolongation du maintien en rétention de Monsieur [S] [L] dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénintentiaire et rappelant à l'intéressé qu'il a l'obligation de quitter le territoire français en application de l'article L742-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- Vu l'appel de ladite ordonnance interjeté le 02 mai 2024 à 14h09 par le procureur de la République près le tribunal judiciaire de Créteil, avec demande d'effet suspensif ;
- Vu l'appel de ladite ordonnance, interjeté le 02 mai 2024 , à 20h45 , par le préfet du Val-de-Marne ;
- Vu l'ordonnance du 02 mai 2024 conférant un caractère suspensif au recours du procureur de la République ;
- Vu la décision de jonction, par mention au dossier, des deux appels ;
-Vu les conclusions du conseil de l'intéressé reçues le 3 mai 2024 à 06h44;
-Vu les conclusions additionnelles du conseil de l'intéressé déposées à l'audience ce jour à 10h57;
- Vu les observations :
- de l'avocat général tendant à l'infirmation de l'ordonnance ;
- du conseil de la préfecture lequel, s'associant à l'argumentation développée par le ministère public, nous demande d'infirmer l'ordonnance et de prolonger la rétention pour une durée de 28 jours ;
- de M. [S] [L], assisté de son conseil qui demande la confirmation de l'ordonnance ;
SUR QUOI,
A titre liminaire, il est rappelé que la Cour européenne des droits de l'homme a clairement refusé d'appliquer l'article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales aux procédures administratives relatives à l'étranger (Cour EDH, G.C. 5 octobre 2000, Maaouia c. France, Req. N°39652/98 ; Cour EDH, 2 février 2010, Dalea c. France, Req. N°964/07), de sorte que les litiges concernant la rétention des étrangers n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 6, § 1, précité (1re Civ., 17 octobre 2019, pourvoi n° 18-24.043, publié), de sorte que les moyens tirés d'une méconnaissance de ces dispositions ne sont pas opérants.
1. Sur les moyens tirés de l'irrecevabilité de l'appel
Conformément à l'article L 743-21 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les ordonnances du juge des libertés et de la détention sont susceptibles d'appel, formé par l'étranger, le ministère public et l'autorité administrative, devant le premier président de la cour d'appel ou son délégué. Le premier président de la cour d'appel ou son délégué est saisi sans forme et doit statuer dans les quarante-huit heures de sa saisine.
Et, en vertu de l'article L 743-22 du même code, l'appel n'est pas suspensif. Toutefois, le ministère public peut demander au premier président de la cour d'appel ou à son délégué de déclarer son recours suspensif lorsqu'il lui apparaît que l'intéressé ne dispose pas de garanties de représentation effectives ou en cas de menace grave pour l'ordre public. Celui-ci décide, sans délai, s'il y a lieu de donner à cet appel un effet suspensif, en fonction des garanties de représentation dont dispose l'étranger ou de la menace grave pour l'ordre public, par une ordonnance motivée rendue contradictoirement et qui n'est pas susceptible de recours. L'intéressé est maintenu à la disposition de la justice jusqu'à ce que cette ordonnance soit rendue et, si elle donne un effet suspensif à l'appel du ministère public, jusqu'à ce qu'il soit statué sur le fond.
Enfin, selon l'article R 743-12 du même code, lorsque le ministère public entend solliciter du premier président de la cour d'appel qu'il déclare son recours suspensif, il forme appel dans le délai de dix heures prévu à l'article L 743-22. Il fait notifier la déclaration d'appel, immédiatement et par tout moyen, à l'autorité administrative, à l'étranger et, le cas échéant, à son avocat, qui en accusent réception. La notification mentionne que des observations en réponse à la demande de déclaration d'appel suspensif peuvent être transmises par tout moyen au premier président ou à son délégué dans un délai de deux heures. L'article R. 743-11 précise que la déclaration d'appel est motivée "à peine d'irrecevabilité", et transmise "par tout moyen au greffe de la cour d'appel".
1.1 Sur la notification à l'intimé
S'il est constant que la notification de la déclaration d'appel assortie d'une demande d'effet suspensif du procureur de la République à l'étranger et à son avocat impose, dans les conditions prévues par la loi, que cette notification soit régulière (1re Civ., 15 novembre 2023, pourvoi n°22-19.570), il s'avère que les pièces du dossier contiennent la notification à la fois à M. [L], par l'intermédiaire d'un interprète dont le nom figure en procédure, et à son avocat, de l'appel motivé et de l'ordonnance ordonnant l'effet suspensif du 2 mai 2024.
Il est relevé que l'intéressé se désiste de ce moyen à l'audience.
1.2 Sur la mention d'un 'référé rétention'
La mention d'un 'référé rétention avec effet suspensif' dans le corps du courriel de transmission n'est pas erronée, dès lors qu'il s'agit bien d'une procédure d'urgence relative à la rétention, étant précisé que la pièce jointe porte le titre 'déclaration d'appel et de saisine de M. Le premier président avec demande d'effet suspensif' et qu'aucune ambiguïté ne résulte de l'emploi de ces termes.
1.3 Sur la motivation de l'acte d'appel, la formulation des demandes et la critique de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention
Il y a lieu de constater que la déclaration d'appel du procureur de la République sollicite l'infirmation de la décision du premier juge.
Sur la formulation des demandes, une demande "d'infirmation" peut se comprendre comme une demande de prolongation de la rétention, à la condition que le dispositif de la décision critiquée se présente de manière simple et claire comme rejetant la demande de prolongation.
Or, en l'espèce, le dispositif se présente comme un refus de prolonger la rétention en raison d'une irrégularité de procédure, dans les mêmes termes que ceux que conteste la déclaration d'appel.
En effet, le dispositif est rédigé en ces termes :
' - Accueillons le moyende nullité soulevé,
- Déclarons la procédure diligentée à l'encontre de M. [L] irrégulière ;
- Disons n'y avoir lieu à statuer sur la prolongation de rétention administrative de M. [L].
Ainsi, la déclaration d'appel conteste-t-elle clairement le dispositif et la motivation principale de cette ordonnance du juge des libertés et de la détention. Il s'en déduit que la jurisprudence sur l'effet dévolutif, le champ de l'appel et les chefs critiqués, jurisprudence qui reproche à une déclaration d'appel de ne pas contester le principal moyen accueilli, de ne pas déterminer la finalité de l'appel du procureur de la République ou de ne pas critiquer le dispositif de l'ordonnance querellée (CA Paris, 2-11, 20 janvier 2020, RG 20/00315 CA Paris, 1-11, 20 mai 2022 RG 22/01464, CA Paris 1-11, 26 mars 2024, RG 24/001394) ne trouve pas à s'appliquer en l'espèce.
En conséquence, l'appel du procureur de la République est recevable.
2. Sur les 'conclusions complémentaires après l'apparition de faits nouveaux dans le délais d'appel'
Des conclusions ont été déposées par l'intimé à l'audience, à 10h57, soit dans le délai d'appel, aux fins de faire constater qu'il n'est justifié ni des avis de transfert JLD et parquet vers le centre de rétention de [Localité 4] ni de la production de la copie du registre du centre de rétention de [Localité 4] et, d'une part, 'de déclarer dès lors irrecevable la requête du préfet à défaut d'être accompagnée en cause d'appel de ces pièces justificatives utiles' et, d'autre part, 'de déclarer en tout état de cause irrégulière la procédure d'appel'.
Il résulte de l'article R.743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que lorsque la requête est formée par l'autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l'article L. 744-2 précité. Il est constant que ce registre doit être 'actualisé' pour être pertinent. Il ne peut être suppléé à leur absence par leur seule communication à l'audience, sauf s'il est justifié de l'impossibilité de les joindre à la requête (1re Civ., 26 octobre 2022, pourvoi n° 21-19.352).
En premier lieu, dans le présent dossier, il est établi que le registre joint à la requête du préfet était celui du lieu de rétention à la date de la saisine, soit le local de rétention de [Localité 1]. Il ne peut donc être reprocé à l'administration de n'avoir pas joint des pièces qui ne sont intervenues que postérieurement et ne sont pas de nature à affecter la recevabilité de la requête du préfet devant le JLD.
En second lieu, s'agissant de l'absence d'actualisation de la situation de M. [L], aucune pièce du dossier n'accrédite de la date du transfert ni des conditions dans lesquelles ont été respectées les dispositions desde l'article R.744-9 du CESEDA. Toutefois le contrôle des conditions de rétention postérieures à la décision du juge des libertés et de la détention ne peuvent être soumises au contrôle du juge d'appel qu'en ce qu'elles auraient également été soumises au premier juge.
Tel n'est pas le cas des conditions de transfert postérieures à cette décision.
Il est en outre rappelé qu'aux termes de l'article L. 743-11 du code précité si, à peine d'irrecevabilité, prononcée d'office, aucune irrégularité antérieure à une audience à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la mesure ne peut être soulevée lors d'une audience ultérieure, c'est à l'exception de circonstance établissant l'impossibilité pour l'intéressé de faire valoir un droit correspondant à des diligences antérieures à cette date. Ainsi la présente décision ne fait-elle pas obstacle à ce que les conditions de rétention entre la date de la décision du premier juge et celle du juge d'appel soient soumises à l'examen d'un juge des libertés et de la détention.
Le moyen pris des conditions de transfert, qui ne pouvait pas être soumis à un juge de premier ressort, ne peut donc être examiné directement par le juge d'appel et doit être rejeté.
3. Sur le contrôle de régularité, des actes antérieurs au placement en rétention et le moyen retenu par le premier juge
Il appartient au juge judiciaire, en sa qualité de gardien de la liberté individuelle, de se prononcer sur les irrégularités, invoquées par l'étranger, affectant les procédures préalables à la notification de la décision de placement en rétention. (2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.002, Bull. 1995, II, n° 221, 2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.006, Bull. 1995, II, n° 212, 2e Civ., 28 juin 1995, pourvoi n° 94-50.005, Bull., 1995, II, n° 211).
En premier lieu, selon l'article L. 812-1 du CESEDA, tout étranger doit être en mesure de présenter les pièces ou documents sous le couvert desquels il est autorisé à circuler ou à séjourner en France à toute réquisition d'un fonctionnaire de police.
L'article L. 812-2 précise que les contrôles des obligations de détention, de port et de présentation des pièces et documents prévus à l'article L. 812-1 peuvent être effectués dans les situations suivantes :
'1° En dehors de tout contrôle d'identité, si des éléments objectifs déduits de circonstances extérieures à la personne même de l'intéressé sont de nature à faire apparaître sa qualité d'étranger ; ces contrôles ne peuvent être pratiqués que pour une durée n'excédant pas six heures consécutives dans un même lieu et ne peuvent consister en un contrôle systématique des personnes présentes ou circulant dans ce lieu ;
2° A la suite d'un contrôle d'identité effectué en application des articles 78-1 à 78-2-2 du code de procédure pénale, selon les modalités prévues à ces articles, si des éléments objectifs déduits de circonstances extérieures à la personne même de l'intéressé sont de nature à faire apparaître sa qualité d'étranger ;
3° En application de l'article 67 quater du code des douanes, selon les modalités prévues à cet article.'
En second lieu, aux termes de l'article L. 813-1, si, à l'occasion d'un contrôle mentionné à l'article L. 812-2, il apparaît qu'un étranger n'est pas en mesure de justifier de son droit de circuler ou de séjourner en France, il peut être retenu aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire français. Dans ce cadre, l'étranger peut être conduit dans un local de police ou de gendarmerie et y être retenu par un officier de police judiciaire de la police nationale ou de la gendarmerie nationale.
En l'espèce, s'il est regrettable que le procès-verbal initial ne mentionne pas l'instant du constat d'extranéité, il résulte bien de la procédure que l'identité, la nationalité et donc l'extranéité de l'intéressé étaient connus de l'administration, dès la rédaction du procès-verbal faisant mention d'une demande de prise en charge d'un détenu où figurait l'identité et la nationalité algérienne.
Ce même procès-verbal de prise en charge du 30 avril 2024 à 0h40 mentionne au demeurant la chronologie des faits permettant d'établir que l'intéressé a été accompagné au greffe de la maison d'arrêt de [Localité 2] afin que lui soit notifiée sa sortie et la 'remise du billet de sortie' (lesquels mentionnent son nom et sa nationalité algérienne), puis que les fonctionnaires de police ont procédé à la vérification de situation administrative en application des articles L. 812-1 et L. 812-2 précités.
La mention sur la fiche pénale éditée par l'administration pénitentiaire à 22h10 de la phrase 'à libérer ce jour' ne faisait pas obstacle à la réalisation des actes nécessaires à la levée d'écrou qui se sont réalisés entre le retour de l'intéressé à la maison d'arrêt et cette levée effective, soit, entre 22h10 et 055, dans un délai de 2h45 qui ne peut être considéré comme excessif au regard des circonstance.
Dans ces conditions, qui permettent au juge judiciaire d'exercer son contrôle, il y a lieu de constater que la procédure est régulière que l'exception de nullité ne peut qu'être rejetée.
Il y a donc lieu d'infirmer sur ce point l'ordonnance critiquée.
Statuant à nouveau, il convient d'examiner les moyens soulevés,
4 . Sur l'avis famille er le droits de prévenir un proche à l'occasion d'une retenue
Il est constant que l'information adressée à la tante de l'intéressé au 06 59 56 31 30 a été adressée à 1h57, ainsi que l'établit un complément au procès-verbal du 30 avril à 1h49. Il y a lieu de considérer que cette information a été réalisée par le fonctionnaire de police selon les termes de ce procès-verbal.
Il est cependant constant que le texte prévoit une information directement par le retenu, et non via le fonctionnaire de police, de sorte que la procédure est, à cet égard, irrégulière.
Dans les cas où une irrégularité de la procédure est constatée, l'article L.743-12 du CESEDA impose au juge de vérifier que cette irrégularité a pour effet de porter atteinte aux droits de l'étranger : « En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d'une demande sur ce motif ou qui relève d'office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée du placement ou du maintien en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter substantiellement atteinte aux droits de l'étranger dont l'effectivité n'a pu être rétablie par une régularisation intervenue avant la clôture des débats. »
Il appartient donc au juge de rechercher si cette irrégularité a porté atteinte aux droits de la personne. En l'espèce, M. [L] n'espose pas en quoi une atteinte aurait été portée à ses droits propres, la possibilité que sa tante ait pu être contactée si lui même avait appelé, plutôt que les fonctionnaires de police, n'étant pas établie. saisisse un conseil n'étant pas opérant dès lors qu'il avait lui-même refusé l'assistance d'un avocat et même n'avait pas souhaité communiquer avec un membre de sa famille.
Le moyen n'est donc pas fondé.
5. Sur la tardiveté alléguée de l'avis au procureur de la République
Il résulte de l'article L. 813-4 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile que, lorsqu'il met en oeuvre une retenue pour vérifictation des titres de séjour, l'officier de police judiciaire (OPJ) informe le procureur de la République dès le début de la retenue. En l'espèce il n'est pas contesté que la retenue du 30 avril 2024 a pour heure d'effet àh55 (interpellation), qu'elle a été notifiée à l'intéressé à 1h49 selon le procès-verbal figurant en procédure et que l'avis au procureur a été adressé 1h55.
Le procureur de la République a donc été informé, dans un délai de l'ordre de 6 minutes, qui correspond à une information dès le début de la retenue. Le moyen n'est donc pas fondé
6 .Sur l'absence d'association habilitée dans le local de rétention administrative
L'article R 744-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile fixe le régime du placement dans un local de rétention administrative (LRA), lequel, ainsi que le relève le juge des libertés et de la détention, n'implique pas "in abstracto" qu'il soit porté atteinte aux droits de l'étranger par le seul fait de son passage avant d'être tranféré au centre de rétention administrative.
Il appartient à la personne qui s'en prévaut de rapporter les éléments de preuve permettant d'établir ses allégations, ce qui, bien que les démonstrations que peut faire la personne retenue soient rendues plus complexes par la situation même de privation de liberté, peut résulter de différents types de constats (1re Civ., 14 septembre 2022, pourvoi n° 20-19.314, 20-19.388).
En l'absence de toute pièce confortant l'allégation d'irrégularité des conditions de rétention à [Localité 1], le juge ne saurait se fonder sur les seules allégations de la personne retenue pour constater une atteinte à l'exercice effectif des droits en rétention.
Sur ce point, l'article R.744-20 du code précité prévoit que pour permettre l'exercice effectif de leurs droits par les étrangers maintenus dans un centre de rétention administrative, le ministre chargé de l'immigration conclut une convention avec une ou plusieurs personnes morales ayant pour mission d'informer les étrangers et de les aider à exercer leurs droits. A cette fin, la personne morale assure, dans chaque centre dans lequel elle est chargée d'intervenir, des prestations d'information, par l'organisation de permanences et la mise à disposition de documentation.
Les étrangers retenus en bénéficient sans formalité dans les conditions prévues par le règlement intérieur.
L'article R. 744-21 du CESEDA précise que pour permettre l'exercice effectif de leurs droits, les étrangers maintenus dans un local de rétention (LRA) peuvent bénéficier du concours d'une personne morale, à leur demande ou à l'initiative, de celle-ci, dans des conditions définies par convention conclue par le préfet ou, à Paris, par le préfet de police. Dans chaque local de rétention, ce concours est assuré par une seule personne morale.
Il n'est pas établi en l'espèce qu'une association ait été agréée pur intervenir au local de rétention de [Localité 1].
En revanche, il résulte du document intitulé « vos droits au local et au centre de rétention » remis aux personnes retenues et notifié à M. [L] le 30 avril à 10h49 ainsi que du document complémentaire notifié à 10h52 qu'il la possibilité de contacter toutes organisations et instances nationales, internationales et non gouvernementales suivantes, dont figuraient les coordonnées téléphoniques : France Terre d'Asile, Forum Réfugiés COSI, le défenseur des droits, le contrôleur général des lieux de privation de liberté, Médecins sans Frontières; et le HCR des Nations Unies.
Les éléments communiqués à M. [L] conduisent à considérer qu'il a bénéficié d'informations précises et effectives sur des associations pouvant lui venir en aide;
qu'en tout état de cause l'intéressé ne démontre pas l'atteinte substantielle aux droits de Monsieur [L] qui résulterait de ce qu'une personne morale spécifique n'aurait pas été désignée par le préfet, ni une convention conclue.
Le moyen n'est donc pas fondé.
7. Sur la demande de prolongation de la mesure
En conséquence de l'ensemble de ces élements, au regard de la motivation de l'arrêté de placement en rétention du préfet et de sa requête du 1er mai 2024, en l'absence de toute illégalité susceptible d'affecter les conditions, découlant du droit de l'Union, de légalité de la rétention, et à défaut d'autres moyens présentés en appel, il y a lieu d'infirmer l'ordonnance critiquée et de prolonger le maintien en rétention de l'intéressé pour une durée de 28 jours.
PAR CES MOTIFS
REJETONS les moyens pris de l'irrecevabilité de l'appel ainsi que les moyens relatifs aux circonstances postérieures à l'ordonnance critiquée,
DECLARONS recevable l'appel,
INFIRMONS cette ordonnance,
STATUANT À NOUVEAU,
DÉCLARONS recevable la requête du préfet,
REJETONS les moyens de nullité et de fond,
ORDONNONS la prolongation de la rétention de M. [S] [L] dans les locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de vingt-huit jours,
ORDONNONS la remise immédiate au procureur général d'une expédition de la présente ordonnance.
Fait à Paris le 03 mai 2024 à
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
REÇU NOTIFICATION DE L'ORDONNANCE ET DE L'EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :
Pour information :
L'ordonnance n'est pas susceptible d'opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l'étranger, à l'autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d'attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Le préfet ou son représentant L'intéressé L'interprète
L'avocat de l'intéressé L'avocat général