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02/05/2024 | FRANCE | N°23/10676

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 10, 02 mai 2024, 23/10676


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 10



ARRET DU 02 MAI 2024



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/10676 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHZUB



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Avril 2023 -Juge de l'exécution de Paris RG n° 23/80223





APPELANT



Monsieur [W] [P]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat a

u barreau de PARIS, toque : J151

plaidant par Me Paul AKAR de la SCP d'Avocat Paul AKAR, avocat au barreau de PARIS, toque : P0033



INTIMEE

S.A.R.L. SOCIETE VIGNES

[Adresse 1]

[Localité 3]

n'a pa...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10

ARRET DU 02 MAI 2024

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/10676 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHZUB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Avril 2023 -Juge de l'exécution de Paris RG n° 23/80223

APPELANT

Monsieur [W] [P]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

plaidant par Me Paul AKAR de la SCP d'Avocat Paul AKAR, avocat au barreau de PARIS, toque : P0033

INTIMEE

S.A.R.L. SOCIETE VIGNES

[Adresse 1]

[Localité 3]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 20 Mars 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Bénédicte PRUVOST, Présidente de chambre

Madame Catherine LEFORT, Conseillère

Madame Valérie DISTINGUIN, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Bénédicte PRUVOST, Présidente de chambre dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Grégoire GROSPELLIER

ARRET :

- RENDUE PAR DEFAUT

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Bénédicte PRUVOST, Présidente de chambre et par Grégoire GROSPELLIER, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

Selon jugement du 3 juin 2022, le tribunal de commerce de Paris a :

condamné M. [W] [P] à payer à la société Vignes la somme de 406.854,02 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2019, avec anatocisme ;

condamné M. [W] [P] à payer à la société Vignes la somme de 5000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné M. [P] aux dépens.

Par jugement du 18 novembre 2022, le tribunal de commerce a  déclaré la société Vignes bien fondée en sa requête en rectification d'erreur matérielle et rectifié comme suit le jugement du 3 juin 2022 :

« condamne M. [P] à payer à la société Vignes la somme de 406.854,02 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2019, avec anatocisme » ;

ordonne l'exécution provisoire.

Ces deux jugements ont été signifiés le 21 décembre 2022, frappés d'appel par la société Vignes et, à la suite du prononcé d'une ordonnance de caducité du 27 juin 2023 non déférée à la cour, sont devenus définitifs.

Le 30 décembre 2022, la société Vignes a fait dresser un procès-verbal d'indisponibilité des certificats d'immatriculation de 18 véhicules, procès-verbal dénoncé à M. [P] le 3 janvier 2023.

Le 30 décembre 2022 également, la société Vignes a fait pratiquer deux saisies-attributions entre les mains l'une de la société BNP Paribas, l'autre de la société Bred Banque Populaire pour avoir paiement de sommes respectives de 426.544,39 et 426.105,61 euros, saisies qui se sont avérées fructueuses à hauteur des sommes respectives de 2333,75 et 41.045,22 euros.

Par acte d'huissier du 30 janvier 2023, M. [P] a saisi le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris aux fins de contestation du procès-verbal d'indisponibilité et des saisies-attributions susvisées.

Par jugement du 17 avril 2023, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris a :

- déclaré recevables les contestations des saisies-attributions pratiquées sur les comptes de M. [P] ouverts auprès des banques BNP Paribas et Bred Banque Populaire,

- débouté M. [P] de ses demandes de mainlevée de ces saisies-attributions,

- débouté M. [P] de sa demande de mainlevée des saisies de véhicule pratiquées le 30 décembre 2022 ;

- débouté M. [P] de sa demande en délais de paiement,

- dit n'y avoir lieu de prononcer une amende civile à l'encontre de M. [P],

- condamné M. [P] aux dépens ainsi qu'à payer à la société Vignes une somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté M. [P] de sa demande d'indemnité formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, le juge de l'exécution a dit que le jugement du 3 juin 2022 avait été assorti de l'exécution provisoire par le jugement rectificatif du 18 novembre suivant, de sorte que l'appel interjeté contre ces décisions ne pouvait avoir eu pour effet d'en suspendre le caractère exécutoire et d'invalider la saisie-attribution.

Concernant la demande de mainlevée des saisies de véhicule, il a constaté que si M. [P] affirmait voir vendu les véhicules saisis, il n'en justifiait pas et que le fichier du service d'immatriculation les faisait toujours apparaître au nom de celui-ci.

Concernant la demande en délais de paiement, il a relevé que le demandeur ne motivait aucunement sa demande et ne justifiait pas davantage de sa situation patrimoniale et financière ni de la façon dont il pourrait régler une 24ème échéance d'un montant de 268.000 euros (hors intérêts) s'il n'était pas en état de verser plus de 5000 euros par mois.

Concernant l'amende civile réclamée, il a retenu que si les contestations de M. [P] étaient peu sérieuses, il n'était pas justifié qu'il ait commis un abus de procédure.

Selon déclaration du 15 juin 2023, M. [P] a formé appel de ce jugement.

Par conclusions remises au greffe le 28 août 2023, l'appelant demande à la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en son appel,

- infirmer le jugement entrepris,

statuant à nouveau,

- ordonner à la société Vignes de fournir concomitamment au dépôt de ses conclusions en défense et dans le délai prévu par le dépôt de celles-ci, un compte récapitulatif précis des sommes qu'elle réclame en principal, intérêts, frais et dépens, ce décompte devant tenir compte des sommes encaissées, notamment au titre des « saisies exécution » pratiquées le 30 décembre 2022,

- ordonner la mainlevée des saisies des véhicules pratiquées le 30 décembre 2022,

- vu ses règlements effectués à compter du 31 juillet 2023, lui accorder les plus larges délais pour régler sa dette, à hauteur de 5000 euros par mois à compter du 31 juillet 2023 pendant 23 mois, le solde étant payé à la 24ème échéance ;

- statuer ce que de droit sur les dépens.

A cet effet, il indique n'avoir jamais contesté les saisies-attributions pratiquées, reconnaissant être redevable de la somme au paiement de laquelle il a été condamné par le tribunal de commerce ; mais qu'il appartient aujourd'hui au créancier de faire savoir s'il a appréhendé les sommes saisies-attribuées et, dans l'affirmative, pour quel montant net, de façon à pouvoir faire les comptes.

Concernant sa situation dont il admet n'avoir pas suffisamment justifié devant le juge de l'exécution, il relate avoir toujours exercé la profession de marchand de biens, être aujourd'hui âgé de 79 ans et vouloir régler sa dette. Il produit son avis d'imposition, faisant apparaître des revenus BIC et propose de régler sa dette à raison de mensualités de 5000 euros, et pour la 24ème échéance, indique qu'il « dispose d'une potentialité de recevoir diverses sommes qui sont des créances à recouvrer sur des queues de programmes », ce dont il ne peut justifier en raison du secret des affaires réclamé par ses cocontractants.

Il demande enfin la mainlevée de la saisie des véhicules, déclarant qu'il n'est plus propriétaire de ces véhicules depuis longtemps, même s'il ne peut en justifier bien qu'il ait rayé la carte grise et signé le certificat de vente, observant que c'était au nouveau propriétaire de faire faire la modification au service des cartes grises, ce dont il s'est sans doute abstenu, et rappelant que le certificat d'immatriculation d'un véhicule n'est pas un titre de propriété.

La société Vignes, à qui la déclaration d'appel et les conclusions d'appelant ont été régulièrement signifiées par acte de commissaire de justice du 8 septembre 2023, n'a pas constitué avocat.

La cour ayant constaté en cours de délibéré que manquait la pièce n°3 (procès-verbal d'indisponibilité de certificat d'immatriculation dressé le 30 décembre 2022) dans le dossier de pièces de l'appelant, l'a réclamé à celui-ci par message RPVA du 21 mars 2024. Par message du 25 mars 2024, l'avocat de l'appelant a répondu que cette pièce, qu'il pensait pouvoir verser aux débats à l'origine, ne lui avait jamais été adressée.

MOTIFS

Le jugement fondant les mesures d'exécution forcée étant devenu définitif depuis que M. [P] a formé appel du présent jugement du juge de l'exécution, l'appelant réduit la portée de son appel aux chefs de dispositif du jugement critiqué le déboutant de sa demande de délais de paiement et de sa demande de mainlevée des saisies de véhicule.

Sur la demande en délais de paiement relative aux saisies-attributions

L'article L.211-2 alinéa 1er du code des procédures civiles d'exécution dispose : « L'acte de saisie emporte, à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée, attribution immédiate au profit du saisissant de la créance saisie, disponible entre les mains du tiers ainsi que de tous ses accessoires. Il rend le tiers personnellement débiteur des causes de la saisie dans la limite de son obligation. »

Selon les dispositions de l'article 1343-5 alinéa 1er du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Les articles 1343-5 et suivants du code civil, en ce qu'ils sont conçus en des termes généraux, permettent l'octroi de délais de paiement y compris après la mise en oeuvre d'une mesure d'exécution. Toutefois, ils prévoient seulement que la décision du juge suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées. Cette suspension, qui ne saurait être assimilée à une mainlevée, s'opère nécessairement dans l'état où se trouve la mesure d'exécution au jour de l'octroi des délais.

Ainsi, en matière de saisie-attribution, la suspension ne peut avoir pour effet que de différer le paiement en faisant obstacle à l'attribution matérielle des fonds au créancier dans le mois suivant la mise en place de cette mesure d'exécution, puisqu'en application l'article L.211-2 du code des procédures civiles d'exécution, l'acte de saisie a déjà emporté attribution juridique des fonds au saisissant.

Dès lors que la somme saisie ne suffit pas à désintéresser le créancier, le juge de l'exécution peut statuer sur la demande de délais pour le solde de la créance, soit la somme de 426.544,39 (montant total pour paiement duquel les saisies-attributions ont été pratiquées) ' 43.405,97 (montant total saisi) = 383.138,42 euros, ce qu'il a fait en l'espèce en rejetant la demande faute de production par M. [P] de justificatifs de sa situation matérielle.

Devant la cour, M. [P] produit son avis d'imposition sur ses revenus de 2021, établi en 2023, dont il ressort que, âgé de 79 ans aujourd'hui, il a perçu des revenus d'un montant total de 42.867 euros en 2021, soit un revenu net mensuel imposable de 3572,25 euros pour vivre avec son épouse, qui ne bénéficie d'aucunes ressources propres. Ces revenus apparaissent insuffisants pour assumer les mensualités de remboursement de 5000 euros que propose M. [P], à supposer même que celui-ci soit propriétaire de son logement. Dans ses conclusions du 28 août 2023, il indiquait vouloir faire la preuve de sa bonne foi en commençant d'ores et déjà à procéder à ces versements par l'intermédiaire de son conseil et ce jusqu'à la date de clôture de la présente instance et en voulait pour preuve deux versements qu'il aurait effectués en juillet et août 2023. Cependant, parmi ses pièces ne figure que la copie d'un seul chèque d'un montant de 5000 euros émis le 8 août 2023 à l'ordre de la CARPA et, à la date de la clôture, aucune preuve de la poursuite de tels versements n'a été communiquée par l'intermédiaire de son conseil. Enfin, à supposer même que ces versements mensuels de 5000 euros aient été respectés, en l'absence de toute assurance du versement du solde à la 24ème échéance, soit 268.138,42 euros, l'article 1343-5 du code civil enserrant l'octroi de délais de paiement dans une limite de deux ans, la cour ne peut faire droit à la demande de l'appelant.

Par conséquent, le jugement entrepris ne peut qu'être confirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de délais de paiement.

Sur la demande de mainlevée du procès-verbal d'indisponibilité des véhicules

M. [P] s'abstient de produire sa pièce n°3 visée à la suite de ses conclusions du 28 août 2023, pièce qui serait constituée d'un procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation du 30 décembre 2022 indiqué comme « à venir ». Par ailleurs l'intimée n'a pas constitué avocat.

Le juge de l'exécution, devant lequel davantage de pièces justificatives ont manifestement été produites, a visé les dispositions de l'article L. 223-1 du code des procédures civiles d'exécution, selon lesquelles l'huissier de justice chargé de l'exécution d'un titre exécutoire peut faire une déclaration aux fins de saisie d'un véhicule terrestre à moteur auprès de l'autorité administrative compétente ; la notification de cette déclaration au débiteur produit tous les effets d'une saisie.

L'appelant ne produisant aucune preuve de la prétendue cession des 18 véhicules litigieux, dont le juge de l'exécution a constaté qu'il ressortait du fichier du service d'immatriculation des véhicules que ceux-ci y étaient toujours inscrits au nom de M. [P], et même si un certificat d'immatriculation n'est pas un titre de propriété, la demande de mainlevée ne peut qu'être rejetée faute de justificatifs, peu important que cette situation provienne d'un défaut de diligences de son (ses) prétendu(s) acquéreur(s). Au demeurant, la cour observe que M. [P] devrait avoir conservé une preuve de la cession de ces 18 véhicules.

Sur les demandes accessoires

L'appelant indique que, dans un souci d'apaisement entre son créancier et lui, il ne réclame pas d'indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ni la condamnation de la société Vignes aux dépens.

Quoi qu'il en soit, l'issue de la procédure d'appel, laquelle n'a été rendue nécessaire que par sa carence à justifier de ses demandes devant le juge de l'exécution, commande de le condamner aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Et y ajoutant,

Condamne M. [W] [P] aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 23/10676
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;23.10676 ?
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