La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/05/2024 | FRANCE | N°23/06225

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 2, 02 mai 2024, 23/06225


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2



ARRÊT DU 02 MAI 2024

(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/06225 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIIMZ



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 30 Août 2023 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 23/00813





APPELANTE :



S.A.S. FIDUCIAL SECURITY HUMAIN(et non FIDUCIAL PRIVATE SECURITE, com

me indiqué dans le jugement), représentée par son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Michel G...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 2

ARRÊT DU 02 MAI 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/06225 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIIMZ

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 30 Août 2023 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 23/00813

APPELANTE :

S.A.S. FIDUCIAL SECURITY HUMAIN(et non FIDUCIAL PRIVATE SECURITE, comme indiqué dans le jugement), représentée par son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel GUIZARD, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Représentée par Me Sébastien-pierre TOMI, avocat au barreau de LYON, toque : 706 et par Me Olivier VOLPE, avocat plaidant, au barreau de LYON,

INTIMÉ :

Monsieur [D] [O] [P]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Olivier BICHET, avocat au barreau de PARIS, toque : B403

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame LAGARDE Christine, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Paule ALZEARI, présidente

Eric LEGRIS, président

Christine LAGARDE, conseillère

Greffière lors des débats : Madame Sophie CAPITAINE

ARRÊT :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile

- signé par Marie-Paule ALZEARI, présidente et par Sophie CAPITAINE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE :

M. [D] [O] [P] a été engagé en 2001 en qualité d'agent de Sécurité.

ll a toujours travaillé sur le même site « PANZANI » situé à [Localité 4].

Son contrat de travail a fait l'objet de plusieurs transferts dans le cadre de changements de prestataires en charge de l'établissement sur lequel il était affecté.

Le 04 février 2021, la société Fiducial Sécurité Humaine lui notifié que son contrat est transféré à compter du 1er mars 2021 à la société Fiducial Private Security.

Estimant que cette dernière n'avait pas maintenu l'indemnité de transport forfaitaire qui lui était allouée jusqu'alors, M. [P] a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes de Paris par requête réceptionnée le 25 juillet 2023, aux fins de voir condamner son employeur à lui payer la somme de 7.000 euros à titre de « primes+indemnité de déplacement mars 2021 à ce jour ».

Par ordonnance de référé contradictoire rendue le 30 août 2023, le conseil de prud'hommes a :

- ordonné à la Société de verser à M. [P] la somme de 2 320 euros à titre de rappel de l'indemnité de déplacement et de lui remettre les bulletins de paye afférents ;

- laissé les dépens à la charge de la Société ;

- a dit n'y avoir lieu à référé pour le surplus des demandes.

Le conseil de prud'hommes a estimé que « Il est établi que M. [P] avait convenu avec ses employeurs successifs du règlement d'une somme mensuelle de quatre vingt euros (80 €) pour le dédommager de l'éloignement de son domicile de son lieu de travail ».

La société Fiducial Private Security a interjeté appel de la décision le 28 septembre 2023.

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par conclusions transmises par RPVA le 07 novembre 2023, la société Fiducial Private Security, demande à la cour de :

« REFORMER l'Ordonnance de Référé du Conseil de Prud'hommes de PARIS du 30 août 2023

Et, statuant à nouveau :

A TITRE LIMINAIRE, SUR LA NATURE DE LA DEMANDE FORMULEE PAR MONSIEUR [P]

JUGER que Monsieur [P] formule une demande au titre d'une indemnité de déplacement et non au titre d'une indemnité de transport,

DEBOUTER Monsieur [P] de sa demande

A TITRE PRINCIPAL, SUR L'INCOMPETENCE DE LA FORMATION DES REFERES

JUGER qu'il existe une contestation sérieuse,

JUGER l'absence d'urgence,

JUGER l'absence de dommage imminent et de trouble manifestement illicite,

JUGER la carence probatoire de Monsieur [P],

DECLARER, par conséquent, la formation de Référé incompétente pour statuer sur les demandes de Monsieur [P],

RENVOYER celui-ci à mieux se pourvoir devant la Juridiction compétente,

AU SUBSIDIAIRE, SUR LE DEBOUTE DE LA DEMANDE DE MONSIEUR [P]

JUGER que Monsieur [P] ne justifie pas de ses demandes en droit et en fait,

JUGER que les contrats de travail de Monsieur [P] ne prévoyaient pas le remboursement d'une indemnité de déplacement,

JUGER que Monsieur [P] ne justifie pas de frais de déplacement non remboursés,

JUGER que Monsieur [P] ne justifie pas avoir adressé à la société FIDUCIAL PRIVATE SECURITY des justificatifs de frais de transports en commun qu'il aurait engagés,

DEBOUTER Monsieur [P] de sa demande,

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER Monsieur [P] à restituer les sommes perçues,

DEBOUTER Monsieur [P] de l'intégralité de ses demandes,

CONDAMNER Monsieur [P] à verser à la société FIDUCIAL PRIVATE SECURITY la somme de 2.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNER le même aux entiers dépens de l'instance ».

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 février 2024.

Par conclusions en intervention volontaire de la société Fiducial Securite Humaine venant aux droits de la société Fiducial Private Security, transmises par RPVA le 4 mars 2024, demande à la cour de :

« Vu l'article 802 du CPC,

DONNER ACTE à la société FIDUCIAL SECURITE HUMAINE venant aux droits de la société FIDUCIAL PRIVATE SECURITE par suite de dissolution, de son intervention volontaire et ce sous la constitution de la SELARL [T] ET ASSOCIES, représentée par Maître [Y] [T], lequel se constitue et occupera pour la susnommée dans la présente instance.

DECLARER l'intervention volontaire recevoir.

La société FIDUCIAL SECURITE HUMAINE sollicite de la Cour de céans de :

REFORMER l'Ordonnance de Référé du Conseil de Prud'hommes de PARIS du 30 août 2023

Et, statuant à nouveau :

A TITRE LIMINAIRE, SUR LA NATURE DE LA DEMANDE FORMULEE PAR MONSIEUR [P]

JUGER que Monsieur [P] formule une demande au titre d'une indemnité de déplacement et non au titre d'une indemnité de transport,

DEBOUTER Monsieur [P] de sa demande

A TITRE PRINCIPAL, SUR L'INCOMPETENCE DE LA FORMATION DES REFERES

JUGER qu'il existe une contestation sérieuse,

JUGER l'absence d'urgence,

JUGER l'absence de dommage imminent et de trouble manifestement illicite,

JUGER la carence probatoire de Monsieur [P],

DECLARER, par conséquent, la formation de Référé incompétente pour statuer sur les demandes de Monsieur [P],

RENVOYER celui-ci à mieux se pourvoir devant la Juridiction compétente,

AU SUBSIDIAIRE, SUR LE DEBOUTE DE LA DEMANDE DE MONSIEUR [P]

JUGER que Monsieur [P] ne justifie pas de ses demandes en droit et en fait,

JUGER que les contrats de travail de Monsieur [P] ne prévoyaient pas le remboursement d'une indemnité de déplacement,

JUGER que Monsieur [P] ne justifie pas de frais de déplacement non remboursés,

JUGER que Monsieur [P] ne justifie pas avoir adressé à la société FIDUCIAL PRIVATE SECURITY devenue FIDUCIAL SECURITE HUMAINE des justificatifs de frais de transports en commun qu'il aurait engagés,

DEBOUTER Monsieur [P] de sa demande,

EN TOUT ETAT DE CAUSE

CONDAMNER Monsieur [P] à restituer les sommes perçues,

DEBOUTER Monsieur [P] de l'intégralité de ses demandes,

CONDAMNER Monsieur [P] à verser à la société FIDUCIAL SECURITE HUMAINE venant aux droits de la société FIDUCIAL PRIVATE SECURITY la somme de 2.000,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNER le même aux entiers dépens de l'instance ».

M. [P] a constitué avocat mais n'a pas conclu.

Pour un plus ample exposé des faits de la cause et des prétentions de l'appelant, il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En application de l'article 472 du code de procédure civile, si l'intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés.

A titre liminaire, il n'y a pas lieu de répondre aux demandes tendant voir « juger » qui ne constituent pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions au sens des articles 4 et 768 du code de procédure civile.

Sur l'intervention volontaire de la société Fiducial Sécurité Humaine venant aux droits de la société Fiducial Private Security :

Les conclusions d'intervention volontaire de la société Fiducial Sécurité Humaine signifiées postérieurement à la clôture sont recevables pour respecter les conditions de l'article 802 du code de procédure civile.

Il ressort des pièces produites aux débats, s'agissant des Kbis et de la publication aux Affiches Parisiennes, que la société Fiducial Sécurité Humaine est venue aux droits de la société Fiducial Private Security (ci-après indifféremment la 'Société') par suite de dissolution, de sorte qu'il y a lieu de la recevoir en son intervention volontaire.

Sur les sommes sollicitées par M. [P] :

La Société fait valoir que :

- aux termes de ses différents contrats et avenants, il n'était prévu aucune indemnité de déplacement ;

- les frais de transports engagés par un salarié et une indemnité de déplacement sont deux notions différentes : les frais de transports constituent, un remboursement sur justificatifs des frais engagés par l'utilisation des transports en commun par le salarié pour se rendre de son domicile à son lieu de travail, et l'indemnité de déplacement est versée par l'employeur en remboursement des frais engagés par le salarié pour un déplacement professionnel ;

- seule une indemnité de transport figure sur les bulletins de paye et n'a pas de nature salariale ;

- M. [P] ne justifie pas de la réalité du versement d'une indemnité de déplacement, se contentant de produire 9 bulletins de paie sur 266 qui mentionnent uniquement une participation de l'employeur aux frais de transport et ne s'explique pas sur la somme de 7.000 euros demandée ;

- elle lui a remboursé ses frais de transport lorsqu'il fournissait un justificatif et a cessé sa prise en charge lorsque M. [P] a cessé de lui adresser des justificatifs ;

- le conseil de prud'hommes ne pouvait considérer que l'indemnité de transport constituait un avantage acquis.

Sur ce

La cour relève que M. [P] sollicitait devant le conseil de prud'hommes « prime(s)+indemnité de déplacement mars 2021 à ce jour  : 7 000 euros ».

Il est cependant fait état dans l'exposé des faits de ce qu'il a été alloué à M. [P] une indemnité mensuelle de transport de 80 euros fixée forfaitairement et sans exigence d'une justification de frais.

En tout état de cause, s'il n'appartient pas à la juridiction des référés de qualifier l'indemnité de 80 euros, il lui appartient d'apprécier si les demandes de M. [P] relèvent des pouvoirs du juge des référés.

En réponse aux conclusions de la Société aux termes desquelles notamment il est fait grief au conseil de prud'hommes de ne pas s'être prononcé sur la compétence de la juridiction des référés, force est toutefois de constater que les demandes telles qu'elles étaient formulées par M. [P] relevaient bien de la compétence de la juridiction des référés, le juge des référés devant ensuite apprécier si les demandes relevaient ou non de son pouvoir pour faire droit aux demandes.

Il convient donc de rappeler les dispositions applicables.

Ainsi aux termes de l'article R. 1455-5 code du travail, « dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend. »

Selon l'article R. 1456-6 du code du travail, « la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite. »

Enfin, en application de l'article R. 1455-7 du même code, « dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. »

Les demandes financières, telles qu'elles sont formulées en exécution d'un contrat de travail par M. [P] s'agissant d'un rappel de primes/indemnités en lien avec les transport seront donc examinées au regard de ces dispositions, en l'occurrence l'article R. 1455-7 précité.

En effet, en application des dispositions précitées, force est de considérer que les demandes en paiement de sommes dues au titre d'indemnités ou de frais de transport ne sauraient constituer une mesure au sens des dispositions de l'article R. 1455-5 du code du travail.

S'agissant de l'article R. 1455-6 du code du travail, force est de constater qu'il n'est ni justifié, ni d'ailleurs allégué, d'un trouble manifestement illicite ou de la survenance d'un dommage imminent, s'agissant de l'ensemble des demandes présentées.

Enfin, sur le fondement des dispositions de l'article R. 1455-7 du code du travail, il doit être rappelé que la formation de référé peut seulement accorder une provision au créancier dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable.

S'il doit être observé, qu'en première instance, M. [P] n'a pas formulé ses demandes en paiement à titre provisionnel, cette absence de mention n'est pas suffisante pour faire obstacle à l'étude du bien-fondé de ses demandes, qui seront donc appréciées au visa de l'article R. 1455-7, peu important encore que le conseil de prud'hommes n'ait pas condamné à titre provisionnel.

Il ressort de la lecture des pièces contractuelles, contrat de travail et avenant, qu'il n'est pas spécifié de prime de transport ou d'indemnité de transport spécifique et forfaitaire qui serait allouée au salarié.

Si des fiches de paye font apparaître la mention « indemnité de transport », pour des montants variant sur l'ensemble de la période de 72,41 euros en décembre 2001 à 80 euros en 2021, force est de constater cependant que les éléments apportés aux débats en cause d'appel ne permettent pas d'établir que cette indemnité a été allouée sans justificatif, et qu'elle correspond à un avantage acquis à titre individuel que la Société ne pouvait remettre en cause.

Dès lors, M. [P] sur lequel pèse la charge de la preuve n'apporte pas d'éléments suffisants de nature à pouvoir caractériser une obligation non sérieusement contestable, de sorte que sa demande ne pouvait utilement aboutir devant le juge des référés.

L'ordonnance entreprise mérite infirmation.

Sur la demande de remboursement :

Il n'y a pas lieu d'ordonner le remboursement à la Société du montant des condamnations prononcées en première instance lequel est de droit en cas d'infirmation de la décision dont il est fait appel.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

M. [P], qui succombe doit être condamné aux dépens de la procédure d'appel et de première instance.

Aucune raison d'équité ne commande cependant l'application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la Société.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

INFIRME l'ordonnance de référé ;

Statuant à nouveau et ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à référé sur les demandes de M. [D] [O] [P] ;

DIT n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée à l'ordonnance déférée à la cour ;

CONDAMNE M. [D] [O] [P] aux dépens de la procédure d'appel et de première instance ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 23/06225
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;23.06225 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award