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02/05/2024 | FRANCE | N°22/19435

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 02 mai 2024, 22/19435


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 02 MAI 2024



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19435 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGWYH



Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Octobre 2022 - tribunal de commerce de Paris - 6ème chambre - RG n° 2021002025





APPELANTE



S.A.S. PHOTONIS TECHNOLOGIES

[Adresse

1]

[Localité 2]

N°SIRET : B 533.819.074

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Me Xavier DE RYCK de...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 02 MAI 2024

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/19435 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGWYH

Décision déférée à la Cour : Jugement du 06 Octobre 2022 - tribunal de commerce de Paris - 6ème chambre - RG n° 2021002025

APPELANTE

S.A.S. PHOTONIS TECHNOLOGIES

[Adresse 1]

[Localité 2]

N°SIRET : B 533.819.074

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Xavier DE RYCK de l'AARPI A.S.A. - AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de Paris, toque : R018

INTIMÉE

S.A. BANQUE PALATINE

[Adresse 4]

[Localité 3]

N°SIRET : 542.104.245

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Me Nicolas BAUCH-LABESSE de l'AARPI TARDIEU GALTIER LAURENT DARMON associés, avocat au barreau de PARIS, toque : E0022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 Mars 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Laurence CHAINTRON,conseillère.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Marc BAILLY, président de chambre

MME Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère

MME Laurence CHAINTRON, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marc BAILLY, président de chambre, et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

* * * * *

La société Photonis Technologies, exerçant dans le domaine de la technologie de vision nocturne, était titulaire de comptes bancaires tenus dans les livres de la Banque Palatine, dont un en euros portant le n° 1350593V001 et un en dollars américains portant le n° 1350593N800.

Une opération de SWAP de devises et de taux d'intérêts USD-EUR a été organisée par la société Photonis Technologies avec la Banque Palatine et les banques Société Générale et Arkea dans lesquelles elle détenait des comptes.

A l'issue de cette opération, la banque Arkea a facturé à la société Photonis Technologies des agios de découvert d'un montant de 16 736,75 euros.

Par ailleurs, indépendamment de cette opération, la Banque Palatine a facturé à la société Photonis Technologies dans le cadre de la gestion du compte ouvert en USD :

- une somme de 997,59 USD à titre d'intérêts débiteurs,

- une somme de 45 425,95 USD à titre de pénalité de plus fort découvert en raison d'une position débitrice du compte aux mois de juillet, août et septembre 2019.

Par exploit d'huissier du 28 décembre 2020 délivré à personne habilitée suivant article 658 du code de procédure civile, la société Photonis Technologies SAS a fait assigner la Banque Palatine devant le tribunal de commerce de Paris afin, notamment, de la voir condamner à lui payer les sommes de 16 736,76 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 18 octobre 2019 et 45 425,95 USD ou sa contre-valeur en euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2020.

Par jugement rendu le 6 octobre 2022, le tribunal de commerce de Paris a :

- débouté la SAS Photonis Technologies de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

- condamné la société Photonis Technologies à payer à la SA Banque Palatine la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS Photonis Technologies aux dépens de l'instance dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 70,86 euros dont 11,60 euros de TVA.

Par déclaration du 17 novembre 2022, la société Photonis Technologies a relevé appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 16 février 2023, la société Photonis Technologies demande, au visa des articles 1231, 1231-1, 1235-1 du code civil, à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de remboursement de la pénalité de 45 425,95 USD,

Statuant à nouveau,

- condamner la Banque Palatine à lui payer la somme principale de 45 425,95 USD ou sa contre-valeur en euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 2 juillet 2020 date de la mise en demeure,

- condamner la Banque Palatine au paiement d'une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- dire que les intérêts courus pour une année entière seront capitalisés et produiront intérêts au même taux ;

- condamner la Banque Palatine aux entiers frais et dépens.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 11 mai 2023, la société Banque Palatine demande à la cour de :

- confirmer purement et simplement le jugement dont appel, rendu par le tribunal de commerce de Paris le 10 octobre 2022 portant le RG2021002025,

Subsidiairement,

- débouter la société Photonis Technologies de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions à son encontre,

En tout état de cause,

- condamner la société Photonis Technologies à lui payer la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux dépens de l'instance.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 février 2024 et l'audience fixée au 7 mars 2024.

MOTIFS

A titre liminaire, il y a lieu de relever que la société Photonis Technologies a renoncé, en cause d'appel, à sa demande de remboursement des agios facturés par la banque Arkea. Le présent litige est par conséquent circonscrit à sa demande de remboursement des pénalités de dépassement de découvert sur le compte n° 1350593N800 à hauteur de la somme de 45 425,95 USD ou de sa contre-valeur en euros.

Sur la demande de remboursement des pénalités de plus fort découvert

La société Photonis Technologies critique le jugement déféré en ce que :

- il a considéré que la pénalité de dépassement concernait l'opération effectuée en septembre 2018, objet de l'autre partie du contentieux ayant opposé les parties, alors qu'il s'agissait d'un litige totalement différent, la pénalité de dépassement ayant été appliquée sur des découverts survenus entre juillet et septembre 2019 à hauteur de la somme totale de 3 950 082 USD sur laquelle la banque a appliqué une pénalité au taux de 1,15 %, soit la somme de 45 425,95 USD,

- il a estimé que malgré l'existence d'une clause d'unicité de comptes, la banque pouvait appliquer des intérêts différenciés sur chacun des comptes considérés,

- il n'a ni examiné, ni répondu à sa demande de modération de la pénalité dont elle invoquait le caractère manifestement excessif.

En premier lieu, elle rappelle que la convention de gestion de comptes courants liant la Banque Palatine et la société Photonis prévoyait en son article 1.3 une clause d'unité de comptes et que c'est à tort que la Banque Palatine a prélevé sur son compte des intérêts débiteurs et une pénalité de dépassement sur le plus fort découvert, dès lors que le solde global était créditeur, et donc qu'aucun découvert ne pouvait être constaté. Elle relève que, même à supposer l'absence de clause d'unicité de comptes, la banque a manqué à son devoir d'information en ne l'informant pas de l'existence d'un découvert sur son compte USD et des conséquences du défaut de provision. Elle souligne que l'article 7.1 de la convention ne précise pas si la position débitrice doit concerner le compte unique ou les sous-comptes et qu'à défaut de précision, il faut considérer que la commission et la pénalité ne s'appliquent que si le compte unique se trouve en position débitrice ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

En second lieu, elle conteste le principe de la pénalité au motif que la Banque Palatine n'a jamais justifié de la méthode de calcul, ni du fondement contractuel de la pénalité de dépassement de 45 425,95 USD, se bornant à faire valoir l'absence d'une convention de compensation qui lui aurait permis de couvrir le découvert du compte USD avec le solde bénéficiaire du compte EUR.

En troisième lieu, elle conteste le montant de la pénalité et estime que celle-ci doit être calculée au prorata temporis au motif que rien n'indique dans les conditions tarifaires que la pénalité se calcule de la même manière selon que le découvert dure tout le mois ou seulement quelques jours.

En quatrième lieu, elle estime que cette pénalité caractérise une clause pénale manifestement excessive qui ne correspond pas au préjudice subi par la banque déjà réparé par l'application d'intérêts débiteurs.

En réplique, la société Banque Palatine sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de restitution des sommes perçues en application de la commission de pénalité de plus fort découvert stipulée à l'article 7.1 de la convention de compte, au motif que la société Photonis Technologies ne pouvait se prévaloir du principe d'unité de compte puisque celui-ci, conformément aux termes de l'article 1.3. de la convention de compte ne fait pas obstacle à l'intérieur du compte unique, à l'application d'intérêts différenciés sur chacun des comptes considérés, et par conséquent ne prévoit pas de compensation entre les comptes pour le calcul du solde en fin de chaque mois.

En premier lieu, la banque soutient que l'article 7.1 de la convention prévoyait la perception d'une commission sur le plus fort découvert et que l'appréciation de l'existence d'un découvert s'applique compte par compte, et non en considération de l'ensemble des comptes, ou d'un seul ou plusieurs sous-comptes le cas échéant, en l'absence de stipulation en ce sens.

En second lieu, elle souligne que les conditions générales applicables aux comptes professionnels, dont relèvent les comptes EUR et USD par renvoi des conventions de comptes souscrites par la société Photonis Technologies, incluent une clause d'unicité de comptes qui prévoyait la faculté pour la banque de refuser de payer dès lors que le solde des comptes détenus se révélait insuffisant et précisait que ce principe d'unité de compte ne faisait pas obstacle, à l'intérieur du compte unique, à l'application d'intérêts différenciés sur chacun des comptes considérés. Elle en déduit qu'elle n'avait, ni la possibilité, ni l'obligation d'opérer une compensation des soldes de chacun des comptes détenus par la société appelante et rappelle qu'elle n'était pas tenue de s'immiscer dans ses affaires.

En troisième lieu, elle précise que la commission de pénalité de plus fort découvert est applicable dès lors que le découvert en compte intervient ponctuellement ou en cas de dépassement autorisé, en l'espèce, le compte n° 350593N800 USD détenu par la société Photonis Technologies dans ses livres a enregistré plusieurs opérations ayant conduit à des soldes débiteurs de juillet à septembre 2019, le taux applicable à cette commission mensuelle était de 1,15 % calculée sur la base du plus fort découvert déterminé mensuellement et aucune autorisation de découvert n'avait été consentie sur le compte USD.

Enfin, elle estime que la clause selon laquelle la banque se verra verser un pourcentage du plus fort découvert mensuellement, sur des opérations autorisées, et partant qui ne résultent pas d'une inexécution, n'est pas une clause pénale au sens de l'article 1235-1 du code civil. La commission apparaît comme une modalité de l'exécution de la convention des parties et non de son inexécution. De surcroît, elle relève que la société Photonis Technologies n'établit pas son caractère manifestement excessif.

Il ressort des relevés du compte n° 1350593N800 en dollars américains de la société Photonis Technologies produits par la banque (pièce n° 3) que des soldes débiteurs ont été enregistrés sur ce compte :

- au mois de juillet 2019 à hauteur de la somme de 2 470 030 USD,

- au mois d'août 2019 à hauteur de la somme de 740 026 USD,

- au mois de septembre 2019 à hauteur de la somme de 740 026 USD.

Ces soldes débiteurs, dont la société Photonis Technologies ne conteste pas les montants, servent de base aux calculs de la pénalité de plus fort découvert litigieuse revendiquée par la banque.

Les parties divergent, en l'espèce, sur l'interprétation des articles 1.3 et 7.1 de la convention de gestion de comptes courants dont elles ne contestent pas l'application.

L'article 1.3 intitulé 'UNITÉ DE COMPTE'stipule que :

'A la demande du Client ou pour certaines opérations, il pourra être ouvert des comptes différents, des sous-comptes ou comptes à rubrique, en euro ou en d'autres monnaies.

Ces comptes, comptes à terme, sous-comptes ou comptes à rubriques seront considérés comme des sous-ensembles du compte, bénéficiant d'une simple autonomie comptable. Ils formeront ensemble, à tout moment, un tout indivisible, quelles que soient leurs modalités de fonctionnement.

(...)

En application de ce principe, la Banque est en droit de refuser d'effectuer un paiement dès lors que le solde fusionné de tous ces comptes, comptes à terme, sous-comptes ou comptes à rubriques se révèle insuffisant quelle que soit la position de l'un des comptes considérés.

Ce principe d'unité de compte ne fait pas obstacle, à l'intérieur du compte unique, à l'application d'intérêts différenciés sur chacun des comptes considérés.

S'agissant des comptes en devises, la situation du compte courant dans son ensemble s'appréciera en euros.

Les opérations en monnaies étrangères seront déterminées à cet effet d'après le cours de la (des) devise(s) concernée(s) sur le marché des changes de [Localité 5] au jour de cette appréciation.

Toute opération portée au débit ou au crédit d'un compte sera convertie de plein droit, sauf convention contraire, dans la monnaie de tenue de compte.'

L'article 7.1 de la convention intitulé 'SOLDE DÉBITEUR EN L'ABSENCE DE TOUTE AUTORISATION' stipule que :

'Toute position débitrice occasionnelle ou tout dépassement du découvert autorisé donne lieu à la perception d'une commission et d'une pénalité précisées dans les Conditions Tarifaires. La Banque percevra également une commission sur le plus fort découvert.'

Il ressort des dispositions de l'article 1192 du code civil qu'on ne peut interpréter les clauses claires et précises d'un contrat à peine de dénaturation.

En l'espèce, la société Photonis Technologies se prévaut vainement du principe d'unité de compte, dès lors qu'en application de l'article1.3 précité de la convention de gestion de comptes courants, il est clairement précisé que ce principe 'ne fait pas obstacle, à l'intérieur du compte unique, à l'application d'intérêts différenciés sur chacun des comptes considérés.'

L'appréciation de l'existence d'un découvert s'applique donc compte par compte, et non en considération de l'ensemble des comptes, ou d'un seul ou plusieurs sous-comptes.

Aucune compensation entre les comptes en euros n° 1350593V001 et en dollars américains n° 1350593N800 de la société Photonis Technologies pour le calcul du solde en fin de chaque mois n'a été contractuellement prévue.

Par ailleurs, il est expressément stipulé à l'article 7. 1 précité qu'en cas de solde débiteur non autorisé, ce qui est le cas en l'espèce, une pénalité correspondant à l'utilisation d'un découvert non autorisé sera facturée au client.

Les dispositions contractuelles précitées doivent donc recevoir application.

Le montant de la pénalité de 1,15 % appliquée par la banque au montant des plus forts découverts non autorisés enregistrés au mois de juillet, août et septembre 2019, à hauteur de la somme totale de 3 950 082 USD (2 470 030 USD + 740 026 USD + 740 026 USD x 1,15 %) n'est pas contesté, soit une somme réclamée de 45 425,95 USD.

La société Photonis Technologies soutient vainement que la banque a manqué à son devoir d'information à son égard, dès lors que le devoir d'information auquel elle fait référence est prévu au premier paragraphe de l'article 7.1 précité qui concerne les agios dus par la cliente en cas de solde débiteur non autorisé et renvoie pour ces modalités à l'article 4.2.6 de la convention relatif à l'émission d'un chèque sans provision.

Les parties divergent ensuite sur la qualification de la clause afférente à la commission de plus fort découvert, la société Photonis Technologies soutenant qu'il s'agit d'une clause pénale manifestement excessive, alors que la banque soutient que la commission apparaît comme une modalité d'exécution de la convention des parties et non de son inexécution, de sorte qu'il ne s'agit pas d'une clause pénale et qu'en tout état de cause, elle n'est pas excessive.

Il ressort des dispositions de l'article 1231-5 du code civil que :

'Lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l'exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Lorsque l'engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d'office, à proportion de l'intérêt que l'exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l'application de l'alinéa précédent.

Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.

Sauf inexécution définitive, la pénalité n'est encourue que lorsque le débiteur est mis en demeure.'

En application de ces dispositions, il est de jurisprudence constante que constitue une clause pénale la clause d'un contrat par laquelle les parties évaluent forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donne lieu l'inexécution de l'obligation contractée (Civ. 1ère, 10 oct. 1995, n° 94-11.209).

En l'espèce, il est précisé au premier paragraphe de l'article 7 de la convention de gestion de comptes courants intitulé 'POSITION DÉBITRICE DU COMPTE' que :

'Le Client doit s'assurer que son compte est suffisamment provisionné avant d'effectuer toute opération entraînant un paiement par le débit de son compte. Toutes les opérations s'inscrivant au débit du compte ne sont effectuées, sauf, convention préalable, que dans la limite du solde comptable effectivement disponible.'

Il en résulte que la clause précitée prévue à l'article 7.1 selon laquelle toute position débitrice occasionnelle en cas de solde débiteur non autorisé donne lieu à la perception 'd'une commission et d'une pénalité précisées dans les Conditions Tarifaires' constitue bien une clause par laquelle les parties ont évalué forfaitairement et d'avance l'indemnité à laquelle donnait lieu l'inexécution de l'obligation contractée par la cliente qui était avant tout de s'assurer, avant d'effectuer une opération entraînant un paiement par le débit de son compte, que ce compte était suffisamment provisionné.

Il y a donc lieu de qualifier la clause litigieuse de clause pénale.

Or, comme le relève pertinemment la société Photonis Technologies, cette clause ne contient aucune précision quant à la durée du découvert pris en considération et n'opère aucune distinction selon la durée de ce découvert.

En l'espèce la société Photonis Technologies indique, sans être contredite sur ce point, que son compte n° 1350593N800 en dollars américains n'a été effectivement à découvert que :

- pendant un jour le 31 juillet 2019,

- deux jours les 30 et 31 août 2019,

- deux jours les 1er et 2 septembre 2019.

Il en résulte que le montant de la pénalité convenue de 1,15 % appliquée au plus fort découvert est manifestement excessif au regard de la durée effective du découvert non autorisé de 5 jours sur une durée de trois mois et donc du préjudice réellement subi par la banque.

Cette pénalité sera par conséquent réduite à la contre-valeur en euros de la somme de 5 000 dollars américains.

Il en résulte que la société Banque Palatine a indûment prélevé la somme de 45 425,95 USD.

Elle sera donc condamnée à rembourser à la société Photonis Technologies la contre-valeur en euros de la somme de 40 425,95 USD (45 425,95 USD - 5 000 USD) avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Sur la capitalisation des intérêts

Il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1343-2 du code civil.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'intimée sera donc condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel, la décision déférée étant infirmée de ce chef.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, l'intimée sera condamnée à payer la somme de 2 000 euros à la société Photonis Technologies.

PAR CES MOTIFS

INFIRME le jugement du tribunal de commerce de Paris du 6 octobre 2022 ;

Statuant à nouveau des chefs de la décision infirmée et y ajoutant,

CONDAMNE la société Banque Palatine à payer à la société Photonis Technologies la contre-valeur en euros de la somme de 40 425,95 dollars américains (USD) avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les termes de l'article 1343-2 du code civil ;

CONDAMNE la société Banque Palatine à payer à la société Photonis Technologies la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Banque Palatine aux dépens de première instance et d'appel ;

REJETTE toute autre demande.

* * * * *

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 22/19435
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;22.19435 ?
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