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02/05/2024 | FRANCE | N°22/07373

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 02 mai 2024, 22/07373


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 6



ARRET DU 02 MAI 2024



(n° , 14 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/07373 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFUHC



Décisions déférées à la Cour : Jugement mixte du 16 novembre 2018 et Jugement du 19 Novembre 2021 - tribunal judiciaire de Paris - 9ème chambre 2ème section - RG n° 15/06753





APPELANTE



Madame [G] [L]

née le

[Date naissance 5] 1954 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Stéphane FERTIER de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de Paris, toque : L0075





INT...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 02 MAI 2024

(n° , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/07373 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFUHC

Décisions déférées à la Cour : Jugement mixte du 16 novembre 2018 et Jugement du 19 Novembre 2021 - tribunal judiciaire de Paris - 9ème chambre 2ème section - RG n° 15/06753

APPELANTE

Madame [G] [L]

née le [Date naissance 5] 1954 à [Localité 7]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Stéphane FERTIER de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de Paris, toque : L0075

INTIMÉE

LA CAISSE DE CREDIT MUTUEL DES BOUCLES DE SEINE OUEST PARISIEN

[Adresse 3]

[Localité 6]

N° SIRET : 785 304 023

agissant sur poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Isabelle SIMONNEAU de la SELEURL IS AVOCAT, avocat au barreau de Paris, toque : D0578

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Février 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Marc BAILLY, président de chambre

M. Vincent BRAUD, président

Madame Laurence CHAINTRON, conseillère chargée du rapport

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

* * * * *

Par contrat du 15 novembre 2005, Mme [G] [L], qui exerce la profession d'avocat, a ouvert dans les livres de la Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien un compte professionnel sous le n° [XXXXXXXXXX01].

Par convention du 23 juin 2006, la Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien a consenti à Mme [G] [L] un découvert en compte courant d'un montant de 10 000 euros à durée indéterminée au taux de 8,10 % l'an à cette date, variable en fonction de l'évolution de son taux de base.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 février 2009, la Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien a accepté à titre exceptionnel et compte tenu d'un décalage volontaire de la facturation des honoraires de Mme [L] du dernier trimestre 2008, de mettre en place 'une autorisation provisoire supplémentaire de 20 000 euros' sur le compte n° [XXXXXXXXXX01] qui bénéficiait ainsi d'une autorisation débitrice de 30 000 euros jusqu'au 31 mars 2009 pour retrouver ensuite un fonctionnement sur des bases créditrices.

A compter de l'expiration du préavis de soixante jours, soit au 9 avril 2009, compte tenu de la date de réception de la lettre recommandée du 5 février 2009, le compte de Mme [G] [L] est redevenu créditeur.

A compter du 4 novembre 2009, le compte de Mme [G] [L] est redevenu débiteur.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 juin 2010 et compte tenu de l'enregistrement de ce nouveau découvert en compte, la Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien a prononcé une seconde fois la dénonciation des concours, ouvrant un nouveau préavis de soixante jours expirant le 11 août 2010. Au 13 août 2010, le solde du compte est redevenu créditeur.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 15 juillet 2011, la Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien a dénoncé les concours octroyés à Mme [G] [L], ouvrant un délai de préavis jusqu'au 15 septembre 2011.

Par lettres recommandées avec accusé de réception des 10 octobre 2011 et 19 décembre 2014, la Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien a vainement mis en demeure Mme [L] d'avoir à lui payer notamment la somme de 20 956,50 euros au titre du solde débiteur du compte ouvert sous le numéro [XXXXXXXXXX01].

Par acte introductif d'instance des 27 février et 11 mars 2015, la Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien a fait assigner Mme [G] [L] devant le tribunal de grande instance de Paris afin de la voir, notamment, condamner à lui payer la somme de 20 956,50 euros, majorée des intérêts au taux du plafond Banque de France minoré de 0,05 %, soit 13,34 %, du 1er septembre 2014 au parfait paiement, au titre du solde débiteur du compte ouvert sous le numéro [XXXXXXXXXX01].

Par ordonnance du 16 mars 2015, concomitamment à la délivrance de l'assignation, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris a autorisé une inscription d'hypothèque judiciaire sur les biens appartenant à Mme [L] situés à Deauville.

Par jugement mixte du 16 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Paris a :

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des demandes de la société Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien fondée sur la prescription soulevée par Mme [G] [L] ;

- rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des demandes de Mme [G] [L] fondée sur la prescription soulevée par la société Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien ;

- enjoint à la société Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien de reconstituer le solde du compte n° [XXXXXXXXXX01] en substituant l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel, en supprimant les dates de valeur pour les opérations autres que celles relatives à l'encaissement des chèques, en excluant tous frais « commissions d'intervention », « facture», « relance impayé », « frais info relance », « frais lettre d'information chèque sans provision »;

- réservé les dépens et les demandes formées au titre des frais irrépétibles ;

- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du vendredi 29 mars 2019 à 09h30, pour production de ce décompte avant le vendredi 25 janvier 2019 et observations éventuelles des parties par voie de conclusions, au nouveau Tribunal de PARIS ' [Adresse 9].

Par déclaration du 26 juillet 2019, la société Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien a interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance du 17 décembre 2019, le magistrat en charge de la mise en état de cette cour a:

- débouté la Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien de sa demande tendant à voir reconnaître l'absence de pouvoirs du magistrat désigné par le président de la chambre pour statuer sur l'irrecevabilité de l'appel dans le cadre d'une procédure soumise aux articles 905 et suivants du code de procédure civile ;

- déclaré irrecevable l'appel de la Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien;

- condamné la Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien à payer à Mme [G] [L] la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien aux dépens de l'appel qui seront recouvrés par Me Stéphane Fertier en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Ce magistrat a en effet considéré que :

'Il résulte des articles 455 alinéa 2 et 480 du code de procédure civile que le jugement ne statue que par ce qui est tranché dans son dispositif, que si les motifs éclairent nécessairement le dispositif dont ils sont le soutien, ils n'ont pas l'autorité de la chose jugée et ne tranchent pas une partie du principal.

En l'espèce, le dispositif du jugement n'a pas, préalablement à la demande d'établissement d'un décompte avant le prononcé de toute condamnation, déchu la banque de l'un quelconque de ses droits conventionnels de sorte qu'il n'a pas tranché, dans son dispositif une partie du principal au sens de l'article 544 du code de procédure civile ci-dessus rapporté.

En conséquence, c'est à juste titre que Mme [L] fait valoir que le jugement ne pouvait être immédiatement frappé d'appel qui doit être déclaré irrecevable.'

Par arrêt du 23 juillet 2020, cette cour saisie par requête aux fins de déféré de cette ordonnance a :

- confirmé l'ordonnance déférée ;

- condamné la Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien aux dépens du déféré qui seront recouvrés selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile ;

- condamné la Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien à payer à Mme [G] [L] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement rendu le 19 novembre 2021, le tribunal judiciaire de Paris a :

- accueilli l'exception d'incompétence soulevée par la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien quant à la demande de mainlevée de l'inscription d'hypothèque;

- condamné Mme [G] [L] à verser à la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien la somme de 12 523,86 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 février 2015, date de l'acte introductif d'instance ;

- laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;

- jugé n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire.

- débouté les parties du surplus de leur demande.

Le 21 avril 2022, le conseil de Mme [L] a remis à la banque un chèque d'un montant de 3 804,61 euros.

Par déclaration du 8 avril 2022, Mme [G] [L] a interjeté appel des deux jugements des 16 novembre 2018 et du 19 novembre 2021.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 27 décembre 2023, Mme [L] demande, au visa des articles 2224, 1131 et 1315 du code civil, 462 et 463 du code de procédure civile, 2003 et 2007 du code civil et L. l33-14, L. 131-1 et L. 133-2 du code monétaire et financier à la cour de:

En ce qui concerne le jugement du 16 novembre 2018

- réformer le jugement du 16 novembre 2018 en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription qu'elle opposait à la demande de la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien,

Et statuant à nouveau,

1) Déclarer la demande de la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien irrecevable en ses demandes parce que prescrite,

Consécutivement, débouter la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien de son appel incident comme dépourvu d'objet,

2) Subsidiairement,

- réformer le jugement du 16 novembre 2018 en ce qu'il a jugé que le calcul des intérêts n'avait pas à être fait en modifiant les dates de valeur relatives à l'encaissement des chèques,

Et statuant à nouveau,

- prononcer la nullité des intérêts appliqués d'après des dates de valeur sans cause pour les chèques à l'encaissement,

- ordonner en conséquence à la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien d'effectuer le calcul des intérêts au taux légal en supprimant les dates de valeurs y compris pour ce qui concerne les chèques à l'encaissement,

- dire l'appel incident de la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien irrecevable et en tout cas mal fondé,

L'en débouter, et en conséquence,

Confirmer le jugement

- en ce qu'il a jugé nuls les intérêts appliqués et les frais sans cause inscrits au débit du compte et consécutivement a ordonné à la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien de reconstituer le solde du compte en substituant l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel, en supprimant les dates de valeur pour les opérations autres que celles relatives à l'encaissement des chèques, en excluant tous frais « commissions d'intervention » « factures» « relance impayé» « frais info relance » « frais lettre d'information chèque sans provision »,

- en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription opposée par la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien à l 'exception de nullité opposée par elle,

- en ce qu'il a dit que le solde du compte éventuellement dû porterait intérêt au taux légal,

En ce qui concerne le jugement du 19 novembre 2021

Subsidiairement, et en tout état de cause, pour le cas où la cour ne ferait pas droit à la demande visée au 1) ci-dessus

- dire recevable et bien fondée la demande en rectification de l'omission de statuer sur la demande exprimée dans les conclusions de Mme [L] devant le tribunal, visant à voir déduire de la créance les sommes de 21,41 euros et 420,19 euros,

- dire en outre recevable et bien fondée la demande en rectification de l'erreur matérielle contenue au jugement consistant en une erreur de reprise de chiffre,

3) En conséquence déclarer que la créance de la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien est, après ces deux rectifications, - et avant déduction des opérations faites sans ordre ou contre ses ordres de 5 250,15 euros (20 956,50 euros - 8 091,09 euros- 6 832,11 euros - 341,55 euros - 420,19 euros - 21 ,41 euros = 5 250,15 euros) et non de 12 523,86 euros

Et, réformant la décision du tribunal,

- limiter la condamnation - avant déduction des opérations faites sans ordre ou contre ses ordres - à 5 250,15 euros (et non de 12 523,86 euros),

4) Subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour estimerait que cette question ne ressortit pas de la rectification d'erreur matérielle et de l'omission de statuer mais de l'erreur d'appréciation, réformer le jugement dont appel sur ce point et,

Statuant à nouveau,

- débouter la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien de toute demande au-delà de 5 250,15 euros en principal (avant déduction des opérations effectuées sans ordre ou contre ses ordres),

- réformer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande visant à voir déduire du solde les opérations faites par la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien sans ordre ou contre ses ordres,

Statuant à nouveau,

5) Ordonner la déduction du solde du compte -ci-dessus mentionné de 5 250,15 euros de la somme de 5 566,96 euros,

- débouter en conséquence la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien de toute demande au-delà du différentiel ci-dessus mentionné,

6) Réformer le jugement en ce qu'il a jugé que la somme à devoir, s'il y a, portera intérêt à compter de l'assignation,

- dire que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

- condamner en outre la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien à 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Stéphane Fertier sur son offre de droit.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 24 novembre 2023, la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien, demande au visa des articles 1103 et 1343-2 du code civil, des articles 544 et 905-2 du code de procédure civile, à la cour de :

A titre principal : sur le jugement du tribunal judiciaire du 16 novembre 2018

- infirmer le jugement mixte rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 16 novembre 2018 en ce qu'il a :

- 'Rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des demandes de Mme [G] [L] fondée sur la prescription soulevée par la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien ;

- Enjoint à la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien de reconstituer le solde du compte n° [XXXXXXXXXX01] en substituant l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel, en supprimant les dates de valeur pour les opérations autres que celles relatives à l'encaissement des chèques, en excluant tous frais « commissions d'intervention », « facture », « relance impayé », « frais info relance », « frais lettre d'information chèque sans provision » ;

- Fixé le taux légal applicable au solde débiteur du compte de Mme [G] [L]',

Confirmer ledit jugement en qu'il a :

- ' Rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des demandes de la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien fondée sur la prescription soulevée par Mme [G] [L]',

Y ajoutant :

- débouter Mme [G] [L] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Mme [G] [L] à payer à la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien la somme de 38 842,66 euros, majorée des intérêts au taux du plafond Banque de France minoré de 0,05 %, soit 13,34 %, du 21 septembre 2022 jusqu'au parfait paiement, au titre du solde débiteur du compte ouvert sous le numéro [XXXXXXXXXX01],

- condamner Mme [G] [L] au paiement de la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens,

A titre subsidiaire : sur le jugement du tribunal judiciaire du 19 novembre 2021

- confirmer le jugement du 19 novembre 2021 en ce qu'il a :

- 'Condamné Mme [G] [L] à verser à la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien la somme de 12 523,86 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 27 février 2015, date de l'acte introductif d'instance.

- Débouté les parties du surplus de leur demande',

- condamner Mme [G] [L] au paiement de la somme de 9 583,49 euros majorée des intérêts au taux légal du 16 septembre 2022 jusqu'au parfait paiement au titre du solde débiteur du compte numéro [XXXXXXXXXX01],

- débouter Mme [G] [L] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner Mme [G] [L] à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux dernières conclusions écrites déposées en application de l'article 455 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 janvier 2024 et l'affaire fixée à l'audience du 13 février 2024.

MOTIFS

Sur le jugement du 16 novembre 2018

Sur la recevabilité de l'action de la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien

Mme [L] soutient que le point de départ de la prescription de l'action en paiement de la banque doit être fixé à la date du 5 avril 2009, qui correspond au délai octroyé par la banque dans son courrier du 5 février 2009 au terme duquel la banque proposait la mise en place d'une autorisation débitrice complémentaire de 20 000 euros, sous réserve d'acceptation du client et, à défaut, dénonçait les concours octroyés avec effet dans les 60 jours.

La banque sollicite la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a déclaré recevable comme non prescrite son action en paiement. Elle soutient que le courrier adressé à Mme [L] le 5 février 2009 ne pouvait 'valoir, en soit, exigibilité du solde du compte courant professionnel, lequel a continué à fonctionner au-delà de cette date, notamment par des remises effectuées par Mme [L] .' Elle fait valoir que Mme [L] confond les effets de la dénonciation des concours et de la clôture du compte. Elle soutient que le délai quinquennal de prescription court à compter de l'expiration du délai de préavis de soixante jours notifiée par lettre du 15 juillet 2011, soit le 15 septembre 2011 et que dans la mesure où elle a assigné Mme [G] [L] en paiement du solde débiteur du compte par acte introductif d'instance des 27 février et 11 mars 2015, son action est recevable, comme non prescrite.

Il ressort des dispositions de l'article L. 110-4 du code de commerce que les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Il est constant que dans le cadre d'un crédit par découvert en compte, l'action en paiement du banquier se prescrit à la date à laquelle le solde débiteur du compte devient exigible.

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 15 juillet 2011, la banque a informé Mme [L] qu'elle dénonçait le concours à durée indéterminée qu'elle lui avait accordé, cette dénonciation prenant effet à l'expiration d'un délai de 60 jours à compter de la présentation de cette lettre (pièce de la banque n° 11).

Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 10 octobre 2011, la banque a rappelé à Mme [L] avoir dénoncé son compte courant par lettre du 15 juillet 2011 à l'expiration d'un délai de 60 jours et l'a mise en demeure de lui payer la somme de 20 956,50 euros au titre du solde débiteur non autorisé du compte (pièce de la banque n° 4).

Le point de départ du délai de prescription de l'action de la banque sera donc fixé au 10 octobre 2011, date de la mise en demeure de payer, de sorte que l'action en paiement initiée par assignation en date du 11 mars 2015 n'est pas prescrite.

Le jugement déféré sera par conséquent confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des demandes de la société Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien fondée sur la prescription soulevée par Mme [G] [L].

Sur la recevabilité des demandes de Mme [L] en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et des différents frais et commissions prélevés par la banque

Le jugement déféré a considéré que : 'En application des articles 64 et 71 du code de procédure civile, constitue une défense au fond, et non une demande reconventionnelle, tout moyen qui tend à faire rejeter comme non justifiée, après examen au fond du droit, la prétention de l'adversaire, sans recherche d'un autre avantage, même lorsqu'est invoquée l'existence d'un dommage, de sorte que la prescription est inopérante.'

Mme [L] sollicite la confirmation de ce jugement en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir soulevée par la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien tirée de la prescription de son action en nullité de la stipulation d'intérêts conventionnels et des différents frais prélevés par la banque pour défaut de stipulation contractuelle d'intérêts dans la convention d'ouverture de compte, de réception de relevés bancaires faisant figurer le taux effectif global (TEG) appliqué, des intérêts calculés d'après des dates de valeur illicites et des frais ou commissions prélevés par la banque. Elle soutient que ces intérêts et frais 'sans cause' doivent être annulés et 'réintégrés pour le calcul du solde définitif.'

Elle rappelle que l'exception de nullité est perpétuelle et que si l'exception de nullité est arguée en défense avant l'expiration du délai de prescription de l'action en nullité, elle n'est pas soumise à la restriction du défaut d'exécution.

Elle soutient, ensuite, que ses demandes s'analysent comme des défenses au fond sur lesquelles la prescription est inopérante et non comme une demande de restitution d'intérêts trop versés qui s'analyse comme une demande reconventionnelle assujettie à ce titre aux règles de prescription.

Elle estime que par courrier du 11 mars 2011, la banque a reconnu l'existence d'anomalies affectant le compte.

La banque sollicite l'infirmation du jugement déféré en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée de la prescription des demandes en nullité de Mme [L]. Elle relève que Mme [L] qui sollicite la nullité de la stipulation des intérêts pour défaut de mention du TEG, a introduit une demande en paiement des frais et des opérations effectuées sur son compte et en suppression des dates de valeur par conclusions signifiées par RPVA le 20 octobre 2015. Elle rappelle qu'il est de jurisprudence que la demande de restitution d'intérêts, de frais et de commissions indûment prélevés sur un compte par un établissement bancaire, qu'elle soit présentée par voie d'action ou de défense au fond, est soumise à la prescription édictée par l'article L.110-4 du code de commerce. Elle soutient que Mme [L] n'est pas recevable à soulever la nullité de la stipulation des intérêts perçus trimestriellement sur le compte courant et à introduire sa demande en paiement des frais prélevés depuis 2006 compte tenu de la prescription de son action et qu'elle n'est recevable à contester ces opérations qu'à compter du 20 octobre 2010 pour la somme de 1 228,88 euros. Elle en déduit que Mme [L] est irrecevable à contester les intérêts perçus de 2006 à 2010 d'un montant total de 9 050,90 euros (10 279,78 euros - 1 228,88 euros) compte tenu de la fin de non-recevoir de la prescription de son action.

Elle relève que, contrairement à ce soutient Mme [L], la lettre adressée par le Crédit Mutuel le 11 mars 2011, ne constitue nullement la reconnaissance expresse d'un droit sur la contestation des intérêts et autres facturations qui serait interruptive de prescription conformément à l'article 2240 du code civil.

Enfin, elle souligne que Mme [L] ne peut prétendre à une exception de nullité perpétuelle car le découvert en compte consenti par convention du 23 juin 2006 a été exécuté, Mme [L] ayant réglé les intérêts trimestriels et les frais depuis cette date, sans qu'elle ait émis une quelconque contestation pour cette période, n'ayant adressé une lettre que le 23 décembre 2010.

L'article 4 du code de procédure civile dispose que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

Le juge doit cependant, en application de l'article 12 du même code, donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée et il peut, à ce titre, changer la dénomination ou le fondement juridique des demandes, sans y être cependant tenu (Ass. Plén., 21 déc. 2007, n° 06-11.343).

La Cour de cassation a jugé dans un arrêt du 30 janvier 2019 que :

'Mais attendu, en premier lieu, que c'est sans méconnaître l'objet du litige que la cour d'appel a retenu que la contestation de prélèvements d'intérêts, de frais et de commissions opérés par la banque, opposée par MM. [K] et [D] à la demande en paiement du solde débiteur de leur compte, constituait une demande, présentée par voie de défense au fond, de restitution des sommes indûment prélevées ;

Et attendu, en second lieu, que la demande de restitution d'intérêts, de frais et de commissions indûment prélevés sur un compte par un établissement bancaire, qu'elle soit présentée par voie d'action ou de défense au fond, est soumise à la prescription édictée par l'article L. 110-4 du code de commerce.' (Cass. Com. 30 janv. 2019, n° 17.20.4936).

En l'espèce, la demande de Mme [L] de contestation du caractère contractuel des intérêts, frais et commissions prélevées tendant à remettre en cause partiellement le bien fondé de la demande en paiement du solde débiteur du compte formée par la banque, formée par conclusions du 20 octobre 2015 devant le tribunal de grande instance de Paris, s'analyse en une demande de restitution de sommes indûment prélevées.

En effet, Mme [L] sollicitait dans le dispositif de ses conclusions de :

'Vu l'article 1315 du code civil, constater au premier chef que le CREDIT MUTUEL ne justifie pas d'une créance certaine et liquide et le débouter de sa demande,

- et subsidiairement en tout état de cause

- enjoindre au CREDIT MUTUEL de produire aux débats un compte expurgé des intérêts indûment prélevés et dans lequel les intérêts seront calculés au taux légal ; avec des dates de valeur correctement appliquées et avec une assiette correcte excluant les dates à déduire telles que ci-dessous énumérées.

* ordonner la déduction du solde des : frais et pour 'commissions d'intervention, 'facture', 'relance impayé', 'frais info' relance', 'frais lettre d'information chèque sans provision' (Pièce n° 13 de la banque).

Il en résulte que Mme [L] entendait obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention adverse s'analysant en une demande reconventionnelle au sens de l'article 64 du code de procédure civile et soumise à la prescription édictée par l'article L. 110-4 du code de commerce.

Ainsi, comme le relève la banque, Mme [L] n'est recevable à contester les opérations litigieuses qu'à compter du 20 octobre 2010, soit 5 ans avant ses écritures de première instance et non à compter de l'année 2006 comme elle le soutient vainement dans ses écritures.

En conséquence, Mme [L] est irrecevable à contester les intérêts perçus de 2006 à 2010, d'un montant total de 9 050,90 euros compte tenu de la prescription de son action et n'est recevable qu'à contester les intérêts perçus :

- au 1er janvier 2011 à hauteur de la somme de 355,51 euros,

- au 1er avril 2011 à hauteur de la somme de 426,86 euros,

- au 1er juillet 2011 à hauteur de la somme de 453,18 euros,

soit à hauteur de la somme totale de 1 235,55 euros.

De la même manière, Mme [L] est irrecevable à contester les modalités de perception des intérêts qui auraient été calculés selon elle sur une durée de 360 jours depuis le 23 juin 2006, son action étant prescrite à ce titre jusqu'au 20 octobre 2010.

Elle est également irrecevable à contester la perception des frais des opérations passées sur son compte et les dates de valeurs jusqu'au 20 octobre 2010.

Enfin, Mme [L] soutient vainement que le courrier de la banque du 11 mars 2011 constituerait la reconnaissance expresse d'un droit sur la contestation des intérêts et autres facturations, qui aurait interrompu la prescription au sens de l'article 2240 du code civil, dans la mesure où cette reconnaissance doit émaner du débiteur et non du créancier et où elle doit non équivoque.

Or, en l'espèce la phrase suivante de la banque dans son courrier du 11 mars 2011 : 'Je note avec vous que le fonctionnement de vos comptes (dont celui en compte courant) n'apparaît pas cohérent et ne nous convient pas plus qu'à vous-même. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons vivement vous rencontrer très rapidement afin de déterminer ensemble les bases d'un accord satisfaisant', ne contient aucune reconnaissance d'un droit (pièce n° 13 de l'appelante).

Il y donc lieu d'infirmer la décision déférée sur le rejet de la fin de non recevoir des demandes de Mme [L] de nullité des intérêts, du paiement des frais et des opérations et de la suppression des dates de valeur depuis 2006 jusqu'au 20 octobre 2010.

Sur la reconstitution du solde expurgé d'intérêts

Au regard des développements qui précédent, il y a lieu d'infirmer le jugement du 16 novembre 2018 en ce qu'il a enjoint à la société Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien de reconstituer le solde du compte n° [XXXXXXXXXX01] en substituant l'intérêt légal à l'intérêt conventionnel et en supprimant les dates de valeur pour les opérations autres que celles relevées à l'encaissement des chèques, en excluant tous frais « commissions d'intervention », « facture », « relance impayé », « frais info relance », « frais lettre d'information chèque sans provision » du 15 novembre 2005 au 20 octobre 2010.

Sur le taux d'intérêt appliqué au solde débiteur du compte au 10 octobre 2011

Mme [L] expose que des intérêts ont été calculés 'd'après un taux qu'on ignore et qui à ce titre doivent être annulés au profit du taux légal.' Elle relève qu'il n'existe aucun document contractuel fixant un taux d'intérêt particulier qui s'appliquerait au solde du compte.

La banque critique le jugement déféré en ce qu'il a retenu qu'à défaut de convention expresse, il convient d'appliquer le taux légal sur le solde débiteur du compte en date du 10 octobre 2011. Elle relève que le contrat d'ouverture de compte du 15 novembre 2005, indique expressément qu'en cas de découvert, le taux débiteur serait celui fixé dans la convention clarté n° 81.73.02/05 et qu'elle verse aux débats le recueil des tarifs prévoyant

l'application du plafond Banque de France minoré de 0,05 %, soit 13,34 %.

Elle sollicite en conséquence l'application de ce taux conventionnel.

I1 résulte des articles 313-1 et 313-2 du code de la consommation applicables aux crédits destinés à financer les besoins de l'activité professionnelle et de l'article L. 313-4 du code monétaire et financier, que le taux effectif global doit, à peine de validité de la stipulation d'intérêt, être mentionné par écrit, mais que s'agissant d'une ouverture de crédit en compte courant, il peut cependant être suppléé à l'absence ou à l'insuffisance de fixation préalable du taux d'intérêt par les mentions figurant sur les relevés de compte du moins, pour les intérêts échus postérieurement à leur réception.

L'acte sous seing privé intitulé 'FORMULE CLE' d'ouverture du compte courant n° [XXXXXXXXXX01] du 15 novembre 2005 stipule que :

'En cas de découvert non autorisé du compte ou de dépassement d'autorisation de découvert, le taux débiteur qui sera appliqué est celui qui figure dans la Convention Clarté n° 81.82.73 02/05.

Les Conditions Générales contenues dans le fascicule 'Nos conditions générales référencé n° 12.01.15 07/05 ..., de même que la Convention Clarté n° 81.82.73 02/05 relative à la tarification des produits et services ont été déposées au rang des minutes de Maître [S] [N], notaire à la résidence de [Localité 8] (Bas-Rhin)' (Pièce n° 1 de la banque).

La banque produit les conditions générales de la convention de compte qui précisent que 'tout solde débiteur sera productif d'intérêt au taux maximal indiqué dans la convention Clarté...Ces intérêts seront calculés et portés au débit du compte courant lors de chaque arrêté'. (Pièce n° 2 de la banque).

Elle verse par ailleurs aux débats le recueil des prix des principaux produits et services de la convention Clarté Professionnels au 1er juillet 2011 qui prévoit l'application du plafond Banque de France publié au journal officiel minoré de 0,05 %.

Mais surtout, il ressort des relevés de compte versés aux débats par Mme [L] que le montant des intérêts prélevés figure sur ces relevés sous la rubrique 'INTERETS/FRAIS', de sorte qu'ils ont été portés à la connaissance de Mme [L] qui ne les a pas contestés à leur réception.

Il y a donc lieu d'appliquer le taux d'intérêt conventionnel au solde débiteur du compte n° [XXXXXXXXXX01] de Mme [L] et d'infirmer le jugement déféré de ce chef.

Sur le calcul des intérêts sur une année de 360 jours

Mme [L] soutient que les intérêts conventionnels sont calculés sur une durée de 360 jours telle que fixée dans les conditions générales de la convention de découvert du 23 juin 2006.

Cependant, comme le relève la banque, Mme [L] est irrecevable à contester les modalités de calcul des intérêts perçus depuis 2006, son action étant prescrite au titre des intérêts perçus de 2006 à 2010, étant rappelé que la convention de 2006 a été dénoncée par la banque au mois de février 2009.

En tout état de cause s'agissant des intérêts postérieurs au 20 octobre 2010, il ya lieu de rappeler que si le TEG doit être calculé sur la base d'une année civile, rien n'interdit aux parties s'agissant d'un prêt professionnel de convenir librement d'un taux d'intérêt conventionnel calculé sur une autre base.

Mme [L] sera donc déboutée de ses prétentions à ce titre.

Sur le caractère erroné du TEG

Mme [L] soutient qu'aucun document écrit ne prévoit un TEG et qu'elle n'a pas reçu les relevés de compte comportant l'indication d'un TEG. Elle allègue encore que le TEG qui y figure est 'inexactement calculé' car les charges, commissions et frais liés au crédit doivent y être intégrés.

La banque rappelle qu'en cas de concours financiers consentis pour les besoins de l'activité professionnelle et notamment par l'ouvert de crédit exceptionnel, la réception de chacun des relevés ou arrêtés indiquant le TEG appliqué constitue le point de départ du délai de prescription quinquennale fixée par l'article 1907 du code civil. Ainsi, le contrat du 15 novembre 2005 d'ouverture du compte renvoie au recueil des tarifs permettant de fixer le taux d'intérêt applicable et prévoyant l'envoi d'arrêté trimestriel de compte en fonction du solde débiteur enregistré. Elle a indiqué dans chaque arrêté trimestriel de compte le TEG appliqué sur la période et verse aux débats les arrêtés de compte trimestriels adressés à Mme [G] [L] en 2010 et 2011, fixant pour chaque trimestre le TEG applicable. Elle soutient enfin que Mme [L] inverse la charge de la preuve de l'inexactitude du TEG fixé devant établir la matérialité de ses affirmations.

En l'espèce, contrairement à ce que soutient Mme [L], les arrêtés de compte trimestriels versés aux débats par la banque pour la période non prescrite comportent, pour chaque trimestre, l'indication d'un TEG.

Il est de jurisprudence constante qu'il appartient à l'emprunteur de rapporter la preuve du caractère erroné du taux effectif global et non à la banque d'établir qu'elle n'a pas commis d'erreur dans sa détermination, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, Mme [L] se contentant de procéder par voie d'affirmation sur le caractère erroné du TEG sans en rapporter la preuve, de sorte qu'elle ne peut qu'être déboutée de ses demandes à ce titre.

Sur les prétendues anomalies sur les opérations effectuées

Sur les dates de valeur

Mme [L] soutient que la banque n'aurait pas respecté les dispositions des articles L. 133-14 et L. 131-1-1 du code monétaire et financier s'agissant des dates de valeur appliquées par la banque. Elle en déduit que la perception des intérêts est donc sans cause.

La banque précise que l'article L. 133-2 du code monétaire et financier prévoit une dérogation à l'article L. 131-1-1 pour les personnes physiques agissant pour des besoins professionnels. Chaque année, les recueils des principaux tarifs fixent la base de calcul des dates de valeur par types d'opérations, Mme [G] [L] ayant reçu ledit recueil à l'ouverture du compte professionnel, en ayant pris connaissance et l'ayant approuvé.

Sur l'analyse in concreto des dates de valeur

S'agissant des virements, Mme [L] soutient que 'tous les virements entre 2006 et fin 2009" sont 'en dates de valeurs erronées, et toujours bien entendu, à l'avantage de la banque.' Elle en veut pour preuve un document établi par elle-même intitulé 'LISTING DE VIREMENTS AVEC DATES DE VALEUR ERRONÉES'.

La banque rappelle que Mme [L] est prescrite en son action en contestation des opérations débitées sur son compte avant le 20 novembre 2010 (en réalité 20 octobre 2010), de telle sorte qu'elle est irrecevable à contester les opérations passées en compte au titre des virements de 2006 à 2010.

A titre liminaire, il a y lieu de relever que le document établi par Mme [L] pour les besoins de l'instance n'est pas probant et ne justifie pas ces opérations (pièce de l'appelante n° 25 - annexe 1).

En tout état de cause, il ressort de ce document qu'à compter de l'année 2010 'Brusquement, les dates de valeur des virements deviennent correctes.'

Il s'en induit que pour la période non prescrite à compter d'octobre 2010, aucun reproche ne peut être fait à la banque.

S'agissant des prélèvements, Mme [L] soutient qu'ils sont 'fréquemment en date de valeur à la veille de leur date' y compris en ce qui concerne ceux opérés par la banque à titre de commissions' et que 'comme les virements, ils ne commencent à être correctement comptabilisés qu'à partir de 2010.' Elle en veut pour preuve un document établi par elle-même intitulé 'LISTING DES PRÉLÈVEMENTS AVEC DATES DE VALEUR'.

La banque indique que cette affirmation est inexacte.

Outre le fait que le document établi par Mme [L] pour les besoins de l'instance n'est pas probant et ne justifie pas ces opérations (pièce de l'appelante n° 26), il ressort de ce listing et des propres écritures de Mme [L] qu'à partir de 2010, les dates de valeur ont été correctement comptabilisées.

Il s'en induit que pour la période non prescrite à compter d'octobre 2010, aucun reproche ne peut être fait à la banque.

S'agissant des chèques, Mme [L] soutient que les chèques sortants sont 'systématiquement mentionnés en date de valeur deux jours avant le débit' et que les chèques entrants sont 'systématiquement comptabilisés en date de valeur éloignée entre 3 et 6 jours de leur inscription au crédit.' Elle en veut pour preuve un document établi par elle-même intitulé 'LISTE DES CHÈQUES EN CRÉDIT ET EN DÉBIT AVEC LEUR DATE DE CRÉDIT ET DE DÉBIT ET LA DATE DE VALEUR DE LEUR COMPTABILISATION.'

La banque indique que cette affirmation est inexacte.

Outre le fait que le document établi par Mme [L] pour les besoins de l'instance n'est pas probant et ne justifie pas ces opérations (pièce de l'appelante n° 27), il ressort de ce listing qu'à partir de 2010, 'les chèques au crédit sont comptabilisés à la date du lendemain du crédit' et que pour les chèques au débit 'bon nombre d'entre eux sont comptabilisés en date de valeur de la veille du débit', 'un certain nombre cependant continuent à être comptabilisés en date de valeur de plusieurs jours de la veille du débit', le dernier chèque débité le 20 septembre 2010 étant la toute dernière opération effectuée par Mme [L] sur le compte.

Il s'en induit que pour la période non prescrite à compter d'octobre 2010, Mme [L] ne saurait contester une quelconque opération.

S'agissant des retraits d'espèces et des paiements par carte bancaire, Mme [L] soutient qu'alors qu'elle disposait d'une carte bancaire à débit différé fin de mois, à partir de 2009, 'les paiements par CB sont systématiquement comptabilisés en débit non pas au 30 du mois mais au fur et à mesure de chaque opération.'

Or, il ressort des relevés bancaires versés au débats par Mme [L] qu'aucun paiement par carte bancaire n'a été effectué sur le compte de cette dernière pour la période non prescrite, de sorte qu'aucun reproche ne saurait être fait à ce titre à la banque.

Sur les commissions d'intervention

Mme [L] conteste les commissions d'intervention facturées par la banque qui résultent soit de la pratique illicite des dates de valeur, soit de l'appréhension d'un niveau de découvert qui n'était pas celui convenu. Elle observe que l'autorisation de découvert 'informelle' était de 20 000 euros et qu'elle a 'rarement été beaucoup dépassée'. Elle en veut pour preuve un document intitulé 'échantillon de commissions d'intervention par année et par mois.' Elle précise que les 'commissions d'intervention' ont brusquement disparu de ses relevés de compte à partir de 2009.

La banque réplique que les conditions particulières et générales du fonctionnement du compte de Mme [L] ouvert dans ses livres et acceptées par l'appelante prévoient le paiement d'une commission d'intervention lorsqu'une opération nécessite un examen particulier du compte en anomalie qui empêche un traitement automatique des opérations journalières. En conséquence, dès lors que la position du compte dépassait le montant de ce découvert, il était prélevé une commission d'intervention parfaitement justifiée.

Il ressort du document intitulé 'échantillon de commissions d'intervention par année et par mois' établi par Mme [L] pour les besoins de l'instance (pièce n° 29) qu'à compter de l'année 2009 'les commissions d'intervention disparaissent subitement', de sorte qu'il s'en induit que pour la période non prescrite aucune contestation ne peut être formulée par Mme [L].

Sur les autres frais prélevés

Mme [L] conteste le règlement des frais depuis 2006 dont elle ne fixe pas le quantum indiquant que 'ces frais sont sans cause et doivent donc être réintégrés pour le calcul du solde définitif.'

La banque relève qu'à l'analyse des écritures de Mme [L], il semble que les frais contestés ont tous été débités en 2006 et en 2008. Or, Mme [L] est irrecevable à contester la perception de frais depuis 2006 jusqu'au 20 novembre 2010 (en réalité 20 octobre 2010), compte tenu de la fin de non-recevoir de la prescription de son action à ce titre.

Il ressort du document intitulé 'LISTE DES FRAIS' établi par Mme [L] (pièce n° 30), corroboré par ses relevés de compte que pour la période non prescrite, à partir du 10 novembre 2010 jusqu'au 11 juillet 2011, la banque a prélevé mensuellement au titre de 'facture' la somme de 15,19 euros, sans apporter la moindre explication sur l'objet de ces factures, de sorte qu'il y a lieu de déduire la somme de 136,71 euros de la somme réclamée par la banque (15,19 euros x 9 mois).

Sur les prétendues opérations effectuées dès octobre 2010

La banque expose à juste titre qu'elle a procédé au paiement des opérations initiées notamment depuis octobre 2010 jusqu'au 16 mars 2011 par Mme [L] et qu'il appartenait à cette dernière, si elle contestait ces opérations, de lui notifier l'arrêt des prélèvements et des virements automatiques.

Elle verse aux débats un décompte actualisé de sa créance au 20 septembre 2022 (pièce n° 31) arrêté à la somme de 38 842,66 euros au titre du solde débiteur du compte numéro [XXXXXXXXXX01] de laquelle il convient de déduire la somme de 136,71 euros au titre de 'factures' indûment prélevées, soit une somme restant due de 38 705,95 euros à laquelle il convient de condamner Mme [L] avec intérêts au taux du plafond de la Banque de France minoré de 0,05 %, soit 13,34 % à compter du 21 septembre 2022 jusqu'au parfait paiement.

Au regard des développements qui précédent, la demande subsidiaire des parties tendant à voir confirmer le jugement du 19 novembre 2021 et à rectifier l'omission de statuer ou l'erreur matérielle, qui selon Mme [L] l'affecterait, est sans objet.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. L'appelante sera donc condamnée aux entiers dépens de première instance et d'appel, la décision déférée étant infirmée de ce chef.

En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En l'espèce, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles qu'elles ont été contraintes d'engager dans la présente instance pour assurer la défense de leurs intérêts. Elles seront par conséquent déboutées de leurs demandes respectives à ce titre.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 16 novembre 2018 en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité des demandes de la société Caisse de Crédit Mutuel des boucles de Seine Ouest Parisien fondée sur la prescription soulevée par Mme [G] [L] ;

L'INFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau des chefs de la décision infirmée et y ajoutant,

DECLARE Mme [G] [L] irrecevable en ses demandes en nullité des intérêts conventionnels et des frais et commissions prélevés par la banque du 15 novembre 2005 au 20 octobre 2010 ;

DÉBOUTE Mme [G] [L] de l'ensemble de ses demandes relatives aux prétendus intérêts, frais et commissions indûment prélevés postérieurs au 20 octobre 2010 à l'exception de celle afférente au prélèvement indu de la somme de 136,71 euros au titre de 'factures' ;

CONDAMNE Mme [G] [L] à payer à la société Caisse de Crédit Mutuel des Boucles de Seine Ouest Parisien la somme de 38 705,95 euros avec intérêts au taux du plafond de la Banque de France minoré de 0,05 %, soit 13,34 % à compter du 21 septembre 2022 ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [G] [L] aux entiers dépens de première instance et d'appel ;

REJETTE toute autre demande.

* * * * *

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 22/07373
Date de la décision : 02/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-02;22.07373 ?
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