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30/04/2024 | FRANCE | N°21/06471

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 30 avril 2024, 21/06471


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9



ARRET DU 30 AVRIL 2024



(n° 2024/ , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06471 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CECLJ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Juin 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY COURCOURONNES - RG n° F 19/00953



APPELANTE



Madame [T] [Y] [N]

[Adresse 1]

[Localité

5]

Représentée par Me Sylvie CHATONNET-MONTEIRO, avocat au barreau D'ESSONNE



INTIMEES



S.E.L.A.R.L. MJC2A ès qualité Mandataire liquidateur de la SAS NUMBER STEAK HOU...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 9

ARRET DU 30 AVRIL 2024

(n° 2024/ , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06471 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CECLJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Juin 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY COURCOURONNES - RG n° F 19/00953

APPELANTE

Madame [T] [Y] [N]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Sylvie CHATONNET-MONTEIRO, avocat au barreau D'ESSONNE

INTIMEES

S.E.L.A.R.L. MJC2A ès qualité Mandataire liquidateur de la SAS NUMBER STEAK HOUSE N 7

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Pierre TONOUKOUIN de la SELARL CAUSIDICOR, avocat au barreau de PARIS, toque : J133

Association AGS-CGEA ILE DE FRANCE EST

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Frédéric ENSLEN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1350

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Février 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Nelly CHRETIENNOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Stéphane MEYER, président

Fabrice MORILLO, conseiller

Nelly CHRETIENNOT, conseillère

Greffier, lors des débats : Monsieur Jadot TAMBUE

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Stéphane MEYER, président de chambre, et par Monsieur Jadot TAMBUE, greffier à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Madame [N] a été engagée par la société NUMBER STEAK HOUSE N°7 dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à compter du 6 août 2018, en qualité de cuisinière, employée niveau 1.

La société comptait plus de 11 salariés et appliquait les dispositions de la convention collective des hôtels, cafés restaurants.

Par lettre du 9 juillet 2019 la société convoquait Madame [N] à un entretien préalable fixé au 19 juillet 2019.

La salariée indique avoir reçu ses documents de fin de contrat début septembre 2019, accompagnés d'une copie d'une lettre de licenciement pour faute grave datée du 2 août 2019 dont elle indique qu'elle n'avait pas été destinataire auparavant.

Madame [N] a saisi le conseil de prud'hommes d'Evry-Courcouronnes aux fins de contestation de son licenciement et paiement de ses heures supplémentaires.

Par jugement du 27 juillet 2020, le tribunal de commerce d'Evry a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société NUMBER STEAK HOUSE N°7 et a désigné la SELARL MJC 2 A en qualité de liquidateur judiciaire.

Par jugement du 1er juin 2021, le conseil de prud'hommes d'Évry Courcouronnes a :

- requalifié le licenciement pour faute grave de Madame [N] en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- fixé la créance salariale de Madame [N] au passif de la liquidation judiciaire de la SAS NUMBER STEACK HOUSE N°7 devant être pris en garantie par L'AGS CGE à IDF EST dans la limite du plafond légal aux sommes suivantes :

- 515,55 € au titre de l'indemnité légale de licenciement

- 1039,11 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

- 103,91 € au titre des congés payés y afférents

- 1429,46 € au titre du rappel de salaire sur mise à pied du 8 juillet au 2 août 2019

- 142,94 € au titre des congés payés y afférents.

Le conseil a débouté Madame [N] du surplus de ses demandes.

Madame [N] a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration du 15 juillet 2021, en visant expressément les dispositions critiquées.

Par écritures récapitulatives notifiées électroniquement le 24 février 2022, Madame [N] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait droit à la demande de requalification du licenciement pour faute grave en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- Réformer le jugement :

- en ce qui ne lui a pas accordé de dommages-intérêts pour rupture abusive,

- en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes d'heures supplémentaires et de dommages-intérêts pour préjudice moral,

En conséquence,

- Fixer au passif de la société NUMBER STEAK HOUSE N°7 les sommes suivantes :

- 8.000 € au titre des dommages et intérêts pour rupture abusive,

- 8.017,01 € au titre du rappel de salaire sur heures supplémentaires,

- 801,70 € au titre des congés payés y afférents,

- 5.000 € nets de CSG-CRDS au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral et financier,

- 2.500 € au titre de l'article 700 alinéa 2 du code de procédure civile,

- Assortir l'ensemble des condamnations pécuniaires à venir des intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil,

- Fixer au passif de la société NUMBER STEAK HOUSE N°7 l'ensemble des dépens,

- Dire et juger la décision opposable à l'AGS CGEA.

Par écritures récapitulatives notifiées électroniquement le 7 janvier 2022, la SELARL MJC2A en la personne de Maître [V] ès qualité de liquidateur judiciaire de la SAS NUMBER STEAK HOUSE N°7 demande à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris,

En tout état de cause,

- Dire que Maître [V] ès qualité de liquidateur de la SAS NUMBER STEAK HOUSE n°7 sera relevé et garantie de toute fixation par les AGS.

Par écritures récapitulatives notifiées électroniquement le 30 novembre 2021, l'UNEDIC Délégation AGS CGEA de L'Ile de France demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en l'ensemble de ces dispositions,

- Débouter Madame [N] de sa demande de nullité de son licenciement,

- Constater que l'AGS s'en rapporte aux observations du mandataire judiciaire sur la rupture du contrat de travail,

- Dire mal fondée Madame [N] en l'ensemble de ses demandes de dommages et intérêts et l'en débouter,

- Subsidiairement, ramener la demande en indemnité pour licenciement sans cause à de plus justes proportions,

- Débouter Madame [N] de sa demande au titre des heures supplémentaires,

- Très subsidiairement, sur la garantie :

- Dire que l'AGS ne devra sa garantie au titre des créances visées aux articles L 3253-8 et suivants du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19 et suivants et L 3253-17 du code du travail,

- Rappeler que la somme éventuellement due au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'une éventuelle astreinte, qu'elle soit ou non liquidée n'entrent pas dans le champ de la garantie de l'AGS,

- Condamner Madame [N] en tous les dépens

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 9 janvier 2024 et l'affaire fixée pour plaider le 5 février 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions.

MOTIFS

Sur le licenciement

Aucune des parties ne conteste que le licenciement soit sans cause réelle et sérieuse, puisqu'elles sollicitent toutes la confirmation du jugement sur ce point.

Sur la demande de dommages et intérêts pour rupture abusive

En vertu de l'article L1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau joint.

La salariée justifie d'un an d'ancienneté et l'entreprise emploie habituellement plus de 11 salariés.

En dernier lieu, elle percevait un salaire mensuel brut de 2.078,22 €.

En application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, elle est fondée à obtenir une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse égale à une somme comprise entre 1 et 2 mois de salaire, soit entre 2.078,22 € et 4.156,44 €.

Au moment de la rupture, elle était âgée de 44 ans et elle justifie de sa situation de demandeur d'emploi jusqu'en mars 2020. Elle a ensuite suivi une formation de chauffeur de bus qui n'a pas abouti sur un emploi.

Au vu de cette situation, et de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle il convient d'évaluer son préjudice à 3.000 €.

Bien que le conseil de prud'hommes ait jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse, il a débouté la salariée de sa demande d'indemnité sans cause réelle et sérieuse, ce en quoi il doit être infirmé.

Statuant de nouveau, il y a lieu de fixer au passif de la liquidation de l'employeur la somme de 3.000 € au profit de la salariée à ce titre.

Sur la demande au titre des heures supplémentaires

Aux termes de l'article L. 3243-3 du code du travail, l'acceptation sans protestation ni réserve d'un bulletin de paie par le travailleur ne peut valoir de sa part renonciation au paiement de tout ou partie du salaire et des indemnités ou accessoires de salaire qui lui sont dus en application de la loi, du règlement, d'une convention ou d'un accord collectif de travail ou d'un contrat.

Aux termes de l'article L. 3171-4 du même code, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il appartient donc au salarié de présenter, au préalable, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies, afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement, en produisant ses propres éléments.

Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l'accord de l'employeur, soit s'il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.

En l'espèce, Madame [N] expose qu'elle a été engagée pour 39 heures alors qu'elle travaillait en réalité 52 heures par semaine avec les horaires suivants :

- le lundi et jeudi de 10h à 15h30 et de 18h00 à 22h30,

- le vendredi et samedi de 10h à 15h30 et de 18h00 à 23h30,

- le dimanche 10h à 15h30 et de 18h00 à 22h30.

Elle chiffre le montant de ces heures supplémentaires à 8.502,18 €.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre au liquidateur de les contester utilement et le chiffre allégué est exact sur le plan arithmétique.

Or, le liquidateur ne produit pas d'éléments permettant de contredire ces horaires, mais indique que des heures supplémentaires ont déjà été réglées à la salariée, ainsi que cela ressort de ses bulletins de paie, et que les calculs de celle-ci ne tiennent pas compte de ses éventuelles absences.

Il ressort des bulletins de paie de la salariée que la somme de 1.409,32 € lui a déjà été versée au titre de ses heures supplémentaires. Le calcul proposé par la salariée prenait en considération les absences puisqu'il est réalisé sur 46 semaines.

Au regard de ces éléments, l'employeur devait à la salariée la somme de 7.092,86 €, outre 709,28 € de congés payés afférents.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement déféré sur ce point, et statuant de nouveau, de fixer, au passif de la liquidation de l'employeur la somme de 7.092,86 € au titre du rappel d'heures supplémentaires, outre 709,28 € de congés payés afférents.

Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier

Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Madame [N] fait valoir qu'elle a souffert du licenciement, qu'elle n'avait jamais fait l'objet du moindre reproche ou de lettre ,d'avertissement et que celui-ci lui a nécessairement causé un préjudice moral mais aussi financier.

Madame [N] ne caractérisant toutefois aucun préjudice distinct de celui réparé par l'attribution des indemnités en lien avec le licenciement, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande à ce titre.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

En l'espèce, la liquidation de l'employeur succombe, ce qui justifie qu'elle supporte la charge des dépens et une somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Ces créances de dépens et frais de procédure ne répondant pas aux conditions de l'article L.622-17 du code de commerce, elles seront fixées au passif de la liquidation.

Sur les intérêts

En vertu de l'article L621-48 du code de commerce, le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux.

Sur la garantie de l'AGS

Il convient de déclarer le présent arrêt opposable à l'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA Ile de France qui sera tenue à garantie dans les termes et conditions des articles L3253-6 et suivants du code du travail, et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail.

L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA Ile de France devra faire l'avance de la somme représentant les créances garanties, à l'exception de l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté Madame [N] de ses demandes :

- au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- au titre du rappel d'heures supplémentaires et congés afférents,

Statuant de nouveau,

FIXE au passif de la liquidation de la société NUMBER STEAK HOUSE N°7 les sommes suivantes au profit de Madame [N] :

- 3.000 € au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 7.092,86 € au titre du rappel d'heures supplémentaires, outre 709,28 € de congés payés afférents,

- 2.000 € au titre des frais de procédure,

FIXE les dépens au passif de la liquidation de la société NUMBER STEAK HOUSE N°7,

RAPPELLE le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux,

DÉCLARE le présent arrêt opposable à l'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA Ile de France qui sera tenue à garantie dans les termes et conditions des articles L3253-6 et suivants du code du travail, et les plafonds prévus aux articles L. 3253-17 et D. 3253-5 du code du travail,

DIT que l'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA Ile de France devra faire l'avance de la somme représentant les créances garanties, à l'exception de l'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 21/06471
Date de la décision : 30/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 07/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-30;21.06471 ?
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