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25/04/2024 | FRANCE | N°23/03912

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 10, 25 avril 2024, 23/03912


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 10



ARRET DU 25 AVRIL 2024



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/03912 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHGCJ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Décembre 2022 -Juge de l'exécution de PARIS RG n° 22/81312





APPELANT



Monsieur [B] El Gharib MOHAMED ALI

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représenté

par Me Marie-pierre MATHIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : B0295

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/00091 du 03/02/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)


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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10

ARRET DU 25 AVRIL 2024

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/03912 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHGCJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Décembre 2022 -Juge de l'exécution de PARIS RG n° 22/81312

APPELANT

Monsieur [B] El Gharib MOHAMED ALI

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Marie-pierre MATHIEU, avocat au barreau de PARIS, toque : B0295

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2023/00091 du 03/02/2023 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIME

Monsieur [V] [U]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Luc TAMNGA, avocat au barreau de PARIS, toque : C1779

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 14 Mars 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Bénédicte PRUVOST, Présidente de chambre

Madame Catherine LEFORT, Conseillère

Madame Valérie DISTINGUIN, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Catherine LEFORT, Conseillère dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : M. Grégoire GROSPELLIER

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Bénédicte PRUVOST, Présidente de chambre et par Grégoire GROSPELLIER, Greffier, présent lors de la mise à disposition.

PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par ordonnance de référé en date du 15 septembre 2021, le président du tribunal judiciaire de Paris a notamment :

ordonné la cessation de la cuisson au barbecue grill et au four tant qu'une installation d'extraction conforme au règlement sanitaire de la ville de Paris ne sera pas en service dans les locaux constituant le lot n°1 appartenant à la SCI Welcome et dont M. [B] [K] [B] [I] est preneur à bail et dit que l'activité exploitée dans ces locaux sera limitée à une activité de restauration compatible avec l'absence d'installation d'extraction conforme au règlement sanitaire de la ville de Paris, et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de 10 jours à compter de la signification de la présente décision, ladite astreinte courant sur un délai de 90 jours,

condamné M. [B] [I] à communiquer à M. [V] [U] et au syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 1] un certificat de ramonage et d'entretien de moins d'un mois, un certificat de conformité de l'installation, ainsi que le registre de sécurité de l'établissement, sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de 10 jours à compter de la signification de la décision, ladite astreinte ayant vocation à courir pendant un délai de 90 jours.

Par acte d'huissier en date du 26 juillet 2022, M. [U] a fait assigner M. [B] [I] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris aux fins de liquidation des astreintes à hauteur de 54.000 euros et de fixation d'une astreinte définitive de 1.000 euros par jour de retard.

Par jugement en date du 7 décembre 2022, le juge de l'exécution a :

condamné M. [B] [I] à payer à M. [U], au titre de la liquidation des astreintes fixées par l'ordonnance de référé du 15 septembre 2021, une somme de 45.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter « de ce jour », outre une indemnité de 2.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile,

dit que les intérêts pourront être capitalisés conformément à l'article 1343-2 du code civil,

dit que l'ordonnance de référé du 15 septembre 2021 est assortie, à compter du mois qui suivra la signification du présent jugement, et pendant une période de 90 jours, d'une astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard, en ce qui concerne les obligations suivantes :

- cessation de la cuisson au barbecue grill et au four [']

- communication d'un certificat de ramonage et d'entretien de moins d'un mois et d'un certificat de conformité de l'installation,

rejeté pour le surplus toutes demandes contraires ou plus amples,

condamné M. [B] [I] aux dépens.

Pour statuer ainsi, le juge de l'exécution a retenu tout d'abord que l'ordonnance de référé du 15 septembre 2021 avait bien été signifiée à M. [B] [I] le 8 octobre 2021, et que M. [U] était recevable à agir en liquidation d'astreintes puisque les obligations mises à la charge de M. [B] [I] avaient été prononcées à sa demande, de sorte que les astreintes avaient commencé à courir le 18 octobre 2021. Ensuite, il a estimé que la preuve de ce que M. [B] [I] s'était conformé à l'injonction du juge des référés sur l'activité de restauration ne pouvait résulter d'une attestation que ce dernier se délivrait à lui-même, de sorte qu'il y avait lieu de liquider l'astreinte à un montant de 27.000 euros pour la période allant du 18 octobre 2021 au 16 janvier 2022. Il a en revanche modéré la seconde astreinte à la somme de 18.000 euros, après avoir constaté d'une part, que M. [B] [I] ne contestait pas ne pas avoir remis les documents visés par l'ordonnance de référé, mais qu'il avait été autorisé, par l'assemblée générale des copropriétaires du 9 juin 2022, à effectuer les travaux de mise en conformité du local commercial, lesquels étaient en cours d'exécution depuis le 2 novembre 2022, d'autre part que le local de la SCI Welcome a été vendu par adjudication le 20 janvier 2022, ce qui représentait une difficulté d'exécution puisque seul le nouveau propriétaire pouvait être autorisé, par assemblée générale extraordinaire, à réaliser les travaux de mise en conformité.

Par déclaration en date du 21 février 2023, M. [B] [I] a relevé appel de ce jugement.

Par conclusions n°3 du 21 février 2024, M. [B] [I] demande à la cour d'appel de :

infirmer le jugement entrepris, en ce qu'il l'a condamné au paiement des sommes de 24.000 euros et 18.000 euros au titre de la liquidation des astreintes provisoires visées dans l'ordonnance de référé du 15 septembre 2021, en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts, en ce qu'il a fixé une nouvelle astreinte provisoire de 500 euros par jour de retard sur 90 jours, en ce qu'il l'a condamné au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

A titre principal,

juger que M. [U] ne justifie pas de la signification par lui-même de l'ordonnance de référé du 15 septembre 2021,

juger en conséquence irrecevable la demande de liquidation des astreintes provisoires par M. [U] à son profit,

juger n'y avoir lieu à liquidation des astreintes provisoires au profit de M. [U],

juger que M. [U] ne pouvait pas exécuter l'ordonnance de référé faute de signification, et

condamner M. [U] à lui rembourser la somme de 9.748,37 euros,

Subsidiairement sur ce point,

ordonner la compensation avec toute somme qu'il pourrait rester devoir,

Subsidiairement,

ordonner la suppression des deux astreintes provisoires de 300 euros sur 90 jours ordonnées par l'ordonnance de référé du 15 septembre 2021 à hauteur de 24.000 euros et 18.000 euros,

ordonner la suppression de la nouvelle astreinte provisoire de 500 euros sur 90 jours à compter du jugement ordonnée par jugement du juge de l'exécution du 7 décembre 2022,

A titre infiniment subsidiaire,

ramener les astreintes provisoires à un euro symbolique,

En tout état de cause,

dire n'y avoir lieu à capitalisation des intérêts,

dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner M. [U] au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700, 2° du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens, dont distraction.

Par conclusions récapitulatives en date du 21 février 2024, M. [U] demande à la cour d'appel de :

confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

En conséquence,

débouter M. [B] [I] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

condamner M. [B] [I] au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

assortir la condamnation d'un anatocisme à compter de la date d'anniversaire de la décision à intervenir,

condamner M. [B] [I] aux entiers dépens y compris ceux d'exécution.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande de liquidation d'astreintes

M. [B] [I] fait valoir que M. [U] ne lui a pas signifié l'ordonnance de référé du 15 septembre 2021, puisque la signification a été faite par le syndicat des copropriétaires le 8 octobre 2021, et qu'en application des articles 324, 503 et 529 du code de procédure civile, la notification d'un jugement par une partie ne vaut pas erga omnes, de sorte qu'il ne peut s'en prévaloir. Il souligne que malgré l'absence de signification, M. [U] a fait pratiquer six saisies-attributions entre avril 2022 et février 2024 et s'est fait payer 3.748 euros en trop.

M. [U] répond à juste titre qu'il a également fait signifier le jugement, avec commandement de payer, le 14 février 2022. Il produit en effet (pièces 1.4 et 32.4) l'acte de signification d'ordonnance avec commandement de payer signifié à M. [B] [I] le 14 février 2022, par remise à étude. Les demandes de M. [U] sont donc parfaitement recevables.

Sur la liquidation des astreintes

M. [B] [I] fait valoir que M. [U] n'apporte pas la preuve de ce qu'il n'a pas respecté son obligation de se limiter à une activité de restauration compatible avec le règlement sanitaire de la ville de [Localité 4], se contente d'affirmer qu'il a continué son activité de restauration sans cesser la cuisson au barbecue et au four, et ne produit pas la moindre preuve qu'il aurait continué à utiliser le barbecue grill et le four. Il soutient qu'il a effectué de nombreuses démarches pour réaliser les travaux de mise en conformité, auprès d'entreprises et de sa propriétaire (la SCI Welcome), qui a demandé une assemblée générale extraordinaire pour obtenir l'autorisation de faire les travaux de mise en conformité de la gaine d'extraction, mais a fait l'objet d'une procédure de saisie immobilière pour des charges impayées, de sorte que le bien a été vendu par adjudication le 9 juin 2022 à la société Cnap Estate, nouveau propriétaire ; que l'assemblée générale a finalement autorisé les travaux, pour lesquels M. [U] s'est abstenu, ce qui montre sa mauvaise foi ; que les travaux ont débuté le 2 novembre 2022 ; qu'il était dans l'impossibilité, jusqu'à mi-décembre 2022, de communiquer les documents compte tenu des difficultés extérieures rencontrées ; que le certificat de ramonage et le certificat conformité, datant de février 2023, ne pouvaient pas être communiqués avant, car les travaux n'ont été terminés que mi-décembre 2022, et que le registre de sécurité a été communiqué le 11 novembre 2022. Il invoque enfin le principe de proportionnalité pour limiter la liquidation de l'astreinte à 1 euro, afin que ce ne soit pas un enrichissement pour le créancier. Il fait état de sa situation précaire, étant âgé de 71 ans, malade, bénéficiaire du revenu de solidarité active, et fait valoir qu'il n'a pas refusé de faire les travaux, mais qu'il ne pouvait pas les faire de sa seule initiative.

M. [U] soutient que M. [B] [I] ne produit aucune preuve sérieuse du respect de l'obligation de cesser d'utiliser le barbecue grill et le four ; que l'appelant a reconnu le défaut de communication des documents ; qu'il n'a entrepris aucune démarche pour exécuter ses obligations, puisqu'il n'a fait aucune demande à son bailleur, la SCI Welcome, tendant à faire convoquer une assemblée générale pour autoriser les travaux et n'a pas adressé les pièces demandées (devis...), de sorte que la procédure de saisie immobilière ne peut expliquer son incurie. Il souligne que M. [B] [I] est incapable de produire le certificat de ramonage et le registre de sécurité de l'établissement, et communique ceux qu'il avait déjà communiqués en référé et qui ont été rejetés par le juge de l'exécution. Il souligne que le certificat de conformité date du 21 février 2023, soit 17 mois après l'ordonnance de référé.

Aux termes de l'article L.131-4 alinéa 1er du code des procédures civiles d'exécution, le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.

L'article L.131-4 alinéa 3 du même code dispose que l'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère.

Cette mesure, qui est indépendante des dommages et intérêts, a uniquement un but comminatoire et est destinée à contraindre le débiteur à s'exécuter par une menace de condamnation. Elle n'a aucune vocation à le punir ni à indemniser le créancier d'un préjudice.

L'exécution de l'obligation avec retard ne supprime ou réduit l'astreinte qu'en cas de cause étrangère ou de difficultés d'exécution.

En l'espèce, selon ordonnance de référé du 15 septembre 2021, M. [B] [I] devait :

- cesser la cuisson au barbecue grill et au four et limiter son activité à une activité de restauration compatible avec l'absence d'installation d'extraction conforme au règlement sanitaire de la ville de [Localité 4] (et ce jusqu'à l'installation d'une extraction conforme), et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de 10 jours à compter de la signification de l'ordonnance, pendant un délai de 90 jours,

- communiquer à M. [U] et au syndicat des copropriétaires :

un certificat de ramonage et d'entretien de moins d'un mois,

un certificat de conformité de l'installation,

le registre de sécurité de l'établissement,

et ce sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de 10 jours à compter de la signification de la décision, pendant un délai de 90 jours.

L'ordonnance de référé, qui est exécutoire de droit par provision, a été signifiée par M. [U] le 14 février 2022. Le délai d'astreinte a donc commencé à courir le 25 février 2022 jusqu'au 26 mai 2022 pour les deux obligations.

Il convient d'observer le comportement du débiteur et les difficultés rencontrées depuis l'ordonnance de référé, ou à tout le moins sa signification le 14 février 2022, jusqu'au 26 mai 2022.

Contrairement à ce que soutient M. [B] [I], il appartient au débiteur de rapporter la preuve qu'il a exécuté les obligations assorties de l'astreinte ou qu'il a rencontré des difficultés pour s'exécuter ou s'est heurté à une cause étrangère.

C'est à juste titre que M. [U] soutient que l'attestation produite par l'appelant relative à la non utilisation du barbecue grill, datée du 20 septembre 2022, ne peut avoir aucune valeur probatoire, s'agissant d'une attestation faite par M. [B] [I] lui-même, comme l'a retenu très justement le premier juge.

A hauteur d'appel, M. [B] [I] produit une attestation, datée du 5 janvier 2023, de M. [L] [Z], gérant de la nouvelle société bailleresse depuis le 20 janvier 2022, qui indique aller régulièrement sur place au restaurant du [Adresse 1] et ne pas avoir constaté, à chacune de ses visites entre 12h00 et 14h00, de cuisson au barbecue grill ni au four. De même, il produit quatre attestations, datées de décembre 2022, de clients fidèles du restaurant qui indiquent que l'établissement ne sert plus de viande grillée, depuis novembre ou décembre 2021, et que lorsqu'ils en demandent la raison, on leur répond que c'est parce qu'il n'y a pas de hotte.

L'intimé ne produisant pas de pièces contraires, ne prouvant pas la persistance des nuisances olfactives et sonores, il y a lieu de considérer que M. [B] [I] a respecté son obligation de cesser d'utiliser le four et le barbecue grill et de limiter son activité à une activité de restauration compatible avec l'absence d'installation d'extraction conforme au règlement sanitaire de la ville de [Localité 4].

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a liquidé l'astreinte relative à cette obligation à la somme de 27.000 euros et de débouter M. [X] de sa demande de liquidation d'astreinte à ce titre.

S'agissant des documents à communiquer, il ressort des pièces produites que M. [B] [I] n'a exécuté son obligation judiciaire que postérieurement à l'expiration du délai d'astreinte. Il est évident qu'il ne pouvait pas communiquer le certificat de conformité avant que les travaux de pose de conduit d'extraction ne soient réalisés.

M. [B] [I] produit des devis établis en octobre 2021 pour des travaux de pose d'un conduit d'extraction, ainsi qu'un courriel de Mme [T] (mandataire du propriétaire) du 18 octobre 2021, demandant la fixation en urgence « d'une date d'assemblée extraordinaire dans les délais les plus rapides pour une mise en conformité de la gaine d'extraction du restaurant Kouchery Du Bon Coeur », à laquelle il a été répondu, dès le 20 octobre 2021, que la demande devait être faite par lettre recommandée en fournissant devis, assurance de l'entrepreneur, plan, photos. Il justifie également de la procédure de saisie immobilière engagée à l'encontre de sa bailleresse par le syndicat des copropriétaires par assignation du 22 juin 2021 qui a abouti à un jugement d'adjudication du 20 janvier 2022 au profit de la société Cnap Estate. Il apporte la preuve qu'il a pris contact avec le gérant du nouveau propriétaire, M. [Z], au sujet de son projet de travaux de pose d'un conduit d'extraction le 25 mars 2022 en lui transmettant des éléments. Il produit en outre un rapport de l'architecte de l'immeuble en date du 2 mai 2022, dont il ressort que le projet présenté n'était pas complet ni conforme. M. [B] [I] justifie alors de nouveaux devis datés des 5 et 6 mai 2022 et d'une convocation, datée du 17 mai 2022, à l'assemblée générale des copropriétaires du 9 juin 2022 contenant sa demande d'autorisation de travaux à l'ordre du jour. Il justifie ensuite de démarches auprès du service de l'urbanisme de la mairie de [Localité 4], et finalement d'une déclaration de travaux en date du 31 octobre 2022, les travaux devant se dérouler en novembre. La société Kely Trade France, entrepreneur, indique, dans une attestation du 21 février 2023 (pièce 48), que les travaux ont été terminés mi-décembre 2022.

L'appelant apporte la preuve qu'il a adressé à M. [U] le certificat de conformité (pièce 46) et le certificat de ramonage et d'entretien (pièce 47) par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 25 février 2023 (lettre non réclamée). Ces documents ont été établis le 21 février 2023 par l'entrepreneur.

Même si M. [U] estime que l'appelant n'a pas été suffisamment diligent pour faire réaliser les travaux et conteste les difficultés que celui-ci a rencontrées, il n'en demeure pas moins que l'ordre judiciaire pesant sur M. [B] [I] ne portait pas sur la réalisation de travaux, mais sur la communication de documents, dont deux ne sont pas établis par lui-même et dépendent de la réalisation de travaux. A réception de ces documents en février 2023, il les a transmis aussitôt à l'intimé. S'agissant du certificat de conformité, l'appelant était nécessairement dans l'impossibilité matérielle de le communiquer dans le délai d'astreinte, compte tenu de la nécessité de réunir une assemblée générale pour autoriser les travaux, et ce à la demande du propriétaire, lequel a changé en janvier 2022, puis de la nécessité d'attendre l'expiration du délai de recours de deux mois après la notification du procès-verbal d'assemblée générale.

S'agissant du ramonage, l'entrepreneur explique dans son certificat et son attestation (pièces 47 et 48) avoir effectué, le 15 novembre 2022, le ramonage de l'ancienne cheminée avant de fermer définitivement la bouche de cette cheminée et que les travaux ayant été terminés mi-décembre 2022, la prochaine opération de ramonage aura lieu en juin 2023. Toutefois, l'ordonnance de référé obligeait M. [B] [I] à communiquer un certificat de moins d'un mois, ce qui impliquait de faire ramoner au plus vite sa cheminée. Or l'appelant ne justifie pas d'une impossibilité d'effectuer le ramonage dès l'ordonnance ou sa signification, ni de difficultés, alors qu'il est constant qu'aucun ramonage n'a été effectué entre l'ordonnance du 15 septembre 2021 et le 15 novembre 2022, soit plus d'un an.

En outre, s'agissant du registre de sécurité de l'établissement, communiqué par avocat à celui de M. [X] le 11 novembre 2022, tel que constaté par le juge de l'exécution, l'appelant ne justifie pas de difficultés expliquant le retard de communication. A hauteur d'appel, il a produit un registre actualisé au 11 janvier 2023.

Par conséquent, le jugement entrepris doit être infirmé en ce qu'il a liquidé l'astreinte à la somme de 18.000 euros. L'astreinte sera modérée à la somme de 7.000 euros, montant qui est par ailleurs proportionné à l'enjeu du litige.

Sur la nouvelle astreinte

L'appelant s'oppose au prononcé d'une nouvelle astreinte en ce qu'au moment de la notification du jugement du juge de l'exécution le 28 décembre 2022, les travaux étaient terminés.

M. [U] estime que M. [B] [I] n'a toujours pas communiqué l'ensemble des documents, de sorte qu'il conclut à la confirmation du prononcé de la nouvelle astreinte.

Il résulte de ce qui précède que les travaux sont terminés et que les documents ont été communiqués. Compte tenu de l'évolution du litige en appel, la nouvelle astreinte n'est plus nécessaire.

Il convient donc d'infirmer le jugement sur ce point et de rejeter la demande de fixation d'une nouvelle astreinte.

Sur l'exécution forcée

L'appelant se plaint des saisies-attributions réalisées par M. [U], qui aurait perçu la somme totale de 13.538,53 euros (6.000 euros au titre de l'ordonnance de référé + 7.538,53 euros), alors qu'il est en situation précaire.

L'intimé répond que M. [B] [I] ne justifie pas de sa situation réelle, dissimule des éléments, est dirigeant de plusieurs sociétés, qu'il ne démontre pas qu'il ne peut pas payer les condamnations mises à sa charge, et que les saisies montrent que son train de vie est incompatible avec les revenus qu'il déclare.

Le présent arrêt infirmatif constitue le titre exécutoire permettant à M. [B] [I] d'obtenir restitution des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement du juge de l'exécution, sans qu'il y ait lieu de condamner M. [U] à lui restituer les sommes perçues le cas échéant en trop.

Sur les demandes accessoires

L'infirmation, partielle, du jugement résultant de l'évolution du litige en appel, il convient de confirmer les condamnations accessoires de M. [B] [I] (dépens, frais irrépétibles, capitalisation des intérêts), étant précisé qu'aussi curieux que cela puisse paraître à l'appelant, la capitalisation des intérêts est de droit dès lors qu'elle est demandée en justice, mais qu'il suffit de ne pas faire courir les intérêts pendant plus d'un an pour y faire échec.

M. [U], succombant en grande partie en appel, sera condamné aux dépens de la procédure d'appel, dont distraction au profit de l'avocat de l'appelant, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité commande de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

CONFIRME le jugement rendu le 7 décembre 2022 par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris, en ce qu'il a :

- condamné M. [B] [K] [B] [I] à payer à M. [V] [U] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les intérêts pourront être capitalisés conformément à l'article 1343-2 du code civil,

- condamné M. [B] [K] [B] [I] aux dépens,

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau,

DECLARE M. [V] [U] recevable en ses demandes,

DEBOUTE M. [V] [U] de sa demande de liquidation de l'astreinte relative à l'obligation de cesser la cuisson au barbecue grill et au four,

LIQUIDE à la somme de 7.000 euros l'astreinte relative à l'obligation de communication de documents pour la période du 25 février 2022 au 26 mai 2022,

CONDAMNE en conséquence M. [B] [K] [B] [I] à payer cette somme à M. [V] [U],

REJETTE la demande de nouvelle astreinte,

DIT n'y avoir lieu de condamner M. [V] [U] à rembourser la somme de 9.748,37 euros,

DEBOUTE les parties de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [V] [U] aux dépens de la procédure d'appel, dont distraction au profit de Me Marie-Pierre Mathieu, avocate, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 23/03912
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;23.03912 ?
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