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25/04/2024 | FRANCE | N°21/09260

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 25 avril 2024, 21/09260


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 25 AVRIL 2024



(n° 2024/ , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09260 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CET5B



Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Septembre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/11459





APPELANTE



Madame [T] [N]

[Adresse 2]
r>[Localité 4]

Représentée par Me Valérie PLANEIX de l'AARPI MONCEAU AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : J 83





INTIMEE



SAS RESULTIME

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 25 AVRIL 2024

(n° 2024/ , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09260 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CET5B

Décision déférée à la Cour : Jugement du 22 Septembre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/11459

APPELANTE

Madame [T] [N]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Valérie PLANEIX de l'AARPI MONCEAU AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : J 83

INTIMEE

SAS RESULTIME

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Sarra JOUGLA, avocat au barreau de PARIS, toque : A200, ayant pour avocat plaidant Me Caterina LISI, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Séverine MOUSSY, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre et de la formation

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre

Madame Séverine MOUSSY, Conseillère

Greffier, lors des débats : Madame Joanna FABBY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, prorogée à ce jour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre, et par Joanna FABBY, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat de travail à durée indéterminée à temps plein du 5 janvier 2004, la société Laboratoire Cosmétique de Lecousse a embauché Mme [T] [N] en qualité d'attachée commerciale.

Le 1er janvier 2016, son contrat de travail a été transféré, en application de l'article L. 1224-1 du code du travail, à la société Resultime (ci-après la société), filiale du groupe Nuxe, avec reprise d'ancienneté au 5 janvier 2004, pour exercer des fonctions d'attachée commerciale, statut cadre, coefficient 460, moyennant une rémunération de 2 429 euros bruts mensuels sur une base de douze mois pour une durée du travail de 151,67 heures.

La relation contractuelle est soumise à la convention collective nationale des industries chimiques en date du 30 décembre 1952 et la société employait au moins onze salariés lors de la rupture de cette relation.

Mme [N] a présenté un arrêt de travail à compter du 9 novembre 2017.

Suivant avis du 14 février 2019, le médecin du travail a déclaré Mme [N] « inapte à son poste » :

« Compte tenu de l'étude de poste en date du 29 janvier 2019 et des recommandations proposées à l'employeur lors de la visite du 16/01/2019, l'inaptitude au poste d'Attachée Commerciale de Madame [N] [T] est constatée par l'examen de ce jour.

Capacités restantes : pourrait occuper un autre poste de type sédentaire, donc sans conduite de véhicule pour des raisons professionnelles par exemple un poste de type administratif, voire le télétravail, sans manutention de plus de 2 kg, de façon répétée avec si nécessaire une formation préalable. »

Par lettre recommandée datée du 4 avril 2019, la société Resultime a proposé à Mme [N] un poste d'assistante commerciale en contrat à durée indéterminée au sein de la société Laboratoire Nuxe.

Par lettre du 14 avril 2019, Mme [N] a refusé cette proposition en précisant les motifs de son refus.

Par lettre recommandée datée du 19 avril 2019, la société a informé Mme [N] des motifs s'opposant à son reclassement.

Par lettre recommandée datée du 23 avril 2019, la société a convoqué Mme [N] à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 9 mai suivant.

Par lettre recommandée datée du 13 mai 2019, la société lui a notifié son licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle avec impossibilité de reclassement.

Contestant l'origine non professionnelle de son inaptitude et son licenciement et estimant ne pas être remplie de ses droits, Mme [N] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 24 décembre 2019.

Par jugement du 22 septembre 2021 auquel il est renvoyé pour l'exposé des prétentions initiales et de la procédure antérieure, le conseil de prud'hommes de Paris a :

- condamné la société à régler à Mme [N] les sommes suivantes :

* 2 000 euros au titre des manquements de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail pour la mise en place tardive de la garantie prévoyance ;

avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement ;

* 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société au paiement des dépens.

Par déclaration du 8 novembre 2021, Mme [N] a régulièrement interjeté appel du jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 2 février 2022 auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, Mme [N] demande à la cour de :

- infirmer le jugement en ce que la société a été condamnée à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des manquements dans l'exécution du contrat de travail et en ce que la salariée a été déboutée du surplus de ses demandes ;

- jugeant à nouveau, condamner la société à lui verser les sommes suivantes :

* 61 289,80 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 9 429,20 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

* 4 714,60 euros à titre de dommages et intérêts pour modification illégale du contrat de travail ;

* 22 428,40 euros à titre de rappel de maintien de salaire (décembre 2017 à mai 2019) ;

* 28 287,60 euros au titre des manquements de l'employeur dans l'exécution du contrat ;

* 28 287,60 euros au titre de la remise tardive des documents de fin de contrat ;

- condamner la société à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société aux dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 12 septembre 2023 auxquelles la cour renvoie pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [N] du surplus de ses demandes ;

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à régler à Mme [N] la somme de 2 000 euros au titre des manquements de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail pour la mise en place tardive de la garantie prévoyance, outre 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme [N] au paiement d'une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, couvrant les frais irrépétibles d'appel et ceux de première instance, outre intérêts au taux légal courant à compter du prononcé de l'arrêt, conformément à l'article 1231-7 du code civil ;

Sur le bien-fondé du licenciement pour inaptitude d'origine non professionnelle et impossibilité de reclassement

- dire et juger que l'inaptitude médicale de Mme [N] à son poste de travail a été régulièrement constatée par le médecin du travail ;

- dire et juger qu'elle a respecté son obligation de reclassement à l'égard de Mme [N] ;

- dire et juger que l'inaptitude médicale de Mme [N] est d'origine non professionnelle ;

en conséquence,

- dire et juger bien-fondé le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement de Mme [N] ;

- dire et juger que ce licenciement est intervenu hors tout contexte de dégradation des conditions de travail et manquements fautifs de l'employeur ;

- dire et juger que Mme [N] n'établit pas de lien entre la dégradation de son état de santé et ses conditions de travail ;

- rejeter la demande d'indemnisation au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse formulée par Mme [N] à hauteur de 61 289,80 euros ;

- rejeter la demande formulée par Mme [N] au titre de l'indemnité compensatrice de préavis à hauteur de 9 429,20 euros bruts, outre congés payés afférents ;

Sur l'absence de manquements imputables à la société dans l'exécution du contrat de travail et à l'occasion de la rupture

- constater l'absence de modification unilatérale du contrat de travail de Mme [N] ;

- constater qu'elle a maintenu le salaire de Mme [N] pendant sa période d'arrêt de travail conformément aux dispositions conventionnelles applicables ;

- constater que la dernière attestation Pôle emploi rectifiée remise à Mme [N] est conforme et qu'il n'y a pas lieu à nouvelle régularisation ;

en conséquence,

- rejeter la demande d'indemnisation au titre de la modification illégale du contrat de travail formulée par Mme [N] à hauteur de 4 714,60 euros ;

- rejeter la demande de rappel de maintien de salaire pour la période décembre 2017 à mai 2019 formulée par Mme [N] à hauteur de 22 428,40 euros bruts ;

- rejeter la demande d'indemnisation au titre des prétendus manquements de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail formulée par Mme [N] à hauteur de 28 287,60 euros ;

- rejeter la demande d'indemnisation au titre des prétendus manquements de l'employeur dans la remise tardive des documents de fin de contrat formulée par Mme [N] à hauteur de 28 287,60 euros ;

en tout état de cause,

- débouter Mme [N] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

à titre reconventionnel,

- condamner Mme [N] au paiement d'une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, couvrant les frais irrépétibles d'appel et ceux de première instance, outre intérêts au taux légal courant à compter du prononcé de l'arrêt, conformément à l'article 1231-7 du code civil, ainsi qu'aux dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 13 septembre 2023.

MOTIVATION

Sur l'exécution du contrat de travail

* sur les dommages-intérêts pour modification illégale du contrat de travail

Mme [N] soutient que la société a modifié à de nombreuses reprises, de façon unilatérale, son secteur géographique de prospection. A cet égard, elle fait valoir qu'entre janvier 2015 et mai 2016, son secteur avait été augmenté de cinq départements alors qu'à partir de mai 2016, il sera considérablement réduit, passant à neuf départements (hors région parisienne) dont deux nouveaux puis à compter de février 2017, à cinq départements ; repassant à huit départements en septembre 2017 (une grande partie de la région parisienne lui étant alors retirée). Mme [N] soutient que sa rémunération se composait de nombreuses primes calculées sur le résultat commercial de son activité directement lié à son portefeuille de clients et prospects ; que les modifications unilatérales de son secteur géographique de prospection ont eu une incidence défavorable sur la croissance de son portefeuille et donc sa rémunération. Elle soutient encore que les clauses par lesquelles un employeur se réserve le droit de modifier le secteur géographique de prospection sont nulles et non opposables au salarié.

Ce à quoi la société réplique que le contrat de travail est clair sur l'absence de contractualisation du secteur géographique de prospection (article 5) ; que la mention du lieu de travail dans le contrat de travail correspondant au secteur géographique d'activité de Mme [N] n'avait qu'une valeur informative et était susceptible d'être modifiée dans le cadre de l'exercice du pouvoir de direction de l'employeur sauf à démontrer qu'une telle modification aurait eu une incidence sur la rémunération de la salariée. La société fait valoir que Mme [N] ne rapporte pas cette preuve et que, de fait, elle n'a subi aucune diminution de sa rémunération.

L'article 5 du contrat de travail intitulé « secteur d'activité et mobilité professionnelle » stipule :

« Madame [T] [N] exercera son activité sur le secteur comprenant au jour de son entrée en fonction, à titre d'information les départements suivants :

2, 3, 18, 45, 59, 60,62, 75, 76, 77, 78, 80, 91, 92, 93, 94, 95

(') Par ailleurs, et pour tenir compte notamment de l'évolution des structures et des activités de la Société, Madame [T] [N] pourra pour des raisons touchant à l'organisation et au bon fonctionnement de la Société, être ultérieurement affectée sur un autre lieu de travail en France.

Cette mobilité est inhérente à la nature du présent contrat.

Madame [T] [N] s'engage expressément à accepter toutes les nouvelles affectations qui pourraient lui être données de manière temporaire ou définitive ainsi que le changement de lieu de résidence qui pourraient en résulter, sans que cette modification géographique ne puisse constituer une modification d'un élément essentiel de son contrat de travail.

Dans ce cadre, et compte tenu de la nature de ses fonctions, Madame [T] [N] exercera en particulier son activité sur un secteur d'activité qui lui sera indiqué par la Direction et qui n'aura aucun caractère de fixité ni d'exclusivité.

(') Ainsi, pour tenir notamment compte de l'évolution des structures et des activités de la Société, cette dernière se réserve le droit de modifier, à tout moment, ses gammes, lignes et produits, la clientèle visée ou le secteur géographique de l'intéressée.

Madame [T] [N] reconnaît à ce titre que ses attributions ne comportent pas, à son profit, la concession d'un secteur géographique, d'une gamme de produits ni d'un secteur de clientèle. »

Au titre de la rémunération, l'article 7 du contrat de travail stipule que, outre le salaire fixe mensuel, Mme [N] « pourra être amenée à être éligible à un système de rémunération variable sur atteinte d'objectif conformément aux règles en vigueur dans la Société et tel qu'il est susceptible d'évoluer. »

La limitation de la zone géographique de prospection d'un commercial, qui est de nature à amoindrir son potentiel commercial et à influer par la suite sur le montant de la partie variable de sa rémunération, assise sur l'atteinte d'objectifs selon les termes du contrat, est constitutive d'une modification du contrat de travail, nécessitant l'accord de la salariée.

En l'espèce, Mme [N] produit un courriel de M. [W] [O] [H], directeur des ventes Resultime, en date du 4 septembre 2017 dont elle est, avec d'autres personnes, destinataire, qui a pour objet « SECTO C5 » et dont le contenu est une carte de France métropolitaine avec des secteurs géographiques individualisés par des nuances de gris différentes. Cette pièce ne permet pas de déterminer le secteur géographique de Mme [N] à cette date ni toutes les évolutions relatives aux départements se trouvant inclus dans son secteur géographique de prospection. Néanmoins, la société ne conteste pas la réalité de ces modifications mais uniquement leur incidence négative sur la rémunération de Mme [N].

Or, si Mme [N] ne chiffre pas l'incidence négative sur sa rémunération, il n'en demeure pas moins que la modification de son secteur géographique de prospection par la réduction du nombre de départements ou la perte d'une partie de la région parisienne ne lui a pas permis d'optimiser sa rémunération lui occasionnant un préjudice qui sera suffisamment indemnisé à hauteur de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts. La décision des premiers juges sera infirmée à ce titre.

* sur le rappel de maintien de salaire

Mme [N] soutient que, pendant environ dix-huit mois, son arrêt de travail n'a pas été pris en charge par la prévoyance d'entreprise en raison de la négligence de l'employeur. Elle expose que l'employeur a appliqué la subrogation à l'égard de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) et a procédé à un maintien de salaire à 100% pendant six mois puis à 50% pendant six autres mois. Elle expose également qu'elle bénéficiait d'une mutuelle / prévoyance d'entreprise souscrite auprès de l'assureur Allianz pour laquelle l'employeur précomptait des cotisations sur son salaire chaque mois ; que le contrat d'assurance prévoyait un maintien du salaire brut de référence à 100% en cas d'arrêt de travail pour maladie, sans limite de durée et après une franchise de 60 jours. Mme [N] soutient qu'elle aurait donc dû bénéficier à ce titre d'un maintien de son salaire à 100% pendant toute la durée de son arrêt de travail soit chaque mois à hauteur de 4 687,88 euros mais que l'employeur n'a pas informé l'organisme de prévoyance de sorte que celui-ci n'a procédé à aucun versement ; qu'au surplus, au cours de l'année 2018, l'employeur a changé d'assureur sans en informer les salariés. Mme [N] fait valoir que c'est à tort que l'employeur a appliqué la convention collective sur le maintien de salaire alors qu'il avait souscrit un contrat d'assurance dont les stipulations étaient plus favorables à la salariée ; qu'elle a finalement perçu à la fin du mois de mars 2019 la somme de 12 602,07 euros sans qu'aucun décompte des prestations de prévoyance ne lui ait été adressé en dépit de ses demandes.

Ce à quoi la société réplique qu'elle a maintenu le salaire de Mme [N] conformément aux dispositions de la convention collective de novembre 2017 à octobre 2018. La société réplique également qu'en raison d'une déclaration tardive, elle a assuré elle-même le complément de salaire sur la base du traitement de référence brut pour la période du 8 janvier au 25 août 2018, date à partir de laquelle l'organisme de prévoyance Allianz a pris en charge l'arrêt de travail ; que Allianz a versé un complément d'indemnités journalières de 12 602,07 euros pour la période du 25 août au 19 décembre 2018 - montant reversé à Mme [N] sur son bulletin de paie de mars 2019 ; que Mme [N] aurait même bénéficié d'un trop perçu que Allianz a renoncé à réclamer.

Il est constant, eu égard à la notice d'information produite par Mme [N], que le contrat collectif de prévoyance prévoit une garantie en cas d'arrêt de travail ainsi définie : « le montant de notre prestation est égal à la différence entre le montant ci-après et celui du paiement dû par la Sécurité sociale : 1/365ème de 100% de votre traitement brut », à l'expiration d'un délai de franchise fixé à 60 jours.

La société reconnaît qu'elle a déclaré tardivement à l'assureur l'arrêt de travail de Mme [N] et qu'en raison de sa négligence, elle a assuré elle-même le versement à la salariée du complément de salaire sur la période du 8 janvier au 25 août 2018 et que ce n'est qu'ensuite que l'assureur est intervenu.

Pour la période postérieure au 25 août 2018, Mme [N] n'est pas fondée à solliciter de l'employeur un quelconque reliquat de salaire puisque la société n'est pas tenue de se substituer à l'assureur.

En revanche, pour la période du 1er décembre 2017 au 25 août 2018, l'examen des bulletins de salaire ainsi que l'étude comparée des pièces n°27 de la salariée et n°31 de l'employeur révèlent que l'employeur reste débiteur d'une somme de 8 948,44 euros pour parvenir au maintien d'un salaire brut mensuel de 100% dès lors que le rappel de salaire calculé sur la base des minima conventionnels et versé en juillet 2018 à hauteur de 15 207,43 euros ne concernait pas uniquement cette période.

Partant, la société sera condamnée à payer à Mme [N] la somme de 8 948,44 euros au titre du reliquat de maintien de salaire pour la période du 1er décembre 2017 au 25 août 2018. La décision des premiers juges sera infirmée à ce titre.

* sur les manquements de l'employeur dans l'exécution du contrat

Mme [N] soutient que la grave carence de l'employeur dans le respect de ses obligations, à savoir le fait de ne pas avoir organisé pendant un an et demi la prise en charge de son arrêt de travail par l'organisme de prévoyance et de ne pas lui avoir versé l'intégralité des sommes dues six mois après la rupture du contrat de travail, l'a placée dans une situation financière insoutenable la dernière année de son arrêt de travail alors qu'elle vivait seule avec deux enfants à charge.

La société, qui a sollicité l'infirmation du chef de jugement l'ayant condamnée à payer la somme de 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail relativement à la mise en place tardive de la garantie prévoyance, n'a pas présenté d'observations dans ses conclusions sur la demande de Mme [N] qui, de son côté, sollicite une somme plus élevée que celle allouée en première instance.

En l'espèce, Mme [N] justifie avoir eu des découverts bancaires et, corollairement, des frais bancaires au cours de l'année 2018, avoir effectué des démarches pour bénéficier d'un logement social auprès de la ville de [Localité 4] à la fin de l'année 2018 et avoir bénéficié d'une aide alimentaire du département des Hauts de Seine (aide sociale à l'enfance) en février 2019.

Il ressort des pièces versées aux débats que l'employeur n'a pas agi avec diligence auprès de l'organisme de prévoyance pour la prise en charge de l'arrêt de travail de Mme [N] et le complément de salaire pris en charge par l'assureur après le 25 août 2018 ne sera effectivement versé à Mme [N] qu'en mars 2019. Il ressort encore de ces pièces que Mme [N] a, par l'intermédiaire de son avocat, interpellé l'employeur à plusieurs reprises sur sa situation et qu'au 21 mars 2019, la société ne lui avait pas versé son salaire pour la période du 5 au 14 février 2019.

Ce manque de diligence qui s'est inscrit dans la durée a causé un préjudice à Mme [N] qui a dû multiplier les démarches et faire face à des soucis financiers directement liés au manquement de l'employeur. Ce préjudice sera justement réparé par l'allocation d'une somme de 4 000 euros à titre de dommages-intérêts et la décision des premiers juges sera infirmée sur le quantum.

Sur la rupture du contrat de travail

La lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est rédigée dans les termes suivants :

« (') Au vu de cet entretien, nous sommes au regret de vous notifier, par la présente, votre licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement compte tenu de votre état de santé constaté par le médecin du travail.

(') Au terme de votre absence pour maladie non professionnelle qui a été renouvelée de façon continue à compter du 9 novembre 2017, nous avons organisé, conformément aux dispositions légales, une visite médicale de reprise en date du 14 février 2019 au cours de laquelle le Médecin du travail a rendu un avis définitif relatif à votre inaptitude à votre poste dans les termes suivants : « inapte à son poste.

Compte tenu de l'étude de poste en date du 29 janvier 2019 et des recommandations proposées à l'employeur lors de la visite du 16/01/2019, l'inaptitude au poste d'Attachée Commerciale de Madame [N] est constatée par l'examen de ce jour.

Capacités restantes : pourrait occuper un autre poste de type sédentaire, donc sans conduite de véhicule pour des raisons professionnelles par exemple un poste de type administratif, voire le télétravail, sans manutention de plus de 2 kg, de façon répétée avec si nécessaire une formation préalable ».

Le Médecin du travail avait également réalisé une étude de votre poste et des conditions de travail en date du 29 janvier 2019 et échangé avec l'employeur en date du 16 janvier 2019.

Dans ces conditions, considérant l'obligation de moyens mise à notre charge en tant qu'employeur en matière de reclassement, nous avons procédé, ainsi que nous vous l'avons écrit le 18 février 2019, à des recherches effectives et à un examen individualisé des possibilités de votre reclassement sur un autre emploi approprié à vos capacités et compatible avec votre qualification, vos expériences professionnelles et votre formation notamment, tant au sein de la société que des sociétés du groupe

NUXE situées sur le territoire national et ce, afin de tenter, par tous moyens, d'assurer votre maintien dans l'emploi.

A cet effet et afin d'affiner nos recherches de reclassement, nous vous avons invité à mettre à jour votre « fiche d'aptitudes professionnelles », mise à jour que vous nous avez fait parvenir par courrier daté et courriel du 27 février 2019.

A l'issue de ces recherches individualisées, nous avons transmis au médecin du travail, par courriel du 19 mars 2019, les informations relatives au poste de reclassement qui pouvait être envisagé afin de solliciter des précisions de sa part sur cette éventuelle possibilité de reclassement et recueillir son avis notamment sur la compatibilité de ce poste avec les conclusions médicales et indications relatives à votre reclassement portées dans l'avis d'inaptitude, voire avec d'éventuelles aptitudes physiques résiduelles.

Par courriel du 21 mars 2019, le médecin du travail nous a répondu que « Le poste d'assistante commerciale que vous proposez répond aux préconisations de l'avis d'inaptitude, sous réserve que l'organisation d'événements ne demande ni déplacements, ni manutention.

Pour les autres postes de bureau sur les sites placés sous ma surveillance médicale, s'ils répondent au descriptif de la fiche d'aptitude, il n'y a pas d'opposition de ma part, avec les mêmes réserves.

Pour ce qui est d'un poste dans des établissements qui ne relèvent pas de ma surveillance, je n'ai pas vocation à me prononcer et il faudrait le cas échéant interroger les médecins des sites concernés. »

Le 3 avril 2019, nous avons informé et consulté les membres du Comité Social et Economique 'CSE) de la société RESULTIME sur la possibilité de votre reclassement, telle qu'identifiée à l'issue de nos recherches et conformes aux préconisations médicales, en prenant soin de leur transmettre tous les documents et informations nécessaires à cette consultation.

A l'issue de cette réunion, les membres du CSE ont rendu un avis favorable à l'unanimité concernant ce poste de reclassement.

Dans ce cadre, considérant l'avis d'inaptitude rendu le 14 février 2019 par le médecin du travail et ses conclusions écrites nous avons été en mesure de vous proposer, par courrier du 4 avril 2019, un reclassement sur le poste suivant, identifié et disponible au sein des autres sociétés du groupe NUXE située sur le territoire national :

Assistante Commerciale au sein de la société Laboratoire NUXE (poste à pourvoir en CDI)

Nous avons également joint à ce courrier la fiche de fonction afférente à ce poste détaillant notamment les principales attributions, le statut, la classification conventionnelle, le lieu de travail, la durée et les horaires de travail, ainsi que la rémunération fixe et variable.

Cette Proposition de poste qui vous a été adressée est sérieuse et répond aux exigences légales dès lors qu'elle est conforme aux conclusions écrites du médecin du travail, appropriées à vos capacités et compatibles avec votre qualification, vos expériences professionnelles et votre formation notamment et qu'elle correspond aux emplois disponibles identifiés dans le cadre de nos recherches de reclassement.

Néanmoins, par courrier daté du 14 avril 2019 vous avez refusé ce reclassement indiquant « je vous indique ne pas pouvoir accepter ce poste dont les fonctions, qui restent dans le même secteur d'activité, sont cependant complètement différences de celles de mon ancien poste, que j'occupais depuis bientôt 15 ans ».

Compte tenu de votre refus du poste proposé et en l'absence de tout autre emploi disponible qui serait compatible avec les conclusions écrites du médecin du travail, aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail, et approprié à vos aptitudes professionnelles, nous avons été contraints de conclure à l'impossibilité de votre reclassement, tant au sein de la société RESULTIME que des sociétés du groupe NUXE situées sur le territoire national.

Par courrier du 19 avril 2019, nous vous avons informée des motifs s'opposant à votre reclassement.

C'est donc pour toutes les raisons ci-dessus exposées que nous sommes contraints de rompre nos relations contractuelles et procéder à votre licenciement pour inaptitude physique et impossibilité de reclassement.

Nous vous informons que votre contrat de travail sera définitivement rompu à la date de première présentation de la présente lettre de notification de licenciement. Votre licenciement n'ouvre pas droit à un préavis. ('). »

* sur le licenciement

* sur l'origine de l'inaptitude

Mme [N] soutient que les juges apprécient souverainement la réalité du caractère professionnel de l'inaptitude en fonction des faits qui leur sont soumis. Elle soutient également qu'il importe peu que l'employeur n'ait pas été informé ou n'ait pas eu connaissance du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie lors du licenciement dès lors que le lien de causalité entre les conditions de travail et l'inaptitude est établi.

Mme [N] fait valoir que son rhumatologue, qui a diagnostiqué une « lombalgie en barre » depuis janvier 2017 et des « douleurs exquises sur les massifs articulaires postérieurs » ayant nécessité des infiltrations, a relevé au titre des causes de cet état que la salariée parcourait 500 kilomètres par jour en voiture régulièrement et que la reprise du travail par Mme [N] ne pouvait pas se faire en continuant la conduite sur de longues distances vu sa fragilité dorso-lombaire. Mme [N] en conclut que son inaptitude a pour origine ses conditions de travail.

Ce à quoi la société réplique qu'à l'occasion de l'étude de poste réalisée par le médecin du travail, celui-ci a disposé d'informations précises et complètes sur la situation de la salariée ainsi que sur l'organisation et le fonctionnement de l'entreprise. La société réplique encore que l'avis d'inaptitude médicale n'ayant pas été contesté par Mme [N], cet avis s'impose aux parties.

Les règles protectrices applicables aux victimes d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée et invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement. Cette application n'est pas subordonnée à la reconnaissance par la CPAM du lien de causalité entre la maladie professionnelle et l'inaptitude de sorte que, quelles que soient les décisions prises par la CPAM, le juge doit apprécier si l'inaptitude du salarié a ou non une origine professionnelle.

En l'espèce, Mme [N] se fonde sur les éléments suivants pour conclure à l'origine professionnelle de son inaptitude :

- ses avis d'arrêts de travail du 9 novembre 2017 au 18 février 2019 ;

- un courrier de son médecin rhumatologue à son médecin traitant en date du 22 novembre 2017 relevant que la patiente fait jusqu'à 500 kilomètres par jour ;

- les prescriptions de son médecin traitant des massages et des séances de rééducation du rachis lombo-sacré en 2017 et 2018 ;

- les prescriptions de médicaments en 2017 et 2018 ;

- l'avis du rhumatologue en date du 17 décembre 2018 estimant judicieux d'envisager un reclassement professionnel excluant la conduite d'un véhicule sur de longues distances de manière régulière ;

- l'avis d'inaptitude du 14 février 2019.

Toutefois, si la circonstance que son poste d'attachée commerciale l'amenait à conduire régulièrement sur de longues distances (plusieurs centaines de kilomètres) a été mentionnée à deux reprises par le médecin rhumatologue, aucun de ces éléments ne fait référence à une origine professionnelle de la pathologie dont souffre Mme [N] et ne permet d'affirmer que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle lors du licenciement.

Par conséquent, Mme [N] sera déboutée de sa demande tendant à voir dire et juger que son inaptitude a une origine professionnelle. La décision des premiers juges sera confirmée à ce titre.

* sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse

Mme [N] soutient que la société a manqué à son obligation de reclassement. Elle fait valoir que la société qui appartient à un groupe de sociétés ne lui a proposé qu'un seul poste qui se serait traduit par une rétrogradation professionnelle. Mme [N] fait également valoir que la société n'a pas procédé à une recherche complète et sérieuse des postes disponibles dans les sociétés Laboratoire Cosmétique de Lecousse, Laboratoire Nuxe et Nuxe Spa. Elle fait encore valoir que la société n'a pas procédé à des recherches en son sein ni dans trois autres sociétés du groupe - les sociétés Nuxe International, Nuxe Développement et Orion Beauté.

Ce à quoi la société réplique qu'elle a effectué des recherches sérieuses, effectives et loyales et a procédé à un examen individuel des possibilités de reclassement de Mme [N]. Elle fait valoir qu'elle rapporte la preuve de l'impossibilité de reclasser Mme [N], compte tenu de son refus d'accepter le poste de reclassement proposé - compatible avec les prescriptions du médecin du travail - et en l'absence de tout autre emploi disponible ; que son obligation de reclassement est réputée satisfaite.

L'article L. 1235-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles et que si un doute subsiste, il profite au salarié. Ainsi, l'administration de la preuve du caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis, objectifs imputables au salarié et matériellement vérifiables.

Suivant l'article L. 1226-2 du même code, lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu'il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Aux termes de l'article L. 1226-2-1 du code du travail, lorsqu'il est impossible à l'employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent à son reclassement.

L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail.

S'il prononce le licenciement, l'employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III du présent livre.

Suivant la jurisprudence de la Cour de cassation, la présomption instituée par ce texte ne joue que si l'employeur a proposé à la salariée, loyalement, en tenant compte des préconisations et indications du médecin du travail, un autre emploi approprié à ses capacités, aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

En l'espèce, la société verse aux débats un organigramme du groupe de sociétés établi par elle qui révèle que sept sociétés sont situées sur le territoire national dont la société holding Nuxe International SAS.

Il ressort des pièces versées aux débats que l'employeur a interrogé les sociétés Laboratoire Cosmétique de Lecousse, Laboratoire Nuxe et Nuxe Spa sur la recherche d'un reclassement pour sa salariée et produit les réponses à sa demande. C'est ainsi que la société Laboratoire Nuxe a répondu qu'il y avait un poste d'assistant commercial à pourvoir.

La société a alors proposé à Mme [N] , par lettre recommandée datée du 4 avril 2019, ce poste d'assistante commerciale au sein de la société Laboratoire Nuxe (poste à pourvoir contrat à durée indéterminée) avec une reprise d'ancienneté au 5 janvier 2004. Il résulte de la fiche de fonctions qui était jointe à la lettre que les attributions principales de l'assistante commerciale consistent à saisir, gérer et suivre les commandes passées par les pharmacies, à élaborer et diffuser des mailings et à participer à la préparation des séminaires commerciaux moyennant une rémunération brute mensuelle de 2 583 euros , outre des primes annuelles sur objectifs, au titre d'une rémunération variable,plafonnées à 1 500 euros, pour une durée de travail de 37,5 heures par semaine - sans précision du statut et du coefficient.

L'employeur a souligné que le comité social et économique avait à l'unanimité donné un avis favorable à ce poste de reclassement et que le médecin du travail avait considéré que ce poste répondait aux préconisations de l'avis d'inaptitude « sous réserve que l'organisation d'événement ne demande ni déplacements, ni manutention ».

Si le poste d'assistante commerciale proposé respecte les préconisations du médecin du travail sous la réserve qu'il a exprimée, les éléments de la cause ne permettent pas de conclure que l'emploi a été proposé dans les conditions prévues à l'article L. 1226-2 du code du travail puisque l'employeur n'a pas procédé en son sein et dans l'intégralité des autres sociétés du groupe à la recherche d'un emploi aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé par Mme [N], au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail, alors que le poste d'assistante commerciale proposé n'est pas comparable dans ses attributions et sa rémunération à celui d'attachée commerciale (statut cadre). Partant, en n'ayant pas procédé loyalement à la recherche d'un reclassement, la présomption d'accomplissement de l'obligation de reclassement n'a pas joué et le licenciement de Mme [N] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La décision des premiers juges sera donc infirmée à ce titre.

* sur les conséquences du licenciement

* sur « l'indemnité compensatrice de préavis » 

La cour n'ayant pas retenu l'origine professionnelle de l'inaptitude de Mme [N], celle-ci n'est pas fondée à solliciter le versement de l'indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis et prévue par l'article L. 1226-14 du code du travail. Mme [N] sera donc déboutée de sa demande et la décision des premiers juges sera confirmée à ce titre.

* sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés dans le tableau soit en l'espèce entre trois et treize mois de salaire brut.

Compte tenu de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié, de son âge - 52 ans - de son ancienneté ' quinze ans - de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle ainsi que des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies ' Mme [N] ne produisant aucun élément sur sa situation actuelle - il lui sera alloué, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, une somme de 47 140 euros, suffisant à réparer son entier préjudice.

La décision des premiers juges sera infirmée à ce titre.

Sur les autres demandes

* sur la remise tardive des documents de fin de contrat

Mme [N] soutient que la société lui a remis tardivement les documents de fin de contrat et que la première attestation Pôle emploi antidatée n'avait pas été complétée avec les douze mois de salaire précédant la suspension de son contrat de travail mais avec les douze derniers mois de salaire durant sa maladie puis que la seconde attestation Pôle emploi, toujours antidatée, ne prenait pas en compte la réévaluation de son salaire sur la base des minima conventionnels. Mme [N] soutient encore qu'il lui aura fallu attendre le 15 juillet 2019 pour obtenir une troisième attestation correctement renseignée sur ses salaires mais erronée sur le nombre de jours de congés payés. Elle fait valoir que la prise en compte par Pôle emploi d'un salaire de référence moindre et d'un délai de carence pour congés payés supérieur à sa rémunération.

Ce à quoi la société réplique que les erreurs alléguées par Mme [N] dans la dernière attestation Pôle emploi adressée le 15 juillet 2019 ne sont pas fondées et qu'elle n'est pas responsable des erreurs commises par Pôle emploi. Elle réplique encore que, s'agissant de l'indemnité compensatrice de congés payés, c'est à juste titre qu'elle a mentionné 66 jours ouvrables.

En l'espèce, il est avéré que Mme [N] a dû attendre le mois de juillet 2019 pour obtenir une attestation Pôle emploi correctement renseignée sur ses salaires alors que son contrat de travail a pris fin à la mi-mai 2019. Ce manque de rigueur de l'employeur, qui s'est ajouté au manque de diligence dont il avait déjà fait preuve dans la gestion de l'arrêt de travail de Mme [N], a causé un préjudice à Mme [N] qui sera réparé en lui allouant une somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts.

* sur le remboursement à Pôle emploi

Conformément aux dispositions de l'article. L.1235-4 du code du travail, la cour ordonne à la société de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à Mme [N] du jour du licenciement au jour du présent arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités.

* sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile

La société sera condamnée aux dépens en appel, la décision des premiers juges étant confirmée sur les dépens.

La société sera également condamnée à payer à Mme [N] la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, la décision des premiers juges étant confirmée sur les frais irrépétibles.

Enfin, la société sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant par arrêt contradictoire et par mise à disposition,

Infirme le jugement sauf en ce qui concerne l'origine non professionnelle de l'inaptitude et l'indemnité compensatrice de préavis ainsi que les frais irrépétibles et les dépens ;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la société Resultime à payer à Mme [T] [N] les sommes suivantes :

* 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour modification du contrat de travail sans l'accord de la salariée ;

* 8 948,44 euros au titre du rappel de maintien de salaire pour la période du 1er décembre 2017 au 25 août 2018;

* 4 000 euros à titre de dommages-intérêts pour les manquements de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail ;

Déboute Mme [T] [N] de sa demande tendant à voir juger que son inaptitude a une origine professionnelle ;

Dit que le licenciement pour inaptitude avec impossibilité de reclassement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la société Resultime à payer à Mme [T] [N] les sommes suivantes :

* 47 140 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

* 1 500 euros à titre de dommages-intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat ;

Condamne la société Resultime à payer à Mme [T] [N] la somme de 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne la société Resultime aux dépens en appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/09260
Date de la décision : 25/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-25;21.09260 ?
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