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24/04/2024 | FRANCE | N°22/06288

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 24 avril 2024, 22/06288


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 24 AVRIL 2024



(n° /2024, 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06288 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFRGH



Décision déférée à la Cour : jugement du 21 février 2022 - tribunal judiciaire de BOBIGNY - RG n° 20/09736





APPELANTE



S.A. AXA FRANCE IARD prise en la personne de son rep

résentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 7]



Représentée par Me Jean-Marc ZANATI de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocat au barreau de ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 24 AVRIL 2024

(n° /2024, 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06288 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFRGH

Décision déférée à la Cour : jugement du 21 février 2022 - tribunal judiciaire de BOBIGNY - RG n° 20/09736

APPELANTE

S.A. AXA FRANCE IARD prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représentée par Me Jean-Marc ZANATI de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0435

INTIMES

Madame [V] [R]

[Adresse 2]

[Localité 8]

Représentée et assistée à l'audience par Me Tanguy LETU de la SCP LETU ITTAH ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS

Monsieur [O] [K] [W] entrepreneur individuel exerçant sous l'enseigne ENTREPRISE GENERALE DE PEINTURE [O] [W], domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Bertrand RABOURDIN de la SELARL SELARL D'AVOCATS MARTIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0158, substitué à l'audience par Me Jean-Philippe PELERIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D158

S.A. LLOYD'S INSURANCE COMPANY prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Ayant pour avocat plaidant Me Sarah XERRI HANOTE, avocat au barreau de PARIS, substitué à l'audience par Me Willy RANDRIANASOLO, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 février 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvie Delacourt, présidente faisant fonction de conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Ludovic Jariel, président de chambre

Mme Sylvie Delacourt, présidente faisant fonction de conseillère

Mme Viviane Szlamovicz, conseillère

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre DARJ

ARRET :

- contradictoire.

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Ludovic JARIEL, président de chambre et par Manon CARON, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Le 5 septembre 2014, suivant devis, Mme [R] a confié à M. [K] [W] des travaux de ravalement et de réfection de la corniche de son pavillon sis [Adresse 2]).

Mme [R] s'est rapidement plainte de la qualité des travaux réalisés par M. [K] [W].

Le 27 novembre 2014, M. [K] [W] a établi une facture des travaux.

Le 3 avril 2015, Mme [R] a effectué une déclaration de sinistre auprès de l'assureur de M. [K] [W], la société Axelliance creative solutions, aux droits de laquelle sont venus les souscripteurs du Lloyd's de Londres.

Elle a refusé de payer le solde des travaux.

Le 13 avril 2015, l'assureur a indiqué à Mme [R] refuser de prendre en charge le sinistre, en l'absence de réception des travaux.

Le 30 mars 2017, sur saisine de M. [K] [W], le tribunal d'instance du Raincy a condamné Mme [R] à lui payer la somme de 5 262,02 euros au titre du solde des travaux.

Le 1er septembre 2017, M. [K] [W] a fait procéder à une saisie-attribution.

Le 12 avril 2018, la saisie-attribution a été confirmée par le juge de l'exécution.

Le 25 juin 2018, sur saisine de Mme [R], le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny a ordonné une mesure d'expertise et désigné M. [B], en qualité d'expert.

Le 17 juin 2019, pendant l'expertise, Mme [R] a établi un procès-verbal de réception avec réserves en l'absence de M. [K] [W].

Le 22 novembre 2019, les opérations d'expertise ont été rendues communes à la société Axa France IARD (la société Axa) et aux souscripteurs du Lloyd's de Londres, en qualité d'assureurs de M. [K] [W].

Début 2020, Mme [R] a réglé à M. [K] [W] l'intégralité des sommes dues.

Le 26 juin 2020, l'expert a déposé son rapport.

Le 27 octobre 2020, Mme [R] a, en lecture du rapport, assigné M. [K] [W] et ses assureurs, la société Axa et les souscripteurs du Lloyd's de Londres, devant le tribunal judiciaire de Bobigny, afin d'obtenir l'indemnisation de ses préjudices.

La société Lloyd's insurance company (la société LIC) est venue aux droits des souscripteurs du Lloyd's de Londres.

Par jugement du 21 février 2022, le tribunal judiciaire de Bobigny a statué en ces termes :

Déclare irrecevables les fins de non-recevoir soulevées par M. [K] [W],

Condamne in solidum M. [K] [W] et ses assureurs les sociétés Axa et LIC à payer à Mme [R] les sommes suivantes :

- 35 963,52 euros HT au titre des travaux réparatoires,

- 81 104,17 euros au titre du préjudice locatif

- 4 098 euros TTC au titre des honoraires de l'expert-conseil,

Dit que sont opposables les franchises, plafonds et limites de la garantie de la société LIC,

Déboute Mme [R] du surplus de ses demandes indemnitaires,

Condamne in solidum M. [K] [W] et ses assureurs, les sociétés Axa et LIC à payer à Mme [R] la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum M. [K] [W] et ses assureurs les sociétés Axa et LIC aux dépens, qui comprendront notamment les frais d'expertise judiciaire et les frais d'analyses en laboratoire,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

Dit n'y avoir lieu à écarter l'exécution provisoire de droit.

Par déclaration en date du 25 mars 2022, la société Axa, ès qualités, a interjeté appel du jugement, intimant devant la cour :

- Mme [R],

- M. [K] [W],

- la société LIC, ès qualités.

Par déclaration du 27 avril 2022, M. [K] [W] a également interjeté appel du jugement du 21 février 2022.

Le 2 juin 2022, ces deux appels ont fait l'objet d'une jonction.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 28 octobre 2022, la société Axa, ès qualités, demande à la cour de :

Déclarer recevable et bien fondée la société Axa en ses demandes,

Infirmer le jugement querellé en ce qu'il a condamné la société Axa à verser à Mme [R], in solidum, avec M. [K] [W] et la société LIC les sommes suivantes :

o 35 963,52 euros HT au titre des travaux réparatoires,

o 81 104,17 euros au titre du préjudice locatif,

o 4 098 euros au titre des honoraires de l'expert-conseil,

o 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

o dépens en ceux compris les frais d'expertise judiciaire,

Et statuant à nouveau :

Débouter Mme [R] de l'ensemble de ses demandes dirigées contre la société Axa,

Débouter M. [K] [W] de l'ensemble de ses demandes dirigées contre la société Axa,

Débouter la société LIC de l'ensemble de ses demandes dirigées contre la société Axa,

Prononcer la mise hors de cause de la société Axa,

En tout état de cause,

Condamner tout succombant au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Débouter les parties de leurs demandes au paiement de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de la société Axa,

Condamner les requérants aux dépens, dont distraction au profit de Me Zanati, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 30 août 2022, M. [K] [W] demande à la cour de :

Déclarer recevable et bien-fondé M. [K] [W] en son appel,

Et, y faisant droit,

Réformer le jugement du 21 février 2022 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :

- condamné in solidum les assureurs, la société Axa et la société LIC au paiement des sommes, et notamment en ce qu'il a jugé que la société Axa n'était pas fondée à se prévaloir de la résiliation de son contrat :

débouté Mme [R] de ses demandes formées au titre des préjudices suivants :

-le préjudice résultant de la fraude aux assurances, en absence de preuve d'une telle fraude ;

-le trouble de jouissance, l'expert ne faisant état que d'une humidité importante empêchant la location des studios, sans préciser si l'humidité empêchait de jouir du reste du pavillon ;

-le préjudice moral, dans la mesure où la saisie-attribution mise en 'uvre par M. [K] [W] n'est que la conséquence du jugement définitif du tribunal d'instance et de la décision du juge de l'exécution et où Mme [R] ne rapporte pas la preuve du comportement déloyal qu'elle impute à M. [K] [W] - M. [K] [W] ayant le droit d'écrire à l'expert comme au juge chargé du contrôle des expertises, et Mme [R] ne démontrant pas que M. [K] [W] a enregistré la réunion d'expertise,

-les frais de constats d'huissier, les constats d'huissier n'étant pas produits et les seules factures ne permettant pas d'établir leur lien avec le présent litige

Et statuant à nouveau,

A titre principal :

Juger que les désordres allégués ne sont pas imputables à M. [K] [W],

Juger que les demandes de Mme [R] ne sont pas justifiées ni sur le principe ni en leur quantum,

Débouter Mme [R] et tout autre partie de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions dirigées à l'encontre de M. [K] [W].

Mettre purement et simplement hors de cause M. [K] [W],

A titre subsidiaire :

Juger qu'il y a bien eu réception expresse ou tacite à la date du 6 mars 2015,

Juger que les désordres allégués revêtent un caractère décennal au sens de l'article 1792 du code civil,

Juger que les conditions d'application de la responsabilité décennale sont réunies en l'espèce,

Juger que les garanties obligatoires et facultatives des sociétés Axa et LIC sont cumulativement et concurremment acquises à M. [K] [W] et couvrent l'ensemble des réclamations formulées par Mme [R],

Juger que la société Axa doit sa garantie à défaut de preuve de la résiliation du contrat,

Débouter la société Axa de sa demande de réformation du jugement déféré à ce titre,

Condamner in solidum les sociétés Axa et LIC à garantir intégralement et relever indemne M. [K] [W] de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre tant en principal qu'en accessoires,

A titre infiniment subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour devait juger que le régime de la responsabilité décennale n'est pas applicable :

Juger que la société Axa doit sa garantie à défaut de preuve de la résiliation du contrat,

Débouter la société Axa de sa demande de réformation du jugement à ce titre,

Juger que les clauses d'exclusion dont se prévalent les sociétés Axa et LIC sont inopposables et qu'en tout état de cause, elles ne valent pas pour les préjudices immatériels allégués par Mme [R] qui sont bien couverts par lesdites garanties,

Débouter la société Axa de sa demande de réformation du jugement à ce titre,

Confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que les garanties de responsabilité civile (avant et après réception) des assureurs, les sociétés Axa et LIC sont acquises en l'espèce,

Y ajoutant et réformant le jugement,

Condamner in solidum les sociétés Axa et LIC à garantir intégralement et relever indemne M. [K] [W] de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre tant en principal qu'en accessoires,

En tout état de cause :

Réduire les demandes de Mme [R] à de plus justes proportions,

Condamner in solidum les sociétés Axa et LIC à garantir intégralement et relever indemne M. [K] [W] de toutes les condamnations qui seraient prononcées à son encontre tant en principal qu'en accessoires,

Débouter la société Axa de sa demande de réformation du jugement déféré et de sa demande de mise hors de cause,

Condamner tout succombant, in solidum au besoin, à payer à M. [K] [W] une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner le même aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Me Rabourdin en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 28 novembre 2022, la société LIC, ès qualités, demande à la cour de :

Réformer partiellement le jugement du 21 février 2022 rendu par le tribunal judiciaire de Bobigny :

A titre principal, sur la garantie responsabilité civile décennale :

Confirmer le jugement du 21 février 2022 en ce qu'elle a débouté toutes les demandes, fins et conclusions tendant à voir mobiliser la garantie responsabilité civile décennale de la société LIC ;

Sur la garantie responsabilité civile générale avant et/ou après réception :

Infirmer le jugement du 21 février 2022 en ce qu'elle a condamné la société LIC à prendre en charge la réparation du sinistre au titre de sa garantie responsabilité civile générale avant et/ou après réception ;

En conséquence et statuant à nouveau,

Débouter toutes les demandes, fins et conclusions tendant à voir mobiliser les garanties de la société LIC au titre de la police " decem second & gros 'uvre CRCD01 016663 " ;

A titre subsidiaire,

Sur le quantum des préjudices allégués :

Confirmer le jugement du 21 février 2022 en ce qu'il a débouté Mme [R] de ses demandes tendant à voir la société LIC prendre en charge son préjudice de jouissance, son préjudice moral et son préjudice résultant de la prétendue fraude à l'assurance ainsi que les frais d'huissier prétendument payés ;

Infirmer le jugement du 21 février 2022 en ce qu'il a fixé à la somme de 81 104,17 euros la perte locative de Mme [R] ;

En conséquence et statuant à nouveau,

Fixer à la somme de 44 607,29 euros la perte de chance liée aux revenus locatifs de Mme [R] ;

Sur les plafonds et limites applicables :

Déduire la franchise de 1 000 euros stipulée par la police " decem second & gros 'uvre " des éventuelles condamnations qui pourraient être mises à la charge de la société LIC ;

Limiter les éventuelles condamnations qui pourraient être mises à la charge de la société LIC aux plafonds et limites de garanties stipulées par la police " decem second & gros 'uvre " ;

En tout état de cause,

Débouter toutes les demandes, fins et conclusions tendant à voir à la société LIC condamnée aux frais et dépens des articles 699 et 700 du code de procédure civile ;

Condamner Mme [R] et tout autre partie succombant à verser à la société LIC la somme de 3 000 euros au titre des frais de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner Mme [R] et tout autre partie succombant au paiement des dépens dont distraction au profit de Me Baechlin en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 30 août 2022, Mme [R] demande à la cour de :

Recevoir Mme [R] en ses demandes et y faire droit ;

A titre principal :

Juger que M. [K] [W] est responsable des préjudices subis par Mme [R] ;

Juger que les garanties de la société Axa et de la société LIC sont acquises ;

En conséquence :

Confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Bobigny en date du 21 février 2022 en ce qu'il a :

- déclaré irrecevables les fins de non-recevoir soulevées par M. [K] [W],

- condamné in solidum M. [K] [W] et ses assureurs les sociétés Axa et LIC à payer à Mme [R] les sommes suivantes :

- 35 963,52 euros ht au titre des travaux réparatoires,

- 81 104,17 euros au titre du préjudice locatif,

- 4 098 euros ttc au titre des honoraires de l'expert-conseil,

- condamné in solidum M. [K] [W] et ses assureurs les sociétés Axa et la LIC à payer à Mme [R] la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum M. [K] [W] et ses assureurs les sociétés Axa et la LIC aux dépens, qui comprendront notamment les frais d'expertise judiciaire et les frais d'analyses en laboratoire,

Y ajoutant :

Condamner in solidum M. [K] [W] et ses assureurs la société Axa et la LIC, à payer à Mme [R] la somme de 6 870 euros à parfaire jusqu'à l'indemnisation des préjudices de Mme [R] au titre du préjudice locatif à compter du 21 février 2022 ;

Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Bobigny en date du 21 février 2022 en ce qu'il a débouté Mme [R] de sa demande relative aux frais de constat d'huissier ;

Statuant à nouveau :

Condamner in solidum M. [K] [W] et ses assureurs la société Axa et la société LIC, à payer à Mme [R] la somme de 545 euros au titre des frais de constat d'huissier ;

A titre subsidiaire :

Et si par extraordinaire la cour jugeait que les garanties " responsabilité pour dommages immatériels consécutifs " de la société Axa et " responsabilité civile générale avant et/ou après réception des travaux " de la société LIC n'étaient pas applicables ;

Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Bobigny en date du 21 février 2022 en ce qu'il a écarté la garantie décennale de la société Axa et de la société LIC ;

Juger que les conditions d'application de la garantie décennale par la société Axa et la société LIC sont réunies ;

Condamner in solidum M. [K] [W] et ses assureurs, la société Axa et la société LIC, à payer à Mme [R] les sommes suivantes :

- 35 963,52 euros HT au titre des travaux réparatoires,

- 87 974,17 euros à parfaire au titre du préjudice locatif,

- 4 098 euros TTC au titre des honoraires de l'expert-conseil,

- 545 euros au titre des frais de constat d'huissier.

En tout état de cause :

Débouter purement et simplement M. [K] [W] et ses assureurs la société Axa et la société LIC de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

Débouter M. [K] [W] et ses assureurs la société Axa et de la société LIC de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner in solidum M. [K] [W] et ses assureurs la société Axa et la société LIC, à payer à verser à Mme [R] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner in solidum M. [K] [W] et ses assureurs la société Axa et la société LIC aux entiers dépens lesquels comprendront les frais d'expertise et d'analyse en laboratoire.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 30 janvier 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 7 février 2024, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

Sur la garantie de la société Axa

Moyen des parties

La société Axa fait valoir que le contrat souscrit par M. [K] [W] a été résilié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 15 novembre 2011 avec effet au 17 novembre 2011 et qu'en conséquence, elle n'a pas à le garantir pour des travaux exécutés en 2014.

Elle soutient qu'elle a parfaitement respecté les dispositions de l'article L. 113-3 du code des assurances puisqu'elle a mis son assuré en demeure d'avoir à payer sa prime le 13 septembre 2011 et qu'elle établit par la production des descriptifs de pli faisant office de preuve de dépôt après validation de La Poste, le respect de ces dispositions.

Elle conclut à la parfaite validité de cette résiliation et rajoute que M. [K] [W] a affirmé avoir de sa propre initiative résilié sa police d'assurance Axa au 1er janvier 2012.

Elle indique que M. [K] [W] ne dispose pas d'une police d'assurance responsabilité professionnelle auprès d'elle.

La société Axa conteste le cumul d'assurance avec la société LIC puisqu'elle a assuré M. [K] [W] au titre des garanties obligatoires et facultatives du 24 avril 2006 au 17 novembre 2011 et que sa police d'assurance auprès de la société LIC est postérieure pour avoir pris effet le 20 janvier 2015.

Cette police d'assurance de M. [K] [W] auprès de la société LIC prévoit une reprise du passif en l'absence de police d'assurance entre le 17 novembre 2011 et le 20 janvier 2015.

Mme [R], qui demande la garantie de la société Axa, soutient que celle-ci ne démontre pas l'envoi des mises en demeure dont elle fait état pour justifier la résiliation du contrat de son assuré au 17 novembre 2011.

Elle prétend que la société Axa n'a pas respecté les dispositions de l'article L.113-3 du code des assurances et qu'elle doit donc sa garantie à son assuré tant au titre de sa responsabilité pour dommages immatériels consécutifs qu'au titre de la garantie décennale.

M. [K] [W] fait valoir qu'il a souscrit avec la société Axa un contrat d'assurance avec prise d'effet au 24 avril 2006 qui a vocation à s'appliquer car l'assureur n'établit pas avoir respecté la procédure de résiliation des articles L.113-3 et R.113-1 du code des assurances.

Il soutient que la mise en demeure de payer la prime a été retrouvée tardivement et que le document produit n'établit pas l'envoi de la lettre recommandée avec demande d'avis de réception et qu'en l'absence de cachet de La Poste, le délai de préavis de résiliation n'a pas pu courir.

La société LIC ne conclut pas sur ce point.

Réponse de la cour

Aux termes de l'article L.113-3 du code des assurances, dans sa version en vigueur du 8 janvier 1981 au 17 juin 2013, au regard de la date de résiliation revendiquée par l'appelante : " ['] A défaut de paiement d'une prime, ou d'une fraction de prime, dans les dix jours de son échéance, et indépendamment du droit pour l'assureur de poursuivre l'exécution du contrat en justice, la garantie ne peut être suspendue que trente jours après la mise en demeure de l'assuré. Au cas où la prime annuelle a été fractionnée, la suspension de la garantie, intervenue en cas de non-paiement d'une des fractions de prime, produit ses effets jusqu'à l'expiration de la période annuelle considérée. La prime ou fraction de prime est portable dans tous les cas, après la mise en demeure de l'assuré.

L'assureur a le droit de résilier le contrat dix jours après l'expiration du délai de trente jours mentionné au deuxième alinéa du présent article ['] "

Selon l'article R.113-1 du code des assurances, la mise en demeure prévue au deuxième alinéa de l'article L. 113-3 résulte de l'envoi d'une lettre recommandée, adressée à l'assuré, ou à la personne chargée du paiement des primes, à leur dernier domicile connu de l'assureur.

En l'espèce, la société Axa produit en copie :

- les conditions générales et les conditions particulières d'un contrat multirisque artisan du bâtiment avec prise d'effet au 24 avril 2006 et paiement semestriel des primes ;

- la mise en demeure avec suspension des garanties en date du 13 septembre 2011 pour non-paiement de la cotisation semestrielle échue au 1er juillet 2011 adressée à M. [K] [W] ;

- une pièce n° 9, faisant office de preuve de dépôt après validation par La Poste qui établit la réalité de l'envoi de la lettre recommandée de demande de paiement de la cotisation à son assuré, à la date du 13 septembre 2011 ;

- la lettre recommandée du 15 novembre 2011 adressée à M. [K] [W] et par laquelle elle met fin au contrat le 17 novembre 2011 ;

- une pièce n° 6 faisant office de preuve de dépôt après validation par La Poste qui établit la réalité de l'envoi de la lettre recommandée de demande de paiement de la cotisation à son assuré, à la date du 17 novembre 2011.

La société Axa justifie avoir respecté les dispositions des articles L. 113-3 et R.113-1 du code des assurances et résilié le contrat multirisque artisan de M. [K] [W] en novembre 2011 et en tout cas, avant les travaux effectués par celui-ci chez Mme [R] en 2014 (1re Civ., 2 février 1982, pourvoi n° 80-17.006, Bull., I, n° 54 ; 2e Civ., 8 septembre 2005, pourvoi n° 03-21.175, Bull. 2005, II, n° 210).

En conséquence, le jugement sera infirmé sur ce point et la garantie de la société Axa ne pourra pas être recherchée au titre du contrat multirisque artisan du bâtiment.

Sur la responsabilité de M. [K] [W]

Moyens des parties

M. [K] [W] prétend que le régime de la responsabilité décennale est applicable et qu'il doit bénéficier de la garantie de ses assureurs même dans l'hypothèse où seule sa responsabilité civile avant réception serait retenue.

Il réfute que les désordres lui soient imputés et subsidiairement argue de leur nature décennale compte tenu du montant des travaux de réparation et de leur révélation dans le temps dans leur ampleur et leurs conséquences.

Il fait valoir la réception expresse des travaux à la date du 6 mars 2015 s'agissant d'une prérogative du maître d'ouvrage. Il soutient que Mme [R] l'a prononcée à cette date manifestant sa volonté non équivoque de réception l'ouvrage, peu important la formalisation postérieure du procès-verbal.

M. [K] [W] soutient à tout le moins, l'existence d'une réception tacite à cette date du 6 mars 2015 puisque Mme [R] a pris possession de l'ouvrage, a mis les locaux en location à partir d'avril et qu'elle a payé la totalité des travaux.

Mme [R] s'appuie sur les conclusions du rapport de l'expert pour faire valoir la responsabilité intégrale de M. [K] [W] concernant les désordres, sans que celui-ci puisse s'en exonérer en invoquant des infiltrations antérieures à ses travaux.

La société LIC argue de l'absence de réception des travaux excluant toute recherche de sa garantie au titre de la responsabilité décennale et notamment, conteste sur ce point la validité du procès-verbal du 17 juin 2019 qui ne peut bénéficier aux contractants rétroactivement au 6 mars 2015.

Elle fait valoir que Mme [R] n'a jamais manifesté son intention d'accepter les travaux de M. [K] [W] dont elle a toujours dénoncé la mauvaise exécution et qu'elle n'a réglés que le 5 mars 2020.

Réponse de la Cour

Sur la réception des travaux

Le point de départ de la garantie des constructeurs est la réception qui intervient entre le maître de l'ouvrage et le locateur d'ouvrage et qui marque l'exécution des travaux commandés.

Selon l'article 1792-6 du code civil, la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves ; elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement et elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement.

La réception expresse figure dans un acte écrit et elle ne peut résulter d'une volonté unilatérale.

Les juges du fond doivent relever le caractère contradictoire de la réception à l'égard de l'entrepreneur auquel elle est opposée (3e Civ., 16 février 1994, pourvoi n° 92-14.342, Bull n° 22).

En l'espèce, il est produit au débat :

- la copie d'une lettre typographiée non-signée intitulée " convocation à une réunion de réception de travaux " de M. [K] [W] par Mme [R] en date du 20 mai 2019,

- la copie d'une lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée par Mme [R] à M. [K] [W] datée du 17 juin 2019, mentionnant qu'elle avait convoqué l'entrepreneur " à une réception tacite et qu'elle confirmait la réception tacite des travaux au 6 mars 2015 établi par procès-verbal du 17 juin 2019 ".

La convocation n'est pas signée par Mme [R] et l'avis de réception ne permet pas de vérifier la date de distribution.

Le procès-verbal accompagnant la lettre du 17 juin 2019, n'est signé que par le maître d'ouvrage.

Ces deux documents ne permettent donc pas d'établir la convocation de l'entrepreneur, ni sa participation effective à un rendez-vous de réception en date du 17 juin 2019.

En conséquence, il ne peut valoir réception expresse des travaux.

La réception tacite est subordonnée à la preuve d'une volonté non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir celui-ci avec ou sans réserve.

Il appartient à celui qui invoque une réception tacite de l'ouvrage de la démontrer (3e Civ., 13 juillet 2017, pourvoi n° 16-19.438, publié au Bulletin).

La prise de possession n'est pas suffisante pour établir la réception tacite et elle doit s'accompagner d'autres éléments, par exemple le paiement du montant des travaux (3e Civ., 16 février 2005, pourvoi n° 03-16.880, Bull n° 3 ; 3e Civ., 4 juin 1998, pourvoi n° 95-16.452).

En l'espèce, de l'examen des pièces produites, il résulte que Mme [R] a toujours contesté la qualité des travaux effectués : lettre à M. [K] [W] du 29 octobre 2014, déclaration de sinistre de Mme [R] du 3 avril 2015, procès-verbal de constat du 22 décembre 2015, documents cités supra.

Elle n'a pas procédé à un paiement volontaire de ceux-ci puisque M. [K] [W] a dû engager une procédure devant le tribunal d'instance du Raincy pour obtenir le paiement du solde de 5 717,42 euros et a fait procéder à une saisie-attribution le 5 septembre 2017 dont Mme [R] a demandé le sursis à exécution puis une consignation des sommes (3e Civ., 24 mars 2009, pourvoi n° 08-12.663).

En conséquence, la contestation continue et dans leur intégralité des travaux et du paiement de ceux-ci par Mme [R] fait obstacle à ce que soit constatée leur réception tacite.

Les travaux n'ont donc pas été réceptionnés excluant toute recherche de la responsabilité décennale de M. [K] [W] et l'éventuelle garantie corollaire de son assureur en responsabilité décennale.

Sur la responsabilité contractuelle de droit commun de M. [K] [W]

Selon les articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.

M. [K] [W] est débiteur à l'égard de Mme [R] d'une obligation de résultat et il ne peut s'exonérer de sa responsabilité contractuelle à ce titre qu'en établissant qu'il s'est heurté à un cas de force majeure.

En l'espèce, l'expert judiciaire a conclu que les travaux ont été préconisés, exécutés et suivis par M. [K] [W].

M. [B] indique qu'ils ne sont pas conformes au DTU 42.1, qu'ils n'ont pas été satisfaisants et qu'ils ont eu pour conséquence de créer de l'humidité dans la maison, que les produits utilisés par M. [K] [W] sont inappropriés et la densité insuffisante.

Il conclut à l'entière responsabilité de M. [K] [W].

M. [K] [W] ne démontre pas que l'humidité était antérieure à son intervention et résulte d'une cause étrangère.

En conséquence, la responsabilité contractuelle de M. [K] [W] est donc engagée à l'égard de Mme [R] pour l'intégralité des désordres.

Sur les préjudices de Mme [R]

Moyens des parties

Mme [R] demande la reprise des travaux à hauteur de 35 963,52 euros HT selon le devis de la société Tene, sur lequel l'expert a donné son avis en ce que le ravalement est à refaire entièrement.

Elle fait encore valoir son préjudice financier du fait que les deux studios du rez-de chaussée présentent de l'humidité qui ne permet pas de les mettre en location depuis 2014.

Elle propose un prix de location de 595 euros et 550 euros sur 10 mois depuis le 1er janvier 2015 soit une somme totale de 87 104,17 euros.

Elle revendique également l'indemnisation de ses frais consistant dans les services d'un expert conseil pour 4 098 euros TTC, les frais de constats de 545 euros, soit un total de 4 643 euros.

M. [K] [W] discute les préjudices de Mme [R] qu'il n'estime pas justifiés tant sur le principe que dans leur quantum.

Il estime que les travaux réparatoires doivent être revus à la baisse car ils vont au-delà des travaux qui lui ont été confiés par le maître d'ouvrage.

Il conteste le préjudice locatif estimant que le point de départ du 1er janvier 2015 est incohérent avec le choix de Mme [R] de faire désigner un expert judiciaire seulement trois ans plus tard et compte tenu du constat des désordres datant de décembre 2015.

Il soutient encore que Mme [R] n'établit pas que les pertes locatives sont en lien avec les désordres d'autant que l'immeuble était affecté d'infiltrations en provenance de la toiture et de fissures préexistantes.

La société LIC discute subsidiairement les préjudices extrapatrimoniaux et patrimoniaux revendiqués par Mme [R] et notamment les frais d'huissier non justifiés et la perte de chance de louer les studios laquelle ne peut pas être calquée sur le montant de la perte de loyer.

Elle propose donc de réduire la somme réclamée à ce titre à 44 607,29 euros résultant de l'application d'un coefficient de 55 % à la somme réclamée par Mme [R].

Réponse de la cour

Les dommages et intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit (2e Civ., 23 janvier 2003, pourvoi n° 01-00.200, Bull. 2003 II, n° 20).

En l'espèce, l'expert judiciaire a donné son accord sur le devis de la société Tene, pour un montant de 38 520 euros HT, dont il faut exclure les chiens assis pour 2 556,48 euros HT.

L'expert tient compte des produits inappropriés utilisés par M. [K] [W] qui ont eu pour conséquence de créer de l'humidité dans le pavillon, qu'il n'avait pas eu à traiter lui-même.

En conséquence, compte tenu du principe de la réparation intégrale du préjudice, il est logique que les travaux de réparation soient plus chers que les travaux exécutés dès lors que la mauvaise exécution de ces derniers par M. [K] [W] a eu des conséquences dommageables reconnues par l'expert judiciaire et qu'il est donc nécessaire de réparer.

M. [K] [W] est donc condamné à payer à Mme [R] la somme de 35 963,52 euros HT au titre des travaux de réparation.

Mme [R] produit les éléments de preuve établissant les frais de son expert-conseil qui sont en lien de causalité avec les désordres dont est responsable M. [K] [W].

M. [K] [W] sera condamné à lui payer la somme de 4 098 euros TTC euros à ce titre.

Le jugement sera confirmé de ces deux chefs.

S'agissant de la perte de revenus locatifs, il n'est pas contesté que la maison de Mme [R] possède deux studios et il est démontré que l'humidité des lieux a joué un rôle dans le départ de ses locataires et l'absence de relocation. Néanmoins, Mme [R] ne rapporte pas la preuve, avec la certitude exigée, que ladite humidité a empêché toute relocation, de sorte que son préjudice doit, comme le propose la société LIC, être analysée en une perte de chance.

A ce titre, le montant définitif de ce poste de préjudice doit être, au vu des éléments de la cause, arrêté à hauteur de 55 %, soit la somme de 44 607,29 euros, au montant de laquelle M. [K] [W] sera condamnée.

Le jugement, qui a retenu une somme supérieure, sera infirmé de ce chef.

Enfin, Mme [R] justifie du coût du constat dressé par huissier de justice qui était nécessaire à la démonstration de son préjudice.

M. [K] [W] sera condamné en conséquence à payer à Mme [R] la somme de 545 euros.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la garantie de la société LIC

Moyens des parties

La société LIC fait valoir que M. [K] [W] a souscrit une police Decem second & gros 'uvre par l'intermédiaire de son courtier la société Kasko qui lui a apporté tous les conseils nécessaires pour répondre à son besoin.

Elle soutient que c'est donc en parfaite connaissance de cause que M. [K] [W] a accepté une clause apparente excluant la garantie des dommages affectant ses travaux.

Elle souligne qu'elle verse aux débats la proposition et le projet de contrat paraphés et signés par M. [K] [W] et par la société Kasko le 14 janvier 2015 et qu'ainsi l'entrepreneur a accepté le modèle de conditions générales Decem second & gros 'uvre 201411-1.

Elle rajoute que M. [K] [W] a été destinataire d'une attestation d'assurance au titre de cette police, laquelle précise qu'elle ne peut pas engager l'assureur en dehors des limites précisées par les clauses et conditions du contrat auquel elle se réfère.

Elle soutient en conséquence, qu'au visa de l'article 3.1.3.15 des conditions générales, sont exclus de la garantie les dommages affectant les travaux de l'assuré réalisés en propre ou donnés en sous-traitance et que cette assurance n'a pas vocation à garantir les dommages matériels et immatériels résultant des désordres affectant les travaux de l'assuré.

A titre subsidiaire, la société LIC entend se prévaloir de la nature et de l'objet même de la garantie responsabilité civile générale avant et/ou après réception des travaux et qui ne peuvent être dénaturés en ce qu'ils ne concernent que l'indemnisation des dommages causés aux tiers par l'ouvrage ou les travaux de l'assuré mais pas les non-façons, les malfaçons ou non-conformités dans les rapports entre l'assuré et le maître d'ouvrage.

A titre encore plus subsidiaire, elle demande de limiter le préjudice de Mme [R] et la garantie de la société Axa.

M. [K] [W] prétend que les conditions générales ne sont pas signées et que la société LIC n'établit pas qu'elles lui sont opposables et que la souscription de la police par un courtier ne présume pas de la connaissance des conditions générales.

Subsidiairement, il fait valoir que la clause d'exclusion de garantie doit être réputée non écrite sur le fondement de l'article L. 113-1 du code des assurances et que les travaux réparatoires et les demandes immatérielles et accessoires de Mme [R] constituent indéniablement des dommages aux tiers.

Mme [R] revendique la garantie de la société LIC compte tenu de la clause de reprise du passé et elle a d'ailleurs déclaré son sinistre au titre de la garantie décennale.

Elle s'est opposée à un refus de prise en charge alors qu'elle revendique l'existence d'une réception des travaux et la mise en 'uvre de la garantie décennale.

Elle reprend à son compte une partie des prétentions de M. [K] [W] concernant l'opposabilité des conditions générales et l'exclusion de garantie.

Réponse de la Cour

Le contrat d'assurance est formé lorsque l'assuré a accepté les offres émises par l'assureur, la connaissance et l'acceptation des conditions générales et particulières conditionnant leur opposabilité à l'assuré et non la formation du contrat.

Sur les clauses générales

En l'espèce, la société LIC produit une proposition d'assurance Decem Second & Gros 'uvre, intitulée " l'assurance décennale des artisans du second 'uvre et du gros 'uvre ", avec effet souhaité au 20 janvier 2015, prévoyant une garantie RC avant/ après réception, une RC décennale et une RC connexe à la RC décennale.

Cette proposition du 14 janvier 2015, mentionne, juste au-dessus de la signature de M. [K] [W], que " L'acceptation de garantie est manifestée par l'envoi d'une attestation de garantie au souscripteur (Référence des conditions générales : CG Decem' Second & Gros oeuvre 201411-1/ Référence de l'annexe Protection juridique : NI-062010) ".

L'attestation établissant l'acceptation de la garantie en date du 26 février 2015, qui a suivi la proposition, mentionne également que les garanties sont acquises selon les Conditions particulières CP Decem' Second & gros 'uvre, établies sur la base du questionnaire préalable d'assurance et des Conditions générales Decem' Second & gros 'uvre 201411-1.

La société LIC ne produit pas d'autres éléments permettant de démontrer qu'elle a tenté de communiquer ces conditions générales à son assuré en ce que, par exemple, elle a enjoint au courtier de faire signer les conditions générales.

Ainsi, en l'absence d'autres éléments que les mentions portées dans les documents signés par l'assuré, la société LIC ne démontre pas que les conditions générales mentionnées ont été effectivement portées à la connaissance de M. [K] [W].

En conséquence, les conditions générales du contrat ne sont pas opposables à M. [K] [W], ainsi en est-il de la clause 3.1.3.15.

Sur la nature et l'objet de la garantie responsabilité civile avant et après réception

M. [K] [W], comme Mme [R], réclame l'application de la police RC exploitation, qui comme son nom l'indique est une assurance de responsabilité, pour couvrir le dommage subi par le maître d'ouvrage portant sur les travaux exécutés par l'assuré.

La société LIC couvre bien M. [K] [W] pour les réclamations notifiées à l'assureur à compter du 20 janvier 2015, pour les dommages matériel, immatériels, de pollution et découlant d'une faute inexcusable dans le cadre de sa responsabilité civile avant réception.

Le contrat couvre la responsabilité civile qu'il encourt en raison des préjudices causés aux tiers, avant ou après réception.

Ni les conditions particulières, ni l'attestation d'assurance produites, ne donnent une définition de la notion de tiers qui permettrait d'exclure de facto, le maître d'ouvrage.

Aussi la mention " Le contrat couvre la responsabilité civile qu'il encourt en raison des préjudices causés aux tiers, avant ou après réception " peut donner lieu à une interprétation favorable à l'assuré (2e Civ., 1er juin 2011, pourvoi n° 09-72-552, Bull 2011 n° 126).

La société LIC doit donc garantir M. [K] [W] des condamnations prononcées à son encontre sous réserve des plafonds de garanties fixées au contrat et de la franchise par sinistre prévue aux conditions particulières.

En conséquence, le jugement sera confirmé sur ce point.

Les frais du procès

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement sur la condamnation aux dépens et sur celle au titre de l'article 700 du code de procédure civile sauf en ce qui concerne la condamnation in solidum de la société Axa de ces chefs.

En cause d'appel, M. [K] [W], partie succombante, sera condamné aux dépens et à payer 3 000 euros à la société Axa et 5 000 euros à Mme [R], soit la somme globale de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en ce qu'il a :

- condamné la société Axa France IARD, in solidum avec M. [K] [W] et la société Lloyd's insurance company, à payer à Mme [R] les sommes de 35 963,52 euros HT au titre des travaux réparatoires, 81 104,17 euros au titre du préjudice locatif, 4 098 euros TTC au titre des honoraires de l'expert conseil,

- condamné la société Axa France IARD, in solidum avec M. [K] [W] et la société Lloyd's insurance company, à payer à Mme [R] la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens comprenant les frais de l'expertise judiciaire et les frais d'analyse en laboratoire,

- condamné in solidum M. [K] [W] et la société Lloyd's insurance company à payer à Mme [R] la somme de 81 104,17 euros au titre du préjudice locatif,

- rejeté la demande de Mme [R] en condamnation in solidum de M. [K] [W] et de la société Lloyd's insurance company à lui payer la somme de 545 euros au titre des frais de constat d'huissier de justice ;

Le confirme pour le surplus de ses dispositions soumises à la cour, statuant à nouveau et y ajoutant,

Rejette les demandes formées à l'égard de la société Axa France IARD au titre du contrat multirisque artisan du bâtiment ;

Dit que la société Lloyd's insurance company doit sa garantie à M. [K] [W] au titre de la responsabilité civile avant réception couverte par le contrat Decem'Second et Gros 'uvre 2015, avec application des plafonds de garantie et de la franchise par sinistre ;

Condamne in solidum M. [K] [W] et la société Lloyd's insurance company à payer à Mme [R] la somme de 44 607,29 euros au titre de la perte de chance de louer les studios ;

Condamne in solidum M. [K] [W] et la société Lloyd's insurance company à payer à Mme [R] la somme de 545 euros au titre des frais de constat d'huissier de justice ;

Condamne M. [K] [W] aux dépens d'appel ;

Admet les avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne M. [K] [W] à payer à la société Axa France IARD la somme de 3 000 euros et à Mme [R] la somme de 5 000 euros et rejette les autres demandes.

La greffière, Le président de chambre,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 22/06288
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;22.06288 ?
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