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24/04/2024 | FRANCE | N°21/13075

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 24 avril 2024, 21/13075


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 24 AVRIL 2024



(n° /2024, 18 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/13075 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEBFP



Décision déférée à la Cour : jugement du 1er juin 2021 - tribunal judiciaire de Paris RG n° 16/15382





APPELANTE



Compagnie d'assurance MMA IARD assureur de la société GRANITO prise en la personne de ses repré

sentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 14]



Représentée par Me Catherine BALLOUARD, avocat au barreau de PARIS, toque : A0420





INTIMEES


...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 24 AVRIL 2024

(n° /2024, 18 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/13075 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEBFP

Décision déférée à la Cour : jugement du 1er juin 2021 - tribunal judiciaire de Paris RG n° 16/15382

APPELANTE

Compagnie d'assurance MMA IARD assureur de la société GRANITO prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 14]

Représentée par Me Catherine BALLOUARD, avocat au barreau de PARIS, toque : A0420

INTIMEES

S.A. SOFERIM prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 15]

Représentée par Me Caroline HATET-SAUVAL de la SELARL CAROLINE HATET AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046

S.C. ETOILE DU NORD prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 16]

Représentée et assistée à l'audience par Me Sophie COMMERCON, avocat au barreau de PARIS, toque : A0344

S.A.S. ILDEI agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 17]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Sylvie RODAS, avocat au barreau de Paris

S.A. AXA FRANCE IARD en sa qualité d'assureur de la société ILDEI, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 19]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Sylvie RODAS, avocat au barreau de Paris

S.A.R.L. C2A ARCHITECTES & INGENIERIE venant aux droits de la SARL C2A INGENIERIE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Localité 16]

Représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

Société GRANITO, prise en la personne de son liquidateur Monsieur [N] [U], domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 10]

[Localité 20]

N'a pas constitué avocat - Signification de la déclaration d'appel le 15 septembre 2021 remise à étude

PARTIES INTERVENANTES

S.A. GENERALI IARD prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Ordonnance de désistement de la société SOFERIM à l'égard de cette société le 21 juin 2022

[Adresse 7]

[Localité 16]

Représentée par Me Jean-Marc ZANATI de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0435, substitué à l'audience par Me Didier FENEAU

Société SPIE INDUSTRIE & TERTIAIRE, venant aux droits de SPIE ILE DE FRANCE NORD OUEST prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Ordonnance de désistement de la société SOFERIM à l'égard de cette société le 21 juin 2022

[Adresse 11]

[Localité 13]

Représentée par Me Jean-Marc ZANATI de la SELAS COMOLET ZANATI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0435, substitué à l'audience par Me Didier FENEAU

Société BECHET prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Ordonnance de désistement de la société SOFERIM à l'égard de cette société le 21 juin 2022

[Adresse 9]

[Localité 18]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

MMA IARD ASSURANCES MUTUELLES venant aux droits de Covea Risks

[Adresse 5]

[Localité 14]

N'a pas constitué avocat - Assignation en appel provoqué le 18 février 2022, remise à personne morale

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 13 Février 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Ludovic JARIEL, président de chambre

Mme Sylvie DELACOURT, présidente faisant fonction de conseillère

Mme Viviane SZLAMOVICZ, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme [J] [G] dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Céline RICHARD

ARRET :

- défaut.

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Ludovic Jariel, président et par Manon Caron, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

La Société française d'études et de réalisations immobilière (la société Soferim) a, en qualité de promoteur immobilier, fait procéder à des travaux de réhabilitation et de rénovation dans un ensemble immobilier à usage de bureaux situé [Adresse 6] - [Adresse 2], dont la société Etoile du nord est propriétaire et qui a été loué à la société SNCF.

Sont notamment intervenus à l'opération :

- la société C2A en qualité de maître d''uvre de conception et d'exécution, aux droits de laquelle vient la société C2A architectes & ingénierie, suite à une opération de fusion ;

- la société Spie IDF nord-ouest, aux droits de laquelle vient la société Spie industrie et tertiaire, au titre des lots plomberie-sanitaire et chauffage-ventilation, assurée par la société Generali IARD (la société Generali) ;

- la société Paris construction est, au titre des lots reprise en sous-'uvre, puits blindés, démolitions, terrassement, assurée auprès de la société Axa France IARD (la société Axa) ;

- la société Ildei au titre des lots pierre, marbrerie, terrazzo et mosaïque, assurée auprès de la société Axa ;

- la société Granito en qualité de sous-traitant de la société Ildei, assurée auprès de la société MMA IARD (la société MMA) ;

- la société Balas au titre du lot charpente-couverture, assurée auprès de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (la SMABTP) ;

- la société Sam + Roumiguier au titre du lot verrière-charpente métallique ;

- la société Bechet au titre des lots cloisons-doublage-plâtrerie et peinture-revêtements muraux ;

- la société Egyde en qualité de directeur de travaux-OPC ;

- la société Betec en qualité de bureau d'études fluides ;

- la société BTP consultant en qualité de bureau de contrôle.

Pour cette opération, la société Soferim a souscrit des polices d'assurance dommages-ouvrage, tous risques chantier et constructeur non réalisateur auprès de la société Covea Risks, aux droits de laquelle sont venues la société MMA et la société MMA IARD assurances mutuelles (les sociétés MMA).

La réception des travaux a eu lieu, avec réserves, le 5 janvier 2011.

La société Soferim a dénoncé plusieurs désordres, pendant l'année de parfait achèvement, concernant notamment, le revêtement de sol en terrazo, un taux de fer anormalement élevé dans l'eau des réseaux, des fuites d'eau dans la verrière de l'atrium, des écoulements d'eau provenant de quatre gouttières situées dans le hall d'accueil, un dégorgement général des descentes d'eaux pluviales du bâtiment et des fissures sur les boiseries du couloir.

A la demande de la société Soferim, par arrêt du 22 novembre 2012, la cour d'appel de Paris a ordonné en référé une expertise judiciaire confiée à M. [E].

Par actes d'huissiers des 13, 14, 15, 20, 21, 29 novembre et du 9 décembre 2013 la société Soferim a assigné devant le tribunal de grande instance de Paris la société Etoile du nord et différents intervenants à l'opération immobilière afin qu'ils soient condamnés à la relever et garantir de toute condamnation.

Suivant actes d'huissier délivrés les 15 et 16 mars 2016 la société Axa a assigné en garantie la société Granito et son assureur la société MMA, la société C2A architectes & ingénierie ainsi que la société C2A devant le tribunal de grande instance de Paris.

Ces affaires ont été jointes par mentions aux dossiers le 2 janvier 2017.

Le rapport d'expertise a été établi le 5 juin 2017.

Par jugement du 1er juin 2021, le tribunal judiciaire de Paris a statué en ces termes :

Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la société Ildei pour défaut de qualité à agir de la société Etoile du nord ;

Déclare irrecevables, faute de signification, les demandes formées par la société Etoile du nord à l'encontre de la société Granito ;

Dit que la matérialité des désordres suivants est établie, lesquels relèvent de la garantie décennale des constructeurs en application de l'article 1792 du code civil :

- fuites d'eau dans la verrière ;

- écoulements d'eau provenant de quatre gouttières situées dans le hall d'accueil et dégorgement général des descentes d'eaux pluviales du bâtiment ;

Dit que les sociétés MMA doivent leur garantie à la société Etoile du nord au titre des désordres à caractère décennal ;

Dit que la matérialité des désordres suivants est établie, lesquels sont susceptibles de relever de la responsabilité civile des constructeurs :

- décollement du revêtement de sol de l'atrium en terrazzo ;

- taux de fer anormalement élevé dans les réseaux ;

- fissures au niveau des boiseries ;

Dit que les sociétés MMA ne doivent pas leur garantie à la société Etoile du nord au titre des désordres ne présentant pas un caractère décennal ;

Dit que la responsabilité de la société Sam + Roumiguier est engagée sur le fondement de l'article 1792 du code civil au titre des fuites d'eau survenues dans la verrière de l'atrium ;

Dit que la responsabilité de la société Spie industrie et tertiaire est engagée sur le fondement de l'article 1792 du code civil au titre des écoulements d'eau provenant de quatre gouttières situées dans le hall d'accueil et du dégorgement général des descentes d'eaux pluviales du bâtiment ;

Dit que la responsabilité des sociétés Ildei et Granito est engagée au titre du décollement du revêtement de sol de l'atrium en terrazzo, respectivement sur le fondement des dispositions des articles 1147 et 1382 du code civil en vigueur avant l'ordonnance du 10 février 2016 applicables au 1er octobre 2016 ;

Dit que la responsabilité de la société Spie industrie et tertiaire n'est pas engagée au titre du taux de fer anormalement élevé dans les réseaux ;

Dit que la responsabilité de la société Bechet est engagée au titre des fissures affectant la peinture des boiseries sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du code civil en vigueur avant l'ordonnance du 10 février 2016 applicable au 1er octobre 2016 ;

Dit que la société Axa doit sa garantie à la société Ildei ;

Dit que la société MMA doit sa garantie à la société Granito, dans les limites contractuelles de sa police (plafonds et franchises) ;

Dit que la société Generali doit sa garantie à la société Spie industrie et tertiaire, dans les limites contractuelles de sa police (plafonds et franchises) ;

Condamne in solidum la société Ildei, son assureur la société Axa et la société MMA en sa qualité d'assureur de la société Granito à payer à la société Etoile du nord les sommes suivantes à titre d'indemnisation des désordres affectant le terrazzo :

- 225 299 euros HT correspondant aux frais de remplacement du revêtement ;

- 2 340 euros HT correspondant aux sondages à réaliser à la demande de la maîtrise d''uvre ;

- 18 000 euros HT correspondant aux frais de maîtrise d''uvre afférents aux travaux de reprise ;

- 4 912,78 euros HT correspondant au coût de l'assurance dommages-ouvrage ;

Condamne in solidum les sociétés MMA, Spie industrie et tertiaire et Generali à payer à la société Etoile du nord les sommes suivantes à titre d'indemnisation des désordres affectant l'évacuation des eaux pluviales :

- 20 579 euros HT correspondant aux travaux de reprise des descentes d'eaux pluviales ;

- 11 500 euros HT correspondant aux frais de maîtrise d''uvre ;

Condamne in solidum les sociétés MMA à payer à la société Etoile du nord 1 852,24 euros HT au titre de la recherche de fuite dans la verrière ;

Condamne la société Bechet à payer à la société Etoile du nord 9 686,91 euros HT au titre des travaux de reprise des fissures au niveau des boiseries ;

Déboute la société Etoile du nord de sa demande d'indemnisation au titre de ses préjudices de jouissance ;

Dit que les sommes allouées au titre des travaux de reprise seront actualisées en fonction de l'évolution de l'indice BT01 depuis le 5 juin 2017, date de dépôt du rapport d'expertise, jusqu'à la date du présent jugement ;

Condamne la société Spie industrie et tertiaire et la société Generali à garantir les sociétés MMA de toutes les condamnations prononcées à leur encontre, en ce compris celles au titre des dépens et des frais irrépétibles ;

Condamne in solidum la société Granito et son assureur la société MMA à relever et garantir intégralement la société Ildei ainsi que la société Axa des condamnations prononcées à leur encontre au titre des désordres affectant le terrazzo, en ce compris celles au titre des dépens et des frais irrépétibles ;

Déboute la société Spie industrie et tertiaire et la société Generali de leurs appels en garantie au titre des désordres affectant les descentes d'eaux pluviales ;

Déboute la société Bechet de ses appels en garantie au titre des désordres affectant les peintures des boiseries ;

Condamne in solidum la société Spie industrie et tertiaire et son assureur la société Generali à payer à la société Balas la somme de 3 162,62 euros HT au titre de sa facture F011406393 établie le 5 juin 2014 ;

Condamne in solidum les sociétés MMA, la société Ildei et son assureur la société Axa, la société Granito et son assureur la société MMA, la société Spie industrie et tertiaire et son assureur la société Generali et la société Bechet au paiement des dépens incluant les frais d'expertise, lesquels pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum les sociétés MMA, la société Ildei et son assureur la société Axa, la société MMA en sa qualité d'assureur de la société Granito, la société Spie industrie et tertiaire et son assureur la société Generali et la société Bechet à payer à la société Etoile du nord 12 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Condamne in solidum les sociétés MMA, la société Ildei et son assureur la société Axa, la société Granito et son assureur la société MMA, la société Spie industrie et tertiaire et son assureur la société Generali et la société Bechet à payer à la société Soferim 10 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

Dit que la charge finale de ces dépens et des frais irrépétibles est répartie comme suit :

- 85% à la charge de la société Granito et de son assureur la société MMA ;

- 12% à la charge de la société Spie industrie et tertiaire et de son assureur la société Generali ;

- 3% à la charge de la société Bechet ;

Condamne la société Soferim à payer 2000 euros aux sociétés C2A et C2A Ingénierie, 2 000 euros à la société Paris construction est, 2 000 euros à la société la société Axa prise en sa qualité d'assureur de la société Paris construction est, 2 000 euros à la société Balas et à son assureur la SMABTP et 2 000 euros aux sociétés Egyde, Sagebat et SMA ;

Ordonne l'exécution provisoire ;

Rejette le surplus des demandes.

Par déclaration en date du 9 juillet 2021, la société MMA, en qualité d'assureur de la société Granito, a interjeté appel du jugement, intimant devant la cour :

- la société Soferim,

- la société Etoile du nord,

- la société Ildei,

- la société Granito,

- la société Axa,

- la société C2A.

La société Soferim a assigné aux fins d'appel provoqué les sociétés Generali, Bechet, MMA assurances mutuelles et Spie industrie et tertiaire. La société Soferim s'est ensuite désistée de son appel provoqué par conclusions du 4 mars 2022 et du 28 avril 2022.

Par ordonnance du 21 juin 2022, le conseiller de la mise en état a déclaré parfait le désistement de la société Soferim à l'encontre des sociétés Generali, MMA assurances mutuelles, Bechet et Spie industrie et tertiaire.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 29 janvier 2024, la société MMA demande à la cour de :

Recevoir la société MMA en son appel et la déclarer recevable et bien fondée.

Confirmer le jugement rendu le 1er juin 2021 en ce qu'il a retenu que les désordres affectant le revêtement de sol de l'atrium ne relevaient pas de la garantie décennale des constructeurs.

Infirmer le jugement rendu le 1er juin 2021 par le tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a retenu que la société MMA devait ses garanties à la société Granito.

Infirmer le jugement rendu le 1er juin 2021 en ce qu'il a condamné la société MMA au versement des sommes suivantes :

A la société Etoile du nord :

o 225 299 euros HT au titre du remplacement du revêtement ;

o 2 340 euros HT au titre des sondages à réaliser à la demande de la maîtrise d''uvre

o 18 000 euros HT au titre des frais de maîtrise d''uvre relatifs aux travaux de reprise ;

o 4 912,78 euros HT correspondant au coût d'une assurance dommages-ouvrage

o 85 % de la somme de 12 000 euros au titre des frais irrépétibles et des dépens

A la société Soferim :

o 85 % de la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles et des dépens

Et statuant à nouveau

Juger que les garanties accordées par la société MMA à la société Granito sont radicalement inapplicables.

Ordonner la mise hors de cause de la société MMA.

Débouter la société Etoile du nord, la société Soferim, la société Ildei et son assureur la société Axa de leurs demandes à l'encontre de la société MMA, ainsi que toute partie à l'instance formant des demandes à son encontre.

A titre subsidiaire,

Confirmer qu'aucune condamnation ne pourra être prononcée à l'encontre de la société MMA, assureur de la société granito, au-delà des limites de garanties de sa police en franchise et plafond.

En tout état de cause,

Condamner toute partie succombante à verser à la société MMA une somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par Me Ballouard, avocat aux offres de droit, par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 1er février 2024, la société Etoile du nord demande à la cour de :

Dire et juger la société Etoile du nord recevable en ses demandes,

L'y déclarer bien fondée,

En conséquence,

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que les désordres affectant le revêtement du sol de l'atrium ne revêtaient pas un caractère décennal,

En conséquence,

Reformer le jugement en ce qu'il a écarté les demandes dirigées par la société Etoile du nord contre les assureurs responsabilité décennale des locateurs d'ouvrage et contre l'assureur dommages-ouvrage

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a écarté les frais d'investigation portant sur le sol et réglés le 9 janvier 2014 par la société Etoile du nord, alors que ces frais avaient été validés par l'expert judiciaire et n'avaient pas fait l'objet de contestation émanant des parties à la mesure d'instruction,

Rejeter l'appel formé par la société MMA et,

Confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a retenu que la société MMA devait ses garanties à la société Granito au titre des condamnations sollicitées par la société Etoile du nord et de l'action directe exercée par celle-ci, en conséquence,

a) condamner solidairement ou à défaut in solidum, les sociétés Ildei et Granito, ainsi que leurs assureurs respectifs les société Axa pour la société Ildei, la société MMA assurances mutuelles (police n° 115418689 souscrite par la société Granito) et les sociétés MMA (aux droits de la société Covea Risks), au titre du contrat " multi risques de chantier plus " - police n° 118264136 - couvrant notamment les dommages survenus pendant la période de construction, ainsi qu'un volet constructeur non réalisateur et assurance dommages - ouvrage, au paiement des sommes suivantes, au titre des désordres affectant le revêtement du sol de l'atrium:

- 5 985, 81 euros HT correspondant au sondage réalisé le 29 octobre 2013

- 3 420 euros HT, au titre des analyses effectuées le 9 janvier 2014 par LCFM

- 18 000 euros HT, au titre des honoraires de maîtrise d''uvre de la société Sispeo

- 2 340 euros HT, au titre du sondage effectué par la société Marpex le 11 janvier 2016

- 225 299 euros HT correspondant aux travaux de reprise du terrazzo, avec revalorisation par application de l'indice BT01 au jour de l'exécution des travaux, qui seront augmentés par le coût de souscription d'une police dommages-ouvrage soit 7 % du coût des travaux, et d'un bureau de contrôle pour la réalisation des travaux soit 5 % du coût des travaux

Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a écarté les frais afférents à l'intervention de la société Serviconfor alors que la facture correspondante a été produite et qu'elle n'a pas fait l'objet de contestation émanant des parties à la mesure d'instruction, en conséquence,

b) condamner solidairement ou à défaut in solidum, la société Spie IDF nord-ouest, ainsi que son assureur, la société Generali, ainsi que les sociétés MMA (aux droits de la société Covea Risks), au titre du contrat " multi risques de chantier plus " - police n° 118264136 - couvrant notamment les dommages survenus pendant la période de construction ainsi qu'un volet constructeur non réalisateur, au paiement des sommes suivantes, au titre des désordres affectant les descentes d'eaux pluviales :

- 20 579 euros HT correspondant aux travaux de reprise des canalisations, avec revalorisation par application de l'indice BT01 au jour de l'exécution des travaux,

- 11 150 euros HT correspondant au contrat de maîtrise d''uvre confié à la société Bet vecteur fluide

- 1 677,60 euros TTC au titre des investigations effectuées par la société Serviconfor

c) condamner solidairement ou à défaut in solidum, la société Bechet, ainsi que les société MMA (aux droits de la société Covea Risks), au titre du contrat " multi risques de chantier plus " - police n° 118264136 - couvrant notamment les dommages survenus pendant la période de construction ainsi qu'un volet constructeur non réalisateur), au paiement des sommes suivantes, au titre des désordres affectant les boiseries :

- 5 942, 30 euros HT correspondant aux travaux de reprise de la zone A, avec revalorisation par application de l'indice BT01 au jour de l'exécution des travaux,

- 3 744, 61 euros HT correspondant aux travaux de reprise de la zone B, avec revalorisation par application de l'indice BT01 au jour de l'exécution des travaux,

d) condamner solidairement ou à défaut in solidum, la société Spie ainsi que son assureur, la société Generali, ainsi que les sociétés MMA (aux droits de la société Covea Risks), au titre du contrat " multi risques de chantier plus " - police n° 118264136 - couvrant notamment les dommages survenus pendant la période de construction ainsi qu'un volet constructeur non réalisateur, au paiement des sommes suivantes, au titre des désordres affectant les réseaux (taux de fer) :

- 4 584 euros HT correspondant aux analyses réalisées par la société LFCM le 11 décembre 2014,

- 820 euros HT correspondant aux analyses réalisées par la société LFCM le 6 mars 2015,

- 42 629, 04 euros HT correspondant au rinçage effectué par la société Vinci le 11 mars 2015,

e) condamner les sociétés MMA (aux droits de la société Covea Risks), au titre du contrat " multi risques de chantier plus " - police n° 118264136 - couvrant notamment les dommages survenus pendant la période de construction ainsi qu'un volet constructeur non réalisateur et assurance dommages-ouvrage, au paiement de la somme suivante, au titre de la fuite d'eau dans la verrière imputable à la société Sam + Roumiguier, aujourd'hui liquidée :

- 1 852, 24 euros TTC correspondant à la recherche de fuites d'eau effectuée par la société Somen ;

f) condamner in solidum les mêmes défendeurs à payer la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts correspondant aux troubles de jouissance subis et à venir du fait des travaux de reprise

g) condamner, solidairement ou à défaut in solidum, les parties succombant à payer à la société Etoile du nord une somme de 20 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

h) condamner les mêmes aux dépens de première instance dont le référé et d'appel, lesquels seront directement recouvrés par Me Commerçon, avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et qui comprendront notamment les honoraires de M. [E].

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 30 mars 2022, les sociétés Ildei et Axa demandent à la cour de :

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il n'a pas retenu l'existence d'une cause étrangère exonératoire de responsabilité des constructeurs, seule la circulation d'engins lourds (destinés à l'exécution d'autres travaux) sur le terrazzo (qui ne peut le supporter) après la réalisation de celui-ci, à savoir le fait d'un tiers, étant de nature à expliquer les désordres constatés par l'expert judiciaire (fissures, " désaffleurs " ').

Infirmer en conséquence le jugement entrepris en ce qu'il est entré en voie de condamnation contre la société Ildei et son assureur, l'imputabilité des désordres aux travaux sous-traités par la société Ildei à la société Granito n'étant pas établie.

En conséquence,

Débouter la société Etoile du nord, ou toute autre partie sollicitant la condamnation des concluantes, des demandes dirigées à l'encontre de la société Ildei et de son assureur, la société Axa, qui seront mises hors de cause.

Si la cour ne retient pas l'existence d'une cause étrangère,

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a écarté l'application de l'article 1792 du code civil pour retenir que les désordres relevaient de la responsabilité civile des constructeurs, l'expert ayant relevé l'existence de désaffleurs générant un risque de chute dans l'atrium (hall d'exposition), et les désordres portant atteinte à la destination d'une salle de grand standing.

Débouter en tout état de cause la société Etoile du nord de ses demandes tendant à se voir allouer :

- le coût de la souscription d'une police dommages-ouvrage, et infirmer le jugement entrepris sur ce point

- le coût de l'intervention d'un contrôleur technique, et confirmer le jugement sur ce point

- le paiement des sommes 5 985,81 euros HT et 3 420 euros HT correspondant à des frais de sondages et d'analyses réalisés au cours des opérations d'expertise dont le maître d'ouvrage n'a pas justifié s'être acquitté, et confirmer sur ce point le jugement.

Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Etoile du nord de sa demande tendant à se voir allouer la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts, correspondant à des préjudices dont il n'a nullement été justifié et qui ne sauraient être indemnisés, en tout état de cause, de manière forfaitaire.

Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Ildei et son assureur la société Axa, in solidum avec les sociétés MMA, la société Granito et son assureur la société MMA, la société Spie industrie et tertiaire et son assureur la société Generali et la société Bechet, à payer à la société Etoile du nord la somme de 12 000 euros au titre des frais irrépétibles, à la société Soferim la somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles, et aux entiers dépens incluant les frais d'expertise.

Débouter la société Soferim de ses demandes contre les concluantes

Subsidiairement, si une quelconque condamnation devait être prononcée à l'encontre des concluantes, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que la garantie de la société Granito et de son assureur vis-à-vis des concluantes devait être totale, dans la mesure où les travaux de réalisation du terrazzo ont été, ainsi que le souligne le tribunal, intégralement sous-traités, la société Ildei n'ayant quant à elle commis aucune faute

Débouter la société MMA de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, la police souscrite par la société Granito ayant vocation à recevoir application, puisqu'elle :

- couvre la responsabilité du sous-traitant lorsque les travaux qu'il a réalisés sont affectés de désordres de nature décennale, ce qui est le cas en l'espèce, le montant du marché de l'assuré étant par ailleurs inférieur à celui prévu aux conditions particulières et pour lequel il est prévu que la garantie ne peut jouer (sauf déclaration particulière à l'assureur)

- couvre, si les désordres sont considérés comme n'étant pas de nature décennale, la responsabilité civile de l'assuré, la clause d'exclusion invoquée par les sociétés MMA (article 32 des conventions spéciales) étant inapplicable

Confirmer en conséquence le jugement entrepris en ce qu'il a décidé que la société MMA devait sa garantie à la société Granito et en ce qu'il a condamné in solidum la société Granito (aujourd'hui Granito et marbres reunis) et son assureur la société MMA à relever et garantir intégralement les sociétés Ildei et Axa des condamnations prononcées à leur encontre au titre des désordres affectant le terrazzo, en ce compris celles au titre des dépens et des frais irrépétibles

L'infirmer en ce qu'il n'a pas retenu la responsabilité du maître d''uvre qui a failli à son devoir de surveillance des travaux

En conséquence,

Condamner in solidum la société Granito et marbres réunis, anciennement Granito, l'assureur de cette dernière, la société MMA, et la société C2A architectes & ingénierie (aux droits de la société C2A ingénierie), à garantir les concluantes de l'ensemble des condamnations prononcées à leur encontre, sur le fondement de l'article 1147 ancien (devenu l'article 1231-1) du code civil pour la société Granito et son assureur, et sur le fondement de l'article 1382 ancien (devenu l'article 1240) du code civil pour la société C2A architectes & ingénierie

Condamner la société MMA, ou à défaut la société Etoile du nord, ou tout succombant, à verser à la société Ildei, d'une part, et à la société Axa, assureur de la société Ildei, d'autre part, la somme de 6 000 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de la société Grappotte-Benetreau, agissant par Me Grappotte-Benetreau, conformément aux dispositions de l'article 699 du même code.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 15 février 2022, la société C2A architectes & ingénierie demande à la cour de :

Dire la société C2A architectes et ingénierie, qui vient aux droits de la société C2A ingénierie recevable et fondée en son intervention volontaire ;

Dire la société MMA non fondée en son appel ;

Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il n'a prononcé aucune condamnation à l'encontre de la société C2A ingénierie aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui la société C2A architectes et ingénierie ;

Confirmer le jugement dont appel en ses dispositions relatives aux dépens incluant les frais d'expertise ;

Débouter tous autres requérants de leurs demandes en garantie à l'encontre de la société C2A ingénierie devenue C2A architectes et ingénierie ;

Condamner la société MMA, assureur de la société Granito ou tout succombant à régler à la concluante la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Les condamner aux entiers dépens, avec le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 6 janvier 2022, la société Soferim demande à la cour de :

Confirmer le jugement du 1er juin 2021 rendu par le tribunal judiciaire de Paris, tout particulièrement en ce qu'il retient l'absence de responsabilité de la société Soferim, et ne prononce pas de condamnation son encontre ;

subsidiairement :

1 - concernant les désordres affectant le revêtement de sol de l'atrium

Constater que la société Etoile du nord ne forme aucune demande de condamnations envers la société Soferim, et que l'expert judiciaire confirme que sa responsabilité n'est pas engagée;

très subsidiairement,

Condamner, in solidum les sociétés Ildei et Granito, ainsi que leurs assureurs respectifs, la société Axa (Ildei et les MMA, au titre du contrat "multi-risque chantier Plus" (police n° 118264136), couvrant notamment les dommages survenus pendant la période de construction, ainsi qu'un volet CNR (constructeur non réalisateur), à la relever et garantir de toutes condamnations pouvant intervenir du chef des désordres affectant le revêtement de sol de l'atrium ;

2 - concernant les désordres relatifs au taux de fer dans les canalisations

- constater que la société Etoile du nord ne forme aucune demande de condamnations envers la société Soferim, et que l'expert judiciaire confirme que sa responsabilité n'est pas engagée ;

- dire, en conséquence, que la responsabilité de la société Soferim n'est pas engagée, et rejeter toutes éventuelles demandes de condamnation la concernant ;

- très subsidiairement, condamner in solidum, la société SPIE et son assureur, la société Generali Iard, ainsi que les MMA au titre du contrat multi-risques Plus (police n° 1182 64134), couvrant notamment les dommages survenus pendant la période de construction, ainsi qu'un volet CNR (Constructeur Non Réalisateur), à la relever et garantir de toutes condamnations pouvant intervenir du chef de désordre relatif au taux de fer dans les canalisations ;

3 - concernant les désordres affectant la verrière de l'atrium

- constater que la société Etoile du nord ne forme aucune demande de condamnations envers la société Soferim, et que l'expert judiciaire confirme que sa responsabilité n'est pas engagée;

- dire, en conséquence, que la responsabilité de la société Soferim n'est pas engagée et rejeter toutes éventuelles demandes de condamnation la concernant ;

4- concernant les désordres affectant les descentes DEP et gouttières de L'atrium

- constater que la société Etoile du nord ne forme aucune demande de condamnations envers la société Soferim, et que l'expert judiciaire confirme que sa responsabilité n'est pas engagée;

- dire, en conséquence, que la responsabilité de la société Soferim n'est pas engagée et rejeter toutes éventuelles demandes de condamnation la concernant ;

- très subsidiairement, condamner in solidum la société SPIE Ile-de-France, ainsi que son assureur, la compagnie d'assurance Genrali , ainsi que les MMA au titre du contrat multi-risques PLUS (police n° 1182 64134), couvrant notamment les dommages survenus pendant la période de construction, ainsi qu'un volet CNR (Constructeur Non Réalisateur), à la relever et garantir de toutes condamnations pouvant intervenir du chef des désordres affectant les descentes EP et gouttières de l'atrium ;

5- concernant les désordres affectant les boiseries

- constater que la société Etoile du nord ne forme aucune demande de condamnations envers la société Soferim, et que l'expert judiciaire confirme que sa responsabilité n'est pas engagée;

- dire, en conséquence, que la responsabilité de la société Soferim n'est pas engagée et rejeter toutes éventuelles demandes de condamnation la concernant ;

- très subsidiairement, condamner in solidum la société BECHET, ainsi que les MMA, au titre du contrat multi-risques Plus (police n°118 264 136), couvrant notamment les dommages survenus pendant la période de construction, ainsi qu'un volet CNR (constructeur non réalisateur), à la relever et garantir indemne du chef des désordres affectant les boiseries ;

En outre,

- condamner in solidum les succombants à payer à la société Soferim une indemnité d'un montant de 25.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner, in solidum les succombants aux dépens, intégrant les frais d'expertise, à charge pour eux de rembourser la société Soferim les frais d'expertise payés à ses frais avancés.

La société Granito a reçu signification par remise à l'étude de la déclaration d'appel de la société MMA le 15 septembre 2021 et n'a pas constitué avocat.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 6 février 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 13 février 2024, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

A titre liminaire

Il résulte des articles 542, 909 et 954 du code de procédure civile que l'intimé qui entend interjeter appel incident doit, comme l'appelant principal, faire figurer dans le dispositif de ses conclusions une prétention tendant à la réformation du jugement (2e Civ., 1er juillet 2021, pourvoi no 20-10.694, publié au Bulletin).

En l'espèce la société Etoile du nord ne sollicite la réformation du jugement que sur les chefs de jugement suivants :

- rejet des demandes formées à l'encontre des assureurs de responsabilité décennale des locateurs d'ouvrage et contre l'assureur dommages-ouvrage concernant le revêtement du sol de l'atrium ;

- rejet de la demande relative aux frais d'investigation portant sur le sol ;

- rejet des frais afférents à l'intervention de la société Serviconfor pour un montant de 1677,60 euros (SPIE, Generali et MMA).

A défaut d'avoir sollicité la réformation du jugement sur les autres chefs, et bien que la société Etoile du nord reprenne dans le dispositif de ses conclusions les demandes identiques à celles formées devant le tribunal, la cour confirmera tous les autres chefs du jugement qui n'auront pas été déférés à la cour par d'autres parties.

Selon l'article 68 du code de procédure civile, les demandes incidentes à l'encontre des tiers sont formées, en appel par voie d'assignation.

Selon l'article 911 du code de procédure civile, les conclusions de l'intimé formant un appel incident doivent être signifiées aux parties n'ayant pas constitué avocat.

Au cas d'espèce, la société Etoile du nord forme des demandes incidentes à l'encontre des sociétés MMA et MMA assurances mutuelles en leur qualité d'assureur dommages-ouvrage.

Or la société Etoile du nord n'a pas signifié ses conclusions à la société MMA assurances mutuelles qui n'a pas constitué avocat ni à la société MMA qui n'a constitué avocat en cause d'appel qu'en sa qualité d'assureur de la société Granito.

Par conséquent les demandes formées par la société Etoile du nord à l'encontre des sociétés MMA en ce qu'elles viennent aux droits de la société Covea Risks, en leur qualité d'assureurs dommages-ouvrage seront déclarées irrecevables.

Sur la nature des désordres affectant le revêtement du sol en terrazzo de l'atrium

Moyens des parties

La société Etoile du nord soutient que ces désordres sont de nature décennale aux motifs que le rapport d'expertise établit qu'il s'agit d'un sinistre généralisé et que l'impropriété à la destination est caractérisée.

La société Ildei et son assureur, la société Axa, font valoir que la nature décennale résulte du risque de chutes qui s'induit des constatations de l'expert quant au soulèvement du revêtement du sol et l'existence de désaffleurs, ainsi que des conclusions de l'expert qui préconise la souscription d'une assurance dommages-ouvrage pour les travaux de reprise des désordres affectant le terrazzo.

La société MMA souligne que les prétendus risques de chute rendant l'utilisation de l'atrium dangereux ne sont pas démontrés et en déduit que le tribunal a fait une exacte appréciation de la nature des désordres.

Réponse de la cour

Selon l'article 1792 du code civil, le dommage de construction indemnisable en application dudit article est celui qui compromet la solidité de l'ouvrage ou le rend impropre à sa destination dans le délai d'épreuve de dix ans à compter de la réception.

Au cas d'espèce, les premiers juges ont rappelé par des motifs pertinents que l'expert établissait que les désordres étaient très localisés et non généralisés. Concernant le risque de chute, l'expert ne l'a pas constaté et il ne peut être établi par les seules affirmations sans offre de preuve de la société Etoile du nord. Il ne peut, par ailleurs être déduit des constatations de l'expert relatives aux désordres constatés dans quelques endroits très localisés que ces désordres seraient susceptibles de générer des chutes. En outre et en tout état de cause, en l'absence de gravité suffisante, il ne saurait caractériser à lui seul l'impropriété de l'ouvrage à sa destination.

Concernant l'allégation selon laquelle les défauts esthétiques du revêtement du sol rendraient les lieux impropres à leur destination, s'agissant de l'atrium du siège social de la SNCF, destiné à accueillir des clients et des personnalités politiques et devant refléter l'image de l'institution, il convient d'observer qu'il n'est produit aux débats aucune pièce de nature à établir de telles incidences de défauts esthétiques qui ne sont pas généralisés.

Le fait que l'expert préconise la souscription d'une assurance dommages-ouvrage dans le cadre des travaux réparatoires résulte de la nécessité de procéder, selon lui, à la reprise de la totalité du revêtement terrazzo, ce qui constitue des travaux de construction au sens de l'article L. 242-1 du code des assurances et rend la souscription de cette assurance obligatoire. Il ne peut en être déduit que les dommages à l'origine des travaux de reprise auraient un caractère décennal.

Par conséquent, c'est à juste titre que les premiers juges ont dit que ce désordre ne relevait pas de la garantie décennale.

Sur la cause étrangère alléguée par la société Ildei et la société Axa

Moyens des parties

La société Ildei et la société Axa font valoir qu'il résulte du rapport d'expertise qu'une nacelle araignée, d'un poids supérieur à celui que le revêtement pouvait supporter, a bien circulé sur le terrazzo, postérieurement à l'achèvement de ce dernier et qu'il n'appartenait pas à l'entrepreneur chargé de la pose du terrazzo de signaler une éventuelle incompatibilité puisqu'aucun engin roulant de manutention ne devait circuler sur ce revêtement.

La société Etoile du nord soutient qu'il résulte du rapport d'expertise qu'il n'est pas établi la preuve que des engins de manutentions auraient circulé sur le terrazzo et seraient à l'origine des désordres relevés. Elle souligne que l'expert écarte la thèse selon laquelle la souplesse du support serait à l'origine des désordres et ajoute que si tel était le cas la société Ildei aurait manqué à son devoir de conseil en n'analysant pas les contraintes du sol et de l'existant pour s'assurer de leur compatibilité avec le revêtement qu'elle était chargée de poser.

Réponse de la cour

Concernant l'incidence de l'utilisation d'une nacelle araignée postérieurement à la réalisation du terrazzo, il est établi par le rapport d'expertise qu'une nacelle araignée a effectivement été utilisée pour déposer l'ancienne verrière et installer la nouvelle, postérieurement à l'application du terrazzo. La société Egyde a précisé que l'arrivée de la nacelle avait fait l'objet de mesures de précautions particulières avec la mise en 'uvre de plaques de répartition néoprène. Cette précision ne permet cependant pas d'établir la preuve que ladite nacelle a roulé sur le terrazzo, l'expert indiquant qu'aucun élément ne lui permet de l'affirmer.

La société Ildei n'apporte pas d'autres éléments permettant d'établir que cette nacelle a effectivement roulé sur le terrazzo. Elle ne prouve notamment pas que les travaux réalisés avec la nacelle ne pouvaient avoir lieu, sans que l'engin ne roule sur le terrazzo.

La société Ildei affirme, sans en rapporter la preuve qui lui incombe, que d'autres engins roulants ainsi que des interventions auraient eu lieu après la pose du revêtement et souligne que la pose des candélabres, fixés dans la dalle après forage et fixation par béton fibré, a généré d'importantes vibrations. Si l'expert évoque effectivement la pose des candélabres dans l'atrium, il indique que le maître d''uvre a déclaré que ceux-ci avaient été fixés en accord avec la société Ildei, ce que cette dernière ne conteste pas.

Au surplus, la société Ildei ne peut faire valoir le rôle causal de cette pose des candélabres dans l'apparition des désordres alors qu'elle ne l'a jamais évoqué auprès de l'expert, que ce dernier ne retient pas de lien de causalité et qu'elle n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation de l'expert.

Quant à l'incidence de la souplesse du support sur l'apparition des désordres, l'expert note que si la souplesse du support était à l'origine du désordre, il y aurait des fissures sur la totalité du revêtement alors que les sondages ont permis de démontrer que là où le revêtement était fissuré, il y avait un défaut d'adhérence à la chape.

Si la société Ildei affirme, au contraire, que c'est la pression exercée par le poids d'engins lourds qui est à l'origine du défaut d'adhérence à la chape, elle n'apporte pas la preuve de ses allégations contraires aux conclusions techniques de l'expert.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que la responsabilité des sociétés Ildei et Granito était engagée au titre du décollement du revêtement de sol de l'atrium en terrazzo respectivement sur le fondement des articles 1147 et 1382 du code civil dans leur version en vigueur avant l'ordonnance du 10 février 2016.

Sur la garantie de la société MMA

Moyens des parties

La société MMA soutient que la société Granito n'a pas souscrit la garantie facultative des dommages intermédiaires et que la garantie responsabilité civile de l'entreprise exclut dans son article 32 les dommages subis par les ouvrages ou travaux effectués par l'assuré. Elle expose que cette clause d'exclusion est claire, précise, formelle et limité et qu'en outre elle ne vide pas le contrat de sa substance.

Elle ajoute qu'en application de l'article 8 des conditions d'application des garanties, ces dernières ne s'appliquent pas dès lors que l'opération de construction à laquelle l'assuré participe dépasse 10 000 000 euros, sans qu'une garantie spécifique n'ait été souscrite pour le marché.

La société Etoile du nord fait valoir que les clauses d'exclusion visées par la société MMA sont sujettes à discussion d'une part et vide de sa substance le contrat d'autre part et que par conséquent ces clauses doivent être réputées non écrites en application de l'article L. 113-1 du code des assurances.

Concernant l'absence de garantie eu égard au montant du chantier, elle soutient que l'article 8 des conditions générales ne concernent que la garantie décennale et qu'en tout état de cause la garantie s'applique en l'espèce puisque le montant du marché exécuté est inférieur à 8 761 908 euros.

La société Ildei et la société Axa soutiennent qu'il convient de comprendre la clause excluant les dommages subis par les ouvrages ou travaux effectués par l'assuré comme les dommages causés aux ouvrages ou travaux de l'assuré par le fait d'un tiers. Elles soulignent qu'à défaut, cette exclusion viderait la garantie de toute substance et qu'en tout été de cause cette clause est sujette à interprétation.

Réponse de la cour

Il est établi qu'une clause d'exclusion n'est pas formelle au sens de l'article L. 113-1 du code des assurances lorsqu'elle ne se réfère pas à des critères précis et nécessite interprétation et qu'elle n'est pas limitée au sens du même article lorsqu'elle vide la garantie de sa substance en ce qu'après son application elle ne laisse subsister qu'une garantie dérisoire (2e Civ., 1er décembre 2022, pourvoi n° 21-19.341, publié au Bulletin et au Rapport).

Au cas d'espèce, l'article 32-4 des conditions spéciales stipule que sont exclus de la garantie les dommages subis par les ouvrages ou travaux effectués par l'assuré et ses sous-traitants.

Cette clause d'exclusion doit être appréciée au regard du champ de la garantie " responsabilité civile de l'entreprise ", défini par l'article 21 des mêmes conditions garantissant notamment l'assuré contre les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant lui incomber en raison des dommages corporels, matériels, immatériels consécutifs à des dommages corporels et matériels garantis subis par autrui et imputables à son activité professionnelle.

Cette clause est claire et précise et permet à l'assuré d'identifier sans hésitation et sans que la clause puisse donner lieu à interprétation les cas dans lesquels il ne sera pas garanti.

Elle revêt donc bien un caractère formel.

Par ailleurs elle laisse dans le champ de la garantie les dommages autres que ceux résultant des malfaçons affectant les ouvrages ou travaux. Ainsi elle laisse dans le champ de garantie tous les accidents de chantier ainsi que les dommages subis par les biens, ouvrages ou travaux réalisés par des tiers ou par l'existant.

Cette clause, qui ne vide donc pas la garantie de sa substance en laissant après son application une garantie dérisoire, revêt est un caractère limité.

La clause d'exclusion est donc formelle et limitée et il n'y a, par conséquent, pas lieu de la réputer non écrite.

Les travaux de reprise du revêtement de sol en terrazzo étant la conséquence des dommages subis par les travaux effectués par la société Granito, ils sont exclus de la garantie responsabilité civile de l'entreprise souscrite auprès de la société MMA.

La garantie de la société MMA étant donc exclue, il convient de rejeter toutes les demandes formées par la société Etoile du nord, la société Ildei et la société Axa à l'encontre de la société MMA en qualité d'assureur de la société Granito.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a condamné la société MMA au versement des sommes suivantes à la société Etoile du nord :

- 225 299 euros HT au titre du remplacement du revêtement ;

- 2 340 euros HT au titre des sondages à réaliser à la demande de la maîtrise d''uvre

- 18 000 euros HT au titre des frais de maîtrise d''uvre relatifs aux travaux de reprise ;

- 4 912,78 euros HT correspondant au coût d'une assurance dommages-ouvrage

Il sera également infirmé en ce qu'il a condamné la société MMA à garantir intégralement la société Ildei et la société Axa des condamnations prononcées à leur encontre au titre des désordres affectant le terrazzo, en ce compris celles au titre des dépens et des frais irrépétibles.

Sur les préjudices de la société Etoile du nord

Moyens des parties

Les sociétés Ildei et Axa soutiennent que la société Etoile du nord ne justifie pas de la nécessité des frais de souscription d'une assurance dommages-ouvrage ni du coût de cette dernière. Elle souligne que la société Etoile du nord n'a pas justifié s'être acquittée des frais de sondage et d'analyses dont elle demande le remboursement.

La société Etoile du nord expose que l'expert s'est prononcé en faveur de la prise en compte dans son préjudice du coût de la police dommages-ouvrage. Elle expose qu'il résulte du tableau réalisé par l'expert que les frais d'analyse et de sondage ont été réglés.

Réponse de la cour

En l'absence d'élément nouveau soumis à son appréciation, la cour estime que le premier juge, par des motifs pertinents qu'elle approuve, a fait une exacte appréciation des faits de la cause et des droits des parties.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum la société Ildei et son assureur la société Axa à payer à la société Etoile du nord les sommes suivantes à titre d'indemnisation des désordres affectant le terrazzo :

- 225 299 euros HT correspondant aux frais de remplacement du revêtement ;

- 2 340 euros HT correspondant aux sondages à réaliser à la demande de la maîtrise d''uvre ;

- 18 000 euros HT correspondant aux frais de maîtrise d''uvre afférents aux travaux de reprise ;

- 4 912,78 euros HT correspondant au coût de l'assurance dommages-ouvrage.

Sur le recours en garantie contre la société C2A

Moyens des parties

La société Ildei et la société Axa soutiennent que lorsque le maître d''uvre est chargé du suivi des travaux, cela implique qu'il doit s'intéresser concrètement aux modalités de leur réalisation et qu'en l'espèce, les travaux de mise en 'uvre du terrazzo ayant duré deux mois, le maître d''uvre pouvait relever les erreurs d'exécution et ne peut s'exonérer de sa responsabilité au motif qu'il n'était pas tenu à une présence permanente sur le chantier.

La société C2A souligne que l'expert a conclu que les dommages étaient la conséquence de défauts ponctuels d'exécution, qu'il n'est pas démontré qu'elle aurait pu prévenir les désordres au titre de sa mission et qu'elle n'était pas tenue à une vérification minutieuse de la bonne exécution en cours de chantier des entreprises intervenantes dont l'expertise était notoire dans leur domaine.

Réponse de la cour

Les premiers juges ont retenu, à juste titre, que s'agissant de défauts de mise en 'uvre ponctuels, non généralisés et non apparents, la responsabilité du maître d''uvre ne pouvait être engagée. Le fait que les travaux aient duré deux mois ne suffit pas à établir la preuve que les erreurs d'exécution auraient pu être décelées par le maître d''uvre d'exécution.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de garantie formée à l'encontre de la société C2A.

Sur les frais du procès

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement sur la condamnation aux dépens et sur celle au titre de l'article 700 du code de procédure civile, sauf en ce qui concerne les condamnations de la société MMA en qualité d'assureur de la société Granito.

En cause d'appel, les sociétés Etoile du nord, la société Ildei, la société Granito et la société Axa, parties succombantes, seront condamnées aux dépens.

Il n'apparaît pas inéquitable que chacune des parties conservent les frais irrépétibles qu'elle a engagés dans le cadre de l'appel.

Le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile sera accordé aux avocats en ayant fait la demande et pouvant y prétendre.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevables les demandes formées par la société Etoile du nord à l'encontre des sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles en ce qu'elles viennent aux droits de la société Covea Risks, en leur qualité d'assureurs dommages-ouvrage ;

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'il a :

- condamné la société MMA IARD en qualité d'assureur de la société Granito, à payer à la société Etoile du nord les sommes suivantes :

- 225 299 euros HT au titre du remplacement du revêtement ;

- 2 340 euros HT au titre des sondages à réaliser à la demande de la maîtrise d''uvre ;

- 18 000 euros HT au titre des frais de maîtrise d''uvre relatifs aux travaux de reprise ;

- 4 912,78 euros HT correspondant au coût d'une assurance dommages-ouvrage ;

- condamné la société MMA IARD, en qualité d'assureur de la société Granito, à garantir intégralement la société Ildei et la société Axa France IARD des condamnations prononcées à leur encontre au titre des désordres affectant le terrazzo, en ce compris celles au titre des dépens et des frais irrépétibles ;

- condamné la société MMA IARD, en qualité d'assureur de la société Granito aux dépens et à payer à la société Etoile du nord la somme de 12 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

L'infirme sur ces points et statuant à nouveau,

Rejette toutes les demandes formées à l'encontre de la société MMA IARD, en qualité d'assureur de la société Granito ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum les sociétés Etoile du nord, la société Ildei, la société Granito et la société Axa France IARD aux dépens d'appel ;

Admet les avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Rejette toutes les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/13075
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;21.13075 ?
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