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24/04/2024 | FRANCE | N°21/07347

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 24 avril 2024, 21/07347


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 24 AVRIL 2024



(n°2024/ , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07347 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEHCT



Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Mars 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de paris - RG n° 19/04202





APPELANT



Monsieur [U] [I]

[Adresse 3]

[Loca

lité 4]

Représenté par Me Marie-Anne LAPORTE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0455





INTIMÉES



S.E.L.A.F.A. MJA prise en la personne de Me [P] es-qualités de liquidateur de la SAS...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 24 AVRIL 2024

(n°2024/ , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/07347 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEHCT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Mars 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de paris - RG n° 19/04202

APPELANT

Monsieur [U] [I]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Marie-Anne LAPORTE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0455

INTIMÉES

S.E.L.A.F.A. MJA prise en la personne de Me [P] es-qualités de liquidateur de la SAS TULUM

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Catherine LAUSSUCQ, avocat au barreau de PARIS, toque : D0223

Association Unedic Délégation AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Hélène NEGRO-DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0197

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre, Président de formation

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, initialement prévue le 27 mars 2024 et prorogée au 24 avril 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre et par Madame Laëtitia PRADIGNAC, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Selon contrat de travail à durée indéterminée, M. [I] a été engagé le 1er octobre 2007 en qualité de « dessinateur: définition des projets, dessins et suivi des chantiers » par la société Vital.

Par avenant du 1er juin 2013, M. [I] a été nommé directeur d'agence.

Placée en liquidation judiciaire le 13 octobre 2016, la société Vital a fait l'objet d'un plan de cession au profit de la société Tulum emportant transfert à celle-ci du contrat de travail de M. [I].

M. [I] a été placé en arrêt de travail du 22 novembre au 17 décembre 2018.

Par lettre du 13 février 2019, la société Tulum a notifié un avertissement à M. [I].

M. [I] a été placé le 8 mars 2019 en arrêt de travail qui a été prolongé jusqu'au 31 mai 2019.

M. [I] a saisi le 16 mai 2019 le conseil de prud'hommes de Paris d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et en sollicitant la condamnation de la société Tulum à lui payer différentes sommes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

M. [I] a été licencié pour faute grave par lettre du 19 juin 2019.

Par jugement du 16 mars 2021, auquel il est également renvoyé pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Paris a rendu la décision suivante:

« Déboute M. [U] [I] de l'ensemble de ses demandes;

Laisse à la charge de M. [U] [I] les entiers dépens. »

Par jugement du 31 mars 2021, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Tulum et a désigné la société MJA en qualité de liquidateur.

M. [I] a relevé appel du jugement du conseil de prud'hommes par déclaration transmise par voie électronique le 9 août 2021.

La constitution d'intimée de la société MJA, ès qualités de liquidateur de la société Tulum, a été transmise par voie électronique le 1er septembre 2021.

La constitution d'intimée de l'AGS CGEA IDF Ouest a été transmise par voie électronique le 31 août 2021.

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 28 octobre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, M. [I] demande à la cour de :

« INFIRMER le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes le 16 mars 2021 et

EN CONSEQUENCE :

' A titre principal,

PRONONCER la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur,

DIRE que cette résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse

DIRE ET JUGER que [U] [I] détient des créances, au titre des demandes par lui formulées et des différents préjudices subis, à l'encontre de la société TULUM en liquidation aujourd'hui représentée par la SELAFA MJA, en la personne de Me [B] [P], es qualité;

FIXER AU PASSIF de la Sté TULUM, aujourd'hui représentée par la SELAFA MJA, en la personne de Me [B] [P], es qualité, les créances de [U] [I] aux

montants suivants :

- remboursement des frais de janvier et février 2019: 322,02 €

- Indemnité de licenciement: 11.253,47 €

- Indemnité de préavis: 7.643,96 €

- Congés payés sur préavis: 764,39 €

- Dommages et intérêts pour inexécution contractuelle, préjudice moral et matériel, avant la rupture: 22.931,88 €

- Indemnité prévue par l'article L1235-3-1 (6 mois): 22.931,88 €

- A. 700 C.P.C: 5.000,00 €

- entiers dépens: mémoire

' A titre subsidiaire,

DIRE que le licenciement prononcé est dépourvu de cause réelle et sérieuse

DIRE ET JUGER que [U] [I] détient des créances, au titre des demandes par lui formulées et des différents préjudices subis, à l'encontre de la société TULUM en liquidation aujourd'hui représentée par la SELAFA MJA, en la personne de Me [B] [P], es qualité;

FIXER AU PASSIF de la Sté TULUM, aujourd'hui représentée par la SELAFA MJA, en la personne de Me [B] [P], es qualité, les créances de [U] [I] aux

montants suivants :

- remboursement des frais de janvier et février 2019: 322,02 €

- Indemnité de licenciement: 11.253,47 €

- Indemnité de préavis: 7.643,96 €

- Congés payés sur préavis: 764,39 €

- Dommages et intérêts pour inexécution contractuelle, préjudice moral et matériel, avant la rupture: 22.931,88 €

- Indemnité prévue par l'article L1235-3-1 (6 mois): 22.931,88 €

- A. 700 C.P.C: 5.000,00 €

- entiers dépens: mémoire

' A titre infiniment subsidiaire,

DIRE que le motif reproché au salarié, compte tenu du comportement de l'employeur à son égard, ne constitue pas une faute grave.

DIRE ET JUGER que [U] [I] détient des créances, au titre des demandes par lui formulées et des différents préjudices subis, à l'encontre de la société TULUM en liquidation aujourd'hui représentée par la SELAFA MJA, en la personne de Me [B] [P], es qualité;

FIXER AU PASSIF de la Sté TULUM, aujourd'hui représentée par la SELAFA MJA, en la personne de Me [B] [P], es qualité, les créances de [U] [I] aux

montants suivants :

- remboursement des frais de janvier et février 2019: 322,02 €

- Indemnité de licenciement: 11.253,47 €

- Indemnité de préavis: 7.643,96 €

- Congés payés sur préavis: 764,39 €

- Dommages et intérêts pour inexécution contractuelle, préjudice moral et matériel, avant la rupture: 22.931,88 €

- indemnité pour licenciement irrégulier: 3.000,00 €

- A. 700 C.P.C: 5.000,00 €

- entiers dépens: mémoire

En tous cas,

DIRE ET JUGER que l'arrêt à intervenir sera déclaré commun et opposable à l'AGS (CGEA) IDF OUEST dans les limites de sa garantie légale.

CONDAMNER l'AGS (CGEA) IDF OUEST à garantir les créances de l'appelant fixées par la Cour au passif de la Sté TULUM, aujourd'hui représentée par la SELAFA MJA, en la personne de Me [B] [P], es qualité

CONDAMNER la Sté TULUM, aujourd'hui représentée par la SELAFA MJA, en la personne

de Me [B] [P], es qualité, à remettre à [U] [I], dans le mois suivant la notification du jugement, le solde de tous comptes, la fiche de paie, le certificat de travail, l'attestation destinée à POLE EMPLOI sous astreinte de 50 € par jour et par document »

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 19 novembre 2021, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, la société MJA, ès qualités de liquidateur de la société Tulum, demande à la cour de:

« CONFIRMER le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris en date du 16 mars 2021 en toutes ses dispositions,

En conséquence :

DEBOUTER Monsieur [I] de toutes ses demandes, fins et prétentions,

En tout état de cause :

CONDAMNER Monsieur [I] à payer à la SELAFA MJA la somme de 1.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNER Monsieur [I] en tous les dépens. »

Dans ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 27 janvier 2022, auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé des moyens, l'AGS CGEA IDF Ouest demande à la cour de:

« Donner acte à la concluante des conditions d'intervention de l'AGS notamment dans le cadre des dispositions du code de commerce rappelées ci-dessus, et des limites et plafonds de la garantie de l'AGS prévus notamment par les articles L.3253-6 à L.3253-17, L.3253-19 à L.3253-20 du Code du travail et dire que toute décision à intervenir ne peut être déclarée opposable à l'AGS que dans ces conditions, limites et plafonds ;

Confirmer le jugement dont appel ;

Débouter M. [I] de ses demandes, fins et conclusions ;

Subsidiairement, rejeter les demandes de fixation de créances qui ne sont ni fondées dans leur

principe ni justifiées dans leur montant et en tout état de cause, réduire aux seuls montants dûment justifiés les créances susceptibles d'être fixées, notamment à titre de salaires et à titre d'indemnités et dommages et intérêts. »

L'ordonnance de clôture a été rendue le 12 février 2024.

MOTIFS

Sur la résiliation du contrat de travail

Cette demande ayant été formée judiciairement avant le licenciement de M. [I], elle doit être examinée en premier lieu.

Il est de jurisprudence constante qu'un salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de manquements de son employeur à ses obligations, suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail. C'est au salarié qui sollicite la résiliation judiciaire du contrat de travail qu'il incombe de rapporter la preuve que l'employeur a commis des manquements suffisamment graves à ses obligations de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

En l'espèce, M. [I] reproche à la société Tulum une absence de fourniture de travail, des paiements irréguliers de salaires et notes de frais, un isolement, l'absence de réponse à ses signalements et le transfert de l'activité de l'employeur sur une autre structure.

S'agissant du premier reproche, M. [U] [I] ne vise dans ses conclusions qu'une pièce consistant en quelques échanges de courriels en août 2018 (pièce n°15). Il n'en ressort pas une absence de fourniture de travail au salarié. Au contraire, après qu'il a été demandé par Mme [M] (gérante de la société Tulum) à M. [I] de répondre à quatre appels d'offres, M. [X] (consultant), par courriel du 17 août 2018, a répondu « Mon analyse et suite discussion avec [U], il me semble que répondre à 4 appels d'offre est impossible dans les temps demandés! ». Il n'est produit aucune pièce démontrant que M. [I] avait répondu qu'il était en sous-charge de travail et avait donc le temps de répondre à l'ensemble de ces appels d'offres. Les termes « insuffisance de travail » dans le courriel de Mme [M] du 20 août 2018 sont d'ailleurs contredits dans le même message par la phrase, adressée aussi à M. [I], « Vous êtes tous sur le pont actuellement ». Le premier manquement n'est par conséquent pas établi.

S'agissant du deuxième reproche, M. [I] produit des échanges de courriels dans lesquels il se plaint à son employeur, le 15 mai 2018 de ne pas avoir encore eu le remboursement de ses frais du mois d'avril 2018, le 22 novembre 2018 de ne pas avoir encore été remboursé de sa note de frais d'octobre 2018 et de n'avoir reçu le paiement de son salaire d'octobre que le 9 novembre 2018, le 10 avril 2019 de n'avoir pas encore perçu son salaire de mars 2019 ni ses remboursements des frais pour janvier et février 2019, le 11 juin 2019 de n'avoir pas perçu son salaire de mai ni la totalité de celui d'avril et d'être toujours en attente du remboursement de ses notes de frais de janvier et février 2019.

La société Tulum ne communique pas de pièces rapportant la preuve que les salaires et remboursement de frais ainsi visés par M. [I] lui avaient bien été versés aux dates prévues et dans leur totalité. Le salaire de mai 2019 n'a finalement été payé à M. [I] qu'en juillet 2019.

La répétition des retards de la société Tulum à verser à M. [I] les sommes lui étant dues constitue un manquement suffisamment grave de la société à ses obligations contractuelles pour, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres reproches formulés par le salarié, rendre impossible la poursuite de son contrat de travail.

Il convient donc de prononcer, par infirmation du jugement, la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [I] à la date d'envoi de la lettre de licenciement, le 19 juin 2019, cette résiliation judiciaire produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la demande en remboursement des frais de janvier et février 2019

M. [I] justifie avoir relancé par courriel son employeur dès le 5 mars 2019 à propos de l'absence de remboursement de ces frais, la société Tulum répondant le même jour qu'ils ne lui ont effectivement pas été encore payés (pièce n°18 du salarié).

La société Tulum ne rapporte pas la preuve du paiement ultérieur de ces frais alors que M. [I] lui avait communiqué les justificatifs de ces frais.

Par conséquent, et par infirmation du jugement, il convient de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Tulum la créance de M. [I] à la somme de 322,02 euros à titre de remboursement des frais de janvier et février 2019.

Sur la demande de 22 931,88 euros de dommages-intérêts « pour inexécution contractuelle, préjudice moral et matériel, avant la rupture »

Il résulte de la page 23 des conclusions de M. [I] que cette somme est demandée au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail, étant ajouté que la somme supplémentaire de 3 000 euros sollicitée en pages 23 et 24 au titre d'un « licenciement irrégulier » ne figure pas parmi les chefs du dispositif des conclusions d'appel de M. [I] dans ses demandes formées dans l'hypothèse où il serait fait droit à sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, de sorte que la cour d'appel n'est pas valablement saisie d'une telle demande de 3 000 euros de dommages-intérêts et n'a pas à y répondre.

L'article L.1222-1 du code du travail dispose que « Le contrat de travail est exécuté de bonne foi ». Il en résulte une obligation de loyauté pesant tant sur le salarié que sur l'employeur pendant la durée de la relation contractuelle.

En l'espèce, il ressort de l'ensemble des éléments communiqués que les manquements invoqués par M. [I] à l'encontre de la société Tulum au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail sont justifiés à l'exception de celui relatif à l'absence de fourniture du travail.

Par conséquent, eu égard aux éléments produits par M. [I] quant aux conséquences en ayant résulté pour lui, et afin de ne pas indemniser le même préjudice que celui pris en compte par l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, il y a lieu, par infirmation du jugement, de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Tulum la créance de M. [I] à la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement de ladite société à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail.

Sur les conséquences financières de la rupture

a) L'indemnité compensatrice de préavis est égale à la rémunération totale qui aurait été perçue si le salarié avait accompli son préavis.

En l'état des documents produits, il est retenu un salaire mensuel moyen de 3 821,98 euros bruts pour M. [I].

En application de l'article L.1234-1 du code du travail, le salarié ayant une ancienneté d'au moins deux ans a droit à un préavis de deux mois.

Par conséquent, et par infirmation du jugement, il convient de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Tulum la somme de 7 643,96 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 764,39 euros au titre des congés payés afférents.

b) Aux termes de l'article L.1234-9 du contrat de travail, « Le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement ».

L'article R.1234-2 du même code dispose que:

« L'indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :

1° Un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à dix ans ;

2° Un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de dix ans. »

Par conséquent, eu égard à l'ancienneté de M. [I] à la date de rupture du contrat de travail, il convient, par infirmation du jugement, de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Tulum la créance de M. [I] à la somme de 11 147,44 euros à titre d'indemnité légale de licenciement.

c) Les dispositions de l'article L.1253-3 du contrat de travail, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017, applicable au litige, prévoient l'octroi au salarié, dans les entreprises de moins de 11 salariés comme c'est le cas en l'espèce, d'une indemnité à la charge de l'employeur dont le montant est compris entre un minimum et un maximum de mois de salaire brut selon l'ancienneté du salarié dans l'entreprise, celle-ci n'étant calculée que sur le fondement d'années complètes.

Eu égard à l'ancienneté de 11 années complètes de M. [I], le montant minimal de l'indemnité est ainsi de 3 mois de salaire brut et le montant maximal prévu est de 10,5 mois de salaire brut.

En considération des circonstances de la rupture ainsi que de la situation particulière du salarié tenant notamment à son âge, son expérience professionnelle, et à sa capacité à retrouver un emploi, il convient donc, par infirmation du jugement, de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Tulum la créance de M. [I] à la somme de 18 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la délivrance de documents

M. [I] sollicite la remise d'un solde de tout compte, d'une fiche de paie, d'un certificat de travail et d'une attestation destinée à Pôle Emploi conformes à la décision à intervenir.

Il est fait droit à ces demandes.

En revanche, aucun élément ne permettant de présumer que la liquidation judiciaire de la société Tulum va résister à la présente décision, il n'y a pas lieu d'ajouter une astreinte à cette obligation de remise. La demande d'astreinte est donc rejetée.

Sur les autres demandes

Le présent arrêt est déclaré commun à l'UNEDIC délégation AGS CGEA Ile-de-France Est et les sommes allouées au salarié seront garanties par cet organisme dans les conditions légales et les limites du plafond qui sont applicables à la date de la rupture, étant précisé que ni les sommes allouées en application de l'article 700 du code de procédure civile ni les dépens ne sont garantis par ledit organisme.

Les créances du salarié trouvent leur origine dans la rupture de son contrat de travail, laquelle est antérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective, de sorte que s'appliquent en l'espèce les dispositions des articles L.622-28 et L.641-3 du code de commerce selon lesquelles le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que de tous les intérêts de retard et majorations.

La liquidation judiciaire de la société Tulum succombant, la société MJA, ès qualités de liquidateur, est condamnée aux dépens de la procédure de première instance et de la procédure d'appel en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Il paraît équitable de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Tulum la créance de M. [I] à la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [I], aux torts de la société Tulum, à la date du 19 juin 2019.

Dit que cette résiliation judiciaire produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société Tulum les créances de M. [I] aux sommes de :

- 322,02 euros à titre de remboursement des frais de janvier et février 2019;

- 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat de travail;

- 7 643,96 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis;

- 764,39 euros au titre des congés payés afférents;

- 11 147,44 euros à titre d'indemnité légale de licenciement;

- 18 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse;

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit que le jugement d'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que de tous les intérêts de retard et majorations.

Ordonne à la liquidation judiciaire de la société Tulum de remettre à M. [I] un solde de tout compte, une fiche de paie, un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle Emploi conformes à la présente décision.

Déboute les parties du surplus de leurs demandes.

Déclare le présent arrêt commun à l'UNEDIC délégation AGS CGEA Ile-de-France Est, qui sera tenu de garantir les sommes allouées à M. [I] dans les conditions légales et les limites du plafond applicable à la date de la rupture.

Condamne la société MJA, ès qualités de liquidateur de la société Tulum, aux dépens de la procédure de première instance et de la procédure d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 21/07347
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;21.07347 ?
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