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24/04/2024 | FRANCE | N°21/05117

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 24 avril 2024, 21/05117


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 24 AVRIL 2024



(n° /2024, 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/05117 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD2BT



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Mai 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F 19/00065





APPELANT



Monsieur [U] [B]

[Adresse 1]

[Loca

lité 2]

Représenté par Me Marie-hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153





INTIMEE



S.A.R.L. GARAGE DES ARCADES prise en la personne de son gérant domicilié en...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 24 AVRIL 2024

(n° /2024, 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/05117 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD2BT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Mai 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F 19/00065

APPELANT

Monsieur [U] [B]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Marie-hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153

INTIMEE

S.A.R.L. GARAGE DES ARCADES prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 2]

Représentée par Me Joseph BENAIM, avocat au barreau d'ESSONNE, toque : E866

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 29 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Florence MARQUES, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Mme. MEUNIER Guillemette, présidente de chambre

Mme. NORVAL-GRIVET Sonia, conseillère

Mme. MARQUES Florence, conseillère rédactrice

Greffier, lors des débats : Madame Clara MICHEL

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Guillemette MEUNIER, Présidente et par Clara MICHEL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société Garage des arcades est spécialisée dans l'entretien et la réparation automobile.

Elle a engagé M. [U] [B] suivant contrat de travail à durée déterminée en date du 30 septembre 2011, pour la période du 3 octobre au 31 décembre 2011, en qualité de carrossier peintre, moyennant une rémunération de 2 055 euros. Il était prévu une durée de travail hebdomadaire de 35 heures.

A l'issue, la relation contractuelle s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes, ainsi que du contrôle technique automobile.

Le 19 juillet 2017, M. [U] [B] a fait l'objet d'un avertissement.

M. [U] [B] a fait l'objet, après convocation du 8 novembre 2018 à un entretien préalable fixé au 20 novembre 2018 et rappel de la mise à pied à titre consevatoire notifiée verbalement le jour même, d'un licenciement pour faute grave le 23 novembre 2018.

À la date de fin de contrat, la société Garage des arcades occupait à titre habituel moins de onze salariés.

M. [U] [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Longjumeau, le 1er février 2019, aux fins de voir juger son licenciement nul à titre principal, dépourvu de cause réelle et sérieuse à titre subsidiaire, et condamner son employeur à lui verser diverses sommes dont des dommages et intérêts pour harcèlement moral et un rappel de salaire au titre des heures suupplémentaires.

Par jugement en date du 12 mai 2021, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Longjumeau a:

- dit que les faits invoqués par M. [U] [B] ne sont pas constitutifs de harcèlement moral,

- rejeté la demande de nullité du licenciement pour faute grave dont a fait l'objet M. [U] [B],

- confirmé le licenciement notifié à M. [U] [B] pour faute grave,

- condamné la société Garage des arcades à payer à M. [B] les sommes suivantes :

* 1.814,03 euros au titre des heures supplémentaires, outre 181,40 euros de congés payés afférents,

* 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les intérêts légaux courront à compter du 4 février 2019, date de réception de la lettre de convocation devant le bureau de conciliation, pour les créances salariales et du prononcé pour les autres créances,

- prononcé l'exécution provisoire de droit,

- débouté la société Garage des arcades de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté les demandes plus amples ou contraires des parties,

- condamné la société Garage des arcades aux entiers dépens de l'instance, y compris ceux afférents aux actes et procédures éventuels de la présente instance ainsi que ceux d'exécution forcée par toute voie légale de la présente décision.

La société Garage des Arcades a cédé son fonds de commerce à effet du 30 septembre 2019.

Par déclaration au greffe en date du 9 juin 2021, M. [U] [B] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 12 janvier 2022, M. [U] [B] demande à la Cour de :

- infirmer le jugement de première instance en ce qu'il a :

* dit que les faits invoqués par M. [U] [B] ne sont pas constitutifs de harcèlement moral,

* rejeté la demande de nullité du licenciement pour faute grave dont a fait l'objet M. [U] [B],

* confirmé le licenciement notifié à M. [U] [B] pour faute grave,

* rejeté les demandes plus amples ou contraire de M. [U] [B],

- confirmer le jugement déféré pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- déclarer que le licenciement pour faute grave notifié par la société Garage des arcades à M. [U] [B] en date du 23 novembre 2018 est nul et subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, et en tout état de cause que l'employeur ne prouve pas la faute grave,

En conséquence,

- condamner la société Garage des arcades à payer à M. [U] [B] toutes les sommes suivantes, avec intérêts légaux à compter de la saisine et capitalisation :

* 56 085 au titre de l'indemnité pour licenciement nul (24 mois) ou subsidiairement sans cause réelle et sérieuse,

* 4 089,57 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

* 4 673,80 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

* 467,38 euros au titre des congés payés afférents,

* 15.000 euros au titre des dommages et intérêts pour harcèlement moral,

* 404,27 à titre de rappel de salaires, outre 40,42 euros de congés payés afférents, et subsidiairement, la somme de 444,69 euros à titre de dommages et intérêts,

* 309,52 euros à titre de rappels de salaires entre le 7 et le 11 mai 2018, outre 30,95 euros de congés payés afférents, et subsidiairement, la somme de 340,47 euros à titre de dommages et intérêts ,

*1 111,88 à titre du rappel de salaire pour mise à pied conservatoire injustifiée, du 9 au 23 novembre 2018, outre 111,18 euros congés payés afférents,

* 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner à la société Garage des arcades de remettre à M. [U] [B] les documents sociaux conformes à l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par document et par jour de retard à compter de la date de l'arrêt à intervenir:

* bulletins de salaires,

* attestation pôle emploi,

* certificat de travail,

- condamner la société Garage des arcades aux entiers dépens de l'instance.

Aux termes de ses uniques conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 25 octobre 2021, la société Garage des arcades demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné la société Garage des arcades au paiement des heures supplémentaires et des congés payés y afférents,

Statuant à nouveau,

- débouter M. [U] [B], de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires et de tout appel incident,

- condamner M. [U] [B] à rembourser à la société Garage des arcades la somme de 1 537,54 euros au titre des heures supplémentaires et congés payés y afférents, ainsi que celle de 1 200 euros qui lui a été versée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [U] [B], à payer à la société Garage des arcades , la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé complet du litige.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 28 novembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION

1-Sur les heures supplémentaires

En application des articles L.3121-27 et L.3121-28 du code du travail, la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine et toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent. L'article L.3121-36 du même code prévoit que, à défaut d'accord, les heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale hebdomadaire fixée à l'article L. 3121-27 ou de la durée considérée comme équivalente donnent lieu à une majoration de salaire de 25 % pour chacune des huit premières heures supplémentaires et 50% pour les suivantes.

Aux termes de l'article L. 3171-2 alinéa 1er du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Il a été jugé que constituent des éléments suffisamment précis des tableaux mentionnant le décompte journalier des heures travaillées, peu important qu'ils aient été établis par le salarié lui-même pour les besoins de la procédure.

Par ailleurs, même en l'absence d'accord express, les heures supplémentaires justifiées par l'importance des tâches à accomplir ou réalisées avec l'accord tacite de l'employeur, qui ne pouvait en ignorer l'existence et qui ne s'y est pas opposé, doivent être payées.

En l'espèce, au soutien de ses prétentions, le salarié produit un tableau établi par ses soins récapitulant le nombre d'heures qu'il prétend avoir effectuées chaque semaine du 1er février 2016 au 30 novembre 2018.

Ce faisant, il produit des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies au-delà de 35 heures ce qui permet à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

En réponse cependant, l'employeur se contente de critiquer les éléments de preuve ainsi communiqués. L'employeur précise que contrairement à ce qu'il affirme, le salarié quittait son travail à 15h30 le vendredi et non à 17h45. Il produit trois attestations émanant de salariés du garage, lesquels témoignent que M. [B] partait tous les vendredis à 15h30 et ce parce qu'il avait terminé ses 35 heures de travail. L'employeur souligne que le salarié n'a jamais réclamé le paiement des heures supplémentaires et que s'il affirme qu'il l'a fait en juin 2017, il n'en rapporte pas la preuve.

La cour estime que ces attestations sont dépourvues de valeur probante au regard de la situation de subordination de leurs auteurs.

La société ne produit en revanche pas ses propres éléments de contrôle en sorte qu'il convient de retenir que des heures supplémentaires non rémunérées ont bien été effectuées, l'absence de réclamation avant la procédure étant indifférente.

Au regard des éléments produits de part et d'autre, il n'y a pas lieu de remettre en cause le décompte du salarié.

Il convient dès lors de condamner l'employeur à payer à M. [B] la somme de 1814,03 euros, outre celle de 181,40 euros au titre de congés payés afférents.

Le jugement est confirmé sur ce point. Ajoutant au jugement, la société est déboutée de sa demande, formulée en cause d'appel, de voir le salarié condamné à lui rembourser la somme en net qu'elle lui a versé de ce chef en exécution de la décision du conseil de prud'hommes.

2-Sur la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1154-1 du même code prévoit, dans sa version applicable à la cause, qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il convient donc d'examiner la matérialité des faits invoqués, de déterminer si pris isolément ou dans leur ensemble ils font présumer un harcèlement moral et si l'employeur justifie les agissements invoqués par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, le salarié soutient que dès lors qu'il a contesté ses horaires de travail et sollicité le paiement de ses heures supplémentaires en juin 2017, il a été victime de harcèlement moral de son employeur caractérisés par :

1- des pressions répétées en vue de signer une rupture conventionnelle;

2- des reproches injustifiés d'absences;

3- des rappels à l'ordre et avertissement injustifiés;

4-le refus de le laisser accéder à son travail à deux reprises;

5- son licenciement injustifié.

Le salarié indique que ces agissements ont dégradé ses conditions de travail, son état moral et conduit 'in fine' à son licenciement.

En ce qui concerne le grief n°1, l'employeur est libre de proposer une rupture conventionnelle à son salarié, lequel est libre de la refuser comme cela a été le cas en l'espèce. Il est noté que le salarié ne prouve pas l'existence de pressions qui auraient été exercées à son égard pour qu'il accepte une rupture conventionnelle mais seulement qu'il a été convoqué le 30 juin 2017 puis le 16 octobre 2017 pour que soit envisagé le principe de ce mode de rupture du contrat de travail.

Ce fait n'est pas établi.

Le salarié justifie qu'il lui a été adressé un courrier en date du 10 octobre 2017 lui reprochant son absence à son poste de travail le 6 octobre 2017 à partir de 16 heures et un autre en date du 16 octobre 2017 lui reprochant son absence à son poste de travail le 13 octobre 2017 à compter de 15h45. Le salarié justifie également que par courrier en date du 1er février 2018, son employeur lui a rappelé qu'en cas d'absence, il devait prévenir dans les 48 heures, le courrier faisant le constat de son absence du 15 au 18 janvier 2018 inclus sans qu'il ne l'ait averti.

La cour constate que le salarié se contente d'affirmer que les absences reprochées aux termes des courriers des 10 et 16 octobre 2016 étaient injustifiées alors qu'il n'a pas les a pas contestées en retour.

Concernant le 3ème courrier, aux termes de ses écritures, le salarié indique que le courrier du 1er février 2018 lui a été envoyé alors que son employeur a été informé, dès le 19 janvier 2018, soit à son retour seulement, des raisons de son absence (à savoir le décès de son père).

Il est remarqué que l'employeur, après avoir rappelé les régles à suivre en cas d'absence, précise qu' 'au vu du justificatif présenté lors de votre retour au sein de l'entreprise, le 19 janvier 2018, nous ne tiendrons pas compte de ce manquement à votre devoir envers nous'.

Ainsi, la lettre du 2 février ne peut être regardée comme comportant des reprochés injustifiés.

Cet élement n'est pas retenu.

Concernant le grief n°3, le salarié ne caractérise pas ce qu'il faut entendre par 'rappel à l'ordre'. Le salarié justifie qu'il a reçu un avertissement le 19 juillet 2017 .

Ce fait est partiellement établi. .

Concernant le grief n°4, le salarié affirme qu'il a trouvé porte close le 26 décembre 2017, son employeur ne l'ayant pas informé que le garage serait fermé jusqu'au 2 janvier 2018. Il souligne que l'entreprise ne fermait habituellement jamais pendant cette période. Par ailleurs, le salarié indique que de nouveau il n'a pas été informé de la fermeture de l'entreprise du 7 au 11 mai 2018.

Il résulte des éléments soumis aux débats que l'employeur n'a pas empêché son salarié d'accéder à son travail fin décembre 2017 et du 7 au 11 mai 2018 mais lui a imposé, comme aux autres salariés, deux périodes de congés payés, étant rappelé que l'organisation des congés relève de la responsabilité de l'employeur.

Ce fait n'est pas établi.

L'élément n°5 ne peut être valablement au titre des gaissements laissant présumer le harcèlement moral qui se rapporte à l'exécution du contrat de travail et non à la rupture.

Ainsi, le salarié n'établit pas de faits qui permettant de supposer l'existence d'un harcèlement moral.

Il résulte de ce qui précède que seul un fait est partiellement établi mais constitue un acte isolé ne pouvant remplir les conditions posées par les articles préciéts.

Dès lors, il s'en évince que le salarié n établit pas des faits qui permettent de supposer l'existence d'un harcèlement.

M. [B] est débouté de sa demande de ce chef et le jugement confirmé.

3-Sur la rupture du contrat de travail

3-1-sur la nullité du licenciement

A titre principal, M. [B] soutient que son licenciement, intervenu dans un contexte de harcèlement moral, est nul. Il a été dit plus haut que le salarié n'a pas subi de harcèlement moral. Il ne peut qu'être débouté de sa demande tendant à voir juger son licenciement nul et de sa demande d'indemnité pour licenciement nul.

3-2-Sur le licenciement pour faute grave

L'article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié. Aux termes de l'article L.1232-1 du même code, le licenciement par l'employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise.

En l'espèce, aux termes de la lettre de rupture du 23 novembre 2018 il est reproché au salarié les manquements suivants :

« En date du 07/11/2018 vous avez travaillé sur le véhicule TOYOTA [Localité 3] immatriculé FA878FE sur lequel nous avons constaté le lendemain des projections de soudures sur la moquette côté ARD. Vous avez volontairement tenté de dissimuler vos agissements en masquant les trous en remettant les tapis de sol du client dessus, vous évitant ainsi tout signalement et explications, constat fait par le gérant M [O] [P] le lendemain. Au vu des dégâts, nous avons été obligés de remplacer toute la moquette et faire intervenir vos collègues sur ce véhicule les obligeants eux même à interrompre leur travail.

Le lendemain, soit le 08/11/2018 vous êtes intervenu sur le véhicule 208 immatriculé CD761AZ , malgré les recommandations de vos collègues de protéger l'habitacle du véhicule, que vous n'avez pas voulu faire, ce qui a entraîné des projections de soudures qui ont embrasé la moquette côté ARD ainsi que le montant plastique seuil bas de caisse ARD, nous avons été obligés de remplacer ces deux éléments dans la totalité et faire intervenir vos collègues sur le véhicule les obligeants eux même à interrompre leur travail.

Votre conduite met en cause la bonne marche de notre entreprise, notre crédibilité et confiance auprès de nos clients sans compter le préjudice financier que cela engendre. Lors de l'entretien vous n'avez pas contesté les faits et n'avez donné aucunes explications quant à ces manquements professionnels et non respects de sécurité.

Il est a noter qu'à plusieurs reprises vous avez déjà fait l'objet d'avertissements pour manquements professionnels ».

Le salarié fait valoir que son employeur ne rapporte la preuve ni de la matérialité des fautes qu'il lui reproche et qu'il conteste fermement, ni celle de leur imputabilité à sa personne. Il souligne qu'ils étaient trois salariés à intervenir sur les véhicules, que les attestations des deux collègues, dans un lien de subordination avec la société, sont quasiment identiques et non conformes à l'article 202 du code de procédure civile en l'absence de mention du lien de subordination. Il souligne que le procès-verbal de constat d'huissier versé aux débats date d'avril 2019, soit 5 mois après les faits reprochés et postérieurement à sa saisine du conseil d eprud'hommes, n'est pas probant. Le salarié soutient qu'il n'est pas démontré que les dépenses dont les factures sont versées aux débats auraient été nécessitées par une faute qui lui soit imputable. Il estime que le courrier de plainte du client est un faux.

Pour preuve des fautes reprochées, l'employeur verse aux débats les éléments suivants :

-une attestation en date du 4 avril 2019 émanant de M. [M] [Z], chef d'équipe lequel témoigne que pendant les travaux sur le véhicule Peugeot 208 immatriculé [Immatriculation 5], il a remarqué que le salarié ne protégeait pas la voiture correctement contre les projections de soudure, qu'il lui a dit de mettre la couverture anti-feu mais que son collègue n'a pas écouté, le feu prenant quelques instants plus tard au niveau de la moquette arrière droit et de la garniture plastique de bas de porte. M. [M] [Z] atteste également que 'le peintre [K]' lui a ensuite montré le véhicule Toyota Auris FA-878- dont s'était occupé 'avant' M. [B] et a constaté des trous de soudure dans la moquette cachée avec du papier bulle, imputant ce fait au salarié.

-une attestation de M. [K] [F], carossier peintre lequel témoigne des mêmes faits.

Si ces attestations ne mentionnent pas le lien de subordination de leur auteur avec la société, elles n'encourent pour autant pas la nullité et constituent des commencements de preuve, d'autant qu'au cas d'espèce, ce lien de subordination n'est pas caché par l'employeur.

L'employeur produit également:

-un procès-verbal de constat établi le 5 avril 2019 par Maître [Y] [V], huissier de justice, lequel s'est rendu au garage des Arcades, le même jour et a procédé aux constatations suivantes : il lui a été présenté un garnissage intérieur de véhicule de type tapis de sol portant au dos une étiquette de référencement portant la marque Toyota et le numéro de produit 58510-02G40, lequel se retouve sur la facture en date du 8 novembre 2018 qui lui a également été présentée, correspondant à la commande d'un garnissage intérieur. L'huissier indique qu'il constate au niveau de la place arrière côté droit du véhicule des marques de plusieurs brûlures, perforantes pour certaines. Des photographies sont annexées, ainsi que la facture.

L'huissier de justice précise également qu'il lui a été présenté un garnissage intérieur de véhicule de type tapis de sol monopièce portant au dos une étiquette de référencement portant la marque Peugeot et le numéro de produit 96737436ZD correspondant à la commande d'un tapis monopièce passée le 9 novembre 2018. Il constate la présence d'un important trou dont les contours et l'envers présentent des marques de brûlures au niveau de la place arière côté droit du véhicule. Des photographies sont annexées, ainsi que la facture.

Enfin, l'huissier de justice fait état de ce que le gérant a précisé que la garniture droite plastique endommagée sur le véhicule Peugeot est en commande, non encore livrée et que l'existante a été remontée sur le véhicule du client dans l'attente de la pièce neuve. Il a annexé le 'tableau des manquants' qui montre qu'une commande d'une garniture droite effectuée le 8 novembre 2018 est en attente de livraison, prévue pour le 17 avril 2019.

L'employeur verse enfin la plainte du client, le garage bellevue, qui avait confié au garage des Arcades le véhicule Peugeot [Immatriculation 4] pour travaux de carrosserie, en date du 30 novembre 2018 et qui se plaint d'avoir récupéré le véhicule le 23 novembre 2018 seulement avec des dégradations ( brûlures sur la garniture porte arrière droite, brûlure sur la moquette de sol arrière droit).

Il s'évince de cet ensemble de pièces que la matérialité des griefs est établie.

Par ailleurs, le salarié ne conteste pas avoir travaillé sur les deux véhicules en question, sans préciser d'ailleurs quel a été son rôle. En tout état de cause, il ne conteste pas avoir effectué de la soudure sur ces deux véhicules. Deux salariés attestent que l'intéressé, à l'occasion de ces travaux de soudure, n'a pas suffisament protégé le véhicule, occasionnant les dégâts constatés.

Il est noté que le salarié a un antécédent disciplinaire (avertissement du 19 juillet 2017).

La cour estime ainsi que la preuve est rapportée de l'imputabilité des faits à M. [U] [E] [B].

L'ensemble de ces faits caractérise une faute qui rendait impossible le maintien de M. [U] [E] [B] dans l'entreprise pendant la durée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a dit le licenciement pour faute grave de M. [U] [E] [B] justifié et en ce qu'il l'a débouté de ses demandes au titre du rappel de salaire durant la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, de l'indemnité de licenciement et de celle pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

4-Sur les demandes de rappels de salaire

Le salarié demande un rappel de salaire pour la période du 26 décembre 2017 au 2 janvier 2018 et du 7 au 11 mai 2018, au motif que la société a fermé ses portes sans l'avertir et lui a décompté des jours de congés payés dont il demande le remboursement. Subsidiairement, il sollicite des dommages et intérêts du même montant.

La société a la possibilité d'imposer des périodes de congés, sous réserve d'en informer ses salariés.

Par courrier déposé à la poste le 27 janvier 2018, le salarié a demandé à son employeur de lui restituer 4 jours de congés aux motifs qu'il n'avait pas été averti de la fermeture du garage du 26 décembre 2017 au 2 janvier 2018. En ce qui concerne l'autre période de congés imposée par l'employeur, le salarié ne l'a jamais contesté avant l'engagement de la procédure.

La société ne peut justifier de ce qu'elle a officiellement informé ses salariés de ces périodes de congés (par une note de service par exemple).

En conséquence, la demande du salairé sera accueillie et la société sera condamnée à lui verser la somme de 404, 27 euros à titre de rapple de salaire, outre 40, 42 euros au titre des congés payés afférents.

5-Sur les demandes accessoires

Le jugement est confirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile. La société est ainsi déboutée de sa demande de remboursement de la somme de 1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au paiement de laquelle elle a été condamnée en première instance.

La société Garage des Arcades est condamnée aux dépens d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de l'une ou l'autre des parties.

La société Garage des Arcades est déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté M. [U] [B] de sa demande à titre de rappel de salaires et des congés payés afférents;

Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,

CONDAMNE la société Garage des Arcades à verser à M. [U] [B] les sommes de 404, 27 euros à titre de rappel de salaire et 40, 42 euros au titre des congés payés afférents;

DÉBOUTE la société Garage des Arcades de sa demande de remboursement de la somme de 1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au paiement de laquelle, elle a été condamnée en première instance.

DÉBOUTE les parties de leur demande respective sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

CONDAMNE la société Garage des Arcades aux dépens d'appel.

Le greffier La présidente de chambre


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 21/05117
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;21.05117 ?
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