La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/04/2024 | FRANCE | N°20/06492

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 24 avril 2024, 20/06492


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 24 AVRIL 2024



(n°2024/ , 17 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/06492 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCOQT



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Septembre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 19/00520





APPELANTE



Mademoiselle [T] [V]

[Adresse 2]

[Locali

té 3]

Représentée par Me Abdelaziz MIMOUN, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 89





INTIMÉE



S.A.S. AMBULANCES PRESENCE 94

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 24 AVRIL 2024

(n°2024/ , 17 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/06492 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCOQT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Septembre 2020 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 19/00520

APPELANTE

Mademoiselle [T] [V]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Abdelaziz MIMOUN, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 89

INTIMÉE

S.A.S. AMBULANCES PRESENCE 94

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Fariha FADOUL, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 69

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 26 février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, Président de formation

Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Laëtitia PRADIGNAC, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

La société Ambulance présence 92 (SAS) a engagé Mme [T] [V] par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er mars 2014 en qualité d'auxiliaire ambulancier.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du transport routier.

A compter du mois de juin 2015, Mme [V] a reçu des bulletins de salaire émanant d'une société Ambulances présence 94, gérée par le même employeur que celui de la société Ambulances présence 92.

A compter du 9 octobre 2014, Mme [V] a fait l'objet d'arrêts de travail jusqu'au 6 février 2017.

Le 15 juillet 2016, Mme [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de graves manquements commis par son employeur, la société Ambulances présence 92.

Le 7 février 2017, le médecin du travail a déclaré Mme [V] définitivement inapte à son poste et indiqué que «'tout maintien de la salariée dans tout emploi dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé'».

Mme [V] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 16 mars 2017 par lettre recommandée datée le 9 mars 2017.

La société Ambulance présence 94 a notifié à Mme [V] son licenciement pour inaptitude par lettre notifiée le 21 mars 2017.

La société Ambulance présence 94 occupait huit salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

A la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, Mme [V] avait une ancienneté de trois ans.

Mme [V] a saisi le 23 mai 2018 le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt d'une action contre la société Ambulances présence 94.

Le 12 mars 2019, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt a rendu un jugement de radiation dans l'instance introduite contre la société Ambulance présence 92.

Par jugement du 20 mars 2019, le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt s'est déclaré territorialement incompétent dans l'instance introduite contre la société Ambulance présence 94 au profit du conseil de prud'hommes de Créteil.

Mme [V] a saisi le 12 avril 2019 le conseil de prud'hommes de Créteil d'une action contre la société Ambulances présence 94.

Mme [V] a formé les demandes suivantes devant le conseil de prud'hommes de Créteil':

«'- Ordonner à la société AMBULANCE PRESENCE 94 d'avoir à remettre les bulletins de salaire pour la période allant de juin 2015 à mars 2017 comportant une ancienneté ou date d'entrée au 1er mars 2014 sous astreinte de 50,00 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification du jugement à intervenir, le Conseil se réservant la compétence pour liquider l'astreinte ;

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 à verser à madame [T] [V] à titre de rappel d'heures supplémentaires et congés payés y afférents l'une des sommes suivantes :

A titre principal 14978,20 euros et 1497,82 euros, ou subsidiairement 11545,68 euros et 1154,56 euros,

- Fixer le salaire brut moyen à la somme de 3906,73 euros ou subsidiairement à la somme de 3548,14 euros ;

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 à verser à madame [T] [V] la somme de 3000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour non respect des durées maximales de travail ;

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 à verser à madame [T] [V] la somme de 23440,38 euros ou subsidiairement 21288,84 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 à verser à madame [T] [V] la somme de 1392,42 euros de prime pour fonctions annexes ainsi que 139,24 euros de congés payés afférents ;

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 à verser à madame [T] [V] la somme de 7000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail ;

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 à verser à madame [T] [V] la somme de 7096,28 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 709,62 euros de congés payés afférents ;

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 à verser à madame [T] [V] la somme de 3906,73 euros à titre principal, ou la somme de 3548,14 euros à titre subsidiaire ou à titre infiniment subsidiaire la somme de 2288,52 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 à verser à madame [T] [V] la somme de 23441,28 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 à verser à madame [T] [V] la somme de 3906,73 euros à titre principal, ou la somme de 3548,14 euros à titre subsidiaire, à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement ;

En tout état de cause,

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 à verser à madame [T] [V] la somme de 2000,00 euros par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

- Ordonner Exécution provisoire du jugement sur le fondement de l'article 515 du Code de Procédure Civile ;

- Condamner la société AMBULANCE PRESENCE 94 aux entiers dépens y compris ceux d'exécution.'»

Par jugement du 3 septembre 2020, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Créteil a rendu la décision suivante :

«'Dit qu'il y a eu un transfert de fait, du contrat de travail de madame [T] [V], depuis la société AMBULANCE PRESENCE 92 vers la société AMBULANCE PRESENCE 94, en date du 1er juin 2015 ;

Dit que l'ancienneté de madame [T] [V] à prendre en compte au sein de la société AMBULANCE PRESENCE 94 s' établit à la date du 1er mars 2014 ;

Fixe le salaire de référence de madame [T] [V] à hauteur de 2679,77 euros bruts ;

Condamne la société AMBULANCE PRESENCE 94 au versement à Madame [T] [V] des sommes suivantes :

- 1.392,42 €, à titre de prime pour fonctions annexes ;

- 139,24 €, au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés incidents ;

- 2.200,00 €, à titre de dommages et intérêts pour dépassement des durées maximales du travail ;

- 2.300,00 € à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement ;

- 1.500,00 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Ordonne à la société AMBULANCE PRESENCE 94 la remise des bulletins de paie des mois de juin 2015 à mars 2017, conformes à la présente décision et portant mention d'une ancienneté au 1er mars 2014, sous astreinte de 50,00 €, par jour de retard, à compter du 30ème jour suivant la notification de la décision, le Conseil se réservant le pouvoir de liquider ladite astreinte conformément à l'article L131-3 du Code des Procédures Civiles

d' Exécution ;

Dit que la décision est assortie de l'exécution provisoire sur la totalité du jugement, sur le fondement de l'article 515 du Code de Procédure Civile ;

Écarte le surplus des demandes de madame [T] [V] ;

Déboute la société AMBULANCE PRESENCE 94 de ses demandes ;

Met les entiers frais et dépens de l'instance à la charge de la société AMBULANCE PRESENCE 94.'»

Mme [V] a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 8 octobre 2020.

La constitution d'intimée de la société Ambulance présence 94 a été transmise par voie électronique le 1er avril 2021.

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 5 avril 2023, auxquelles la cour se réfère expressément pour l'exposé des moyens, Mme [V] demande à la cour de :

«'Infirmer partiellement le jugement rendu le 03 septembre 2020 par le conseil de prud'hommes de Créteil en ce qu'il a :

- fixé le salaire de référence de Madame [T] [V] à hauteur de 2679,77 euros

bruts ;

- condamné la société Ambulance Présence 94 au versement à Madame [T] [V] des sommes suivantes :

- limité à 1392,42 euros à titre de prime pour fonctions annexes,

- limité à 139,24 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés incidents ;

- débouté Mademoiselle [T] [V] de ses autres demandes à savoir :

. Rappel d'heures supplémentaires et congés payés y afférents l'une des sommes suivantes : à titre principal 14.978,20 € + 1.497,82 € ou subsidiairement 11.545,68 € + 1.154,76 €

. Indemnité pour travail dissimulé : 23.440,38 € ou subsidiairement 21.288,84 €

. Dommages et intérêts pour harcèlement moral : 7.000,00 €

. Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail

. Indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents : 7.096,28 € + 709,62 €

. Indemnité légale de licenciement : 3.906,73 € à titre principal, ou la somme de 3.548,14'€ à titre subsidiaire ou à titre infiniment subsidiaire la somme de 2.288,52 €

Statuant de nouveau,

- Condamner la SAS AMBULANCES PRÉSENCE 94 à verser à Mademoiselle [T] [V] à titre de rappel d'heures supplémentaires et congés payés y afférents l'une des sommes suivantes :

. à titre principal 14.978,20 € + 1.497,82 €

. ou subsidiairement 11.545,68 € + 1.154,76 €

- Fixer le salaire brut moyen à la somme de 3.906,73 € ou subsidiairement à la somme de 3.548,14 € ;

- Condamner la SAS AMBULANCES PRÉSENCE 94 à verser à Mademoiselle [T] [V] la somme de 23.440,38 € ou subsidiairement 21.288,84 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé ;

- Condamner la SAS AMBULANCES PRÉSENCE 94 à verser à Mademoiselle [T] [V] la somme de 1.392,42 € de prime pour fonctions annexes ainsi que 139,24 € de congés payés afférents ;

- Condamner la SAS AMBULANCES PRÉSENCE 94 à verser à Mademoiselle [T] [V] la somme de 7.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

- Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail au 21 avril 2017 date du licenciement ;

- Condamner la SAS AMBULANCE PRÉSENCE 94 à verser à Mademoiselle [T] [V] la somme de 7.096,28 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme de 709,62 € de congés payés afférents ;

- Condamner la SAS AMBULANCES PRÉSENCE 94 à verser à Mademoiselle [T] [V] la somme de 3.906,73 € à titre principal, ou la somme de 3.548,14 € à titre subsidiaire ou à titre infiniment subsidiaire la somme de 2.288,52 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;

- Condamner la SAS AMBULANCES PRÉSENCE 94 à verser à Mademoiselle [T] [V] la somme de 23.441,28 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;

- Condamner la SAS AMBULANCES PRÉSENCE 94 à verser à Mademoiselle [T] [V] la somme de 3.906,73 € à titre principal, ou la somme de 3.548,14 € à titre subsidiaire à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement ;

En tout état de cause,

- Condamner la SAS AMBULANCES PRÉSENCE 94 à verser à Madame [T] [V] la somme de 4.000,00 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la SAS AMBULANCES PRÉSENCE 94 aux entiers dépens y compris ceux d'exécution comprenant également les honoraires d'huissier.'»

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 7 avril 2021, auxquelles la cour se réfère expressément pour l'exposé des moyens, la société Ambulance présence 94 demande à la cour de':

«'DECLARER la société AMBULANCES PRESENCE 94 recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions ;

DEBOUTER Madame [T] [V] de l'ensemble de ses demandes ;

A TITRE LIMINAIRE DE :

- PRONONCER la caducité de l'appel de Madame [T] [V] formé le 8 octobre 2020 à l'encontre du jugement du Conseil de prud'hommes de CRETEIL ;

- CONDAMNER Madame [T] [V] au versement de la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

A TITRE SUBSIDIAIRE, sur le FOND :

- DÉBOUTER Madame [T] [V] de l'ensemble de ses demandes ;

- CONFIRMER le jugement du Conseil de prud'hommes de CRETEIL en date du 3 septembre 2020 ;

- CONDAMNER Madame [T] [V] au règlement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- CONDAMNER Madame [T] [V] aux entiers dépens. La CONDAMNER aux entiers dépens.»

Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 27 mai 2021, la demande de caducité de l'appel de Mme [V] formulée par la société Ambulances présence 94 a été rejetée.

L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 30 janvier 2024.

L'affaire a été appelée à l'audience du 26 février 2024.

MOTIFS

Sur la caducité de l'appel

Cette demande de la société Ambulances présence 94 a déjà été examinée et rejetée par ordonnance du conseiller de la mise en état du 27 mai 2021.

Sur la prescription de la demandes de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires

La cour constate que la société Ambulances présence 94 n'a pas repris dans le dispositif de ses conclusions son moyen relatif à la prescription de la demandes de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires.

Le moyen tiré de la prescription ne sera donc pas examiné par la cour au motif que l'article 954 du code de procédure civile dispose notamment que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif.

Sur le harcèlement moral

Mme [V] demande par infirmation du jugement la somme de 7'000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

En réplique, la société Ambulances présence 94 demande la confirmation du jugement qui a rejeté la demande.

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.

L'article L.1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, Mme [V] invoque les faits suivants :

- le gérant des sociétés Ambulances présence 92 et Ambulances présence 94 a fait le choix de l'abandonner en privilégiant sa vie privée pour vivre son amour aux USA au préjudice de sa salariée,

- elle n'a jamais pu bénéficier des moyens humains et matériels pour mener à bien, dans des conditions normales, les tâches qui lui ont été imposées sans son accord, ceci alors même qu'aucune indemnité ou compensation ne lui a jamais été versée par son employeur (pièces salariée n° 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19 et 20),

- l'employeur ne lui a jamais permis de respecter les obligations sanitaires en'lui imposant, par exemple, de procéder aux dialyses seule, en violation avec la réglementation sanitaire (pièce n°19),

- elle n'a jamais pu bénéficier des temps de repos hebdomadaires normaux, étant en charge de l'animation de la société Ambulance présence 94 (pièces salariée n° 21 et 22),

- les conséquences sur ses conditions de travail et sur sa santé ont été particulièrement lourdes dans la mesure où la salariée n'a plus été en mesure d'exercer son activité professionnelle sombrant dans un état de burn-out à compter du mois de novembre 2015 (pièce salariée n° 6) jusqu'à son licenciement pour inaptitude le 17 mars 2017, le médecin du travail l'ayant déclarée «'inapte à tout poste. Tout maintien de la salariée dans tout emploi dans l'entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé » (pièce salariée n° 23).

Les pièces n° 7 à 20 composées d'échanges de sms de mars 2015 à novembre 2015 et les pièces n° 21 et 23 (lettre de contestation de ses conditions de travail de Mme [V] eu égard à la charge de travail excessive et à la gestion de la société Ambulances présence 94 que l'employeur lui a abandonnée et réplique de la société Ambulances présence 94 qui l'admet en évoquant le projet convenu de lui vendre l'entreprise) démontrent que l'employeur a délaissé non seulement la gestion quotidienne des activités de transports sanitaires mais également la gestion de la société Ambulances présence 94, que Mme [V] a dû organiser les activités de transports et la gestion de la société Ambulances présence 94 elle-même pendant 7 mois et que cela a abouti à une situation d'épuisement professionnel (pièce salariée n° 6).

Mme [V] établit ainsi l'existence matérielle de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre.

En défense, la société Ambulances présence 94 fait valoir le moyen suivant': «'Au cas particulier, Madame [V] ne rapporte aucune preuve d'un fait répétitif imputable à la société.

Elle s'est chargée des tâches définies dans son contrat de travail et a bénéficié de temps de repos.

Quant à l'appréciation du médecin du travail, il ne s'est fondé que sur l'appréciation de Madame [V].'»

A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que la société Ambulances présence 94 échoue à démontrer que les faits matériellement établis par Mme [V] sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement'; le harcèlement moral est établi.

Il résulte de l'examen des pièces versées aux débats et des moyens débattus, compte tenu du harcèlement subi, de sa durée, et des conséquences dommageables qu'il a eu pour Mme [V], que l'indemnité à même de réparer intégralement son préjudice doit être évaluée à la somme de 3 000 €.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne la société Ambulances présence 94 à payer à Mme [V] la somme de 3 000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Sur les heures supplémentaires

Mme [V] demande par infirmation du jugement à titre de rappel d'heures supplémentaires et congés payés y afférents l'une des sommes suivantes :

- à titre principal 14.978,20 € + 1.497,82 €

- ou subsidiairement 11.545,68 € + 1.154,76 €.

En réplique, la société Ambulances présence 94 demande la confirmation du jugement qui a rejeté cette demande.

Il est de jurisprudence constante qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux articles L. 3171-2, L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, le juge évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, Mme [V] expose que':

- son contrat de travail prévoyait un salaire de 2'370,78 € pour 181,44 heures par mois

- ce forfait est nul faute de ventilation

- à titre principal le taux horaire doit être recalculé sur la base de 151,67 h soit 2'370,78': 151,67 = 15,30 €

- elle réalisait chaque mois entre 181,44 heures et 238 heures,

- elle produit des feuilles d'activité (pièce salariée n° 32),

- elle produit les feuilles de calcul des heures supplémentaires dues à titre principal sur la base du taux horaire recalculé de 15,30 €, majoré à 19,20 € pour la majoration de 25 % et à 22,95 € pour celle de 50 % (pièce salariée n° 33) et à titre subsidiaire sur la base du taux horaire mentionné dans les bulletins de salaire à hauteur de 11,84 €, majoré à 14,80 € pour la majoration de 25 % et à 17,76 € pour celle de 50 % (pièce salariée n° 34).

Mme [V] produit ainsi des éléments préalables qui peuvent être discutés par l'employeur et qui sont de nature à étayer sa demande. Ces éléments sont suffisamment précis afin de permettre à la société Ambulances présence 94, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

En défense, la société Ambulances présence 94 expose que Mme [V] est prescrite en ses demandes relatives à la période antérieure à mai 2015 du fait qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes le 28 mai 2018.

L'article L. 3121-38 du code du travail dans sa rédaction applicable à la date des faits dispose': «'La durée du travail de tout salarié peut être fixée par une convention individuelle de forfait en heures sur la semaine ou sur le mois.'»

L'article L. 3121-40 du code du travail dans sa rédaction applicable à la date des faits dispose : «'La conclusion d'une convention individuelle de forfait requiert l'accord du salarié. La convention est établie par écrit.'»

L'article L. 3121-41 du code du travail dans sa rédaction applicable à la date des faits dispose :' «'La rémunération du salarié ayant conclu une convention de forfait en heures est au moins égale à la rémunération minimale applicable dans l'entreprise pour le nombre d'heures correspondant à son forfait, augmentée des majorations pour heures supplémentaires prévues à l'article L. 3121-22.'»

La cour constate que le contrat de travail de Mme [V] contient les stipulations suivantes':

«'ARTICLE N°IV ' Rémunération

Mademoiselle [V] [T] bénéficiera d'une rémunération brute mensuelle de 2'320.78 € primes conventionnelles et majorations pour heures supplémentaires incluses

ARTICLE N°V Durée du travail

La durée hebdomadaire de travail de Mademoiselle [V] [T] est de 48 heures, soit 9.6 heures par jour effectuées selon l'horaire en vigueur dans l'entreprise. Mademoiselle [V] [T] devra travailler deux samedis et deux dimanches par mois. Du fait des périodes de permanence, la rémunération sera calculée sur la base de 181.44 heures effectives mensuelles.

D'autres heures supplémentaires pourront également être demandées à Mademoiselle [V] [T] en fonction des nécessités de l'entreprise et dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles.

(...)'»

Au vu des éléments produits de part et d'autre, et sans qu'il soit besoin d'une mesure d'instruction, la cour a la conviction, au sens du texte précité, que Mme [V] n'a pas effectué d'heures supplémentaires qui n'ont pas été rémunérées puisque les durées du travail revendiquées par Mme [V] sont celles pour lesquelles elle a été rémunérée'; en effet, par exemple, Mme [V] mentionne avoir travaillé pour les durées de 213,90 heures en juin 2015, 234 heures en juillet 2015, 238 heures en août 2015 et 199 heures en septembre 2015'; or la cour constate que les bulletins de salaire mentionnent':

- en juin 2015 en sus de 151,67 heures du salaire de base, 20,80 heures d'équivalence, 17,33 heures supplémentaires à 25% et 24,10 heures supplémentaires à 50 %, soit une durée du travail payée de 213,90 heures

- en juillet 2015 en sus de 151,67 heures du salaire de base, 28,68 heures d'équivalence, 17,33 heures supplémentaires à 25% et 36,32 heures supplémentaires à 50 %, soit une durée du travail payée de 234 heures

- en août 2015 en sus de 151,67 heures du salaire de base, 32,45 heures d'équivalence, 17,33 heures supplémentaires à 25% et 36,55 heures supplémentaires à 50 %, et 3 jours de congés payés les 3, 4 et 19 août, soit une durée du travail payée de 238 heures

- en septembre 2015 en sus de 151,67 heures du salaire de base, 20,25 heures d'équivalence, 17,33 heures supplémentaires à 25% et 9,75 heures supplémentaires à 50 %, soit une durée du travail de payée 199 heures.

Et c'est en vain que Mme [V] soutient que son salaire contractuel de 2'370,78 € pour 181,44 heures par mois ne doit pas être retenu au motif qu'il s'agit d'un forfait illicite du fait que la clause de rémunération au forfait ne prévoit aucune ventilation entre les heures normales et les heures supplémentaires et qu'il est impossible de connaître le nombre d'heures supplémentaires puisque cette rémunération porte également sur les primes conventionnelles ; en effet, la cour retient que ce moyen est mal fondé au motif d'une part que la fixation par le contrat de travail d'une rémunération mensuelle fixe forfaitaire de 2'370,78 € pour 181,44 heures par mois primes conventionnelles et majorations pour heures supplémentaires incluses, caractérise une convention de forfait de rémunération incluant un nombre déterminé d'heures supplémentaires (181,44 heures moins 151,67 heures), au motif d'autre part que cette convention de forfait assure sans que cela ne soit contredit une rémunération au moins égale à la rémunération minimale applicable dans l'entreprise pour le nombre d'heures correspondant à son forfait, augmentée des majorations pour heures supplémentaires et au motif enfin que Mme [V] était effectivement payée normalement chaque mois pour les heures supplémentaires réalisées avec les majorations de 25 % et de 50 % applicables comme cela ressort des bulletins de salaire en sorte que Mme [V] ne peut utilement invoquer l'absence de ventilation précise entre les heures normales et les heures supplémentaires et l'inclusion dans le forfait des primes conventionnelles qui n'affecte aucunement la détermination des heures supplémentaires.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] de ses demandes relatives aux heures supplémentaires.

Sur l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé de l'article L.'8223-1 du code du travail

Mme [V] demande par infirmation du jugement la somme de 23.440,38 € ou subsidiairement 21.288,84 € à titre d'indemnité pour travail dissimulé ; la société Ambulances présence 94 s'y oppose en soutenant que la volonté délibérée de dissimuler les heures litigieuses n'est pas établie.

Il a été précédemment retenu par la cour que les bulletins de paie de Mme [V] mentionnaient un nombre d'heures de travail égal à celui réellement accompli.

Il convient donc de rejeter la demande de Mme [V] formée au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé de l'article L.'8223-1 du code du travail.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] de sa demande formée au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé.

Sur les primes pour fonctions annexes

Mme [V] demande par infirmation du jugement la somme de 1.392,42 € de prime pour fonctions annexes ainsi que 139,24 € de congés payés afférents et la société Ambulances présence 94 s'oppose à cette demande.

La cour constate que Mme [V] n'articule aucun moyen propre au soutien de cette demande.

La demande formée de ce chef ne sera donc pas examinée en application de l'article 954 du code de procédure civile qui dispose notamment que la cour n'examine les moyens au soutien des prétentions énoncées au dispositif que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a condamné la société Ambulances présence 94 à payer à Mme [V] les sommes de 1'392,42 €, à titre de prime pour fonctions annexes et de 139,24 € au titre des congés payés afférents, et statuant à nouveau de ce chef, la cour déboute Mme [V] de ses demandes relatives aux primes pour fonctions annexes.

Sur le salaire moyen

Mme [V] demande la fixation du salaire brut moyen à la somme de 3.906,73 € ou subsidiairement à la somme de 3.548,14 € ; elle fait valoir que la moyenne de ses trois derniers mois effectivement travaillés (sept 2015 : 2'225,41 € - août 2015': 2'701,38 € - juillet 2015 : 2'697,29 €) s'élevait à la somme de 2'541,36 € (pièce n°4 : bulletins de salaire) et que compte tenu des heures supplémentaires dues, le salaire brut moyen recalculé s'élève à la somme de 3'906,73 € ou subsidiairement à la somme de 3'548,14 €

En réplique, la société Ambulances présence 94 s'oppose à cette demande et soutient que son salaire moyen sur les 12 derniers mois est de 1'795,77 € et non 2.320,78 € comme il est prétendu (sic).

A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que le salaire moyen de Mme [V] doit être fixé à la somme de 2'541,36 € qui correspond à sa rémunération mensuelle brute moyenne sur les 3 derniers mois avant son arrêt de travail étant précisé que son salaire de base de 1'795,77 € hors heures d'équivalence et heures supplémentaires ne peut pas être retenu comme salaire moyen, contrairement à ce que soutient la société Ambulances présence 94.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a fixé le salaire de référence de Mme [V] à hauteur de 2'679,77 euros bruts et statuant à nouveau de ce chef, la cour fixe le salaire mensuel moyen de Mme [V] à la somme de 2'541,36 €.

Sur la résiliation judiciaire

Le conseil de prud'hommes de Créteil a débouté Mme [V] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail du fait qu'elle avait saisi le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 28 mai 2018 de cette demande formée à l'encontre de la société Ambulances présence 94 alors que le contrat de travail avait été rompu au terme d'un licenciement prononcé le 21 mars 2017.

Mme [V] demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail et soutient qu'elle effectuait sa prestation de travail pour le compte des deux sociétés, la société Ambulances présence 94 et la société Ambulance présence 92 de façon indifférente, les deux sociétés s'étant comportées comme co-employeurs, qu'elle a saisi initialement le conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt le 15 juillet 2015 à l'encontre de la société Ambulances présence 92 uniquement puis le 28 mai 2018 à l'encontre de la société Ambulances présence 94, que son action a initialement et indivisiblement visé les deux employeurs dès le 15 juillet 2015 et que sa demande de résiliation ne peut pas être déclarée sans objet'; elle invoque les manquements suivants qui, pris ensemble caractérisent des faits de harcèlement moral':

- absence de paiement de l'ensemble des heures supplémentaires ;

- absence de versement de l'indemnité au titre des fonctions de régulation ;

- soumission de la salariée à des conditions de travail indignes ayant conduit au burn-out ;

- modification unilatérale du contrat de travail sans requérir l'accord écrit de la salariée.

En réplique, la société Ambulances présence 94 demande la confirmation du jugement.

La cour constate que le conseil de prud'hommes a «'Dit qu'il y a eu un transfert de fait, du contrat de travail de madame [T] [V], depuis la société AMBULANCE PRESENCE 92 vers la société AMBULANCE PRESENCE 94, en date du 1er juin 2015 ;'» et que Mme [V] ne demande pas l'infirmation de cette disposition dans le dispositif de ses conclusions en sorte qu'elle est définitive, peu important le moyen tiré du co-emploi que Mme [V] invoque et qui n'est de surcroît pas non plus repris dans le dispositif des conclusions.

Dans ces conditions, la cour retient que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail formée à l'encontre de la société Ambulances présence 94 est sans objet dès lors que cette demande a été formée à l'encontre de la société Ambulances présence 94 pour la première fois le 28 mai 2018 après que la société Ambulances présence 94 a licencié Mme [V] le 21 mars 2017.

Sur la régularité de la procédure de licenciement

Il ressort de l'article L. 1235-1 du code du travail qu'en cas de litige, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties';

Mme [V] soutient que la procédure ayant abouti à son licenciement n'est pas régulière au motif qu'il n'y a pas eu 5 jours ouvrables entre la présentation de la lettre de convocation datée du 9 mars 2017 qui n'a été reçue au mieux que le 10 mars 2017 (sic) et la date de l'entretien préalable le 16 mars 2017.

La société Ambulances présence 94 conteste ce moyen': le délai de 5 jours a été respecté.

Il ressort de l'article L.1232-2 du code du travail que «'l'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation'».

Aux termes de l'article 641 du code de procédure civile du code de procédure civile, «'lorsqu'un délai est exprimé en jours, celui de l'acte, de l'événement ou de la notification qui le fait courir ne compte pas'»'; Il en résulte que le jour de remise de la lettre de convocation à l'entretien préalable ne compte pas dans le délai des 5 jours ouvrables et que le 1er des 5 jours ouvrables requis se place donc le lendemain de la remise de la convocation en main propre ou de la présentation par lettre recommandée.

En l'espèce, l'entretien préalable a été fixé le jeudi 16 mars 2017'; la convocation à l'entretien préalable est, elle, datée du jeudi 9 mars 2017 et Mme [V] soutient sans que cela ne soit contredit que la réception de la lettre recommandée avec accusé de réception a eu lieu au plus tôt le vendredi 10 mars 2017.

Dans ces conditions, la cour retient que le délai de 5 jours ouvrables n'a pas pu commencer à courir avant le samedi 11 mars 2017 qui compte comme étant le premier jour ouvrable, que le 2e jour ouvrable était donc le lundi 13 mars 2017 et le 5e jour ouvrable était le jeudi 16 mars 2017.

L'entretien préalable ne pouvait pas avoir lieu avant le vendredi 17 mars 2017.

Compte tenu de ce qui précède, la cour retient que Mme [V] est bien fondée à invoquer une irrégularité dans la procédure de licenciement au motif que l'entretien préalable ayant eu lieu le jeudi 16 mars 2017, il n'y a pas eu 5 jours ouvrables entre la présentation de la lettre de convocation notifiée par lettre recommandée avec accusé de réception au plus tôt le vendredi 10 mars 2017 et la date de l'entretien préalable.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a jugé que la procédure de licenciement est régulière, et statuant à nouveau de ce chef, la cour dit que la procédure de licenciement est irrégulière.

Sur le licenciement

La cour constate que Mme [V] demande par infirmation du jugement des dommages et intérêts pour licenciement abusif dans le dispositif de ses conclusions.

A cet effet, Mme [V] soutient que':

- lorsque l'inaptitude a pour origine une faute commise par l'employeur, le licenciement pour inaptitude physique est déclaré sans cause réelle et sérieuse,

- à compter du mois de mai 2015, l'employeur lui a imposé des fonctions de régulatrice ne relevant absolument pas du poste d'ambulancier auxiliaire, étant précisé que le poste de régulateur se situe à un niveau de responsabilité et de rémunération beaucoup plus élevé,

- l'employeur l'a abandonné en lui imposant, dans les faits, l'exercice de deux charges de travail, celle d'ambulancier et celle de régulateur conduisant à l'accomplissement d'heures de travail dépassant les 48 heures de travail hebdomadaires, comme le confirment les différents bulletins de salaire portant mention de plus de 200 heures de travail par mois, soit plus de 50 heures de travail par semaine.

- les arrêts de travail, qu'elle a dû subir à compter d'octobre 2015, sont incontestablement en lien avec les conditions de travail imposées par l'employeur': ces arrêts de travail puis l'inaptitude qui en est résulté relèvent incontestablement de l'activité professionnelle de sorte que la rupture du contrat de travail relève de l'application des articles L. 1226-10 et suivants du code du travail.

En réplique, la société Ambulances présence 94 soutient qu'elle n'a jamais imposé aucune mission de régulateur, que l'amplitude horaire peut dépasser 40 heures par semaine et atteindre 48 heures par trimestre comme le prévoit la convention collective applicable, qu'il s'agit d'une amplitude et non du travail réellement effectué, qui lui n'a jamais dépassé 40 heures par semaine et qu'en conséquence, aucune faute n'a été commise par la société.

A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que Mme [V] est bien fondée à contester son licenciement au motif, d'une part, que les pièces n°7 à 20 composées d'échanges de sms de mars 2015 à novembre 2015 et les pièces n°21 et 23 (lettre de contestation de ses conditions de travail de Mme [V] eu égard à la charge de travail excessive et à la gestion de la société Ambulances présence 94 que l'employeur lui a abandonnée et réplique de la société Ambulances présence 94 qui l'admet en évoquant le projet convenu de lui vendre l'entreprise) démontrent que l'employeur a délaissé non seulement la gestion quotidienne des activités de transports sanitaires mais également la gestion de la société Ambulances présence 94, que Mme [V] a dû organiser les activités de transports et la gestion de la société Ambulances présence 94 elle-même pendant 7 mois et que cela a abouti à une situation d'épuisement professionnel (pièce salariée n° 6),'et au motif, d'autre part, que le fait d'avoir abandonné ainsi à Mme [V] la gestion de la société Ambulances présence 94 et l'organisation des activités de transports de l'entreprise 7 mois durant caractérise, de la part de son employeur, un manquement à l'obligation de sécurité qui lui incombe et que ce manquement est à l'origine de l'inaptitude de Mme [V].

Compte tenu de ce qui précède, la cour statuant dans les limites de la demande, dit que le licenciement de Mme [V] est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Mme [V] demande par infirmation du jugement la somme de 23'441,28 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif (sic) ; elle soutient que les dommages et intérêts doivent être fixés à 6 mois de salaire du fait que son licenciement est nul par suite du harcèlement moral qu'elle a subi.

En réplique, la société Ambulances présence 94 s'oppose à cette demande.

L'article 954 du code de procédure civile dispose notamment : «'La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.'».

La cour constate que Mme [V] n'a pas formé de demande de dommages et intérêts pour licenciement nul en sorte que seule la demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif sera examinée.

Il est constant qu'à la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, l'effectif de la société Ambulances présence 94 n'atteignait pas le seuil de 11 salariés ; il y a donc lieu à l'application de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa rédaction applicable à la date du licenciement ; il en ressort que le juge octroie une indemnité au salarié égale au préjudice subi.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération de Mme [V] (2'541 €), de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, la cour retient que l'indemnité à même de réparer intégralement le préjudice de Mme [V] doit être évaluée à la somme de 8 000 €.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne la société Ambulances présence 94 à payer à Mme [V] la somme de 8 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif.

Sur les dommages et intérêts pour procédure irrégulière

Mme [V] demande la somme de 3.906,73 € à titre principal, ou la somme de 3.548,14 € à titre subsidiaire à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement ; la société Ambulances présence 94 s'oppose à cette demande.

La violation des exigences de la procédure de licenciement est sanctionnée par le code du travail et justifie l'allocation de dommages et intérêts en application des articles L. 1235-2 et L.1235-5 du code du travail.

Il a été précédemment dit que le licenciement de Mme [V] a été prononcé sans observation de la procédure requise et sans cause réelle et sérieuse ; il est constant qu'à la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, l'effectif de la société Ambulances présence 94 n'atteignait pas le seuil de 11 salariés ; par application combinée des articles L. 1235-2 et L. 1235-5 du code du travail, Mme [V] a droit au bénéfice d'une indemnité limitée au préjudice subi ; il résulte de l'examen des pièces versées aux débats, que l'indemnité à même de réparer intégralement le préjudice subi par Mme [V] du chef du non respect de la procédure de licenciement doit être évaluée à la somme de 2'300 €.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Ambulances présence 94 à payer à Mme [V] la somme de 2'300 € à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement.

Sur l'origine de l'inaptitude

Mme [V] demande l'application de l'article L.1226-14 du code du travail'; elle soutient que le moyen suivant':' «'Compte tenu des développements qui précèdent et des éléments de preuve rapportés par Mademoiselle [T] [V], le conseil de céans dira que la rupture du contrat de travail pour inaptitude relève des dispositions relatives aux accidents du travail ou aux maladies professionnelles des articles L. 1226-6 et suivants du Code du travail et en tirera toutes les conséquences de droit.'»

Les règles spécifiques applicables aux salariés inaptes, victimes d'accident du travail ou de maladie professionnelle, s'appliquent dès lors que l'inaptitude du salarié, quel que soit le moment où elle est constatée ou invoquée, a, au moins partiellement, pour origine cet accident ou cette maladie et que l'employeur a connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

C'est au salarié de rapporter la preuve d'un lien de causalité entre l'accident du travail ou la maladie professionnelle et l'inaptitude à son poste.

La cour constate que Mme [V] ne produit pas ses arrêts de travail pour maladie.

En l'espèce, à l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que Mme [V] est mal fondée à invoquer l'application des dispositions des articles L. 1226-6 et L. 1226-17 du code du travail relatives à l'inaptitude d'origine professionnelle au motif, d'une part, qu'elle ne précise pas de quel accident du travail ou de quelle maladie professionnelle elle a ou aurait été victime et au motif, d'autre part, qu'elle ne prouve pas que l'employeur avait connaissance de cette origine professionnelle au moment du licenciement.

C'est donc en vain que Mme [V] demande l'application de l'article L.1226-14 du code du travail au motif que les seules pièces médicales qu'elle verse sont le certificat médical du Dr [O] du 17 novembre 2015 (pièce salariée n° 6)'et l'avis d'inaptitude du 7 février 2017 (pièce salariée n° 23) et que ces deux seules pièces ne permettent pas de retenir que Mme [V] a été victime d'une maladie professionnelle.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis

Mme [V] demande par infirmation du jugement les sommes de 7'096,28 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de 709,62 € au titre des congés payés afférents ; la société Ambulances présence 94 s'oppose à ces demandes du fait que l'inaptitude de Mme [V] n'est pas d'origine professionnelle.

La cour rappelle que lorsque l'employeur a commis un manquement à son obligation de sécurité dont le salarié est fondé à solliciter la réparation du préjudice en résultant et que son inaptitude est en lien avec ce manquement, le salarié est en droit de percevoir, outre une indemnité pour perte d'emploi, une indemnité compensatrice de préavis dont l'inexécution est imputable à l'employeur.

Tel est le cas de Mme [V] et elle a donc droit à une indemnité compensatrice de préavis.

En application de articles L. 1234-1 et L. 1234-2 du code du travail, le salarié a droit à un délai-congé dont la durée varie en fonction de l'ancienneté ; avec une ancienneté supérieure à 2 ans, la durée du préavis est fixée à 2 mois ; l'indemnité légale de préavis doit donc être fixée à la somme de 5 082,72 € qui correspond aux salaires que Mme [V] aurait perçus si elle avait continué à travailler pendant la période du préavis.

Par application de l'article L. 3141-22 du code du travail, l'indemnité de congés payés est égale au dixième de la rémunération totale perçue par le salarié au cours de la période de référence ayant déterminé le droit et la durée des congés ; la présente juridiction a fixé à la somme de 5 082,72 €, l'indemnité compensatrice de préavis due à Mme [V] ; en conséquence, l'indemnité compensatrice de congés payés afférente à la période de préavis due à Mme [V] est fixée à la somme de 508,27 €.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] de sa demande formée au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne la société Ambulances présence 94 à payer à Mme [V] les sommes de 5 082,72 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de 508,27 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférente à la période de préavis.

Sur l'indemnité de licenciement

Mme [V] demande par infirmation du jugement la somme de 3'906,73 € à titre principal, ou la somme de 3'548,14 € à titre subsidiaire ou à titre infiniment subsidiaire la somme de 2'288,52 € à titre d'indemnité légale de licenciement ; la société Ambulances présence 94 s'oppose à cette demande au motif qu'elle a déjà perçu l'indemnité de licenciement.

Il résulte de l'examen des pièces versées aux débats, que le salaire de référence s'élève à 2'541,36 € par mois.

Il est constant qu'à la date de la rupture du contrat de travail, Mme [V] avait une ancienneté de 3 ans et donc au moins un an d'ancienneté ; il y a donc lieu à l'application de l'article L. 1234-9 du code du travail dans sa rédaction applicable à la date du licenciement et une indemnité légale de licenciement doit lui être attribuée ; cette indemnité ne peut être inférieure à une somme calculée, par année de service dans l'entreprise, sur la base d'1/5 de mois ; les années incomplètes doivent être retenues, la fraction de l'indemnité de licenciement afférente à une année incomplète étant proportionnelle au nombre de mois de présence ; pour le calcul du montant de l'indemnité, l'ancienneté prise en considération s'apprécie à la date de fin du préavis ; l'indemnité légale de licenciement doit donc être fixée à la somme de 1'609,44 € calculée selon la formule suivante : [(3+2/12)] x 1/5] x 2'541,36 €.

Il ressort du reçu pour solde de tout compte et de l'attestation Pôle emploi que Mme [V] a perçu une indemnité de licenciement de 1'616,37 €'; elle a donc été remplie de ses droits.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [V] de sa demande formée au titre de l'indemnité de licenciement.

Sur les autres demandes

La cour condamne la société Ambulances présence 94 aux dépens de la procédure d'appel en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Il apparaît équitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de condamner la société Ambulances présence 94 à payer à Mme [V] la somme de 3'000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

L'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande ou en défense est rejeté, leur rejet découlant des motifs amplement développés dans tout l'arrêt.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans les limites de l'appel

Infirme le jugement sauf en ce qu'il a':

- débouté Mme [V] de ses demandes relatives aux heures supplémentaires, au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé et de l'indemnité de licenciement,

- condamné la société Ambulances présence 94 à payer à Mme [V] la somme de 2'300 € à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement.

Statuant à nouveau des chefs infirmés et ajoutant,

Fixe le salaire mensuel moyen de Mme [V] à la somme de 2'541,36 €.

Dit que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail formée à l'encontre de la société Ambulances présence 94 est sans objet,

Dit que le licenciement de Mme [V] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Condamne la société Ambulances présence 94 à payer à Mme [V] les sommes de':

- 8 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

- 5 082,72 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 508,27 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférente à la période de préavis,

- 3'000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral.

Déboute Mme [V] de ses demandes relatives aux primes pour fonctions annexes.

Condamne la société Ambulances présence 94 à verser à Mme [V] une somme de 3'000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel.

Condamne la société Ambulances présence 94 aux dépens de la procédure d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 20/06492
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;20.06492 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award