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24/04/2024 | FRANCE | N°19/20858

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 24 avril 2024, 19/20858


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 24 AVRIL 2024



(n° /2024, 19 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/20858 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA7FE



Décision déférée à la Cour : jugement du 13 septembre 2019 - tribunal de grande Instance de PARIS - RG n° 16/10230





APPELANTE



S.A. AXA FRANCE IARD en sa qualité d'assureur des so

ciétés SOCOTEC et ROCLAND, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Jeanne BAE...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 24 AVRIL 2024

(n° /2024, 19 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/20858 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA7FE

Décision déférée à la Cour : jugement du 13 septembre 2019 - tribunal de grande Instance de PARIS - RG n° 16/10230

APPELANTE

S.A. AXA FRANCE IARD en sa qualité d'assureur des sociétés SOCOTEC et ROCLAND, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Ayant pour avocat plaidant Me Cyrille CHARBONNEAU, avocat au barreau de Paris, substituée par Me Sonia PAAL à l'audience

INTIMEE

S.A. ALLIANZ IARD venant aux droits de GAN EUROCOURTAGE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Sylvie KONG THONG de l'AARPI Dominique OLIVIER - Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

Ayant pour avocat plaidant Me Delphine ABERLEN, avocat au barreau de Paris, sibstituée par Me Stefania CARMINATI à l'audience

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 mai 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Ange SENTUCQ, présidente de chambre, chargée du rapport et Mme Elise Thévenin-Scott, conseillère.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Ange Sentucq, présidente

Mme Elise Thévenin-Scott, conseillère

Mme Béatrice Baudiment, conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Céline RICHARD

ARRET :

- contradictoire.

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, délibéré initialement prévu le 20 décembre 2023 et prorogé au 24 avril 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Ange Sentucq, présidente de chambre et par Manon Caron, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

À la suite d'un incendie survenu dans un bâtiment à usage de bureaux et d'entrepôt situé à [Localité 5] lui appartenant, la société Vitakraft dont l'activité est la production et la vente d'aliments et accessoires pour animaux, a entrepris en 2001 la reconstruction de ses locaux.

Sont intervenues à l'opération :

- la société Cotrex, assurée auprès des Mutuelles du Mans Iard ( MMA) pour la maîtrise d'oeuvre,

- la société Rocland pour le lot dallage, assurée auprès de la SA Axa France Iard au titre d'une police responsabilité civile décennale et de la société Gan Eurocourtage aux droits de laquelle vient la société Allianz au titre d'une police responsabilité civile des entreprises

- la société Ainf aux droits de laquelle se trouve Socotec, en qualité de contrôleur technique, assurée auprès de la SA Axa France Iard.

La réception a été prononcée le 2 août 2002 sans réserve.

Des désordres sont apparus consistant en des fissurations du dallage.

Par ordonnance de référé du président du tribunal de commerce d'Evry en date du 10 septembre 2003, une expertise a été ordonnée et confiée à M. [S] au contradictoire notamment de la société Axa France Iard, prise en sa qualité d'assureur de la société Rocland.

La société Rocland a fait l'objet d'une liquidation judiciaire à compter de 2004 sans que sa représentation ne soit régularisée dans le cadre de l'expertise judiciaire.

La société Gan Eurocourtage n' a pas été attraite aux opérations d'expertise.

Le rapport d'expertise de Monsieur [S] a été déposé en février 2007.

Au vu des conclusions de l'expert le jugement rendu par le tribunal de commerce le 12 novembre 2007, a, entre autre dispositions, retenu la responsabilité de la société Socotec à hauteur de 20 %, de la société Rocland à hauteur de 50 % et condamné la société AXA France Iard, en sa double qualité d'assureur de la société Socotec et d'assureur décennal de la société Rocland à indemniser les préjudices.

Cette cour, par un arrêt du 1er avril 2009 statuant sur l'appel interjeté par la société Vitakraft et la société Cotrex a, entre autres dispositions et pour ce qui concerne le litige :

- retenu sur le fondement de l'article 1792 du Code civil la responsabilité de plein droit de la société Rocland, du maître d'oeuvre la société Cotrex et de la société Socotec, dans les proportions respectives de 50%, 30% et 20%

- constaté que la société Vitakraft s'est désistée de son instance et de son action à l'encontre de la société GAN Eurocourtage, assureur de responsabilité civile de la société Rocland

- constaté qu'antérieurement à ce désistement, seule la société Cotrex avait formé des demandes à l'encontre de la société GAN Eurocourtage en première instance cependant qu'AXA France Iard avait été, dès le mois de mai 2007, date de sa demande de jonction de la procédure 2007- 35454 dans laquelle elle avait attrait la société GAN Eurocourtage, en mesure d'agir contre GAN Eurocourtage

- déclaré irrecevables les demandes de la société Socotec et de la société Cotrex à l'encontre de GAN Eurocourtage, formées pour la première fois en cause d'appel celles-ci n'étant pas justifiées par l'évolution du litige, soulignant en outre que ni GAN Eurocourtage ni la société Rocland n'ont été appelées aux opérations d'expertise, celle-ci leur est inopposable

- condamné, entre autres parties, la société AXA France Iard en sa qualité d'assureur responsabilité civile décennale de la société Rocland à indemniser la société Vitakraft de ses préjudices matériels et immatériels

Sur le pourvoi formé par la société Axa France Iard, la Cour de cassation, par un arrêt du 20 octobre 2010, après avoir mis hors de cause la société GAN Eurocourtage, a cassé partiellement l'arrêt rendu le 1er avril 2009 :

- pour avoir condamné la société AXA France Iard au paiement des dommages immatériels au visa de l'article L 113-17 du Code des assurances alors que les exceptions visées par ce texte se rapportent aux garanties souscrites et ne concernent ni la nature du risque garanti ni le montant de cette garantie

- pour ne pas avoir lu en euros le plafond de garantie invoqué par les MMA

au titre des dommages matériels exprimé en francs lors de la conclusion du contrat, au regard de l'article 14 du règlement communautaire n°974/98 du 3 mai 1998 concernant l'introduction en euros.

Par un arrêt rendu le 12 octobre 2012 cette cour saisi sur renvoi a pour l'essentiel, statuant dans les limites de l'appel et de la cassation :

Condamné in solidum AXA assureur de la société Rocland, les MMA assureur de la société Cotrex à payer à la société Vitakraft la somme de 3 584 098,68 euros au titre des travaux réparatoires

Condamné in solidum Socotec et les MMA assureur de la société Cotrex à payer à la société Vitakraft dans la limite de la franchise et du plafond exprimé en euros, la somme de 1 837 140,92 euros au titre des préjudices immatériels

Dit que le plafond de garantie des préjudices immatériels exprimé en euros est de 145 328 euros

Dit que la franchise est de 2 416 euros.

Sur l'assignation délivrée le 11 juin 2013 à l'encontre de la SA Allianz Iard, la SA AXA France Iard, invoquant la subrogation dans les droits de son assurée la société Socotec, a sollicité la condamnation de la SA Allianz Iard venant aux droits de la société Gan Eurocourtage en sa qualité d'assureur responsabilité civile de la société Rocland, à la garantir dans la proportion de responsabilité de 50 % mise à la charge de la société Rocland.

Par jugement du 13 septembre 2019, le tribunal de grande instance de Paris a statué en ces termes :

Dit que l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 1er avril 2009 a autorité de la chose jugée quant à la mise hors de cause de la société Gan Eurocourtage aux droits de laquelle vient la SA Allianz iard

Dit en conséquence irrecevables les demandes formées par la SA Axa France Iard à l'encontre de la SA Allianz Iard venant aux droits de la société Gan eurocourtage ;

Déboute la SA Allianz iard de sa demande reconventionnelle tendant à l'allocation de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamne la SA Axa France iard à payer à la SA Allianz iard la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SA Axa France iard aux dépens de l'instance dont distraction au profit de Me Naba dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile ;

Dit n' y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration en date du 12 novembre 2019, la SA Axa France Iard a interjeté appel du jugement, intimant devant la cour d'appel de Paris la SA Allianz Iard venant aux droits de Gan Eurocourtage.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 26 septembre 2022, Axa France Iard en sa qualité d'assureur des sociétés Socotec et Rocland demande à la cour de :

Infirmer le jugement rendu le 13 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a jugé que les demandes de la société Axa France Iard étaient irrecevables en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 1er avril 2009,

Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société Allianz de sa demande de condamnation pour procédure abusive,

Statuant à nouveau,

Juger que la demande de la société Axa France Iard ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 1er avril 2009,

Juger que la société Axa France Iard justifie de sa subrogation dans les droits de la société Socotec,

Juger que la demande de la société Axa France Iard n'est pas prescrite,

Juger en conséquence la société Axa France Iard recevable en ses demandes formées à l'encontre de la société Allianz, venant aux droits de la société Gan eurocourtage,

Juger que la société Rocland a engagé sa responsabilité,

Condamner la société Allianz à payer la somme de 1 303 787 euros en application du contrat d'assurance souscrit par la société Rocland auprès de la société Gan Eurocourtage, aux droits de laquelle la société Allianz vient, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 12 octobre 2012, date du dernier arrêt d'appel ayant arrêté le montant des préjudices immatériels,

Ordonner la capitalisation des intérêts,

Juger que la société Allianz n'est pas fondée à opposer un plafond au titre des dommages

immatériels non consécutifs,

Débouter la société Allianz de son action en garantie dirigée à l'encontre de la société Axa France Iard, recherchée en qualité d'assureur de la société Rocland,

Débouter la société Allianz de sa demande de condamnation de la société Axa France Iard à lui verser la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

Condamner la société Allianz à payer à la société Axa France Iard la somme de 15 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

Débouter la société Allianz de l'intégralité de ses prétentions et demandes.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 21 août 2020, la compagnie Allianz iard demande à la cour de :

Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la compagnie Axa de son recours à l'encontre de la concluante

Dire et juger irrecevable la demande d'Axa France du fait de l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 1er avril 2009 et subsidiairement encore attaché à l'autorité de la chose jugée du jugement rendu le 12 novembre 2007 par le tribunal de commerce de Paris.

Débouter Axa France de toutes ses demandes.

Subsidiairement,

Dire et juger qu'Axa France ne justifie pas être subrogée et donc recevable à agir.

Dire et juger que justifierait-elle être subrogée dans les droits et actions de Vitakraft, Axa

France ne serait pas en mesure d'agir.

Ainsi,

Constatant notamment qu'Axa France ne verse pas au débat la police d'assurances Socotec industries et moins encore ne s'explique sur les conditions dans lesquelles elle pouvait être mobilisée,

Dire et juger Axa France irrecevable à agir en application des règles sur la subrogation.

Débouter Axa France de toutes ses demandes.

Subsidiairement,

Si Axa France se prétend subrogée dans les droits de Vitakraft,

Dire et juger que son action est prescrite.

Si Axa France se prétend subrogée dans les droits de Socotec industries,

Dire et juger prescrite l'action d'Axa France.

Déclarer Axa France irrecevable et la débouter de toutes ses demandes.

Subsidiairement encore,

Dire et juger que le rapport d'expertise et l'estimation des préjudices sur lesquels repose la demande d'Axa France sont inopposables à Allianz Iard et à la société Rocland.

Dès lors,

Débouter Axa France de toutes ses demandes comme irrecevables.

Subsidiairement encore,

Débouter Axa France de toutes ses demandes.

Toujours subsidiairement,

Dire et juger non applicable la police Gan eurocourtage.

Débouter Axa France de toutes ses demandes et la déclarer mal fondée en son appel.

Par ailleurs,

Dire et juger qu'Axa France est l'assureur de la société Rocland au titre des préjudices

immatériels.

Dire et juger qu'il appartient à Axa France assureur de Socotec industries de se retourner contre Axa France assureur de Rocland.

Si par impossible une condamnation étant prononcée contre Allianz Iard,

Vu l'article 11 du contrat d'assurances Gan Eurocourtage,

Condamner Axa France assureur de la société Rocland à relever indemne Allianz Iard de toutes les condamnations susceptibles d'être prononcées contre elle.

Opérer une compensation et dire n'y avoir donc lieu à aucun règlement par Allianz Iard au bénéfice de la société Axa France iard.

En tout état de cause et subsidiairement,

Concernant les demandes présentées,

Vu les explications apportées,

Dire et juger qu'aucune demande n'est justifiée.

Débouter donc Axa France de toutes ses demandes.

Dire et juger qu'aucune somme ne saurait en tout état de cause être retenue au titre du recours au-delà de 661 008, 50 euros et subsidiairement au-delà de 768 035, 50 euros.

Dire et juger n'y avoir lieu à aucun intérêts.

Surtout,

Vu la police Gan eurocourtage souscrite,

Si par impossible une condamnation devait intervenir contre Allianz Iard,

Dire et juger qu'aucune condamnation ne saurait intervenir au-delà des limites contractuelles prévues au contrat.

Dire et juger qu'aucune demande ne saurait donc excéder 155 000 euros au titre du plafond de garantie.

Dire et juger qu'aucune demande ne saurait être accueillie sans tenir compte par ailleurs de la franchise de 15 000 euros prévue au contrat.

Par ailleurs,

A titre reconventionnel,

Vu le caractère abusif du recours d'Axa France,

Vu les fautes largement établies commises par Axa France dans l'exercice de son prétendu recours,

Vu l'article 1240 du code civil,

Condamner Axa France à payer à Allianz iard la somme de 50 000 euros à titre de dommages intérêts.

Condamner la société Axa France à payer à la société Allianz iard aux droits de Gan eurococourtage la somme de 20 000 euros au titre de ses frais irrépétibles et la condamner également aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Kong Thong et ce conformément aux articles 699 et 700 du code de procédure civile.

La société Allianz Iard a signifié des conclusions récapitulatives le 15 mai 2023 demandant à la cour de :

Vu le jugement rendu le 13 septembre 2019

Vu l'appel de la compagnie AXA

Débouter la compagnie AXA de son appel

Vu les articles 480 du Code de Procédure Civile et 1351 du Code Civil,

Vu la nécessaire concentration des moyens et des demandes dans une instance,

Vu la jurisprudence de la Cour de Cassation versée aux débats,

Vu l'arrêt rendu par la Cour d'Appel de Paris le 1 er avril 2009 et vu le jugement rendu le 12 novembre 2007 par le Tribunal de Commerce de Paris,

Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la compagnie AXA de son recours à l'encontre de la concluante

Juger irrecevable la demande d'AXA FRANCE du fait de l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 1er avril 2009 et subsidiairement encore attaché à l'autorité de la chose jugée du jugement rendu le 12 novembre 2007 par le Tribunal de commerce de Paris.

Débouter AXA FRANCE de toutes ses demandes.

Subsidiairement,

Vu l'article L 121 du Code des Assurances,

Vu l'article 1251 3 ème du Code Civil,

Vu les pièces versées aux débats,

Juger qu'AXA FRANCE ne justifie pas être subrogée et donc recevable à agir, que ce soit dans les droits et actions de son assurée SOCOTEC que de la demanderesse principale la société VITAKRAFT,

Juger irrecevable et mal fondé le recours d'AXA France en tant qu'exercé à l'encontre de la concluante, AXA ne pouvant avoir plus de droits que son assuré SOCOTEC, lequel est irrecevable à agir contre la concluante

Ainsi,

Juger AXA FRANCE irrecevable à agir en application des règles sur la subrogation.

Débouter AXA FRANCE de toutes ses demandes.

Subsidiairement,

Si AXA FRANCE se prétend subrogée dans les droits de VITAKRAFT,

Vu l'article 1792 du code civil et 2270-1 du même code,

Dire et juger que son action est prescrite.

Si AXA FRANCE se prétend subrogée dans les droits de SOCOTEC INDUSTRIES,

Vu l'arrêt de la Cour de Cassation du 13 septembre 2006,

Vu les éléments produits,

Vu l'article 1382 du Code Civil, nouvellement 1240 du même code,

Vu la loi du 17 juin 2008 et le cas échéant le nouvel article 2224 du code civil,

Juger prescrite l'action d'AXA FRANCE.

Déclarer AXA FRANCE irrecevable et la débouter de toutes ses demandes.

Subsidiairement encore,

Juger que le rapport d'expertise et l'estimation des préjudices sur lesquels repose la demande d'AXA FRANCE sont inopposables à ALLIANZ IARD et à la société ROCLAND.

Dès lors,

Débouter AXA FRANCE de toutes ses demandes comme irrecevables.

Subsidiairement encore,

Vu l'article 1240 du Code Civil,

Vu l'absence de toute démonstration de faute de la société ROCLAND.

Débouter AXA FRANCE de toutes ses demandes.

Toujours subsidiairement,

Vu la police GAN communiquée

Vu les conditions d'application dans le temps de la police GAN EUROCOURTAGE,

Vu l'article L 124-1 du code des assurances,

Vu les faits de l'espèce, leur chronologie,

Vu le cas échéant l'article 1964 ancien du Code Civil,

Vu le caractère aléatoire du contrat d'assurances et la connaissance dès 2002 par la société ROCLAND du sinistre,

Juger non applicable la police GAN EUROCOURTAGE.

Débouter AXA FRANCE de toutes ses demandes et la déclarer mal fondée en son appel.

Par ailleurs,

Juger qu'AXA FRANCE est l'assureur de la société ROCLAND au titre des préjudices immatériels.

La juger irrecevable à agir à ce titre

Juger qu'il appartient à AXA FRANCE assureur de SOCOTEC INDUSTRIES de se retourner contre AXA FRANCE assureur de ROCLAND.

Si par impossible une condamnation était prononcée contre ALLIANZ IARD,

Vu l'article 11 du contrat d'assurances GAN EUROCOURTAGE,

Condamner AXA FRANCE assureur de la société ROCLAND à relever indemne ALLIANZ IARD de toutes les condamnations susceptibles d'être prononcées contre elle.

Opérer une compensation et juger n'y avoir donc lieu à aucun règlement par ALLIANZ IARD au bénéfice de la société AXA FRANCE IARD.

En tout état de cause et subsidiairement,

Concernant les demandes présentées,

Vu les pièces communiquées

Dire et juger qu'aucune demande n'est justifiée.

Débouter donc AXA FRANCE de toutes ses demandes.

A tout le moins juger que AXA France ne justifie avoir exécuté les décisions en qualité d'assureur de SOCOTEC qu'à hauteur de 93.653,25 euros.

A défaut juger qu'aucune somme ne saurait en tout état de cause être retenue au titre du

recours au-delà de 661.008, 50 € et subsidiairement au-delà de 768.035, 50 euros.

Dire et juger n'y avoir lieu à aucun intérêt.

Surtout,

Vu la police GAN EUROCOURTAGE souscrite,

Si par impossible une condamnation devait intervenir contre ALLIANZ IARD,

Dire et juger qu'aucune condamnation ne saurait intervenir au-delà des limites contractuelles prévues au contrat.

Dire et juger qu'aucune demande ne saurait donc excéder 155.000 € au titre du plafond de garantie.

Dire et juger qu'aucune demande ne saurait être accueillie sans tenir compte par ailleurs de la franchise de 15.000 euros prévue au contrat.

Par ailleurs,

A titre reconventionnel,

Vu le caractère abusif du recours d'AXA FRANCE,

Vu les fautes largement établies commises par AXA FRANCE dans l'exercice de son prétendu recours,

Vu l'article 1240 du Code Civil,

Condamner AXA FRANCE à payer à ALLIANZ IARD la somme de 50.000 euros à titre de dommages intérêts.

Condamner la société AXA FRANCE à payer à la société ALLIANZ IARD aux droits de GAN EUROCOCOURTAGE la somme de 20.000 euros au titre de ses frais irrépétibles et la condamner également aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Sylvie KONG THONG et ce conformément aux articles 699 et 700 du CPC.

La clôture a été prononcée par ordonnance le 16 mai 2023.

La société Axa France Iard a signifié des conclusions aux fins de révocation de la clôture et au fond le 26 mai 2023 demandant à la cour de :

Vu les articles 122, 564 et 71 du Code de procédure civile,

Vu l'article 480 du Code de procédure civile,

Vu l'article 1355 du Code civil, auparavant numéroté 1351,

Vu l'article L. 121-12 du Code des assurances,

Vu les articles 1346 et suivants du Code civil,Vu l'article 1240 du Code civil,

Vu l'article 26, II de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, portant réforme de la prescription en matière civile,

Vu l'article L124-1, L 124-5 du Code des assurances,

Vu l'article 1343-2 du Code civil,

Vu les conclusions de la Société Allianz déposées le 15 mai 2023 à 18h21,

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 16 mai 2023,

Vu les articles 15 et 16 du Code de procédure civile,

REVOQUER l'ordonnance de clôture rendue le 16 mai 2023 et admettre aux débats les présentes conclusions et,

INFIRMER le jugement rendu le 13 septembre 2019 par le Tribunal de grande instance de Paris en ce qu'il a jugé que les demandes de la société AXA FRANCE IARD étaient irrecevables en raison de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 1er avril 2009,

CONFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté la société ALLIANZ de sa demande de condamnation pour procédure abusive,

Statuant à nouveau,

JUGER que la demande de la société AXA FRANCE IARD ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 1 er avril 2009,

JUGER que la société AXA FRANCE IARD justifie de sa subrogation dans les droits de la société SOCOTEC,

JUGER que la demande de la société AXA FRANCE IARD n'est pas prescrite,

JUGER en conséquence la société AXA FRANCE IARD recevable en ses demandes formées à l'encontre de la société ALLIANZ, venant aux droits de la société GAN EUROCOURTAGE,

JUGER que la société ROCLAND a engagé sa responsabilité,

CONDAMNER la société ALLIANZ à payer la somme de 1.303.787 euros en application du contrat d'assurance souscrit par la société ROCLAND auprès de la société GAN EUROCOURTAGE, aux droits de laquelle la société ALLIANZ vient, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 12 octobre 2012, date du dernier arrêt d'appel ayant arrêté le montant des préjudices immatériels,

ORDONNER la capitalisation des intérêts,

JUGER que la société ALLIANZ n'est pas fondée à opposer un plafond au titre des dommages immatériels non consécutifs,

DEBOUTER la société ALLIANZ de son action en garantie dirigée à l'encontre de la société AXA France IARD, recherchée en qualité d'assureur de la société ROCLAND, DEBOUTER La Société ALLIANZ de sa demande de condamnation de la société AXA France IARD à lui verser la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

CONDAMNER la société ALLIANZ à payer à la société AXA FRANCE IARD la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

DEBOUTER la société ALLIANZ de l'intégralité de ses prétentions et demandes.

A défaut de révoquer l'ordonnance de clôture et admettre les présentes conclusions aux débats,

Rejeter les conclusions signifiées par la Société ALLIANZ le 15 mai 2023 soir (la veille de la clôture) des débats en les déclarant tardives.

L'affaire a été fixée à l'audience du 30 mai 2023.

A l'audience, in limine litis, les parties ont sollicité de la cour conformément aux dispositions de l'article 803 alinéa 3 du Code de procédure civile, la révocation de la clôture au jour des débats, pour respecter le principe du contradictoire au vu des conclusions signifiées par la société Axa France Iard la veille de l'ordonnance de clôture.

La révocation de l'ordonnance de clôture au 30 mai 2023 a été actée au plumitif au seuil des débats.

SUR QUOI,

LA COUR

1- La recevabilité du recours de la société Axa France Iard au regard de l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt du 1er avril 2009

Le tribunal a jugé que l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 1er avril 2009 a fondé sur deux moyens la mise hors de cause de la société Gan Eurocourtage, aux droits de laquelle vient la société Allianz, recherchée en qualité d'assureur responsabilité civile de la société Rocland, tenant d'une part, au caractère nouveau des demandes de garantie formées à hauteur d'appel à l'encontre de GAN Eurocourtage et, d'autre part, à l'inopposabilité à la société Gan Eurocourtage de l'expertise qui n'a pas été réalisée au contradictoire de cette dernière. Le jugement en a inféré que la garantie de la société Gan Eurocourtage ne peut plus être recherchée dans le cadre de la présente instance ouverte entre les mêmes parties et concernant les mêmes causes.

La société Axa France Iard, en sa qualité d'assureur responsabilité civile décennale des sociétés Socotec et Rocland, au soutien de l'infirmation du jugement, relève que c'est uniquement la recevabilité de la demande à l'égard de la société Socotec qui a été jugée et non son bien fondé, l'instance initiale portant sur la demande d'indemnisation du maître d'ouvrage contre les constructeurs alors que la présente instance porte sur l'action subrogatoire de l'assureur de Socotec, dont le fait générateur est constitué par le paiement effectué en exécution des décisions rendues.

Elle en infère qu' aucune autorité de la chose jugée tirée de l'arrêt du 1er avril 2009 ne peut lui être opposée en sa qualité d'assureur de Socotec.

La société Allianz Iard, au soutien de la confirmation du jugement, oppose que la mise hors de cause de la société Gan Eurocourtage devenue Allianz fait suite à l'inapplicabilité dans le temps de la police d'assurance souscrite par la société Rocland qui fait obstacle à toute action à son encontre cependant que l'autorité de la chose jugée se combine avec le principe de la concentration des moyens que l'appelante tente vainement, selon l'intimée, de contourner en faisant croire que son action serait aujourd'hui différente alors qu'elle procède de la même cause et a le même objet que ce qui a donné lieu à l'arrêt du 1er avril 2009. Elle ajoute à l'appui de l'autorité de la chose jugée de l'arrêt du 1er avril 2009 qu'il appartenait à la société AXA France Iard de présenter en temps utile ses appels en garantie, s'agissant d'un droit né avant la décision rendue du 1er avril 2009.

Réponse de la cour

Selon les dispositions de l'article 480 du Code de procédure civile dans sa version en vigueur du 01 janvier 1976 au 01 janvier 2020 applicable au litige : "Le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

Le principal s'entend de l'objet du litige tel qu'il est déterminé par l'article 4."

L'objet du litige selon les dispositions de l'article 4 précité est déterminé par les prétentions respectives des parties fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense. sauf à être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.

Selon les dispositions de l'article 1351 du Code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'Ordonnance du 10 février 2016 applicable au litige : " L 'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité."

Il suit de l'ensemble de ces dispositions que la chose jugée par l'arrêt du 1er avril 2009 a autorité dans les limites de la chose jugéé :

- entre les mêmes parties agissant en la même qualité, soit la société AXA France Iard, prise en sa seule qualité d'assureur de responsabilité civile décennale de la société Rocland, et la société Gan Eurocourtage, aux droits de laquelle vient la société Allianz, la société AXA France Iard n'étant pas partie dans le cadre de cet arrêt en qualité d'assureur responsabilité civile décennale de la société Socotec,

- au regard de l'objet déterminé par les prétentions des parties, s'agissant de la recevabilité de la demande formée pour la première fois en cause d'appel par la société Socotec ( et non son assureur AXA France Iard ) à l'encontre de Gan Eurocourtage, ce qui n'interdit pas à la société AXA France Iard, agissant en une autre qualité, d'introduire une nouvelle instance à l'encontre de la société Gan Eurocourtage

- pour une demande fondée sur la même cause, condition non remplie en l'espèce, la cour n'ayant pas été saisie du recours subrogatoire de la société AXA France Iard en qualité d'assureur de la société Socotec à l'encontre de GAN Eurocourtage mais du recours en garantie formée par la société AXA France Iard en seule qualité d'assureur de la société Rocland à l'encontre de la société Gan Eurocourtage ainsi qu'il a été dit plus haut.

Par conséquent l'arrêt rendu le 1er avril 2009 n'a pas l'autorité de la chose jugée à l'égard du recours subrogatoire de la société AXA France Iard prise en sa qualité d'assureur de la société Socotec à l'encontre de la société Gan Eurocourtage, prise en sa qualité d'assureur responsabilité civile de la société Rocland, aux droits de laquelle vient la société Allianz, le moyen tiré de l'inopposabilité du rapport d'expertise à la société Gan Eurocourtage qui n'y était pas partie étant inopérant compte tenu des développements précités, de même que le moyen tiré du droit né avant la décision du 1er avril 2009 cependant que le moyen tiré de la recevabilité du recours subrogatoire sera examiné en suivant.

Cet arrêt n'a pas non plus l'autorité de chose jugée à l'égard de la société AXA France Iard prise en sa qualité d'assureur responsabilité civile décennale de la société Rocland, à l'égard de la société Gan Eurocourtage prise en sa qualité d'assureur responsabilité civile de cette dernière dès lors que son dispositif ne statue pas sur la recevabilité des demandes de la société AXA France Iard prise en cette qualité à l'égard de la société Gan Eurocourtage mais déclare irrecevables les demandes des sociétés Cotrex et Socotec à l'encontre de la société Gan Eurocourtage.

Dès lors, l'autorité de la chose jugée le 1er avril 2009 ne peut valablement être opposée à la société AXA France Iard prise en sa double qualité d'assureur responsabilité civile décennale des sociétés Socotec et Rocland à l'égard de la société Gan Eurocourtage aux droits de laquelle vient la société Allianz.

Le jugement sera de ce chef infirmé.

2- La recevabilité du recours subrogatoire de la société AXA France Iard au regard de son intérêt à agir

La société AXA France Iard expose qu'au vu des chèques Carpa produits en pièce n°6 à 10 et des relevés Carpa communiqués en pièces n°14 et 15, elle justifie de tous les paiements effectués dans le cadre de l'action subrogatoire exercée ensuite de la garantie souscrite par son assurée la société Socotec dont le détail des condamnations réglées au titre des préjudices immatériels.

La société Allianz Iard soutient que la société Socotec ayant été déclarée irrecevable à agir à l'encontre de la société AXA France Iard ne peut avoir davantage de droits que son assurée cependant que selon l'intimée, les dernières pièces produites par l'appelante n'établissent pas qu'elle ait bien exécuté les décisions au titre de la police souscrite par la société Socotec.

Réponse de la cour

Il sera liminairement constaté que la société AXA France Iard dans le dispositif de ses dernières conclusions du 23 mai 2023 ne sollicite pas la garantie d'Allianz Iard au titre de la subrogation dans les droits de la société Rocland mais uniquement dans les droits de la société Socotec.

Selon les dispositions de l'article L 121-12 alinéa 1 du Code des assurances : " L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur."

Au rappel que la société Socotec a été déclarée irrecevable en ses demande contre la société Gan Eurocourtage par l'arrêt du 1er avril 2009, non remis en cause par le pourvoi qui n'a pas été formé par la société AXA France Iard en sa qualité d'assureur de la société Socotec, il appartient à la société AXA France Iard qui invoque la subrogation dans les droits de son assurée Socotec de rapporter la preuve des paiements effectués pour le compte de son assurée en vertu de son obligation à garantie.

La société AXA France Iard produit en pièce n°6 à 10 des copies de chèques émis par elle :

- le 29 novembre 2007 remis sur le compte Carpa de la SCP Godart à hauteur de 93 653,25 euros,

- le 11 mai 2009 remis sur le compte de la Carpa sans indication du nom de l'avocat à hauteur de 225 000 euros,

- le 12 mai 2009 remis sur le compte Carpa à l'ordre de Maître Karila à hauteur de 768 035 euros,

- le 21 mai 2013 remis sur le compte Carpa à l'ordre de Maître Godart à hauteur de 100 000 euros,

- le 21 mai 2013 remis sur le compte Carpa à l'ordre de Maître Godart à hauteur de 636 791,70 euros.

Cependant ces copies de chèques ne comportent aucune indication de la qualité en laquelle la société AXA France Iard a émis ces chèques et/ou un numéro d'affaire permettant de rattacher ces paiements à la garantie qui les fonde.

Ils ne peuvent donc servir au soutien de la preuve de la subrogation bénéficiant à la société AXA France Iard qui ne démontre pas que ces règlements ont été effectués au titre de la police souscrite par la société Socotec.

La société AXA France Iard produit en pièce n°14 un tableau non daté, non signé, ne mentionnant pas le nom de son auteur faisant état des mouvements de fond pour le client Rocland sur lequel AXA France Iard apparaît en qualité d'Assurances en marge de plusieurs remises de fonds.

Pour les mêmes raisons tenant à l'absence de toute référence à l'assuré et à la garantie au titre de laquelle la société Axa France Iard a effectué ses règlements, cette pièce ne peut servir au soutien de la preuve de la subrogation bénéficiant à la société AXA France Iard prise en sa qualité assureur de la société Socotec.

La société AXA France Iard produit en pièce n°15 un courrier à l'en-tête de la Carpa n° d'affaire 155645 sur le compte de Maître Goldszal Maryla, avocate au Barreau de Paris mentionnant des remises de chèques par la société AXA France Iard à hauteur d'une somme globale de 1 033 185,97 euros mais ce document ne permet pas non plus d'identifier la qualité en laquelle l'assureur a effectué ces règlements ni les garanties au titre desquelles ils ont été effectués.

La société AXA France Iard produit en outre un courrier de Maître Maryla Goldszal adressé le 4 mai 2013 au cabinet d'avocat Sacaee attestant que dans l'affaire Vitakraft/Socotec ( n° Affaire 1613952) une somme totale de 736 791,70 euros a été reversée à la société Vitakraft par chèque du 20 juin 2013 ensuite des chèques remis par la société AXA.

Ce document fait la preuve du paiement effectué par la société AXA France Iard pour le compte de son assurée la société Socotec au titre de son obligation à garantie.

Il en résulte que la société AXA France Iard démontre son intérêt à agir à l'encontre de la société Gan Eurocourtage du chef de son recours subrogatoire à hauteur de la somme de 736 791,70 euros versée en sa qualité d'assureur de la société Socotec.

3- La recevabilité du recours subrogatoire au regard de la prescription de l'action

La société Allianz soulève la prescription au motif que la société AXA France Iard assureur subrogée dans les droits de Socotec n'a plus aucun recours dès lors que le maître d'ouvrage Vitakraft a définitivement renoncé à agir contre Allianz, qu'en tout état de cause le maître d'ouvrage pouvait agir à partir du mois de novembre 2002 date à laquelle le maître d'oeuvre Cotrex avait reçu la méthodologie de reprise des désordres et que la société AXA France Iard ayant engagé son action le 11 juin 2013 sans aucun acte antérieur interruptif de prescription, son action est manifestement prescrite.

La société Axa France Iard répond que c'est la date à laquelle Socotec a eu connaissance du dommage qui constitue la date de sa manifestation soit la date à laquelle le demandeur à l'action récursoire la société Socotec a été assigné en l'espèce le 17 juillet 2003.

Au rappel de l'article 26 de la loi du 17 juin 2008 qui a réduit de 10 ans à 5 ans le délai de prescription, elle en infère que ce délai courait jusqu'au 19 juin 2013 et qu'ayant agi le 11 juin 2013 elle n'est pas prescrite.

Réponse de la cour

Le marché ayant été conclu en 2001, avant l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription, les dispositions de l'article 2270-1 ancien du code civil sont applicables pour apprécier le point de départ des recours exercés entre les locateurs d'ouvrage non liés par un contrat et leurs assureurs.

Selon ces dispositions : " Les actions en responsabilité civile extracontractuelle se prescrivent par dix ans à compter de la manifestation du dommage ou de son aggravation."

Selon les dispositions transitoires de l'article 26 de la loi du 17 juin 2008 :

III. - Lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de la présente loi, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne. Cette loi s'applique également en appel et en cassation."

L'instance ayant donné lieu au jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 12 novembre 2007 auquel étaient parties les sociétés Socotec et AXA France Iard en sa qualité d'assureur de la société Rocland, ayant été initiée antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, le délai pour agir de la société AXA France Iard prise en sa qualité d'assureur de la société Socotec était donc de 10 ans à compter de la date à laquelle Socotec Industries, demandeur à l'action récursoire, a été attraite en justice par le maître d'ouvrage Vitakraft aux fins qu'il soit statué sur les responsabilités et les préjudices, soit à compter de l'exploit délivré le 13 avril 2007, cependant que le jugement rendu le 12 novembre 2007 a fait courir un nouveau délai de 10 ans à compter de son prononcé.

Par conséquent, l'assignation délivrée le 11 juin 2013 par la société AXA France Iard subrogée dans les droits de la société Socotec à l'encontre de la société Allianz Iard ayant été délivrée dans le délai légal, n'est pas prescrite.

4- Le bien fondé du recours subrogatoire

La société AXA France Iard fait valoir que la garantie souscrite par la société Rocland à effet au 1er janvier 2003 auprès de la société Gan Eurocourtage a vocation à s'appliquer à toutes les réclamations intervenant pendant sa date de validité, que ce n'est qu'au moment où le maître d'ouvrage a fait procéder à une expertise privée et marqué son refus des propositions de reprises de la société Rocland dans le cadre de la garantie de parfait achèvement en avril 2003 que le fait dommageable s'est révélé dans toute son ampleur. Elle observe que l'assureur en tout état de cause doit rapporter la preuve de l'existence du passé connu par l'assuré au jour de la souscription de la garantie pour refuser celle-ci, preuve non rapportée en l'espèce de sorte que la société Allianz ne peut valablement contester l'application de sa police et sera condamnée à régler à la société Axa France Iard la somme de 1 303 787 euros.

La société Allianz Iard fait valoir que la réclamation a été portée à la connaissance de la société Rocland au plus tard au mois de novembre 2002, date à laquelle elle a proposé au maître d'oeuvre Cotrex une méthodologie de reprise des désordres qui feront ensuite l'objet de l'expertise confiée à Monsieur [S]. Elle souligne que sa note de couverture produite en pièce n°5 signée le 12 décembre 2002 comprend une date d'effet au 1er janvier 2003 à laquelle le sinistre était déjà constitué. Elle en infère que sa police ne peut en aucune façon être mobilisée et ce d'autant que l'assuré avait connaissance du sinistre non déclaré lors de la souscription de la police ce qui prive d'aléa le contrat. Subsidiairement elle ajoute qu'en signant le procès-verbal d'estimation ds dommages, AXA France Iard a fait la preuve au mois de septembre 2005 qu'elle est bien en réalité l'assureur de Rocland, cependant qu'elle a toujours dissimulé les conditions et l'étendue précise de sa garantie et ne produit toujours pas à hauteur d'appel la police d'assurance qu'elle invoque pour avoir été souscrite par Socotec.

Réponse de la cour

Il doit être constaté que la société AXA France Iard ne produit pas, fût-ce en copie, la police d'assurance souscrite par la société Socotec sur laquelle elle fonde sa subrogation.

Les conditions particulières de la police responsabilité civile des entreprises contrat n° 034199001 à effet au 1er janvier 2003, souscrite par la société Rocland auprès de Gan Eurocourtage sont produites en copie.

Elles stipulent en leur Article 11 Prise d'effet des garanties :

" Le présent contrat prend effet le 1er janvier 2003.

La garantie s'applique à toutes réclamations formulées postérieurement à la date d'effet et antérieurement à sa suspension et/ou résiliation. (...)"

Selon les dispositions de l'article L 124-1 du Code des assurances : " Dans les assurances de responsabilité, l'assureur n'est tenu que si, à la suite du fait dommageable prévu au contrat, une réclamation amiable ou judiciaire est faite à l'assuré par le tiers lésé."

Il ne résulte pas des éléments produits par la société Allianz Iard que les désordres tirés de l'apparition des fissures affectant le dallage réalisé par la société Rocland, aient été portés à la connaissance de la société AXA France Iard dans le cadre d'une réclamation élevée en 2002, ceci ne pouvant être inféré des seules affirmations de la société Vitafraft dans son assignation délivrée le 17 juillet 2013 à la société Rocland selon laquelle cette dernière aurait proposé, selon un document non daté mais parvenu au maître d'oeuvre Cotrex le 18 novembre 2002, une méthodologie de reprise des joints de construction et des tampons fonte sur regard EP.

Il ne saurait donc en être déduit de cette seule affirmation aucunement étayée, la connaissance du sinistre objet du litige, antérieurement à la date de prise d'effet du contrat, par la société Rocland, ce moyen sera donc écarté.

La société Axa France Iard justifie avoir réglé pour le compte de son assurée Socotec la somme de 736 791,70 euros qui forme l'assiette de son recours, ce montant attesté par l'avocate administratrice de la Carpa étant exclusif de toute mention relative à l'application ou pas de la taxe sur la valeur ajoutée.

Cependant la police souscrite par la société Rocland auprès du Gan exclut en son article 6 de manière lisible souligné et surlignée les conséquence de la responsabilité décennale relevant de l'obligation d'assurance et, en son article 8, les dommages immatériels qui sont la conséquence de dommages matériels non garantis.

La société AXA France Iard prise en sa qualité d'assureur de Socotec exerce son recours subrogatoire du chef des indemnités versées en réparation des préjudices matériels et immatériels consécutifs à des désordres dont la natue décennale a été jugée et non remise en cause par le pourvoi et l'arrêt de renvoi du 12 octobre 2012.

Au vu de l'assurance souscrite par la société Rocland auprès de la société Gan Eurocourtage qui est une assurance de responsabilité civile d'exploitation, exclusive des garanties obligatoires instaurée par la loi n° 78-12 du 4 janvier 1978, il échet de constater que la société AXA France Iard n'est pas fondée en son recours dirigée à l'encontre de la société Allianz Iard.

La société AXA France Iard sera déboutée de ce chef.

5- Les dommages et intérêts pour procédure abusive

La société Allianz Iard soutient que l'acton de la société AXA France Iard prise en sa qualité d'assureur de Socotec est manifestement abusive et ne sert qu'à couvrir les errements procéduraux de cette partie à qui il appartenait d'intervenir en cettr qualité dans la procédure d'origine ce qu'elle a omis de faitre. Au visa de l'article 1240 du Code civil elle sollicite en réparation de ce comportement fautif une somme de 50 000 euros.

La société AXA France Iard au rappel que la complexité du dossier est dû à la succession des assureurs et qu'elle a payé l'entièreté des condamantions de Socotec dont la part imputée à Rocland conclut au débouté aucune intention malicieuse ne pouvant lui être imputée.

Réponse de la cour

Il appartient à la société Allianz Iard de rapporter la preuve que le recours exercée par l'appelante, la société AXA France Iard, s'agissant d'un droit fondamental, a dégénéré en abus et ce faisant lui a causé un préjudice or, les allégations selon lesquelles la société AXA France Iard aurait toujours dissimulé les conditions et l'étendue précise de ses garanties compte tenu de l'ancienennté du litige qui remonte à plus de 22 ans ne peuvent s'évincer de la seule absence de communication de la police souscrite par la société Socotec quand la matérialité des paiements a été justifiée.

La société Allianz Iard sera donc déboutée de cette demande et le jugement confirmé de ce chef.

6- Les frais irrépétibles et les dépens.

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement qui a condamné la société AXA France Iard à régler à la société Allianz Iard une somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles outre les dépens.

Y ajoutant la société AXA France Iard sera condamnée à régler à la société Allianz Iard une somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement du chef de l'autorité de la chose jugée ;

Statuant à nouveau de ce seul chef :

DECLARE recevables les demandes formées par la société AXA France Iard en ses qualités d'assureur des sociétés Socotec et Rocland du chef de la chose jugée par l'arrêt rendu par cette cour le 1er avril 2009 à l'égard de la société Gan Eurocourtage aux droits de laquelle vient la société Allianz Iard ;

Y ajoutant

DECLARE recevable la société AXA France Iard, en sa qualité d'assureur de la société Socotec en son action subrogatoire à l'encontre de la société Gan Eurocourtage aux droits de laquelle vient la société Allianz Iard ;

Au fond,

L'EN DEBOUTE ;

CONFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions ;

CONDAMNE la société AXA France Iard, en sa qualité d'assureur de la société Socotec et de la société Rocland à régler à la société Allianz Iard une somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 19/20858
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;19.20858 ?
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