La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/04/2024 | FRANCE | N°19/10314

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 24 avril 2024, 19/10314


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 24 AVRIL 2024



(n° /2024, 16 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/10314 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B76XA



Décision déférée à la Cour : jugement du 28 mars 2019 - tribunal de grande instance d'EVRY - RG n° 16/04043





APPELANT



Monsieur [N] [S]

[Adresse 3]

[Localité 5]
<

br>

Représenté par Me Jérôme LEFORT de la SELAS LLC et Associés Bureau de Paris, avocat au barreau de PARIS, toque : B1094





INTIMEES



Madame [U] [F]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Repr...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 24 AVRIL 2024

(n° /2024, 16 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/10314 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B76XA

Décision déférée à la Cour : jugement du 28 mars 2019 - tribunal de grande instance d'EVRY - RG n° 16/04043

APPELANT

Monsieur [N] [S]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Jérôme LEFORT de la SELAS LLC et Associés Bureau de Paris, avocat au barreau de PARIS, toque : B1094

INTIMEES

Madame [U] [F]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Alexandra MORIN, avocat au barreau d'ESSONNE, toque : P74

S.A.R.L. LE BUISSON IMMOBILIER prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 6 juin 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Ange Sentucq, présidente de chambre, chargée du rapport et Mme Elise Thévenin-Scott, conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Ange Sentucq, présidente

Mme Elise Thévenin-Scott, conseillère

Mme Véronique Bost, conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Céline RICHARD

ARRET :

- contradictoire.

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, délibéré initialement prévu le 20 décembre 2023 et prorogé au 24 avril 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Ange Sentucq, présidente de chambre et par Manon Caron, greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur [N] [S] était propriétaire et occupant d'un pavillon individuel sis [Adresse 1] à [Localité 4], objet d'un permis de construire obtenu le 10 avril 2001. Il a, par le biais du site immobilier ORPI, mis en vente son bien le 20 avril 2013 au prix de 795.000 euros soit 765.000 euros net vendeur.

Ayant fait part de son intérêt pour le bien, Madame [U] [F] a visité la maison et proposé de l'acquérir pour la somme de 780.000 euros soit 755.000 euros net vendeur.

Un compromis de vente a été signé le 22 mai 2013 avec le concours de la Société Le Buisson Immobilier.

Le 23 août 2013 Monsieur [S] a déposé une déclaration d'achèvement et de conformité des travaux auprès de la mairie de [Localité 4].

L'acte de vente a été reçu le 30 août 2013 par le ministère de Maître [T] [M], notaire à [Localité 4].

Invoquant différents vices affectant la toiture, le réseau d'assainissement, la plomberie, la VMC et le chauffage, dans un courrier du 3 novembre 2013 réitéré le 24 novembre 2013, Madame [F] exprimait à Monsieur [S] son accord pour que celui-ci fasse établir des devis de réparation mais indiquait qu'il était exclu que ces entreprises interviennent précisant que les devis établis pourraient servir de base à une négociation à laquelle elle affirmait n'être opposée.

Madame [F] a fait établir un procès-verbal de constat le 18 décembre 2013 mettant en évidence :

- des traces d'humidité affectant les murs et plafond du séjour, des traces de moisissure au plafond et sur les murs de la salle de bains, dans les WC, dans une des chambres de l'étage, des traces d'humidité sous le papier peint des murs de l'entrée

- un non-raccordement de la VMC du grenier vers l'extérieur,

- le film sous-toiture imprégné d'eau, des traces d'humidité sur les pavés de verre des toilettes à l'étage, des traces de moisissures et d'humidité sur les pavés de verre de la partie en réserve à l'étage,

- des fissures affectant les murs de l'appentis, une fissure verticale sur le mur du fond à droite de l'insert, et plusieurs dalles commençant à se désolidariser à plusieurs endroits de l'escalier.

Madame [F] a saisi, par exploit délivré à Monsieur [N] [S] et à la société Le Buisson Immobilier le 25 février 2014, le Juge des référés du Tribunal de Grande Instance d'Evry aux fins de désignation d'un expert judiciaire.

Désigné par ordonnance de référé du 8 avril 2014, Monsieur Dirand a rendu son rapport le 22 juillet 2015.

A la suite de ce rapport d'expertise, Madame [F] a saisi le Tribunal de Grande Instance d'Evry aux fins de :

- constater que Monsieur [S] a engagé sa responsabilité décennale au titre des désordres

affectant le pavillon vendu à Madame [F]

- constater que Monsieur [S] est tenu de la garantie des vices cachés au bénéfice de Madame [F]

- condamner in solidum Monsieur [S] et la Sarl Le Buisson Immobilier à payer à Madame [F] les sommes suivantes, avec intérêts au taux légal à compter de la date délivrance de l'assignation :

89.325, 85 euros TTC, au titre de la réparation des désordres

2.246,85 euros au titre des frais d'investigations

2.050 euros au titre des frais d'expert amiables

316,84 euros au titre des frais d'huissier

- condamner in solidum Monsieur [S] et la SARL LE BUISSON IMMOBILIER à payer à Madame [F] la somme de 15.000 euros au titre du préjudice de jouissance arrêté au jour de la délivrance de la présente assignation, outre une somme de 500 euros par mois entre la date de délivrance de l'assignation et le jugement à intervenir

- condamner in solidum Monsieur [S] et la SARL LE BUISSON IMMOBILIER à payer à Madame [F] la somme de 3.000 euros au titre du préjudice de jouissance durant la réalisation des travaux

- constater que le pavillon vendu a fait l'objet d'une modification postérieure au dépôt du permis de construire et en contravention avec celui-ci ;

- constater que Madame [F] a été induite en erreur sur la surface habitable du pavillon qu'elle achetait en raison du comportement de Monsieur [S] et de l'erreur de l'agence immobilière

- condamner in solidum Monsieur [S] et la société LE BUISSON IMMOBILIER à payer à Madame [F] une somme de 83.888 euros au titre du préjudice consécutif à la perte de surface habitable

- condamner in solidum Monsieur [S] et la société LE BUISSON IMMOBILIER à payer à Madame [F] une somme de 8.000 euros au titre de l'arti cle 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens de l'instance, lesquels comprendront les frais d'expertise judiciaire.

Par le jugement du 28 mars 2019, le Tribunal de Grande Instance d'Evry a ainsi statué :

DÉCLARE recevable comme non forclose l'action de Madame [U] [F] à l'égard de Monsieur [N] [S] au titre de la garantie décennale ;

CONDAMNE Monsieur [N] [S] à payer à Madame [U] [F] :

- une indemnité de quatre-vingt-dix mille neuf cent cinquante-huit euros et soixante centimes (90.958,60 euros) au titre de ses préjudices matériels ;

- une indemnité de douze mille cinq cents euros (12.500 euros) au titre de ses préjudices de jouissance ;

RAPPELLE que ces indemnités produiront des intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;

CONDAMNE Monsieur [N] [S] aux dépens de l'instance, lesquels comprendront les frais d'expertise, ainsi qu'à payer une somme de quatre mille euros (4.000 euros) à Madame [U] [F] en applicati on de l'arti cle 700 du code de procédure civile

REJETTE le surplus des demandes de Madame [U] [F] ;

CONDAMNE Madame [U] [F] à payer une somme de mille cinq cents euros (1.500 euros) à la société LE BUISSON IMMOBILIER en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

AUTORISE maître Natale BORRELLO à procéder au recouvrement direct des dépens conformément à l'arti cle 699 du code de procédure civile.

Par déclaration reçue au greffe le 14 mai 2019, Monsieur [S] a interjeté appel du jugement du 28 mars 2019.

Par conclusions signifiées le 15 mai 2023 Monsieur [S] demande à la cour de :

Vu l'article 1792 du code Civil

Vu l'article 1641 du Code Civil

Vu l'article 700 du Code de procédure

Vu l'article 699 du Code de procédure

Vu la jurisprudence,

INFIRMER le Jugement n°2019/96 du Tribunal de Grande Instance d'Evry du 28 mars 2019

Statuant de nouveau

A titre principal :

CONSTATER la prescription de l'action en garantie décennale,

JUGER irrecevable l'action en garantie décennale de Madame [F]

A titre subsidiaire :

JUGER que les désordres allégués ne sont pas des désordres de nature décennale

A titre infiniment subsidiaire :

JUGER que constituent des vices apparents n'ouvrant pas lieu à garantie :

- Insuffisance de l'épaisseur de la laine de verre,

- Défaut de pente d'eaux usées du lave-linge,

- Déclipsage des colliers de maintien.

JUGER que relève de l'entretien courant :

- L'installation chauff age,

- Le réseau d'eaux pluviales.

En conséquence,

DEBOUTER Madame [F] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions

A titre très infiniment subsidiaire et pour le cas où la cour confirmerait le jugement entrepris :

REDUIRE les prétentions de Madame [F] à de plus justes proportions, conformément aux remarques de Monsieur [O] et limiter l'indemnisation des postes ci-dessous selon les valorisations suivantes :

- Infiltrations de la toiture du séjour : 25.050,43 euros

- Défaut de pente du réseau d'eaux usée du lave-linge : 769,47 euros

- Drainage périphérique :2.262,09 euros

- Chauff age : 250,00 euros

REJETER la demande de Madame [F] en ce que Monsieur [S] soit condamné à lui verser la somme de 57 000 euros au titre d'un préjudice de jouissance.

CONFIRMER le jugement du 28 mars 2019 en ce qu'il déboute Madame [F] de sa demande d'indemnisation du préjudice résultant de la surface habitable réduite.

En tout hypothèse,

CONDAMNER Madame [F] à payer la somme de 8.000 euros à Monsieur [S] en application de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER Madame [F] aux entiers dépens, conformément à l'article 696 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 15 février 2023 Madame [U] [F] demande à la cour de :

Vu les articles 1792 et suivants du Code Civil ;

A titre subsidiaire, vu les articles 1641 et suivants du Code Civil ;

Vu l'article 1147 du Code Civil ;

Vu le rapport de Monsieur Luc DIRAND,

Vu les pièces versées aux débats ;

RECEVOIR Madame [F] en ses conclusions;

L'Y DECLARER bien fondée;

JUGER que Monsieur [N] [S] a engagé sa responsabilité décennale au titre des désordres affectant le pavillon vendu à Madame [F] ;

JUGER que l'action engagée par Madame [F] n'est pas forclose ;

CONFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'EVRY le 28 mars 2019 en ce qu'il a condamné Monsieur [S] à payer à Madame [F] les sommes suivantes :

' 90.958,60 euros au titre de ses préjudices matériels ;

' 4.000 euros au titre de l'article 700 du CPC pour la procédure de première

instance, ainsi que les dépens ;

A titre subsidiaire :

JUGER que Monsieur [N] [S] est tenu de la garantie des vices cachés au

bénéfice de Madame [F] ;

JUGER que les désordres allégués constituent des vices cachés ;

En conséquence,

CONFIRMER, par substitution de motifs, le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'EVRY le 28 mars 2019 en ce qu'il a condamné Monsieur [S] à payer à Madame [F] les sommes suivantes :

' 90.958,60 euros au titre de ses préjudices matériels ;

' 4.000 euros au titre de l'article 700 du CPC pour la procédure de première instance, ainsi que les dépens ;

En tout état de cause,

REFORMER le jugement rendu par le Tribunal de Grande instance d'EVRY le 28 mars 2019 en ce qu'il

' Limité la condamnation de Monsieur [S] à la somme de 12.500 euros au titre des préjudices de jouissance,

' Rejeté toute demande à l'encontre de la Société Le Buisson Immobilier,

' Rejeté la demande de Madame [F] au titre du préjudice lié à la perte de surface habitable ;

' Condamné Madame [F] à payer une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du CPC ;

Et, statuant à nouveau,

JUGER que la Société Le Buisson Immobilier a engagé sa responsabilité à l'égard de Madame [F] ;

JUGER que la Société Le Buisson Immobilier sera tenue d'indemniser Madame [F], in solidum avec Monsieur [S], au titre de l'ensemble des préjudices subis ;

JUGER que le préjudice de jouissance de Madame [F] perdure tant que les travaux de réparation n'ont pas été réalisés, ce qui implique son indemnisation préalable ;

CONDAMNER in solidum Monsieur [S] et la Société Le Buisson Immobilier à payer à Madame [F] les sommes suivantes :

' 90.958,60 euros au titre de ses préjudices matériels,

' 57.000 euros au titre du préjudice de jouissance lié consécutif aux désordres,

' 3.000 euros au titre du préjudice de jouissance durant la réalisation des travaux,

' 83.888 euros au titre de la perte de surface habitable du pavillon ;

JUGER que le pavillon vendu a fait l'objet d'une modification postérieure au dépôt du permis de construire et en contravention avec celui-ci ;

JUGER que l'agence a publié une annonce faisant état d'un pavillon de 180 m 2 , alors que le permis de construire a été accordé pour une surface habitable de 163 m 2 ;

JUGER que Madame [F] a été induite en erreur sur la surface habitable du pavillon qu'elle achetait en raison du comportement de Monsieur [S] et de l'erreur de l'agence immobilière ;

En conséquence :

CONDAMNER in solidum Monsieur [S] et la société Le Buisson Immobilier à payer à Madame [F] une somme de 83.888 euros au titre du préjudice consécutif à la perte de surface habitable ;

En tout état de cause :

CONDAMNER in solidum Monsieur [N] [S] et la SARL Le Buisson Immobilier à payer à Madame [F] une somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile pour la procédure de 1 ère instance ainsi qu'une somme de 4.000 euros pour la procédure d'appel, outre les entiers dépens de l'instance, lesquels comprendront les frais d'expertise judiciaire.

Par conclusions signifiées le 12 novembre 2019 la société Le Buisson Immobilier demande à la cour de :

Vu les articles 1240 et suivants du Code Civil,

Vu les pièces versées aux débats,

A titre principal,

CONFIRMER le jugement rendu le 28 mars 2019 par le Tribunal de grande instance d'EVRY (RG N°16/04043) en ce qu'il a :

Débouté Madame [U] [F] de ses demandes à l'encontre de la société Le Buisson Immobilier ,

Condamné Madame [U] [F] au paiement de la somme de 1.500 euros à la société Le Buisson Immobilier sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,

A titre subsidiaire,

DIRE ET JUGER que la société Le Buisson Immobilier n'a commis aucune faute,

DIRE ET JUGER que le préjudice invoqué par Madame [U] [F] n'est justifié ni dans son principe ni dans son montant,

DIRE ET JUGER qu'il n'existe aucun lien de causalité entre la prétendue faute de la société Le Buisson Immobilier et le préjudice de Madame [U] [F]

DEBOUTER Madame [U] [F] de sa demande de condamnation in solidum,

DIRE ET JUGER que ses demandes sont manifestement disproportionnées,

En tout état de cause,

DEBOUTER en conséquence Madame [U] [F] de l'ensemble de ses

demandes, fins et conclusions,

REJETER toutes fins, moyens et conclusions contraires,

CONDAMNER toute autre partie succombante, au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

La clôture était prononcée par ordonnance du 21 février 2023.

SUR QUOI

La cour,

1- Les désordres

L'expert judiciaire a constaté les désordres suivants :

- Le réseau de récupération des eaux de pluies a été mis en oeuvre par Monsieur [S] qui n'a pas la compétence requise, ces eaux se jettent dans l'égoût et le réseau mis en charge entraîne l'apparition d'eau dans le vide sanitaire sous la maison, laquelle s'infiltre dans le sol excavé de la cave dont le vide sanitaire n'est pas ventilé alors qu'une chaudière y est installée la mise en oeuvre du réseau de drainage n'est pas assurée de manière effective, certaines des canalisations ne se jettent pas dans le puisard.

Il conclut que tous ces points doivent être traités.

- Le chauffage : la chaudière a été remplacée par Monsieur [S], présence de boue dans le réseau, certains pointeaux de réglage des débits ne fonctionnent pas, des organes de protection du réseau sont préconisés.

L'expert judiciaire renvoie à la note de Monsieur [P] du 27 mars 2015, lequel n'a pas émis de doute sur la matérialité d'un réseau passant sous le dallage du séjour

- La ventilation des pièces humides : l'installation a été réalisée par Monsieur [S], la VMC n'est pas raccordée à l'extérieur et l'air usé est rejeté dans les combles fermés dans la maison les conduits d'extraction souples ne sont pas raccordés aux bouches, le réseau ne peut pas fonctionner et les détalonnages de portes donnant sur les pièces équipées de bouches de ventilation n'ont pas été réalisés.

- Le défaut de fonctionnement du réseau d'eau usée : la pente du réseau est notoirement insuffisante et discontinue. Monsieur [S] indique avoir réalisé lui-même ces travaux de plomberie, un devis de reprise doit être établi pour la reprise des pentes.

- La toiture et l'isolation : non conformité de la couverture au DTU 40.23/NFP 31-204 et aux règles du Cahier du CSTB n°1926 de mai 1984 : pente inadaptée au type de tuile posées de l'ordre de 14% alors qu'on devrait mesurer 35 % au moins, absence de châtière de ventilation et de ventilation sous-toiture, défaut de passage d'air entre l'isolant thermique et le toit, non perméabilité à l'air de la sous-couche entraînant un risque de pourriture des bois, vérification et note de calcul de l'isolation du pavillon non réalisée selon la RT 2005, réalisation de la noue non conforme car " bricolée par Monsieur [S]" et suppléée par des enduits et mastics visant à endiguer le débordement permanent de noue sur ses rives, défaut de réalisation du solin sur raccord au refend litigieux en salon

- Robinetterie de douche : installation instable

- Instabilité des marches : désordres apparents lors de la vente non retenus par l'expert

- Electricité : désordre sans occurrence régulière ni répétition, non retenu par l'expert judiciaire

- Fissures dans le séjour sur le mur de refend et la chambre d'aile liées au défaut de réalisation de la couverture et au défaut du solin qui pousse sur le refend et crée une fissuration

- Instabilité des marches de l'escalier de la cave : non décrit dans l'assignation, désordre non retenu par l'expert judiciaire.

L'expert judiciaire conclut : ' Tous les désordres allégués proviennent de défaut de conception, d'absence de connaissance du bâtiment, d'absence de réflexion sur les ouvrages

à concevoir et à bâtir. En phase de chantier, on constate une série de défauts de mise en oeuvre résultant de méconnaissance des techniques des règles de l'art.

Ces désordres allégués correspondent à des ouvrages relevant du clos et du couvert pour certains et à leur conception. Ces défauts apparurent immédiatement assurément après leur réalisation.

Monsieur [S], en tant que concepteur et réalisateur du pavillon ne pouvait pas méconnaître les désordres allégués, à partir de l'instant où il vécut dans son

pavillon. Et a tenté de les corriger à l'occasion de la vente à Madame [F] ( par exemple en remplaçant la chaudière alors que l'origine du sinistre se trouve dans les organes de réglage du plancher chauffant(...)'

En page 12 de son rapport l'expert conclut : "Monsieur [S] n'était pas compétent pour réaliser ses ouvrages ni pour réparer les conséquences des désordres apparaissant(...)

Les ouvrages ci-dessous rendent le pavillon impropre à sa destination :

- ventilation mécanique non raccordée

- chauffage non entretenu et réseau embourbé

- réseau d'assainissement Eaux Pluviales non étanche

- couverture sans ventilation induisant un vieillissement accéléré et une isolation thermique sacrifiée

Désordres par défaut de réalisation

- canalisation des eaux usées en sous-sol

- fixation des canalisations de la douche"

L'expert ajoute in fine cette remarque :

"Monsieur [S] a régularisé en urgence une déclaration d'achèvement de travaux règlementaire selon le code de la construction le 23 août 2013 avant la vente du 29 août 2013. Ce document ne reflète pas les surfaces construites et vendues le 29 août 2013 à Madame [F] car il n'intègre pas les surfaces hors oeuvre déclarées achevées, la surface du garage que Monsieur [S] a transformé en surface habitable ( chambre + salle de bains) SFON ( sic) du permis de construire : 163 m2 + un garage de 42,84 m2 Déclaration d'achèvement des travaux : SHON 165 m2 or le garage est devenu un espace de vie.

L'agence immobilière Le Buission Immobilier et le notaire ne semblent pas s'être assurés de la conformité du permis de construire du pavillon dont ils assuraient la cession, le pavillon ayant été modifié assurément moins de 10 ans après l'obtention du permis de construire et en cours de construction. Transformation du garage en pièce à vivre : chambre et salle d'eau, chaufferie dans un vide sanitaire."

2-La responsabilité décennale du vendeur

Le jugement a retenu au visa des conclusions de l'expert judiciaire la responsabilité décennale de Monsieur [S], vendeur après achèvement de l'immeuble, estimant que la réception des travaux peut se déduire, en l'absence de procès-verbal de réception, du fait que Monsieur [S] n'a pu qu'accepter les travaux qu'il a réalisés en considérant la maison achevée, la prise de possession alléguée en 2002 ne pouvant se déduire de sa propre déclaration établie tardivement en 2013 pour les besoins de la vente ni des factures de consommation d'énergie au demeurant faibles à cette époque témoignant que les abonnements étaient manifestement souscrits pour les besoins du chantier.

Le jugement en déduit que Monsieur [S] échoue à rapporter la preuve de la date de réception des travaux et par conséquent de l'expiration du délai de garantie décennale au moment de l'assignation en référé ce dont il a inféré la recevabilité de l'action au titre de la garantie décennale écartant la force probante de l'expertise amiable non contradictoire à l'égard de Madame [F] soulignant que les divergences de vue n'ont pas été soumises à la contradiction de l'expert judiciaire. Se fondant sur les conclusions de ce dernier, le jugement retient le caractère décennal des infiltrations d'humidité, du dysfonctionnement du chauffage, du défaut de ventilation de la maison, du défaut de pente du réseau d'eau usée, du défaut de conception de la couverture et des fuites provenant des noues. Il a écarté le désordre allégué de la robinetterie au motif de son caractère apparent et la réalité des infiltrations non établie.

Monsieur [S] soutient à l'appui de son appel que si la déclaration d'achèvement des travaux a bien été déposée à l'administration fiscale le 23 août 2013, les travaux ont été achevés le 25 août 2002 comme indiqué dans ladite déclaration, date corroborée par les déclarations des témoins, les factures de consommation d'eau et d'énergie établissant une prise de possession et une réception tacite à compter de cette date.

Il en infère que le jugement doit être infirmé en ce qu'il a déclaré non forclose l'action en garantie décennale.

Il affirme que l'humidité de la cave ne la rend pas impropre à sa destination, que le défaut de ventilation était visible et le défaut d'évacuation des eaux usées lié à l'utilisation par Madame [F] d'une machine à laver d'une capacité de 8 kg au lieu de 5 kg.

Madame [F] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a déclaré non forclose l'action en garantie décennale au motif pris du caractère non probant des éléments produits, de la tardiveté de la déclaration d'achèvement des travaux établie en 2013 par l'appelant pour les besoins de la vente lequel avait tout intérêt à dater l'achèvement des travaux à une date antérieure de plus de 10 ans cependant que Monsieur [S] s'est toujours refusé à communiquer quelques pièces que ce soit : taxe foncière, attestation d'assurance habitation de nature à dater l'achèvement des travaux.

Par référence aux constatations et conclusions de l'expert judiciaire elle sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a statué sur les travaux de reprise des désordres évalués à la somme de 89 018,80 euros soulignant le caractère fantaisiste des avis du sapiteur amiable mandaté par Monsieur [S] dont les constatations n'ont pas été soumises à l'expert judiciaire.

Réponse de la cour

Les constatations de l'expert judiciaire ne sont pas utilement contredites par les 12 attestations d'amis et/ou membres de la famille de Monsieur [S] qui affirment dans des termes identiques n'avoir pas constaté lors de leur venue dans la maison de Monsieur [S] de dysfonctionnement ou d'éléments montrant des nuisances particulières, les désordres litigieux relevant en effet soit des techniques de construction ( mise en euvre de la charpente, couverture non ventilée, réseau de récupération des eaux de pluie, canalisation en sous sol ) soit de la mise en oeuvre d'équipement nécessaire à l'habitabilité des lieux (ventilation et chauffage) non décelables par des visiteurs profanes.

Les observations de Monsieur [G] [O], expert mandaté par Monsieur [S] qui reprend et analyse les constatations de l'expert judiciaire dans un rapport établi le 18 juillet 2016 pour en minimiser les conséquences n'ont pas été réalisées de manière contradictoire à l'égard de l'expert et des parties, quand il eût été aisé pour Monsieur [S] de se faire assister au cours des opérations d'expertise par ce technicien dont les dires auraient pu utilement être débattus. Ce rapport d'analyse établi unilatéralement et non contradictoire n'étant corroboré par aucun autre élément doit donc être écarté.

Les désordres décrits constituent des vices graves liés à des défauts d'exécution et de mise en oeuvre antérieurs à la vente imputables à Monsieur [S] qui a vendu après achèvement une maison dont l'expert judiciaire indique sans être contredit par l'appelant que celui-ci a assuré la conception et la réalisation pour la très grande majorité des ouvrages dont ceux affectés des malfaçons litigieuses.

Les dispositions de l'article 1792 du Code civil énoncent que : "Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.

Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère."

Selon les dispositions de l'article 1792-1 du Code civil : "Toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire est réputé constructeur de l'ouvrage."

Selon les dispositions de l'article 1792-4-1 : " Toute personne physique ou morale dont la responsabilité peut être engagée en vertu des articles 1792 à 1792-4 du présent code est déchargée des responsabilités et garanties pesant sur elle, en application des articles 1792 à 1792-2, après dix ans à compter de la réception des travaux ou, en application de l'article 1792-3, à l'expiration du délai visé à cet article.

L'article 1792-6 alinéa 1 du Code civil précise que : " La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement."

Il est jugé qu'en l'absence de procès-verbal de réception, la réception tacite résulte de la volonté non équivoque du maître de l'ouvrage d'accepter l'ouvrage, avec ou sans réserve.

La déclaration d'achèvement des travaux régularisée tardivement par Monsieur [S] le 23 août 2013 alors que la vente a été réitérée le 30 août 2013, mentionne une date d'achèvement des travaux au 25 août 2002 qui correspond aux énonciations de l'acte authentique de vente selon lesquelles la construction a été édifiée sur le terrain acquis par Monsieur [S] selon permis de construire délivré le 10 avril 2001.

La date d'achèvement des travaux est corroborée par la facture d'électricité du 21 juillet 2003 qui fait état d'une consommation constante depuis le mois de septembre 2002, régularisée au mois de janvier 2003 puis à nouveau pour les mois de mars à mai 2003.

Elle est également étayée par la facture de consommation d'eau qui établit le comparatif de l'index de consommation entre le mois de janvier 2003 et le mois d'avril 2003.

Monsieur [S] a donc construit sa maison sur la période du mois d'avril 2001 au mois d'août 2002. Il en a pris possession de manière univoque au 25 août 2002 à l'achèvement des travaux qui marque le point de départ de la garantie décennale due par le vendeur après achèvement. Il en résulte que le délai décennal expirait le 25août 2012 à minuit soit antérieurement à la signature du compromis de vente intervenue le 22 mai 2013.

Contrairement à ce qui a été jugé, l'action de Madame [F] fondée sur les dispositions des articles 1792 et suivants du Code civil est donc forclose.

De ce chef le jugement sera infirmé.

3- La garantie des vices cachés

Monsieur [S], au rappel que l'acte authentique de vente exclut expressément la garantie des vices cachés le vendeur n'étant pas un professionnel du bâtiment, soutient que celle-ci n'est pas applicable au regard du caractère apparent des désordres, ( déclipsage des colliers de maintien) de leur absence d'antériorité à la vente ( l'épaisseur de la pose de la laine de verre règlementée en 2005) ou de leur imputabilité à l'acquéreur ( le défaut de pente du réseau usé du lave linge, le réseau de chauffage et le réseau d'eaux pluviales non entretenus par Madame [F]), reproche à l'expert judiciaire de n'avoir pas tenu compte de l'avis du technicien mandaté par Monsieur [S] qui a relevé le peu d'attention porté au bien lors de ses deux visites par Madame [F] alors que le défaut de raccordement de la ventilation était visible tout comme les infiltrations en toiture et les regards extérieurs. Il demande que soient également écartés les dommages non apparents qui ne causent aucun désordre : défaut de pose de l'écran de pluie, pose et dépose de la laine de verre, ventilation sous toiture, changement de velux, alimentation de la douche.

Madame [F] oppose que la clause d'exclusion de la garantie des vices cachés visée dans l'acte authentique de vente ne peut trouver application au regard de l'exception stipulée lorsque le vendeur se comporte comme un professionnel sans en avoir les compétences ou s'il n'a pas révélé les vices dont il avait connaissance or, Monsieur [S] en avait nécessairement connaissance puisqu'il a entrepris de construire lui-même le pavillon sans en avoir la compétence ainsi que l'expert judiciaire l'a expressément indiqué. Ayant vendu un bien immobilier qu'il a édifié Monsieur [S] est donc un professionnel .

Les désordres contrairement à ce que soutient Monsieur [S] ont été tous datés par l'expert judiciaire antérieurement à la vente et le tribunal doit être suivi en ce qu'il n'a pas retenu la force probante des attestations alors que la quasi totalité des désordres se situe dans les pièces que des invités n'ont pas nécessairement l'occasion de visiter : salles de bains, cave, chambre et couverture.

Réponse de la cour

Selon les dispositions de l'article 1641 du Code civil : " Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus."

Les dispositions de l'article 1648 alinéa 1 du Code civil précisent que : " L'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice."

La clause intitulée Etat de l'Immeuble en page 9 de l'acte authetique de vente énonce : " L'Acquéreur prendra l'immeuble sous réserve des déclarations faites et des garanties consenties dans l'acte par le Vendeur dans l'état où il se trouve au jour de l'entrée en jouissance sans garantie de la part de ce dernier en raison des vices apparents ou cachés dont le sol, le sous-sol et les ouvrages s'ils existent pourraient être affectés (...)

Le Vendeur sera néanmoins tenu à la garantie des vices cachés s'il a la qualité de professionnel de l'immobilier ou de la construction ou s'il s'est comporté comme tel sans en avoir les compétences professionnelles ou encore s'il est prouvé qu'il n'a pas révélé des vices cachés connus de lui.

Monsieur [S] a construit les ouvrages affectés de désordres ainsi qu'il a été vu plus haut sans avoir les compétences professionnelles requises et s'est donc comporté comme un professionnel de la construction.

Les désordres relevés par l'expert sont des vices graves, non décelables par l'acquéreur profane dans le domaine de la construction, antérieurs à la vente. En effet dans un courrier adressé à Madame [F] dont celle-ci lui a accusé réception le 19 novembre 2013, Monsieur [S] indique avoir procédé à des travaux de peinture dans l'entrée, le salon la salle à manger avant la vente, ce qui explique que les traces de moisissures constatée dans le procès-verbal de l'huissier le 18 décembre 2013, n'étaient pas visibles lors des visites du bien au mois de mai 2013 par Madame [F].

Ces désordres sont à l'origine d'infiltrations récurrentes par la toiture du fait de la non conformité des pentes dont la noue ne canalise pas correctement les eaux de ruissellement, de l'inefficience du réseau d'évacuation des eaux usées en raison d'une pente insuffisante ou inversée, de l'absence de ventilation sous les combles et du défaut de chauffage ensuite de l'embouage des canalisations que rien ne permet d'imputer à un défaut d'entretien de l'acquéreur puisque Madame [F] a signalé cette impossibilité de mise en chauffe à Monsieur [S] dès le 3 novembre 2013 alors qu'elle était entrée dans les lieux le 30 août dans un temps très proche de la vente.

Monsieur [S], vendeur après achèvement de l'immeuble qu'il a construit, est donc tenu à la garantie des vices cachés à l'égard de l'acquéreur Madame [F] conformément à la clause stipulée dans l'acte authentique.

4- Les préjudices

Monsieur [S] demande à titre infiniment subsidiaire la prise en compte des estimations du sapiteur qu'il a mandaté et la réduction à de plus justes proportions des travaux des travaux de reprise des infiltrations de la toiture, du défaut de pente du réseau d'eaux usées du lave-linge, du drainage périphérique et du chauffage.

Il sollicite la confirmation du jugement concernant les dommages immatériels.

Madame [F] demande la confirmation du jugement pour son préjudice matériel et son infirmation en ce qu'il a limité son préjudice de jouissance. Elle fait valoir qu'elle occupe un pavillon constamment inondé et n'a pu faire les travaux ne disposant pas des moyens financiers pour cela. Elle sollicite l'infirmation du jugement qui a limité son indemnisation à la somme de 500 euros au motif que ceux-ci ne génèreront qu'une simple gêne ponctuelle alors que son préjudice perdure. Elle demande à la cour de le fixer à la somme de 500 euros par mois depuis 9 ans et 6 mois.

Réponse de la cour

4-1 le préjudice matériel

Selon les dispositions de l'article 1645 du Code civil : "Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur."

Madame [F] limite son action à la seule indemnisation de ses préjudices.

Les observations non contradictoires du technicien mandaté par Monsieur [S] ayant été écartées, aucun élément ne vient contredire les évaluations de l'expert qui a chiffré le préjudice matériel ainsi qu'il suit :

- réfection de la toiture : 66 971,25 euros TTC

- remise en peinture du salon : 8 646 euros TTC

- mise en conformité de la VMC : 2 814,03 euros TTC

- détalonnage des portes : 361,90 euros TTC

- chauffage : 2 287,14 euros TTC

- canalisations eaux de pluie et caniveaux : 5 926,03 euros TTC

- réseaux rampants des eaux usées : 2 012,45 euros TTC.

- frais d'investigation : 1 939,80 euros TTC

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a alloué à Madame [F] en réparation de son préjudice matériel la somme de 90 958,60 euros TTC.

4-2 Le préjudice immatériel

A l'appui de sa demande au titre du préjudice de jouissance Madame [F] ne produit aucun élément, constat ou attestations, afin de caractériser la gêne qu'elle subit depuis le mois de septembre 2013 ensuite des désordres.

Cependant au vu des seules constatations de l'expert il convient de fixer le préjudice de jouissance à 100 euros par mois depuis le mois de novembre 2013 soit 12 500 euros au jour du prononcé de l'arrêt.

Du chef du quantum de ce préjudice le jugement sera donc infirmé.

4-3 La surface perdue

Le tribunal a écarté le préjudice allégué par Madame [F] du fait d'une perte de surface habitable de 20 m2 du fait de la différence entre la surface hors oeuvre nette figurant au permis de construire et la surface habitable du bien vendu à défaut pour Madame [F] de caractériser le dommage dont elle sollicite réparation.

Monsieur [S] sollicite le rejet de la demande au titre de la perte de surface habitable en l'absence d'élément nouveau fourni à hauteur d'appel et la confirmation du jugement.

Madame [F] sollicite l'infirmation du jugement qui n'a pas pris en compte son nécessaire préjudice ensuite de la surface réellement acquise de 160 m2 alors qu'il lui a été présenté comme ayant une surface habitable de 180 m2.

La Sarl Le Buisson Immobilier fait valoir que la différence de surface invoquée n'a nullement vicié le consentement de Madmae [F] et ne lui a causé aucun préjudice.

Réponse de la cour

L'annonce de présentation de l'immeuble en vente par La Sarl Le Buisson Immobilier présente au prix de 795 000 euros " une superbe maison d'architecte récente dont un séjour de 52 m2 sur une ensemble paysagé d'environ 670 m2. La superficie totale du bien n'est pas indiquée.

Madame [F] a acquis selon le compromis de vente signé le 22 mai 2013 un ensemble immobilier [Adresse 1] d'une contenance totale de 511 m2 sans mention de la superfice intérieure, composé d'un sous-sol partiel, une entrée, buanderie, séjour double, cuisine américaine équipée, wc, salle de bains avec douche, 1 chambre, 1 garage double, à l'étage dégagement, deux chambres, 1 salle d'eau 1 wc, combles éclairées.

Le compromis précise que : " le permis de construire PC n° 9164501p7000 a été délivré le 10 avril 2001. Le vendeur déclare qu'il n'a pas de certificat de conformité, l'acquéreur déclare en être informé et accepte la maison en l'état."

L'acte authentique mentionne la même désignation de l'immeuble et y ajoute sa référence cadastrale [Cadastre 6] pour une surface de 00 ha 06 ares 06 ca.

Madame [F] a donc acquis aux termes de l'acte authentique un bien d'une superficie de 606 m2 supérieure par conséquent à celle annoncée au compromis.

L'expert a relevé que la surface hors oeuvre nette du permis de construire créée en m2 est de 165 m2 et n'intègre pas la transformation du garage en pièce à vivre alors que celui-ci était initialement prévu pour une surface de 42,84 m2.

Cependant Madame [F] ne remet pas en cause la matérialité du garage qui figure dans la désignation du bien acquis tant dans le compromis que dans l'acte authentique quand il a été vu qu' aucun élément ne vient étayer le fait qu'elle aurait acquis une surface de 160 m2 alors que le bien lui aurait été présenté comme ayant une surface habitable de 180 m2.

Par conséquent le jugement qui a retenu que Madame [F] ne caractérise pas le dommage qu'elle invoque et l'a déboutée de cette demande sera confirmé.

5- La responsabilité de l'agence immobilière

Le jugement, au visa de l'article 1382 du Code civil, a écarté la responsabilité de l'agence immobilière dont le devoir d'information et de conseil est limité à ce dont elle a connaissance au constat que la maison étant conforme à l'annonce et l'agent immobilier n'étant pas un professionnel du bâtiment, celui-ci ne pouvait déceler les vices non apparents pour un profane.

Madame [F] sollicite l'infirmation du jugement de ce chef et la condamnation in solidum de l'agence immobilière à réparation, au rappel que l'annonce rédigée par l'agence immobilière faisait état d'une superbe maison d'architecte avec de très belles prestations d'une superfice de 180 m2 avec le raccordement au tout à l'égoût alors que l'immeuble a été contruit par Monsieur [S], comporte des désordres affectant les réseaux d'évacuation des eaux usées et que l'agence en sa qualité de professionnelle de la vente d'immobilier avait l'obligation de vérifier la conformité du bien avec les mentions de son annonce et d'attirer l'attention de l'acquéreur sur les nombreux désordres et non conformités du pavillon. Elle souligne que la responsabilité de l'agence est nécessairement engagée laquelle ne s'est pas assurée de la surface habitable alors que si elle avait correctement examiné le permis de construire elle se serait aperçue que la surface habitable n'était que de 160 M2 et que le garage avait été transformé en habitation.

La Sarl Le Buisson Immobilier rappelle que dans le cadre d'un mandat, le mandataire n'est tenu que d'une obligation de moyen et la mise en cause de l'agence suppose, sur le fondement de l'article 1240 du Code civil, que soient réunies les trois conditions relatives à la constatation d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité. Elle soutient n'avoir commis aucune faute au regard de la légèreté blâmable dont a fait preuve Madame [F] en ne visitant le bien que deux fois, cependant que les photographies produites attestent des très belles prestations offertes par l'immeuble tandis que les désordres relevés par l'expert judiciaire sont de deux types , apparents et parfaitement visibles et ceux relevant d'un défaut de conformité. Elle souligne avoir spécifié dans le compromis l'absence de certificat de conformité et l'acceptation de la maison en l'état par l'acquéreur qui a déclaré prendre le risque de signer le compromis sans attendre le certificat de condormité ou l'attestation du maire certifiant la conformité des travaux avec le permis demandé.

A titre subsidiaire sur le préjudice elle observe qu'il ne pourrait s'agir que d'une perte de chance d'acquérir à un prix moins élevé, le préjudice de jouissance n'étant fondé sur aucun élément tangible.

Elle soutient en tout état de cause l'inexistence du lien de causalité entre la faute et le préjudice allégué qui n'est dû qu'au manquement du vendeur à son devoir de loyauté.

N'étant pas coauteur du dommage liés aux vices cachés dont seul Monsieur [S] est tenu elle conclut enfin au rejet de la demande de condamnation in solidum.

Réponse de la cour

La Sarl Le Buisson Immobilier a reçu de Monsieur [S] un mandat de vendre sans exclusivité le bien situé [Adresse 1] à [Localité 4] le 21 juin 2012.

A l'égard de l'acquéreur tiers au mandat, le mandataire répond de ses fautes sur le fondement des dispositions de l'article 1382 du Code civil dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur de l'Ordonnance du 10 février 2016 applicable au litige.

Les désordres retenus à l'appui de l'action estimatoire ne sont pas apparents pour un profane de la construction et l'agent immobilier dont la compétence est circonscrite à la vente ne peut être tenu pour responsable des vices cachés inhérents à la construction de l'ouvrage dans l'ignorance desquels il a été tenu par son mandant cependant qu'aucune faute ne peut lui être imputée relativement à son obligation d'information quant à la désignation du bien.

Partant le jugement qui a débouté Madame [F] de sa demande de condamnation in solidum à l'encontre de l'agence immobilière la Sarl Le Buisson Immobilier sera donc confirmé.

6- Les frais irrépétibles et les dépens

Le tribunal a condamné Monsieur [S] aux dépens outre le versement à Madame [F] de la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles et a condamné Madame [F] à verser à la Sarl Le Buisson Immobilier, une somme de 1 500 euros.

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement de ces chefs et, y ajoutant, à condamner Monsieur [S] seul, à régler au titre des frais irrépétibles, à Madame [F] une somme de 2 500 euros et à la Sarl Le Buisson Immobilier, une somme de 1 500 euros outre les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement seulement en ce qu'il a statué sur le préjudice de jouissance :

Statuant à nouveau de ce seul chef,

CONDAMNE Monsieur [N] [S] à régler à Madame [U] [F] une somme de 12 500 euros ;

CONFIRME le jugement par motifs substitués pour le surplus de ses dispositions ;

Y ajoutant,

CONDAMNE Monsieur [N] [S] aux entiers dépens et à régler seul, au titre des frais irrépétibles :

- à Madame [U] [F] une somme de 2 500 euros

- à la Sarl Le Buisson Immobilier une somme de 1 500 euros.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 19/10314
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;19.10314 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award