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04/04/2024 | FRANCE | N°23/14472

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 04 avril 2024, 23/14472


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 04 AVRIL 2024



(n° 146 , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/14472 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIFL4



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juillet 2023 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS CEDEX 17 - RG n° 22/57533





APPELANTE



S.A.R.L. DYMA FEDO, agissa

nt en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 9]



Ayant comme avocat postulant Me Stéphane FERTIER de la SELARL JRF AV...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 04 AVRIL 2024

(n° 146 , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/14472 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIFL4

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Juillet 2023 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS CEDEX 17 - RG n° 22/57533

APPELANTE

S.A.R.L. DYMA FEDO, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 9]

Ayant comme avocat postulant Me Stéphane FERTIER de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075

Représenté par Me Nathalie SAILLANT-LAURENT, substituée par Me Victorine OYER à l'audience

INTIMÉS

M. [N] [Y]

[Adresse 8]

[Localité 10]

M. [D] [Y]

[Adresse 7]

[Localité 11]

Mme [U] [Y] épouse [I]

[Adresse 1]

[Localité 6]

Ayant comme avocat postulant Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34

Représenté par Me Vincent SABLIER à l'audience

Syndic. de copro. [Adresse 2] représenté par son syndic, le Cabinet BARRA-NACERI, RCS de PARIS sous le n°430 227 439, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Agnès LEBATTEUX SIMON de la SCP ZURFLUH - LEBATTEUX - SIZAIRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0154, substitué par me Charlotte d'ASPE à l'audience

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 29 Février 2024, en audience publique, Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre, ayant été entendu en son rapport dans les conditions prévues par l'article 804, 805 et 905 du code de procédure civile, devant la cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Laurent NAJEM, Conseiller,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Jeanne BELCOUR

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

MM. [N] et [D] [Y] ainsi que Mme [Y] (les consorts [Y]) sont propriétaires indivis d'un local commercial dans un immeuble en copropriété situé [Adresse 2]), constituant le lot n°8.

Par acte sous seing privé du 9 février 2021, ils ont donné ce local à bail à la société Dyma Fedo pour y exploiter une activité de restauration, traiteur, vente sur place et à emporter, épicerie, glacier et vente de crêpes. Cette dernière a procédé à des travaux de réfection et d'aménagement de ce local en prévision de son ouverture au public.

Soutenant que ces travaux affectent les parties communes et la façade de l'immeuble sans avoir été autorisés, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] a, par acte du 20 octobre 2022, fait assigner les consorts [Y] et la société Dyma Fedo devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris, aux fins de voir :

- condamner solidairement les consorts [Y] et la société Dyma Fedo à :

* stopper immédiatement les travaux entrepris sans autorisation ;

* déposer les installations irrégulières, remettre en état la devanture du local commercial, tant en ce qui concerne sa couleur que l'apparence de ses vitres, ainsi qu'à supporter le coût des éventuelles dégradations faites à la façade de l'immeuble ce sous le contrôle et la surveillance de l'architecte de la copropriété, à leurs frais ;

* lui communiquer l'ensemble des documents relatifs aux travaux réalisés sur le plancher haut du sous-sol de l'immeuble, à savoir :

la description complète des travaux ;

le rapport de mission et l'étude de charges qui ont été réalisés par le bureau de contrôle missionné par la société Dyma Fedo au sujet de l'état des structures ;

les devis et les factures émises par les entreprises ayant réalisé les travaux ;

les attestations d'assurance DO avec extension aux existants ;

les attestations d'assurance des entreprises intervenues ;

- assortir ces condamnations d'une astreinte de 500 euros par jour de retard à l'issue d'un délai de sept jours à compter de la signification de l'ordonnance à intervenir dont le juge des référés se réservera la liquidation ;

- condamner solidairement les consorts [Y] et la société Dyma Fedo aux dépens, comprenant notamment le coût de l'assignation et des constats d'huissier, ainsi qu'à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires a sollicité en outre une mesure d'expertise.

Les consorts [Y] ont conclu au débouté et en tout état de cause à la garantie de la société Dyma Fedo, et à la limitation de la mission de l'expert aux travaux déjà réalisés si une mesure d'expertise était ordonnée, sur laquelle ils ont émis protestations et réserves.

La société Dyma Fedo n'a pas comparu.

Par ordonnance réputée contradictoire du 7 juillet 2023, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :

ordonné à la société Dyma Fedo de cesser les travaux affectant les parties communes ou la façade de l'immeuble entrepris sans autorisation, dans le délai de 48 heures à compter de la signification des présentes et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 60 euros par jour de retard durant six mois ;

ordonné à la société Dyma Fedo de procéder à la remise en état des parties communes et de la façade de l'immeuble, en ce compris la réfection de la devanture du local (couleur vitrine), la dépose des installations qui s'y trouvent, la suppression de l'évacuation créée dans le local poubelles, la suppression des WC installés en rez-de-chaussée avec raccordement sur une descente inutilisable, sous la surveillance et le contrôle de l'architecte de la copropriété, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente ordonnance, puis sous astreinte provisoire de 60 euros par jour de retard durant six mois ;

dit n'y avoir lieu pour le juge des référés de se réserver la liquidation éventuelle de ces astreintes ;

débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de communication de pièces telle que dirigée vers la société Dyma Fedo ; débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de mesures de remise en état et de communication de pièces telles que dirigées vers les consorts [Y] ;

donné acte aux consorts [Y] de leurs protestations et réserves ;

ordonné une mesure d'expertise ;

désigné pour y procéder : M. [O] [T] avec mission de :

* se faire préciser les liens contractuels entre les divers intervenants ;

* relever et décrire les travaux visés expressément dans l'assignation et affectant l'immeuble litigieux, ainsi que les non conformités et/ou inachèvements allégués au regard des documents contractuels liant les parties ;

* en détailler l'origine, les causes et l'étendue, et fournir tous éléments permettant à la juridiction de déterminer à quels intervenants ces désordres, malfaçons et inachèvements sont imputables, et dans quelles proportions ;

* donner son avis sur les conséquences de ces désordres, malfaçons et inachèvements quant à la solidité, l'habitabilité, l'esthétique du bâtiment, et, plus généralement quant à l'usage qui

peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination ;

*dire si les travaux ont été conduits conformément aux documents contractuels et aux règles de l'art;

*à partir de devis d'entreprises fournis par les parties, sur proposition, le cas échéant du maître d'oeuvre de leur choix, donner un avis sur la ou les solutions appropriées pour remédier aux désordres entachant l'ouvrage et sur le coût des travaux utiles ;

* donner son avis sur les préjudices et coûts induits par ces désordres, malfaçons, inachèvements ou non conformités et sur leur évaluation, dès lors que ces demandes sont présentées de manière motivée ;

* rapporter toutes autres constatations utiles à l'examen des prétentions des parties ;

* donner, le cas échéant, son avis sur les comptes entre les parties ;

condamné la société Dyma Fedo aux dépens ;

condamné la société Dyma Fedo à payer au syndicat des copropriétaires, d'une part, et aux consorts [Y], d'autre part, la somme de 2.000 euros à chacun par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 16 août 2023, la société Dyma Fedo a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 27 février 2024, elle demande à la cour, au visa de l'article 835 du code de procédure civile, de :

la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes ;

infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle n'a pas fait droit à ses demandes ;

confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle n'a pas fait droit à la demande de communication de pièces telles que dirigées contre elle ;

Statuant à nouveau :

Sur l'absence de situation constitutive de trouble manifestement illicite :

juger que le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic ne justifie pas d'une violation flagrante et évidente d'une règle de droit ;

juger que le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic n'établit pas avec évidence une atteinte indiscutable à l'harmonie de l'immeuble ;

juger que le trouble manifestement illicite rapporté par le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic n'est pas caractérisé ;

débouter le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic de sa demande de cessation de travaux et de remise en état ;

Sur la demande de remise en état des travaux affectant les parties communes et sa demande d'expertise :

juger qu'elle a communiqué l'ensemble de la documentation relative aux travaux effectués ;

juger les travaux opportuns puisque nécessaires à la pérennité du bien et réalisés en conformité avec les règles applicables ;

débouter le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic de sa demande de cessation de travaux et de remise en état ;

débouter le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic de sa demande d'expertise ;

En tout état de cause :

rejeter toutes les demandes, fins et conclusions du syndicat des copropriétaires représenté par son syndic ;

rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de l'indivision [Y] ;

condamner le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner le syndicat des copropriétaires représenté par son syndic en tous les dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera effectué par la SELARL JRF&associés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir pour l'essentiel :

- qu'il n'est pas établi par le syndicat des copropriétaires, avec l'évidence requise en référé, une atteinte indiscutable à l'harmonie de l'immeuble alors qu'elle-même justifie par un constat d'huissier que la devanture et les vitrines n'ont pas été modifiées ;

- que s'agissant des travaux de rénovation de gros oeuvre portant sur la structure du plancher haut du sous-sol, les demandes de remise en état et d'expertise, auxquelles il a été fait droit, ne peuvent être effectuées en même temps ; qu'il s'agit de travaux qui s'imposaient pour remédier au mauvais état des structures métalliques, poutres et fers du plancher ; que le bureau d'études qu'elle a mandaté a attesté de la conformité des travaux réalisés, la désignation d'un expert étant par conséquent inutile ;

- que la demande de communication de pièces sur les futures conditions et installations d'exploitation est injustifiée et d'exécution impossible, alors que le local est en travaux et inexploité, la réalisation des travaux étant bloquée par la copropriété, que le syndicat a été informé de ce que l'activité envisagée ne nécessiterait pas de cuisson sur place de sorte que l'installation d'une extraction n'est pas à l'ordre du jour et que compte tenu de l'attitude très hostile de la copropriété, la société Dyma Fedo a décidé de ne pas exploiter de restaurant.

Dans ses dernières conclusions déposées et notifiées le 19 février 2024, le syndicat des copropriétaires demande à la cour, au visa des articles 145, 835 du code de procédure civile, 25-b de la loi du 10 juillet 1965, 1240, 1242 du code civil et L. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution, de :

confirmer l'ordonnance rendue le 7 juillet 2023 en ce qu'elle a :

* ordonné à la société Dyma Fedo de cesser les travaux affectant les parties communes ou la façade de l'immeuble entrepris sans autorisation, dans le délai de 48 heures à compter de la signification des présentes et, passé ce délai, sous astreinte provisoire de 60 euros par jour de retard durant six mois ;

* ordonné à la société Dyma Fedo de procéder à la remise en état des parties communes et de la façade de l'immeuble, en ce compris la réfection de la devanture du local (couleur vitrine), la dépose des installations qui s'y trouvent, la suppression de l'évacuation créée dans le local poubelles, la suppression des WC installés en rez-de-chaussée avec raccordement sur une descente inutilisable, sous la surveillance et le contrôle de l'architecte de la copropriété, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente ordonnance, puis sous astreinte provisoire de 60 euros par jour de retard durant six mois ;

* ordonné une mesure d'expertise ;

infirmer l'ordonnance de référé rendue le 7 juillet 2023 en ce qu'elle :

* l'a débouté de sa demande de communication de pièces relatives aux futures installations et conditions d'exploitation du local commercial telle que dirigée vers la société Dyma Fedo et les consorts [Y] ;

* l'a débouté de ses demandes de mesures de remise en état et de communication de pièces telles que dirigées vers les consorts [Y] ;

Statuant à nouveau :

condamner solidairement les consorts [Y] à la remise en leur état antérieur des parties communes et la façade de l'immeuble sur lesquels des travaux ont été réalisés sans autorisation préalable de l'assemblée générale ;

condamner solidairement les consorts [Y] à lui communiquer l'ensemble des documents relatifs aux futures installations et conditions d'exploitation du local commercial, s'agissant notamment des extracteurs d'odeurs, ainsi que le justificatif des autorisations obtenues auprès de la mairie de [Localité 5] ;

En tout état de cause :

condamner solidairement les consorts [Y] et la société Dyma Fedo à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner solidairement les consorts [Y] et la société Dyma Fedo aux entiers dépens, qui comprendront notamment le coût des constats d'huissier, avec distraction au profit de la SCP Zurfluh-Lebatteux-Sizaire et associés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Il expose essentiellement que les travaux ont été réalisés sans l'autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires et qu'ils affectent l'aspect extérieur de l'immeuble s'agissant de la devanture qui a été modifiée comme il résulte des constats d'huissier, ainsi que les parties communes s'agissant des travaux de rénovation du gros oeuvre portant sur la structure du plancher haut de la partie du local située au sous-sol, de la création d'un local poubelles à l'arrière du local commercial comportant un raccordement d'une évacuation d'eau avec mise en place d'un siphon, et de l'installation d'un WC au rez-de-chaussée du local commercial avec raccordement sur une canalisation commune ; que l'exécution de ces travaux sans autorisation suffit à caractériser un trouble manifestement illicite pour le syndicat, une attestation de conformité des travaux étant indifférente ; qu'en leur qualité de copropriétaires les consorts [Y] doivent être condamnés in solidum avec leur locataire à réaliser les travaux de remise en état ; qu'il est indispensable que la société Dyma Fedo soit contrainte de répondre aux demandes légitimes du syndicat s'agissant de la conformité du futur système d'extraction d'air, de fumées et de gaz brûlés qui sera implanté dans ses cuisines, alors qu'elle a loué le local commercial pour y exercer une activité précise qu'elle est parfaitement en mesure d'identifier, soutenant de mauvaise foi que ses plans ne seraient plus d'actualité sans pour autant éclairer le syndicat sur la nature de l'activité projetée ; qu'au vu de la réticence manifeste de la société Dyma Fedo et des consorts [Y] à justifier des précautions prises pour respecter la stabilité de l'immeuble et le sérieux des travaux, le syndicat n'a eu d'autre choix que de solliciter la désignation d'un expert, afin de pouvoir éventuellement demander réparation, cette mesure étant utile et nécessaire.

Dans leurs dernières conclusions déposées et notifiées le 22 novembre 2023, les consorts [Y] demandent à la cour, de :

confirmer l'ordonnance rendue le 7 juillet 2023 en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes de mesures de remise en état et de communication de pièces dirigées à l'encontre de l'indivision [Y] et condamné la société Dyma Fedo à payer à l'indivision [Y] une somme de 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire et reconventionnel, dans l'hypothèse où la cour condamnerait l'indivision [Y] envers le syndicat des copropriétaires à un titre quelconque :

condamner la société Dyma Fedo à relever et garantie indemne l'indivision [Y] de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre au titre des demandes formées par le syndicat des copropriétaires ;

rejeter toute demande formée à l'encontre de l'indivision [Y] ;

condamner toute partie succombante à verser à l'indivision [Y] une somme de

5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils font en substance valoir qu'étant dessaisis de la jouissance du local et de sa garde depuis sa mise à bail, ils sont dans l'impossibilité tant juridique que matérielle d'effectuer la remise en état ordonnée et que si toutefois ils devaient y être condamnés in solidum avec leur locataire, celle-ci devrait les garantir par application de l'article 11.4 du bail commercial qui interdit au preneur de faire dans les lieux loués aucune démolition ni construction et généralement des travaux touchant au gros oeuvre sans avoir obtenu les autorisations administratives et de copropriété nécessaires et sans l'autorisation écrite du bailleur, précisant n'avoir jamais été requis par la société Dyma Fedo pour autoriser les travaux litigieux, dont ils n'ont été informés que par le syndic.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 29 février 2024, avant l'ouverture des débats.

SUR CE, LA COUR

En application de l'article 835 du code de procédure civile, le juge des référés peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite découle de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

Selon l'article 25 b) de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, dont les dispositions sont d'ordre public, sont adoptées à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant l'autorisation donnée à certains copropriétaires d'effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l'aspect extérieur de l'immeuble, et conformes à la destination de celui-ci.

En l'espèce, le syndicat des copropriétaires reproche à la société Dyma Fedo d'avoir effectué, sans autorisation de l'assemblée générales des copropriétaires, les travaux suivants :

- la modification de la devanture de la boutique de la façade de l'immeuble,

- des travaux de rénovation de gros oeuvre portant sur la structure du plancher haut de la partie du local situé en sous-sol,

- la création d'un local poubelle à l'arrière du local commercial avec un raccordement d'une évacuation d'eau avec mise en place d'un siphon,

- l'installation d'un WC au rez-de-chaussée du local commercial avec raccordement sur une canalisation commune.

La matérialité de ces travaux n'est pas contestée, même si la société Dyma Fedo conteste avoir modifié l'aspect extérieur de la devanture, indiquant que la couleur blanche de celle-ci constitue un apprêt et que son intention est de remettre la peinture marron initiale, les travaux se trouvant toutefois suspendus en exécution de la décision de première instance.

Il résulte des procès-verbaux de constats versés aux débats et des photographies produites par les parties que la devanture a bien fait l'objet de travaux et qu'en l'état elle ne présente plus son aspect antérieur : des plaques de contreplaqué y ont un temps été apposées et une peinture blanche s'y trouve présente, l'expert judiciaire désigné en première instance relevant, sans sa note aux parties n°2 produite par la société Dyma Fedo, qu'il s'agit d'une couche de protection et de préparation du support, précisant cependant que dans le document qui lui a été communiqué, la devanture est prévue d'être modifiée.

Il apparaît donc bien, même si elle ne présente pas encore son aspect définitif, que la devanture a été modifiée et que les travaux réalisés en l'état portent atteinte à l'aspect extérieur de l'immeuble, alors qu'il est constant qu'ils n'ont pas fait l'objet d'une demande d'autorisation préalable de l'assemblée générale des copropriétaires, ce dont il résulte incontestablement pour le syndicat des copropriétaires un trouble manifestement illicite.

Il en est de même pour les autres travaux énumérés plus haut, qui incontestablement affectent des parties communes de l'immeuble à la lecture du règlement de copropriété, ce qui n'est d'ailleurs pas discuté, en ce qu'ils ont porté sur des canalisations communes et sur le plancher haut séparant la pièce du sous-sol de celle du rez-de-chaussée, lui aussi partie commune. L'utilité des travaux de gros oeuvre effectués sur ce plancher du fait de son mauvais état et leur conformité attestée par un bureau d'études mandaté par la société Dyma Fedo ne sont pas de nature à rendre les travaux licites, leur seule réalisation sans autorisation de l'assemblée générale des copropriétaires constituant une violation de la règle de droit constitutive d'un trouble manifestement illicite pour le syndicat des copropriétaires.

C'est donc à bon droit que le premier juge a retenu un tel trouble et qu'à titre de première mesure de remise en état, il a ordonné à la société Dyma Fedo de cesser les travaux litigieux sous 48 heures et passé ce délai sous astreinte de 60 euros par jour de retard.

C'est aussi à raison que le premier juge a fait droit à la demande d'expertise du syndicat des copropriétaires, certains des travaux réalisés étant susceptibles d'affecter la solidité de l'immeuble, dont le syndicat est responsable, ce dernier justifiant ainsi d'un motif légitime au sens de l'article 145 du code de procédure civile au prononcé de cette mesure d'instruction, laquelle est en outre utile à une remise en état effective et conforme aux règles de l'art.

Si la remise en l'état antérieur est seule à même de faire complètement cesser le trouble subi, elle doit l'être conformément aux préconisations de l'expert judiciaire et ne peut donc être imposée tant que les opérations de celui-ci sont en cours.

Il y a donc lieu, par infirmation de l'ordonnance entreprise sur ce point, de dire que la remise en état des parties communes et de la devanture du local devra être effectuée conformément aux préconisations de l'expert judiciaire, dans les trois mois du dépôt par ce dernier de son rapport définitif et passé ce délai sous astreinte courant selon les modalités précisées au dispositif.

L'ordonnance sera infirmée en ce qu'elle a mis l'obligation de remise en état à la charge de la seule locataire, les propriétaires devant en effet répondre de cette obligation envers le syndicat des copropriétaires. Les consorts [Y] seront donc condamnés à la remise en état in solidum avec la société Dyma Fedo.

L'ordonnance sera aussi infirmée en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de communication de pièces, ce dernier justifiant d'un motif légitime à connaître précisément l'activité que la société Dyma Fedo entend exercer dans les lieux et les installations que cette activité implique eu égard à la destination du bail (restauration, traiteur, vente sur place et à emporter, épicerie, glacier et vente de crêpes) et à la mention suivante qu'il contient dans son article 5 : « Il est précisé que le local commercial n'est pas, à ce jour, équipé d'une extraction ce dont le preneur est parfaitement informé. Le bailleur s'oblige à porter à l'ordre du jour d'une prochaine assemblée des copropriétaires de l'immeuble une résolution autorisant l'installation d'un système d'extraction (...) » Or, l'installation d'un extracteur pour les besoins d'une activité de restauration est de nature à affecter les parties communes, l'aspect extérieur de l'immeuble ainsi que les conditions de jouissance des autres copropriétaires. La cour fera donc droit à cette demande légitime du syndicat des copropriétaires, l'obligation de communication des pièces requises étant mise à la charge non seulement de la société Dyma Fedo mais aussi des consorts [Y], pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés.

Les consorts [Y] sont bien fondés à se voir garantis des condamnations au titre de la remise en état et de la communication des pièces en cas d'inexécution par la société Dyma Fedo de ses propres condamnations. Le bail fait en effet obligation au preneur de solliciter l'accord du syndicat des copropriétaires et de ses bailleurs avant d'effectuer des travaux de démolition, construction et généralement, des travaux touchant au gros oeuvre, or il n'est pas discuté que la société Dyma Fedo n'a pas non plus sollicité l'autorisation de ses bailleurs avant d'effectuer les travaux litigieux.

Le sort des frais et dépens de première instance a été exactement réglé par le premier juge.

Perdant en appel, la société Dyma Fedo sera condamnée aux dépens de cette instance et à payer au syndicat des copropriétaires ainsi qu'aux consorts [Y] une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient de préciser que les frais de constat de commissaire de justice sont inclus dans l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et non dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme la décision entreprise, sauf sur les modalités de la remise en état et en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande de communication de pièces et de ses demandes dirigées contre les consorts [Y],

Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,

Condamne in solidum les consorts [Y] et la société Dyma Fedo à :

- remettre en leur état antérieur les parties communes et la devanture de l'immeuble en se conformant aux préconisations de l'expert judiciaire, dans le délai de trois mois à compter du dépôt du rapport définitif de ce dernier et passé ce délai sous astreinte de 60 euros par jour de retard courant pendant un délai de trois mois passé lequel il pourra être à nouveau fait droit,

- communiquer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] l'ensemble des documents relatifs aux futures installations et conditions d'exploitation du local commercial, s'agissant notamment des extracteurs d'odeurs, ainsi que le justificatif des autorisations obtenues auprès de la mairie de [Localité 5] ;

Condamne la société Dyma Fedo à garantir les consorts [Y] de ces condamnations,

Condamne la société Dyma Fedo aux dépens de l'instance d'appel (n'incluant pas les frais de constat de commissaire de justice), dont distraction au profit de la SCP Zurfluh-Lebatteux-Sizaire et associés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Condamne la société Dyma Fedo à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 3.500 euros, aux consorts [Y] la somme de 2.500 euros,

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 23/14472
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;23.14472 ?
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