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04/04/2024 | FRANCE | N°22/16828

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 04 avril 2024, 22/16828


RÉPUBLIQUE FRANÇAIS

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7



ARRÊT DU 04 AVRIL 2024

(n° , 16 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/16828 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGPA4



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2022 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 21/00149





APPELANT

ETABLISSEMENT PUBLIC TERRITORIAL PLAINE COMMUNE

représenté par son Président en exercice, domicilié en cette qualité

audit siège

[Adresse 2]

[Localité 14]

représentée par Me Didier Guy SEBAN de la SELAS SEBAN ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0498 substitué à l'au...

RÉPUBLIQUE FRANÇAIS

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 04 AVRIL 2024

(n° , 16 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/16828 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGPA4

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 28 Juin 2022 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 21/00149

APPELANT

ETABLISSEMENT PUBLIC TERRITORIAL PLAINE COMMUNE

représenté par son Président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 14]

représentée par Me Didier Guy SEBAN de la SELAS SEBAN ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0498 substitué à l'audience par Me Florianne HERPIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P498

INTIMÉES

S.C.I. JEROME

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 11]

représentée par Me Audrey HINOUX de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 substituée à l'audience par Me Myriam HERTZ, avocat au barreau de PARIS, toque : C2379

DIRECTION DEPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DE LA SEINE SAINT DENIS - COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

Division Missions Domaniales

[Adresse 8]

[Localité 13]

représentée par Madame [S] [V], en vertu d'un pouvoir général

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 Février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Hervé LOCU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Hervé LOCU, Président

Madame Marie MONGIN, Conseillère

Madame Nathalie BRET, Conseillère

Greffier : Madame Dorothée RABITA, lors des débats

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, Président et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La SCI JEROME est propriétaire d'un bien immobilier situé [Adresse 12] à [Localité 16] sur la parcelle cadastrée U numéro [Cadastre 6], de 490 m².

Il s'agit d'un ensemble immobilier composé de huit logements et de deux locaux commerciaux, ainsi que d'un terrain arboré en fond de parcelle.

La SCI JEROME a adressé une déclaration d'intention d'aliéner ce bien au prix de 2'050'000 euros, avec en outre 50'000 euros TTC à titre de frais d'agence, à la mairie de [Localité 16] qu'il a réceptionnée le 8 avril 2021.

L'Etablissement Public Territorial PLAINE COMMUNE (ci-après dénommée EPT PLAINE COMMUNE), délégataire du droit de préemption a exercé son droit de préemption par une décision du 7 juillet 2021 au prix de 1 686'600 euros qu'il a adressé à Me [B], notaire mandataire de la SCI JEROME par exploit d'huissier du 8 juillet 2021.

La SCI JEROME a refusé cette proposition par courrier du 6 septembre 2021.

Par une requête et un mémoire introductif d'instance reçus le 20 septembre 2021 au greffe, l'EPT PLAINE COMMUNE a saisi le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny en vue de la fixation du prix du bien préempté.

Celle-ci justifie avoir consigné le 16 novembre 2021 une somme de 280'100 euros, correspondant à 15 % du montant de l'évaluation du prix par le Directeur des services fiscaux et avoir notifié copie du récépissé de la consignation à la SCI JEROME par exploit d'huissier du 16 décembre 2021 et à la juridiction d'expropriation par exploit d'huissier du 17 décembre 2021.

Par ordonnance du 10 décembre 2021, le juge de l'expropriation a fixé le transport sur les lieux et l'audition des parties au 1er février 2022.

Par jugement contradictoire du 28 juin 2022, le juge de l'expropriation de la Seine-Saint-Denis a :

'annexé à la décision le procès-verbal de transport du 1er février 2022 ;

'fixé à 2'015'000 euros ( 620m² X 3 250 euros) le prix d'acquisition du bien appartenant la SCI JEROME, en valeur occupée, situé [Adresse 12] à [Localité 16] sur la parcelle cadastrée U numéro [Cadastre 6] ;

'condamné l'Etablissement Public Territorial PLAINE COMMUNE

à payer à la SCI JEROME une somme de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamné l'Etablissement Public Territorial PLAINE COMMUNE aux dépens.

L'EPT PLAINE COMMUNE a interjeté appel du jugement le 17 août 2022 sur la fixation du prix, l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

1/ adressées au greffe par l'EPT PLAINE COMMUNE le 9 novembre 2022, notifiées le 14 novembre 2022 (AR intimé et du CG le 15 novembre 2022) aux termes desquelles il est demandé à la cour de:

'annuler le jugement du 28 juin 2022 rendu par le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny,

consécutivement,

'réformer le jugement

'fixer le prix du bien sis sur la parcelle section U numéro [Cadastre 6] sur laquelle se trouve un ensemble immobilier à usage mixte, le tout situé [Adresse 12] à [Localité 16] à la somme totale de 1'791'800 euros (620 m² X 2 890 euros) en valeur occupée ;

en tout état de cause,

'condamner la SCI JEROME au versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

2/ adressées au greffe par l'EPT PLAINE COMMUNE le 26 avril 2023 notifiées le 28 avril 2023 (AR intimé et CG du 5 mai 2023) aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

'annuler le jugement du 28 juin 2022 rendu par le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny,

consécutivement,

'réformer le jugement

'fixer le prix du bien sis sur la parcelle section U numéro [Cadastre 6] sur laquelle se trouve un ensemble immobilier à usage mixte, le tout situé [Adresse 12] à [Localité 16] à la somme totale de 1'791'800 euros (620 m² X 2 890 euros) en valeur occupée ;

en tout état de cause,

'condamner la SCI JEROME au versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

3/ adressées au greffe par l'EPT PLAINE COMMUNE le 11 janvier 2024 notifiées le 16 janvier 2024 (AR intimé du 19 janvier 2024 et CG du 18 janvier 20245) aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

'annuler le jugement du 28 juin 2022 rendu par le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Bobigny,

consécutivement,

'réformer le jugement

'fixer le prix du bien sis sur la parcelle section U numéro [Cadastre 6] sur laquelle se trouve un ensemble immobilier à usage mixte, le tout situé [Adresse 12] à [Localité 16] à la somme totale de 1'791'800 euros (620 m² X 2 890 euros) en valeur occupée ;

en tout état de cause,

'condamner la SCI JEROME au versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

4/déposées au greffe par la SCI JEROME le 7 février 2023, notifiées le 13 février 2023 (AR appelant du 16 février 2023 et AR CG du 17 février 2023, formant appel incident aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

'la déclarer recevable et bien-fondée en ses demandes ;

'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé le prix d'acquisition du bien immobilier lui appartenant à la somme de 2'015'000 euros,

'le confirmer pour le surplus ;

statuant à nouveau :

à titre principal :

Fixer le prix d'acquisition du bien sis sur la parcelle section U numéro [Cadastre 6] sur lequel se trouve l'ensemble immobilier à usage mixte, le tout situé [Adresse 12] à [Localité 16] à la somme totale de 2 284'080 euros (620 m² X 3 684 euros) en valeur occupée ;

à titre subsidiaire :

confirmer le jugement en ce que celui-ci a fixé le prix d'acquisition du bien immobilier lui appartenant à la somme de 2'015'000 euros,

en tout état de cause :

Débouter l'EPT PLAINE COMMUNE de sa demande d'annulation du jugement ;

Débouter l'EPT PLAINE COMMUNE de sa demande de fixation du prix du bien à la somme de 1'791'800 euros en valeur occupée,

'débouter l'EPT PLAINE COMMUNE de toutes demandes contraires; ;

'condamner l'EPT PLAINE COMMUNE à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamner l'EPT PLAINE COMMUNE aux dépens.

5/déposées au greffe par la SCI JEROME le 26 décembre 2023 notifiées le 26 décembre 2023 (AR appelant du 2 janvier 2024 et CG du 2 janvier 2024), formant appel incident aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

'la déclarer recevable et bien-fondée en ses demandes ;

'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé le prix d'acquisition du bien immobilier

lui appartenant à la somme de 2'015'000 euros,

'le confirmer pour le surplus

statuant à nouveau :

à titre principal :

Fixer le prix d'acquisition du bien sis sur la parcelle section U numéro [Cadastre 6] sur lequel se trouve l'ensemble immobilier à usage mixte, le tout situé [Adresse 12] à [Localité 16] à la somme totale de 2 284'080 euros( 620 m² X 3684 euros) en valeur occupée ;

à titre subsidiaire :

confirmer le jugement en ce que celui-ci a fixé le prix d'acquisition du bien immobilier lui appartenant à la somme de 2'015'000 euros,

en tout état de cause :

Débouter l'EPT PLAINE COMMUNE de sa demande d'annulation du jugement ;

Débouter l'EPT PLAINE COMMUNE de sa demande de fixation du prix du bien à la somme de 1'791'800 euros en valeur occupée,

'débouter l'EPT PLAINE COMMUNE de toutes demandes contraires; ;

'condamner l'EPT PLAINE COMMUNE à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

'condamner l'EPT PLAINE COMMUNE aux dépens.

6/Le commissaire du gouvernement n'a pas déposé ou adressé de conclusions.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

L'EPT PLAINE COMMUNE fait valoir que :

La parcelle cadastrée section U numéro [Cadastre 6] sur laquelle se trouve un ensemble immobilier bâti sis [Adresse 12] à [Localité 16] appartenant la SCI JEROME est située dans le périmètre du droit de préemption urbain institué sur le territoire de la commune de [Localité 16] et dans l'orientation d'aménagement et de programmation de l'OPAP sectoriel numéro 20 secteur Grand Est de [Localité 16] ; les objectifs fixés par le PLUI de PLAINE COMMUNE et notamment l'OAP grand centre, invitent à conforter la centralité de [Localité 16] et son rayonnement dans toutes ses dimensions (culturelle, commerciale, administratives) en restituant au centre de [Localité 16] son statut de véritable centralité qui contribue à l'unité, à l'attractivité au rayonnement de la ville par la requalification de la diversification de l'offre commerciale, en permettant de retrouver une plus grande diversité de populations dans son centre, en améliorant et diversifiant l'habitat et en faisant de [Localité 16] un lieu de destination touristique, culturel et commercial ; la [Adresse 15] fait donc l'objet d'un effort de restructuration et d'accroissement de l'attractivité ;le centre de [Localité 16], où se situe cette parcelle, fait partie des sites retenus pour la mise en 'uvre du PNRQAD et de la poursuite de la résorption du parc privé dégradé dans le cas du NPNRU.

L'EPT PLAINE COMMUNE conteste :

'la régularité du jugement ;

'le mal fondé du jugement, le prix fixé à 1'791'800 euros.

Sur le caractère irrégulier du jugement :

-sur l'imparfaite motivation du jugement

Le juge de l'expropriation a retenu que le bien en litige était d'un « état d'entretien général correct », alors même que le procès de transport sur les lieux est beaucoup plus critique sur l'état du bien :

's'agissant de l'état de la façade extérieure : ' l'ensemble est dans un état d'usage, avec quelques fissures » ;

's'agissant de l'état intérieur :

'dans le bâtiment en R+2 de droite, il est précisé que l'un des appartements situé entre le rez-de-chaussée et le 1er étage, que 'la locataire signale un problème d'humidité dans la salle de bains, lié à un dégât des eaux récent et indique que le système de VMC ne fonctionne pas ;

'toujours dans le bâtiment en R+2 de droite, au 1° étage : l'un des appartements comporte des 'traces d'humidité'.

- toujours dans le bâtiment en R+2 à droite: un autre appartement comporte 'des fissures au plafond dans la chambre à coucher » ;

'dans le bâtiment en R+2 de gauche, l'un des logements comporte une cuisine « qui comprend de nombreuses traces noirâtres au plafond. Le parquet flottant est abîmé, il y a d'importantes traces d'humidité dans la salle de bains, une des fenêtres de l'étage en simple vitrage, est fêlée, les huisseries sont anciennes. Le locataire indique que la VMC ne fonctionne pas. L'appartement est dans un mauvais état général ' ;

'dans le même bâtiment, il est constaté pour l'ensemble des logements que « les pourtours des fenêtres de certains appartements de fortes traces d'humidité ».

La moitié des appartements n'est pas dans état correct.

Le premier juge a tenu compte à tort d'un rapport émis par un architecte à la seule demande de la SCI JEROME.

Il est également reproché au jugement d'abord retenu que : « s'agissant en particulier de l'immeuble [Adresse 9], il convient de considérer qu'il est dans un état d'entretien supérieur à celui du bien préempté, comme invoqué par PLAINE COMMUNE en s'appuyant en particulier sur la comparaison des avis des Domaines, ainsi que de l'acte authentique de vente du terme DEF n°2 et de la promesse de vente du bien préempté. Cela est confirmé par le commissaire du gouvernement s'agissant de l'état de la façade sur rue.

Ce meilleur état d'entretien ne saurait toutefois suffire à écarter ce terme. Il s'agit néanmoins d'un élément qui devrait être pris en considération dans la détermination du prix. »

Le premier juge n'a pas mis les différentes parties de connaître les raisons pour lesquelles ce terme de référence devait finalement être pris en considération.

-Sur le mal fondé du jugement :

Concernant la situation et la description du bien :

la façade du bâtiment sur rue est dans un état médiocre ; les façades des bâtiments sur cour sont en très bon état ; les parties communes du bâtiment sur rue sont en bon état et celles sur cour en état moyen (photographies produites).

'sur les surfaces, les parties se sont accordées sur la surface de 620 m².

'Sur la situation locative du bien, l'ensemble immobilier à usage d'habitation est occupé par des locataires et l'ensemble immobilier doit donc est évalué en valeur occupée.

-S'agissant de la situation au regard des droits d'urbanisme, le bien étant soumis au droit de préemption, en application de l'article L 213-4 du code de l' urbanisme, la date de référence correspond au PLUI de PLAINE COMMUNE approuvé par délibération du Conseil de Territoire du 25 février 2020, exécutoire depuis le 30 mars 2020, le bien étant situé en zone UMT; celle-ci correspond aux espaces denses des centres-villes anciens, souvent historiques, au tissu traditionnel et peut couvrir plusieurs fonctions urbaines (habitat, commerces, services, artisanat, équipements).

'S'agissant du prix, l'EPT PLAINE COMMUNE l'a fixé en considération de l'état du bien, sur la base de l'avis des Domaines et sur l'acte authentique de vente du 4 mars 2021 rappelant la présence au sein d'immeubles de plomb, d'amiante et d'une installation électrique comportant des anomalies.

En première instance, elle a fait état de trois termes de référence, dont deux ont été retenus à juste titre par le premier juge.

Elle propose une valeur unitaire de 2 890 euros/m², soit 620 m² X 2 890 euros/m²= 1'791'800 euros.

En première instance, la SCI JEROME a fait état de quatre termes de référence, dont trois ont été retenus à tort par le premier juge correspondant aux immeubles situés [Adresse 9] et [Adresse 1].

Il convient également d'écarter un terme de référence de la SCI JEROME au [Adresse 7], les caractéristiques du bien n'étant pas identiques.

La SCI JEROME insiste sur le prétendu bon état d'ensemble de son immeuble :

a/sur les extérieurs et intérieurs de l'immeuble de la SCI JEROME

Elle croit pouvoir comparer l'état de son immeuble avec celui du [Adresse 9], elle produit des photographies confirmant qu'elle a effectué des travaux superficiels de peinture des extérieurs et les intérieurs des parties communes, qui ne sont pas des palliatifs à l'humidité.

b/sur la prétendue absence d'humidité de l'immeuble de la SCI JEROME

L'attestation d'un architecte produite relative à la prétendue absence d'humidité dans l'immeuble n'est pas probante; elle a été rédigée pour les seuls besoins de la cause.

c/sur l'état de l'immeuble

La référence de la SCI JEROME relative à une comparaison effectuée sur un site en ligne ne sera pas retenue.

L'EPT PLAINE COMMUNE a fait constater l'état général de l'immeuble du [Adresse 9] par huissier de justice, tant du point de vue de son aspect extérieur que de l'intérieur de certains des appartements qu'il a pu visiter, ainsi que de l'absence de l'humidité (pièce n° 17).

L'appel incident de la SCI JEROME ne pourra qu'être rejeté :

'la date à prendre en considération est celle du jugement, à laquelle il convient de se placer pour apprécier sa consistance ;

' elle ne peut donc se prévaloir d'une facture du 5 octobre 2022 relative à des travaux dans l'appartement de Madame [P] et de travaux d'électricité du 7 octobre 2023.

S'agissant des travaux de l'appartement de Madame [K], ceux-ci se sont révélés uniquement nécessaires du fait d'un dégât des eaux qui a eu lieu en septembre 2020, et il est donc établi que l'engagement des travaux dans cet appartement avait pour seul but de tenter d'augmenter le prix du bien.

'Le premier juge a retenu l'intégralité des six termes de références du commissaire du gouvernement qui a proposé de retenir une valeur de 3400 euros/m², le premier juge ayant retenu une valeur moyenne de 2892 euros du m² ; si certaines de ces références paraissent a priori intéressantes, il convient de prendre en compte les erreurs de surface prises en compte par rapport à celles retenues par le service des Domaines.

LA SCI JEROME rétorque que :

Elle est propriétaire d'un ensemble immobilier bâti sis [Adresse 12] à [Localité 16], acquis le 10 juillet 2008 ; une déclaration d'intention d'aliéner émanant de Me [B], notaire, pour son compte, au prix de 2'050'000 euros incluant une commission d'agence 50'000 euros TTC à la charge du vendeur a été reçue le 8 avril 2021 en mairie ; l'EPT PLAINE COMMUNE a mis en oeuvre son droit de préemption urbain, mais elle a indiqué par courrier du 6 septembre 2021 qu'elle maintenait le prix figurant dans la DIA.

La visite des lieux par le juge de l'expropriation le 2 février 2022 a permis de constater le bon état de l'immeuble, aussi bien dans ses parties communes que dans les parties privatives.

Elle demandait dans son premier mémoire de retenir un prix de 2 200'000 euros, mais c'était sans connaître le prix de vente de l'ensemble immobilier situé au [Adresse 9], particulièrement similaire, si ce n'est avec des parties communes en plus mauvais état, vendu au prix de 3'009'828 euros, soit 3 684 euros/m² ; elle a donc modifié sa demande afin que soit retenu le prix de 620 m² X 3 184 euros= 2 184'080 euros, et à titre subsidiaire le prix de 2 200'000 euros.

Sur la régularité du jugement entrepris :

'sur la description du bien : sous couvert de défaut de motivation, l'EPT PLAINE COMMUNE conclut en réalité sur le fond.

À l'issue de sa visite, le premier juge précise que « l'ensemble est dans un état général correct », l'excellent emplacement du bien été pris en compte également, ainsi que l'existence d'un permis de construire sur l'arrière de la parcelle ; le bien dans son ensemble, et non seulement les appartements, est dans un état d'entretien général correct.

'Sur le comparatif avec l'immeuble voisin : il s'agit du meilleur terme de référence à retenir, les caractéristiques et l'emplacement étant particulièrement similaires.

Sur l'appel incident :

a/sur la situation géographique de l'ensemble immobilier

L'ensemble immobilier est particulièrement bien desservi, facilement accessible par les transports en commun, très bien situé, en plein centre-ville avec des commerces de proximité, un centre commercial, la mairie et la Basilique de [Localité 16] à 250 mètres.

B/sur la présentation générale de l'ensemble immobilier :

Le bâti se compose de :

'bâtiment en façade en bon état donnant sur la place élevé d'un rez-de-chaussée de trois étages ;

'de deux bâtiments perpendiculaires sur cour, en bon état, dont les façades ont été récemment ravalées, élevées d'un rez-de-chaussée et de deux étages avec une cour entre ces bâtiments et un jardin bien entretenu en fond de parcelle.

L'ensemble immobilier comporte :

'au rez-de-chaussée du bâtiment sur rue, deux locaux commerciaux ;

'huit logements en bon état voir très bon état, deux logements sur cour de type duplex.

Elle est titulaire d'un permis de construire pour une surface de 127 m² environ, permis purgé de recours permettant la réalisation d'une maison de 127 m² avec jardin (pièce numéro 11).

S'agissant des prestations extérieures, la façade est en état correct (photographies).

S'agissant des prestations intérieures, les parties communes sont en très bon état, le bâtiment ayant fait l'objet d'importants travaux en 2017 à savoir le ravalement complet des cours arrières et des cages d'escaliers (photographies).

Les parties privatives, constituées de huit logements d'habitation, sont en très bon état voir très bon état, et aucun problème d'humidité d'ordre structurel n'est à relever, comme en justifie l'attestation établie par M. [L], architecte qui indique que l'humidité constatée dans certains logements est « superficielle et non structurelle », et que de menus travaux pour un devis total de 3 000 à 4 000 euros mettront fin à ces désordres (pièce numéro 19).

S'agissant des prestations intérieures concernant l'usage commercial :

'magasin de vente prêt-à-porter au rez-de-chaussée gauche, avec un ensemble bien configuré, en bon état ;

'magasin de vente de produits cosmétiques au rez-de-chaussée à droite, en bon état ;

'deux bâtiments côté cour (à usage d'habitation) : deux duplex de trois pièces.

L'état locatif des baux commerciaux et d'habitation, arrêté au 4 novembre 2020, a été précisé (pièces n° 8 et 10).

Sur la valeur de l'ensemble immobilier :

-l'offre retenue par l'autorité préemptrice est inadéquate par rapport à la singularité de l'ensemble immobilier, et d'ailleurs l'avis des domaines retient une valeur globale d'1'873'900 euros, arrondis à 1'874'000 euros.

'Sur les éléments de comparaison de l'autorité préemptrice :

les trois références de l'EPT PLAINE COMMUNE sont critiquables, la surface n'étant pas comparable, la localisation différente et l'état des immeubles n'étant pas documenté.

Les deuxièmes et troisièmes références ne sont pas enregistrées.

L'ensemble mitoyen situé [Adresse 9] à [Localité 16] a été vendu le 29 avril 2021 au prix de 3'100'000 euros pour une surface de 687 m², corrigée à 817 m² par le commissaire du gouvernement, qui est donc intervenue après la DIA.

Le mémoire peut comporter un montant supérieur à celui qui avait été notifié dans la DIA.

Elle propose quatre références significatives, mais il convient de retenir les données relatives à l'immeuble situé [Adresse 9] comme la valeur de référence, à savoir 3 684 euros/m².

Le prix du marché se situe à 4 131 euros/m² en moyenne selon les professionnels de la vente immobilière (pièce numéro 21 : meilleursagents.com).

En conséquence la valeur de l'immeuble ne saurait être inférieure à : 620 m² X 3 184 euros= 2 284'080 euros.

SUR CE, LA COUR

- Sur la recevabilité des conclusions

Aux termes de l'article R 311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017 - article 41 en vigueur au 1er septembre 2017, l'appel étant du 17 août 2022, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l'espèce, les conclusions de l'EPT PLAINE COMMUNE du 9 novembre 2022 et de la SCI JEROME du 7 février 2023 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.

Les conclusions de l'EPT PLAINE COMMUNE, appelante incidente, du 26 avril 2023 et du 11 janvier 2024 sont de pure réplique à celles de la SCI JEROME ne formulent pas de demandes nouvelles, sont donc recevables au-delà des délais initiaux.

Les conclusions de la SCI JEROME du 26 décembre 2023 et les pièces nouvelles sont en réplique aux demandes de l'EPT PLAINE COMMUNE et sont donc recevables.

- sur la demande d'annulation du jugement

L'EPT PLAINE COMMUNE demande l'annulation du jugement et consécutivement de le réformer et de fixer le prix du bien préempté à la somme d'1'791'800 euros en valeur occupée.

Il invoque l'article 455 du code de procédure civile qui dispose que les jugements doivent exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens. Cet exposé peut revêtir la forme d'un visa des conclusions des parties avec l'indication de leur date. Le jugement doit être motivé. Il énonce sa décision sous forme de dispositif.

Il ajoute que tout jugement doit être motivé en ce qu'il permet aux parties de connaître les éléments de droit et de fait ayant conduit le juge à prendre sa décision.

La SCI JEROME conclut au débouté de cette demande de nullité.

L'EPT PLAINE COMMUNE reproche au jugement d'avoir jugé que : « il résulte de l'ensemble de ces éléments que, malgré l'existence de trace d'humidité dans certains appartements, le bien doit être considéré comme présentant un état d'entretien général correct, conformément aux conclusions du procès-verbal de transport » (production n°0) ; or, le juge de l'expropriation a retenu dans son jugement que le bien en litige était d'un « état d'entretien général correct », alors même que le procès-verbal de transport sur les lieux est beaucoup plus critique sur l'état du bien, et ne saurait permettre de résumer l'état du bien par : « état d'entretien général correct ».

S'agissant de l'état du bien, le premier juge a indiqué que les parties sont en désaccord sur ce point, il a repris les arguments de l'expropriant et de l'exproprié ; il a ensuite fait état des conclusions du commissaire du gouvernement et de l'avis de l'inspecteur du service des domaines daté du 4 mai 2021. Il a ensuite repris les conclusions du procès-verbal de transport annexé au jugement et a mentionné l'attestation produite en pièce 19 par l'exproprié.

Le jugement est donc parfaitement motivé, et sous couvert d'une demande d'annulation, l'EPT PLAINE COMMUNE reproche au premier juge ses conclusions concernant l'état général de l'immeuble situé [Adresse 12].

Il reproche d'autre part au jugement d'avoir retenu que : « s'agissant en particulier de l'immeuble [Adresse 9], il convient de considérer qu'il est dans un état d'entretien supérieur à celui du bien préempté, comme invoqué par PLAINE COMMUNE en s'appuyant en particulier sur une comparaison des avis des domaines, ainsi que de l'acte authentique de vente du terme DEF n°2 et de la promesse de vente du bien préempté. Cet état est par ailleurs confirmé par le commissaire du gouvernement s'agissant de l'état de la façade sur rue.

Ce meilleur état d'entretien ne saurait toutefois suffire à écarter ce terme : il s'agit néanmoins d'un élément qui devra être pris en considération dans la détermination du prix » (Production n°0 page 9)

S'agissant de l'immeuble [Adresse 9], le premier juge a motivé sa décision en indiquant qu'il s'agit d'un terme de référence privilégié correspondant à une cession récente de l'immeuble mitoyen et en observant toutefois le moins bon état d'entretien retenu de l'immeuble préempté, ainsi que le nombre supérieur aussi bien de locaux commerciaux que de locaux d'habitation de ce terme par rapport au bien préempté.

Le jugement est donc parfaitement motivé ; sous couvert d'une demande d'annulation, l'EPT PLAINE COMMUNE reproche au premier juge sa motivation sur ce terme privilégié.

L'EPT PLAINE COMMUNE ne démontre pas que le premier juge a violé l'article 455 du code de procédure civile et il convient en conséquence de le débouter de sa demande d'annulation du jugement.

- Sur le fond

Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s'impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'il juge nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.

Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.

L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l'article L 211-5 du code de l'urbanisme, tout propriétaire d'un bien soumis au droit de préemption peut proposer au titulaire de ce droit l'acquisition de ce bien, en indiquant le prix qu'il en demande. Le titulaire doit se prononcer dans un délai de 2 mois à compter de ladite proposition dont copie doit être transmise par le maire au directeur départemental des finances publiques.

À défaut d'accord amiable, le prix est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation selon les règles mentionnées à l'article L 213-4.

En cas d'acquisition, l'article L 213-14 est applicable.

Aux termes de l'article L 213-4 du code de l'urbanisme, à défaut d'accord amiable le prix d'acquisition est fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation ; ce prix est exclusif de toute indemnité accessoire, et notamment l'indemnité de remploi.

Conformément aux dispositions de l'article L 322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.

L'appel principal et l'appel incident portent sur la fixation du prix du bien préempté.

S'agissant de la date de référence, le premier juge a retenu les possibilités d'urbanisme définies par le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI) approuvé le 25 février 2020 rendu opposable 30 mars 2020 et modifié le 15 décembre 2020.

L'EPT PLAINE COMMUNE retient la même date, en application de l'article L213-4 du code de l'urbanisme, le bien étant soumis au droit de préemption.

La SCI JEROME n'a pas conclu sur ce point.

En l'absence de contestation des parties, il convient de confirmer le jugement qui a exactement retenu le PLUI de PLAINE COMMUNE approuvé par délibération du conseil de territoire du 25 février 2020, exécutoire depuis le 30 mars 2020, le bien étant soumis au droit de préemption.

S'agissant des données d'urbanisme, à cette date le bien est situé en zone UMTb du PLUI, correspondant à une zone dédiée aux biens à vocation mixte.

Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, il s'agit d'un ensemble immobilier composé d'un immeuble sur rue de type R+3 et de deux immeubles sur cour de type R+2, qui accueille deux commerces et huit logements, tous trois disposés autour d'une cour intérieure donnant sur un petit jardin, cette partie de la parcelle bénéficiant d'un permis de construire pour l'édification d'une maison individuelle.

Le bien se situe au sein de la commune, dans une zone d'habitation et de commerce, très passante, sur la place accueillant le marché de [Localité 16], proche de la basilique et de l'hôtel de ville.

Il est desservi par ligne 13 du métro (station basilique de [Localité 16]) et la ligne 1 du tramway (arrêt Jean Rostand/Lamartine).

Comme en première instance, les parties sont en désaccord sur l'état général d'entretien du bien.

L'EPT PLAINE COMMUNE indique qu'il ressort des constatations du procès-verbal de transport que certains appartements comportent des fissures, souffrent d'humidité résultant de différentes causes : dégât des eaux, système de VMC qui ne fonctionne pas, comportent des fenêtres qui sont pas toutes adaptées (simples vitrages, vitre fêlée, huisseries anciennes) et comportent des matériaux abîmés : parquet flottant abîmé, traces noirâtres au plafond ; qu'en réalité la moitié des appartements souffre de ces griefs, puisque sur six appartements compris au sein du bâtiment en R+2 de droit, trois ont fait l'objet de griefs sur leur état, retenus par le procès-verbal et quant au bâtiment en R+2 de gauche composé de deux appartements, l'un des deux est dans un état très dégradé ; qu'en outre le premier juge a tenu compte à tort d'un rapport émis par un architecte, qui est intervenu en dehors de tout contradictoire, à la seule demande de la SCI JEROME .

La SCI JEROME rétorque que l'appelant se limite à reprendre la description de quatre appartements, alors que c'est tout un immeuble de 620 m² qui a été visité, les parties privatives mais également les parties communes, dont l'état général est effectivement correct au vu des constatations réalisées lors de la visite des lieux, reprise dans le procès-verbal de transport.

Elle précise que l'appartement en R+2 gauche n'est pas habité et n'est pas donné à bail puisque des travaux doivent être réalisés par la SCI JEROME et dans l'appartement en R+2 droite, la trace d'humidité relevée n'est pas structurelle et est la conséquence d'un dégât des eaux provenant du voisin du dessus.

La consistance doit s'apprécier à la date du jugement soit le 28 juin 2022 ; il convient en conséquence d'écarter des débats les pièces postérieures produites par la SCI JEROME (pièce n°25 : factures Madame [K], pièce numéro 28 : prise en charge assurance, pièce numéro 26 factures Madame [P] et pièces numéro 29 : factures mises aux normes électricité).

Il ressort du procès-verbal de transport du 1er février 2022 les constatations suivantes :

« Description extérieure : en façade... l'ensemble dans un état d'usage, avec quelques fissures

description intérieure :

le local commercial de droite... état correct ;

'local commercial de gauche .... en bon état

bâtiment en R+2 de droite :

entre le rez-de-chaussée premier étage, un appartement T2... le parquet flottant et la peinture sont en bon état. Le locataire signale un problèmes d'humidité dans la salle de bains, lié à dégât des eaux récentes et dit que le système VMC ne fonctionne pas.

Au 1er étage : le sol est recouvert de lino, ensemble dans un état correct, sauf quelques traces d'humidité. L'appartement est dans un bon état général.

Entre le 1er et le 2ème étage... l'ensemble est en bon état. Le locataire signale quelques fissures au plafond dans la chambre à coucher, qui apparaissent minimes.

Au 2ème étage : un appartement T3 en bon état

entre le 2ème et le 3ème étage, appartement T2... l'ensemble est dans l'état d'usage, ancien mais correct ;

Au 3ème étage : les fenêtres sont en double vitrage il y a quelques traces d'humidité dans la salle de bains. Le lino et la peinture en assez bon état. L'ensemble est dans un état d'usage.

Le bâtiment R+2 de gauche :

à gauche... l'ensemble est en bon état

à droite... le parquet flottant est abîmé, importantes traces d'humidité de la salle de bains, l'une des fenêtres de l'étage, en simple vitrage, est fêlée, les huisseries sont anciennes. La locataire indique que la VMC ne fonctionne pas. L'appartement est dans un mauvais état général.

Pour l'ensemble des logements, le chauffage est assuré par des convecteurs électriques, les tableaux électriques semblent aux normes et la quasi-exclusivité des fenêtres sont en double vitrage avec cadres récents en PVC.

On constate néanmoins sur les pourtours de fenêtres de certains appartements de fortes traces d'humidité ».

Il ressort de ces constatations que malgré l'existence de trace d'humidité dans certains appartements, le bien présente un état d'entretien général correct, comme l'a indiqué exactement le premier juge.

S'agissant de l'humidité, la SCI JEROME verse aux débats une attestation de l'architecte (pièce numéro 19), recevable car ayant été soumise au contradictoire, qui indique que le 31 mars 2022 qu'il s'est rendu à l'immeuble préempté afin d'y analyser les traces d'humidité dans les pièces d'eau de plusieurs appartements loués.

Il constate que cette humidité est superficielle et non structurelle, qu'elle provient d'un défaut d'aération et de ventilation.

Il suggère de poser des grilles de ventilation haute et basse sur les fenêtres, d'étalonner les portes et de remplacer les deux moteurs de VMC défectueux.

Il estime le coût de ces travaux entre 3000 et 4000 euros TTC.

Pour une plus ample description, il convient de se référer au procès verbal de transport.

S'agissant de la date à laquelle le bien doit être estimé, il s'agit de celle de la première instance, soit le 28 juin 2022.

- Sur la méthode

La méthode par comparaison retenue par le premier juge n'étant pas contestée par les parties, le jugement sera confirmé sur ce point.

-Sur les surfaces

Les parties s'accordent comme en première instance sur une surface de 620 m². Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

- Sur la fixation du prix

Le premier juge après examen des références des parties a retenu deux termes de l'entité préemptrice, trois termes de la partie préempté et six termes du commissaire du gouvernement, ce qui aboutit au total à sept termes de comparaison pour une moyenne de 1843 euros/m² ; en tenant compte de la situation géographique très favorable du bien, de la présence d'un permis de construire sur une partie de la parcelle qui représente un facteur incontestable de plus-value dans le cadre de la cession d'un immeuble de rapport et en prenant en considération en particulier la valeur de 3684 euros/m² correspondant à une cession récente d'un immeuble moyen tout en observant le moins bon état d'entretien de l'immeuble préempté, a retenu une valeur unitaire de 3250 euros/m² en valeur occupée.

Il convient d'examiner les références des parties :

1° Les références de l'EPT PLAINE COMMUNE

Il indique qu'il a fait état de trois termes de références, dont deux ont été retenus à juste titre par le premier juge, qu'il reprend en appel (avec les références de publication) :

N° du terme

Date de vente

Adresse

Surface/m²

Prix en euros

Prix en euros/m²

Observations

T1

30 juillet 2020

[Adresse 10]

Z n°15

490

1'125'000

2295

bâtiment R+4 avec grenier perdu et un local commercial occupé

bâtiment d'un niveau sur cave à la suite

bâtiment R+1 sur cour-passage avec 9 appartements dont 7 occupés

T2

20 juillet 2019

[Adresse 4]

AK n°[Cadastre 5]

467

1'190'000

2548

immeuble à usage mixte (partiellement occupé) avec un rez-de-chaussée une boutique, des appartements aux étages

T1 : L'EPT PLAINE COMMUNE indique que cette référence comporte une cour intérieure d'une surface de l'ordre 74 m², qu'elle est située sur la rue de la République qui constitue une artère commerçante qui va de la basilique en passant à côté du marché de la mairie, car elle croise notamment la [Adresse 15], et qu'il s'agit d'une rue piétonne dynamique

La SCI JEROME indique que cette référence concerne une vente du 23 mars 2016 pour un prix de 1 275'000 euros et non d'une transaction du 30 juillet 2020 à un prix de 1'125'000 euros (pièce n°7).

La fiche de la base BIEN fait état de la même adresse et de la même référence cadastrale, concernant une transaction du 24 mars 2016 au prix de 1'275'000 euros.

Elle propose cependant une référence au 74 rue de la République à la même date soit le 30 juillet 2020, pour le même prix de 1 125'000 euros, mais avec une surface différente et un prix unitaire de 3 214,29 euros.

En l'absence de la détermination exacte du prix au m², ce terme sera écarté.

T2 : L'EPT PLAINE COMMUNE indique que cette référence se trouve également sur la rue de la République et est encore plus proche de la [Adresse 15].

La SCI JEROME indique que cette référence n'est pas enregistrée et que l'état de l'immeuble n'est pas documenté.

Cependant, ce terme est accompagné des références de publication ; il s'agit d'une vente récente, comparable en localisation et en consistance au regard de la photographie produite.

Il sera donc retenu.

2° Les références de la SCI JEROME

Elle propose des transactions immobilières intervenues en 2020 et 2021 dans le cadre d'immeubles de rapport sans les références de publication :

N° du terme

Date de vente

Adresse

Surface

Prix en euros

Prix en euros/m²

I1

2 juillet 2020

[Adresse 1]

579

2 400'000

4145,08

I2

29 avril 2021

[Adresse 9]

687

3'010'000

4380,37

I33

16 décembre 2020

[Adresse 7]

383

4'300'000

11'227,15

I4

30 juillet 2020

[Adresse 10]

350

1'125'000

3114,29

I1 : L'EPT PLAINE COMMUNE demande d'écarter ce terme correspondant à un ensemble immobilier de bien meilleure facture, qui comprend au rez-de-chaussée une agence bancaire nationale « BNP Paribas » ; elle indique que la présence d'une banque nécessite des aménagements sécurité de l'immeuble bien supérieurs à l'ensemble de la SCI JEROME.

La présence de cette banque n'enlève pas la pertinence de ce terme, qui est récent, comparable en localisation et en consistance ; il sera donc retenu.

I2 : L'EPT PLAINE COMMUNE indique que ce terme est en meilleur état que le bien de la SCI JEROME, comme cela ressort de l'avis des domaines (pièce n°7) ainsi que d'un constat d'huissier établi le 9 mai 2022 (pièce n° 17) et qu'en outre l'acte de vente ne fait pas référence contrairement à l'acte de vente du bien préempté de la présence de plomb, d'amiante ou encore d'anomalies sur l'installation électrique (pièces n°15 et 16).

Ce terme récent, comparable en consistance et en localisation, doit être privilégié, puisqu'il s'agit de l'immeuble mitoyen.

Cependant, il s'agit d'une valeur haute, puisqu'il est établi par le constat d'huissier produit que ce bien est en meilleur état, et que l'acte de vente du bien préempté fait état de la présence de plomb, d'amiante et d'anomalies sur l'installation électrique.

I3 : ce terme correspondant à un bien de construction nettement plus récente est trop élevé par rapport à la moyenne des autres références et sera donc écarté.

I4 : ce terme a déjà été écarté

La SCI JEROME fait également état du prix du marché qui se situe à 4 131 euros/m² selon les professionnels de la vente immobilière (pièce 21 : meilleursagents.com), mais ne s'agissant pas d'une mutation effective, cette analyse sera écartée.

Elle produit également des références de transaction immobilière dans un rayon de 500 m (pièce n°7), mais s'agissant de termes issus de la base BIEN, en l'absence des références de publication, permettant d'accéder à l'acte de vente et de connaître ces caractéristiques, ceux-ci seront écartés.

Elle fait état enfin de l'avis des domaines (pièce n°5) pour un montant de 1 874 000 euros ; ne s'agissant pas d'une mutation effective, cet avis sera écarté.

Les termes retenus correspondent à une moyenne de :

2 548 euros + 4 145,08 + 4 381,37 = 11 074, 45 euros/3= 3 691 euros/m².

Les éléments de plus-value sont les suivants :

-situation géographique très favorable du bien ;

-présence d'un permis de construire sur une partie de la parcelle qui représente un facteur incontestable de plus-value dans le cadre de la cession d'un immeuble de rapport.

Les éléments de moins-value sont les suivants :

-état uniquement correct du bien

-présence de plomb, d'amiante et anomalies sur l'installation électrique.

S'il convient de privilégier le terme correspondant à une valeur de 4 381,37 euros, il s'agit par contre d'une valeur haute en raison de son meilleur état.

En conséquence, au regard de ces éléments, le premier juge a exactement retenu une valeur inférieure à la moyenne susvisée et retenu une valeur unitaire de 3 250 euros/m².

Il convient de confirmer le jugement qui a exactement fixé l'indemnité principale à lasomme de : 620 m² X 3 250 euros/m² : 2'015'000 euros en valeur occupée.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné L'EPT PLAINE COMMUNE à payer à la SCI JEROME la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de débouter l'EPT PLAINE COMMUNE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et de la condamner sur ce fondement à verser la somme de 3000 euros à la SCI JEROME.

- Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance.

L'EPT PLAINE COMMUNE perdant le procès sera condamné aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Statuant dans la limite de l'appel,

Déclare recevables les conclusions des parties ;

Déboute l'Etablissement Public Territorial (EPT) PLAINE COMMUNE de sa demande de nullité de jugement ;

Confirme le jugement entrepris ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Déboute l'Établissement Public Territorial (EPT) PLAINE COMMUNE de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne l'Établissement Public Territorial (EPT) PLAINE COMMUNE à verser la somme de 3 000 euros à la SCI JEROME au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l'établissement public territorial (EPT) PLAINE COMMUNE aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 22/16828
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;22.16828 ?
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