RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 10
ARRÊT DU 28 MARS 2024
(n° , 30 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07553 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7WBF
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Mars 2019 -Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 17/06390
APPELANTS
Madame [YN] [W]
née le [Date naissance 5] 1967 à [Localité 27]
[Adresse 1]
[Localité 11]
ET
Monsieur [B] [K]
né le [Date naissance 8] 2001 à [Localité 26]
[Adresse 16]
[Localité 12]
ET
Monsieur [OI] [W]
né le [Date naissance 2] 1989 à [Localité 22]
[Adresse 14]
[Adresse 14]
[Localité 9]
ET
Madame [M] [K]
née le [Date naissance 7] 1996 à [Localité 26]
[Adresse 4]
[Localité 20]
Tous représentés et assistés par Me Frédéric LE BONNOIS de la SELARL CABINET REMY LE BONNOIS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0299, substitué à l'audience par Me Maelle LE THOREAU LA SALLE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0299
INTIMÉS
Monsieur [Z] [RU]
Polyclinique [25]
[Adresse 6]
[Localité 10]
ET
PANACÉA ASSURANCES(GROUPE PASTEUR MUTUALITE), prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 13]
[Localité 19]
Représentés et assistés par Me Amélie CHIFFERT de l'AARPI ACLH AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0845, substitué à l'audience par Me Elsa AUBERTEL, avocat au barreau de PARIS, toque : A0845,
ONIAM - OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MÉDICAUX DES AFFECTIONS IATROGÈNES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES, pris en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 30]
[Adresse 30]
[Localité 21]
Représenté par Me Nathalie LESENECHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2090
Assisté de Me Pierre RAVAUT de la SELARL BIROT-RAVAUT ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX, toque : 798
CAISSE LOCALE DELEGUEE POUR LA SECURITÉ SOCIALE DES TRAVAILLEURS INDEPENDANTS venant aux droits du RSI
[Adresse 3]
[Localité 18]
Représentée et assistée par Me Sylvain NIEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2032
INTERVENANTE VOLONTAIRE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU PUY DE DOME, venant aux droits et obligations de la CAISSE LOCALE DÉLÉGUÉE POUR LA SÉCURITÉ SOCIALE DES TRAVAILLEURS INDÉPENDANTS, venant aux droits et obligations du RSI, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 15]
[Localité 17]
Représentée et assistée par Me Sylvain NIEL, avocat au barreau de PARIS, toque : D2032
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été plaidée le 25 Janvier 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Florence PAPIN, Présidente
Mme Valérie MORLET, Conseillère
Madame Anne ZYSMAN, Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Valérie MORLET, Conseillère dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Florence PAPIN, Présidente et par Ekaterina RAZMAKHNINA, greffier, présent lors de la mise à disposition.
***
Faits et procédure
Madame [YN] [W], née le [Date naissance 5] 1967, souffrant d'une obésité importante, s'est vue au mois de février 2000 mettre en place un anneau périgastrique par le docteur [F] et a ensuite perdu du poids. Mais elle a au mois d'avril 2005 été victime d'un accident sur la voie publique et a dû se voir retirer cet anneau courant 2006, reprenant alors du poids.
Sur le conseil de son médecin, le docteur [H], elle a consulté le docteur [Z] [RU], chirurgien digestif exerçant à la polyclinique de [25] (ou clinique des [28]), qui lui a proposé plusieurs solutions et a le 22 août 2008 et à sa demande, pratiqué une sleeve gastrectomie. La patiente a quitté l'hôpital le 27 août 2008.
Ressentant des douleurs le 29 août 2008, elle a pris contact avec le docteur [RU] en fin d'après-midi et a plus tard en soirée, devant l'aggravation de ses douleurs, été conduite au service des urgences du centre hospitalier [29] de [Localité 26]. Elle a ensuite le 30 août 2008 été transférée à la polyclinique de [25], où elle a été réopérée le jour même par le docteur [X] [O] pour une péritonite purulente (provoquée par une rupture de sutures, ou fistule gastrique) puis, en raison d'un choc septique sévère, transférée au service de réanimation de la polyclinique[24]d. Elle y est restée hospitalisée et une reprise chirurgicale a été réalisée le 17 septembre 2008 (drainage sous laparoscopie puis laparotomie). Elle a quitté le service de réanimation le 2 octobre 2008 pour le service de soins continus, puis a le 21 octobre 2008 été à nouveau transférée à la polyclinique [25] pour la poursuite des soins, puis au centre de rééducation des Grands Chais le 25 novembre 2008 pour une rééducation motrice et une prise en charge psychothérapique. La patiente a regagné son domicile le 26 mars 2009 et a alors été prise en charge en hôpital de jour à [Localité 26] pour une poursuite de la rééducation associée à une prise en charge psychiatrique.
Madame [W] a de nouveau été hospitalisée à la polyclinique de [25] du 9 au 14 novembre 2009 pour une chirurgie par cure d'éventration réalisée par le docteur [RU], puis de nouveau en hospitalisation de jour à [Localité 26] pour une prise en charge associant kinésithérapie, ergothérapie et psycho-relaxation du 19 octobre au 8 décembre 2010.
Elle souffre d'une neuropathie du membre supérieur droit, associée à des troubles neurologiques, des troubles du transit et une dyspareunie.
*
Madame [W] a par courrier du 11 juin 2010 saisi la Commission de Conciliation et d'Indemnisation des accidents médicaux (CCI) de la région Aquitaine d'une demande d'indemnisation dirigée contre le centre hospitalier de [Localité 26], la polyclinique de [25] assurée par la SA AXA France IARD, les docteurs [RU] et [O]. Les docteurs [S] [L], chirurgien viscéral, et [X] [T], qualifié en réparation du préjudice corporel, ont été désignés en qualité d'experts par décision du 14 octobre 2010
Les experts ont déposé un rapport le 11 avril 2011.
Au vu de ce rapport, la CCI a par avis du 19 octobre 2011 écarté une prise en charge de l'accident médical non fautif et a estimé que la réparation des préjudices subis par Madame [W] incombait à l'assureur du centre hospitalier de [Localité 26] à hauteur de 30%, a mis hors de cause la polyclinique de[25]e et les docteurs [RU] et [O], a constaté que l'état de santé de la patiente n'était pas consolidé et dit qu'il lui appartenait de la saisir à nouveau après consolidation. La Commission a ensuite énuméré les préjudices qu'il convenait d'indemniser à titre provisionnel et à hauteur de 30% et dit qu'il appartenait à l'assureur du centre hospitalier de [Localité 26] d'adresser une offre d'indemnisation à la patiente.
En désaccord avec l'avis de la CCI, Madame [W] a le 4 juillet 2012 saisi le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux aux fins d'expertise, au contradictoire de l'Office National d'Indemnisation des Accidents Médicaux, des Affections Iatrogènes et des Infections Nosocomiales (ONIAM), de la caisse du Régime Social des Indépendants (RSI) d'Aquitaine (organisme de sécurité sociale dont elle dépendait alors) et du centre hospitalier de [Localité 26]. Le professeur [G] [R] a par ordonnance du 5 avril 2013 été désigné en qualité d'expert.
L'expert a clos et déposé son rapport le 27 novembre 2014.
Madame [W] a au vu de ce rapport et par acte du 9 février 2015 assigné le docteur [RU], l'ONIAM, le centre hospitalier [29] de [Localité 26] et le RSI d'Aquitaine devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins d'expertise judiciaire. Le professeur [V] [FS] a été désigné en qualité d'expert par ordonnance du 30 mars 2015. Une requête en omission de statuer a été déposée par Madame [W] (concernant l'étendue de la mission de l'expert) et rejetée par le juge des référés par ordonnance du 15 juin 2015.
Madame [W] a à nouveau assigné le docteur [RU], l'ONIAM, le centre hospitalier de [Localité 26] et le RSI devant le juge des référés et une nouvelle mesure d'expertise médicale a été confiée au professeur [FS] selon ordonnance du 9 novembre 2015, le juge des référés rejetant par ailleurs la demande de mise hors de cause présentée par le centre hospitalier de [Localité 26]. Ce dernier a interjeté appel de cette ordonnance et la cour d'appel de Bordeaux l'a par arrêt du 26 octobre 2017 infirmée au regard de l'autorité de la chose jugée attachée à l'ordonnance du 30 mars 2015, Madame [W] étant déclarée irrecevable en sa nouvelle demande d'expertise.
L'expert judiciaire désigné par le juge des référés judiciaire a clos et déposé son rapport le 3 octobre 2016.
*
Au vu de ce rapport et faute de solution amiable, Madame [W], son compagnon Monsieur [P] [BC] et ses trois enfants, [B] et [M] [K] et [OI] [W] ont par actes des 31 mars, 3, 4, 6, 12 et 27 avril 2017 assigné l'ONIAM, le docteur [RU] et son assureur la SA Panacéa Assurances, le centre hospitalier de [Localité 26] et son assureur la SA AXA France IARD ainsi que le RSI, en responsabilité et indemnisation devant le tribunal de grande instance de Paris.
La Caisse Locale Déléguée pour la Sécurité Sociale des Indépendants (CLDSSTI) est volontairement intervenue à la procédure en lieu et place du RSI.
Le juge de la mise en état a par ordonnance du 4 décembre 2017 constaté l'incompétence de la juridiction judiciaire pour statuer sur les demandes des consorts [W] à l'encontre du centre hospitalier de [Localité 26] et leur désistement d'instance à l'encontre de son assureur, la compagnie Axa France.
Le tribunal, par jugement du 18 mars 2019, a :
- déclaré la CLDSSTI recevable en son intervention volontaire,
- rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise du docteur [FS] (présentée par Madame [W]),
- dit n'y avoir lieu à nouvelle mesure d'expertise,
- dit que la fuite de la suture gastrique du 29 août 2008 subie par Madame [W] constitue un accident médical non fautif,
- dit que le retard de prise en charge de la fistule est constitutif d'une faute,
- fixé la part du préjudice à la charge de la solidarité nationale à une proportion de 30%,
- sur les 70% restant fixé la responsabilité du docteur [RU] dans le retard de prise en charge à hauteur de 30% et fixé en conséquence la part du préjudice à sa charge in solidum avec la compagnie Panacéa Assurances à hauteur de 70 X 30% = 21%,
- rejeté la demande de condamnation du docteur [RU] et de sa compagnie d'assurance à prendre en charge l'ensemble des préjudices subis à charge pour lui d'engager une action récursoire contre le centre hospitalier de [Localité 26],
- condamné l'ONIAM et le docteur [RU], ce dernier in solidum avec la compagnie Panacéa Assurances à réparer le préjudice subi dans les proportions précitées,
- débouté Madame [W] de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice d'agrément,
- sursis à statuer sur les postes de pertes de gains professionnels futurs à compter du 1er avril 2018 et sur l'incidence professionnelle dans l'attente de la production par Madame [W] de sa nouvelle situation à l'issue de sa reconversion professionnelle,
- alloué à Madame [W] l'indemnisation par postes de préjudices comme suit :
. 3.942,10 euros au titre des frais divers,
. 37.928 euros au titre des pertes de gains professionnels avant consolidation,
. 157.276,07 euros au titre de la tierce personne,
. 58.641,44 euros au titre des pertes de gains professionnels après consolidation jusqu'au 31 mars 2018,
. 11.345 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,
. 35.000 euros au titre des souffrances endurées,
. 2.000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,
. 56.000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,
. 6.000 euros au titre du préjudice esthétique permanent,
. 4.000 euros au titre du préjudice sexuel,
- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la décision,
- condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à Monsieur [BC] 21% des indemnités suivantes :
. 7.122,14 euros au titre des frais de déplacements,
. 8.000 euros au titre du préjudice d'affection,
. 6.000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence,
avec intérêts au taux légal à compter de la décision,
- débouté Monsieur [BC] de sa demande d'indemnisation au titre des frais de loyers,
- condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à Monsieur [OI] [W] 21% des indemnités suivantes :
. 6.000 euros au titre du préjudice d'affection,
. 4.000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence,
avec intérêts au taux légal à compter de la décision,
- condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à Madame [M] [K] 21% des indemnités suivantes :
. 6.000 euros au titre du préjudice d'affection,
. 6.000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence,
avec intérêts au taux légal à compter de la décision,
- condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à Monsieur [B] [K], représenté par sa mère Madame [W], 21% des indemnités suivantes :
. 6.000 euros au titre du préjudice d'affection,
. 6.000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence,
avec intérêts au taux légal à compter de la décision,
- condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à la CLDSSTI 21% de sa créance s'élevant à 199.503,57 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2017 sur la somme de 194.054,85 euros et du 12 novembre 2018 pour le surplus,
- condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à la CLDSSTI 21% de sa créance s'élevant à 1.362,18 euros au titre des arrérages échus du 1er décembre 2018 au 28 février 2019 de la pension d'invalidité, avec intérêts au taux légal à compter de la date d'exigibilité de la pension versée,
- dit que la créance de la CLDSSTI s'impute sur les postes de dépenses de santé actuelles (156.289,62 euros), dépenses de santé futures (818,50 euros), pertes de gains professionnels actuels (6. 247,23 euros), et en ce qui concerne les arrérages échus et à venir de la pension d'invalidité servie sur le poste de pertes de gains professionnels actuels (5.189,77 euros), pertes de gains professionnels futurs (30.958,45 euros au 30 novembre 2018 et 1.362,18 euros du 1er décembre 2018 au 28 février 2019),
- ordonné la capitalisation des intérêts légaux à compter de l'assignation,
- condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à la CLDSSTI la somme de 1.066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de l'article L376-1 du code de la sécurité sociale,
- condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à la CLDSSTI la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à Madame [W] la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances aux dépens comprenant les frais d'expertises,
- dit que Maître Sylvain Niel et la SELARL Cabinet Rémy Le Bonnois (Maître Frédéric Le Bonnois), pourront recouvrer directement les dépens dont ils auraient fait l'avance sans avoir reçu provision,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision à concurrence des deux tiers de l'indemnité allouée et en totalité en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens,
- rejeté le surplus des demandes, plus amples ou contraires.
Madame [W] et ses enfants ont par acte du 9 avril 2019 interjeté appel de ce jugement, intimant le docteur [RU] et son assureur la compagnie Panacéa Assurances (groupe Pasteur Mutualité), l'ONIAM et la CLDSSTI devant la Cour. Le dossier a été enrôlé sous le n°19/7553.
L'ONIAM a également, par acte du 18 mai 2019, interjeté appel du jugement, intimant Madame [W], le docteur [RU] et son assureur la compagnie Panacéa Assurances et la CLDSSTI devant la Cour. L'affaire a été enregistrée sous le n°19/10604.
Les deux instances ont été jointes par ordonnance du 20 décembre 2019.
*
Par un premier arrêt du 18 novembre 2021, la Cour de céans, dans la limite de l'appel dont elle était saisie, a :
- confirmé le jugement du 18 mars 2019 en ce qu'il a :
. déclaré recevable l'intervention volontaire de la CLDSSTI,
. rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise du docteur [FS],
. dit que la fuite de la suture gastrique du 29 août 2008 constitue un accident médical non fautif et que le retard de prise en charge de cette complication de la sleeve gastrectomie est constitutif d'une faute,
. condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à la CLDSSTI la somme de 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
. condamné in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à payer à Madame [W] la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens comprenant les frais d'expertises, dépens dont le recouvrement direct était autorisé,
. ordonné l'exécution provisoire de la présente décision à concurrence des deux tiers de l'indemnité allouée et en totalité en ce qui concerne les frais irrépétibles et les dépens,
- infirmé le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
- dit que la rupture de la suture par agrafage constitue un accident médical non fautif auquel est imputable 30% des préjudices subis par Madame [W] et que le retard dans la prise en charge de cette complication de la sleeve gastrectomie pratiquée le 22 août 2009 est à l'origine de 70% des préjudices subis par Madame [W] et ses enfants, [OI] et [M] [W] et [B] [K],
- mis hors de cause l'ONIAM,
- dit que le docteur [RU] et son assureur la compagnie Panacéa Assurances sont tenus in solidum à réparer les préjudices de Madame [W] et ses enfants à hauteur de 70% et en conséquence, les condamne in solidum à payer, avec intérêts au taux légal à compter de la décision de première instance les sommes de :
. 4.200 euros au titre du préjudice d'affection et 2.800 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence à Monsieur [OI] [W],
. 4.200 euros au titre du préjudice d'affection et 4.200 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence à Madame [M] [K],
. 4.200 euros au titre du préjudice d'affection et 4.200 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence à Monsieur [B] [K],
Sur les demandes de Madame [W] et du RSI,
- ordonné une mesure d'expertise, confiée au docteur [E] [Y], avec une mission classique en la matière,
- dit que le rapport doit être déposé avant le 1er septembre 2021 sauf prorogation expresse,
- fixé à la somme de 3 000 euros le montant de la provision à valoir sur les frais d'expertise, à la charge de Madame [W] avant le 1er janvier 2021,
- renvoyé le dossier en mise en état pour vérification du versement de la consignation,
- condamné in solidum le docteur [RU] et son assureur la compagnie Panacéa Assurances à payer à Monsieur [OI] [W], Madame [M] [W] et Monsieur [B] [K] la somme de 1.000 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile et à Madame [W] la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a d'ores et déjà exposés en cause d'appel,
- réservé les dépens d'appel, dont l'ONIAM, [OI] et [M] [W] et [B] [K] sont intégralement déchargés et sursoit à statuer sur les autres demandes de Madame [W] et du RSI, jusqu'au dépôt du rapport d'expertise.
L'expert judiciaire a clos et déposé son rapport le 27 janvier 2023.
*
Les parties ont conclu en ouverture de rapport.
Madame [W], dans ses dernières conclusions signifiées le 4 janvier 2024, demande à la Cour de :
- appliquer le barème de capitalisation extrait de la Gazette du Palais du 31 octobre 2022,
- condamner in solidum le docteur [RU] et son assureur la compagnie Panacéa Assurances à lui verser l'indemnisation suivante, en deniers ou quittances, avec capitalisation des intérêts légaux à compter de l'assignation :
. 9.340,85 euros au titre des frais divers,
. 270.178,42 euros au titre de la tierce personne avant consolidation,
. 40.940,00 euros au titre des pertes de gains professionnels avant consolidation (et à titre subsidiaire fixer l'indemnisation à 27.414,80 euros),
. 609.108,42 euros au titre de la tierce personne après consolidation,
. 26.500,04 euros au titre des frais de véhicule aménagé,
. 1.278.577,99 euros au titre des pertes de gains professionnels après consolidation (et à titre subsidiaire fixer l'indemnisation à 915.618,03 euros),
. 100.000 euros au titre de l'incidence professionnelle,
. 26.500,04 euros au titre des frais de véhicule adapté [sic, redite],
. 18.465 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,
. 50.000 euros au titre des souffrances endurées,
. 7.000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,
. 148.396,26 euros au titre du déficit fonctionnel permanent (et à titre subsidiaire, fixer l'indemnisation à 100.000 euros)
. 6.000 euros au titre du préjudice esthétique permanent,
10.000 euros au titre du préjudice sexuel,
. 8.000 au titre de l'article 700 du « CPC » en cause d'appel,
. les entiers dépens d'appel, avec distraction au profit de la SELARL Cabinet Rémy Le Bonnois (Maître Frédéric Le Bonnois),
- rendre l'arrêt à intervenir commun à la CPAM du Puy-de-Dôme venant aux droits de la CLDSSTI.
Le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances (groupe Pasteur Mutualité), dans leurs dernières conclusions n°2 signifiées le 28 décembre 2023, demandent à la Cour de :
- appliquer le BCRIV 2023 pour les postes de préjudice soumis à capitalisation,
- liquider les préjudices de Madame [W] de la manière suivante :
. frais divers :
. frais en lien avec les expertises :
. frais de médecin conseil : 4.556,80 euros,
. frais de déplacement aux expertise et CCI : débouté,
. reproduction du dossier médical : 51,03 euros,
. autres frais divers :
. remboursement des frais de télévision : 220 euros,
. frais de déplacement aux séances de kinésithérapie : 165,19 euros,
. assistance par tierce personne avant consolidation :
. besoins propres de Madame [W] : 14.755,71 euros,
. besoins de compensation par son compagnon de l'époque : débouté (subsidiairement 4.020 euros),
. placement des enfants en famille d'accueil : débouté,
. pertes de gains professionnels actuelles : 17.948 euros,
. assistance par tierce personne après consolidation : 76.747,86 euros,
. pertes de gains professionnels futures :
. jusqu'au 30 mars 2019 : 47 310,91 euros ;
. à compter du 1er avril 2019 : débouté (subsidiairement 7.180,79 euros),
. incidence professionnelle : 30.000 euros,
. frais de véhicule aménagé : 9.130,71 euros,
. déficit fonctionnel temporaire : 15.387,50 euros,
. souffrances endurées : 35.000 euros,
. déficit fonctionnel permanent : 56.000 euros,
. préjudice esthétique définitif : 3.000 euros,
. préjudice d'agrément : sans objet en l'absence de demande,
. préjudice sexuel : 2.000 euros,
- juger qu'ils ne pourront être condamnés à réparer le préjudice subi par Madame [W] que dans la limite de 70% des sommes précitées,
- juger que la créance de la CPAM du Puy de Dôme, venant aux droits du RSI, s'élève à la somme de :
. dépenses de santé actuelles :
. 44.352,30 euros au titre des frais d'hospitalisation,
. 0 euros (débouté) au titre des frais médicaux,
. dépenses de santé futures : 0 euros (débouté),
. indemnités journalières : 6.247,23 euros,
. pension d'invalidité : 88.754,86 euros au titre des arrérages échus et à échoir,
- juger qu'ils ne pourront être condamnés à rembourser la créance de la CPAM du Puy de Dôme venant aux droits du RSI que dans la limite de 70% de son montant,
- statuer ce que de droit quant à la demande formulée par Madame [W] au titre des frais irrépétibles sans excéder la somme de 1.500 euros,
- statuer ce que de droit quant à la demande formulée par la CPAM du Puy de Dôme au titre des frais irrépétibles sans excéder la somme de 1.000 euros,
- statuer ce que de droit quant aux dépens.
La CPAM du Puy de Dôme, dans ses dernières conclusions n°4 signifiées le 12 janvier 2024, demande à la Cour de :
- la recevoir en son intervention volontaire en appel comme venant aux droits de la CLDSSTI qui venait aux droits du RSI,
- infirmer le jugement dont appel et statuant à nouveau,
Avant application du taux de responsabilité retenu,
- condamner in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à lui payer les sommes de :
. 156.289,62 euros en remboursement des prestations en nature prises en charge avant consolidation (DSA), avec intérêts de droit à compter du 27 novembre 2017 date de sa première demande en justice,
. 818,50 euros en remboursement des prestations en nature prises en charge après consolidation (DSF), avec intérêts de droit à compter du 27 novembre 2017 date de sa première demande en justice,
. 6.247,23 euros en remboursement indemnités journalières versées avant consolidation (PGPA), avec intérêts de droit à compter du 27 novembre 2017 date de sa première demande en justice,
. 90.238,27 euros en remboursement des arrérages échus au 30 septembre 2023 de la pension d'invalidité attribuée à Madame [W] et de capital représentatif de la rente invalidité au 1er octobre 2023, avec intérêts de droit à compter du 27 novembre 2017 date de sa première demande en justice pour la somme de 30.699,50 euros et du 12 novembre 2018 pour 42.268,07 euros et du 27 octobre 2023 pour 88.754,86 euros et du 12 janvier 2024, date des présentes, pour le surplus,
- dire que les intérêts échus pour une année entière à compter de la décision produiront eux-mêmes intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,
- dire qu'elle exerce son recours :
. en ce qui concerne les prestations en nature prises en charge avant consolidation, sur le poste dépenses de santé actuelles (DSA) qui sera fixé à la somme de 156.289,62 euros,
. en ce qui concerne les prestations en nature prises en charge après consolidation, sur le poste dépenses de santé futures (DSF) qui sera fixé à la somme de 818,50 euros,
. en ce qui concerne les indemnités journalières sur le poste pertes de revenus temporaires (PGPA) qui sera fixé à la somme de 52.377 euros,
. en ce qui concerne les arrérages échus et à venir, de la pension d'invalidité servie prioritairement sur le poste pertes de revenus futurs (PGPF), puis si besoin sur les postes incidence professionnelle (IP) et déficit fonctionnel permanent (DFP),
- infirmer le jugement sur le montant et condamner in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à lui payer la somme de 1.191 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de l'article L376-1 du code de la sécurité sociale,
- préciser que toutes les condamnations prononcées au profit de la CLDSSTI le sont à son profit, venant aux droits de celle-ci,
- condamner in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances à lui payer la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile en sus de la condamnation à ce titre de première instance qui sera confirmée,
- condamner in solidum le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances aux entiers dépens, avec distraction au profit de Maître Sylvain Niel.
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La clôture de la mise en état du dossier a été ordonnée le 17 janvier 2024, l'affaire plaidée le 25 janvier 2024 et mise en délibéré au 28 mars 2024.
Motifs
La Cour de céans a dans son précédent arrêt du 13 janvier 2021 sur le fondement de l'article L1142-1 point II du code de la santé publique retenu que la fuite de la suture gastrique, subie le 29 août 2008 par Madame [W] en suite de l'opération de sleeve gastrectomie pratiquée par le docteur [RU] le 22 août 2008, constituait un accident médical non fautif à l'origine de 30% des préjudices subis par la patiente, mais qu'il ne pouvait donner lieu à une indemnisation par la solidarité nationale alors que cette complication n'était pas une conséquence anormale de l'acte médical en cause. L'ONIAM a ainsi été mis hors de cause.
Il a également été jugé, sur le fondement de l'article L1142-1 point I du code de la santé publique, que Madame [W] avait été victime d'une prise en charge trop tardive par le docteur [RU] des complications de l'opération survenues le 29 août 2008, et que le médecin et son assureur, la compagnie Panacéa Assurances, étaient tenus in solidum à réparer les préjudices de Madame [W] et ses enfants à hauteur de 70%, avec intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris, étant rappelé que le partage de responsabilité entre le médecin et le centre hospitalier de [Localité 26] (dont la faute doit être examinée par le tribunal administratif) n'est pas opposable à la patiente.
La Cour a statué sur les demandes indemnitaires des enfants de Madame [W], Messieurs [W] et [K] et Madame [K], et a ordonné une nouvelle expertise pour examiner l'intéressée. Sont donc seuls désormais discutés l'indemnisation des préjudices subis par Madame [W] elle-même et le remboursement des indemnités servies par la CPAM (venant aux droits de la CLDSSTI, venant elle-même aux droits du RSI).
Sur l'intervention volontaire de la CPAM
Madame [W] était initialement affiliée au Régime Social des Indépendants (RSI, caisse régionale d'Aquitaine), créé par ordonnance n°2005-1528 du 8 décembre 2005, et dépendait de la Caisse régionale du RSI d'Aquitaine.
Le 1er mars 2015, les directeurs et agents comptables des caisses concernées ont signé une convention de délégation de l'activité de recours contre tiers en application de l'article L611-11 du code de la sécurité sociale, aux termes de laquelle la Caisse régionale du RSI d'Aquitaine a cédé à la Caisse régionale d'Auvergne l'activité de recours contre tiers.
Le régime du RSI a par ailleurs été supprimé par l'article 15 de la loi n°2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018 et ses missions progressivement transférées au régime général de la sécurité sociale et à de nouveaux organismes créés à cet effet. Dans le cadre de ce transfert progressif et depuis le 1er janvier 2018, la Caisse nationale du RSI a provisoirement pris le nom de Caisse Nationale Déléguée pour la Sécurité Sociale des Travailleurs Indépendants (CNDSSTI) et c'est ainsi que la Caisse Locale Déléguée pour la Sécurité Sociale des Travailleurs Indépendants (CLDSSTI), venant aux droits du RSI à cette date, est volontairement intervenue à l'instance devant les premiers juges, ce dont ils ont pris acte.
Or, si la mission du recouvrement des créances de l'ancien RSI (cotisations des travailleurs indépendants) a été transférée à l'URSSAF, ainsi que l'indique la Cour dans son arrêt du 18 novembre 2021, la gestion des prestations sociales a été transférée aux CPAM.
La CPAM du Puy de Dôme a été désignée en qualité d'organisme liquidateur de la CLDSSTI d'Auvergne selon décret du 4 mars 2020 relatif à la clôture des comptes et la liquidation de la Caisse nationale et des caisses locales déléguées pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants.
Monsieur [ML] [WR], directeur général de la Caisse Nationale d'Assurance Maladie (CNAM) a par décision du 1er janvier 2020 dit, notamment, que « le pôle national RCT [Recours Contre Tiers] TI de la caisse primaire d'assurance maladie de Clermont-Ferrand prend en charge l'activité de recours contre tiers relatif à tous les assurés travailleurs indépendant et/ou bénéficiaires affiliés au sein d'une caisse de France métropolitaine ou des départements et régions d'outre-mer », précisant que les pôles RCT devaient gérer intégralement le recours contre tiers, de l'ouverture des dossiers à leur clôture, d'une part, agir et/ou représenter les caisses en justice dans le cadre de recours contre tiers, à titre principal ou incident, d'autre part, et recouvrer, encaisser et mener les contrôles des dossiers, enfin.
C'est ainsi que la CPAM du Puy de Dôme vient aujourd'hui aux droits de la CLDSSTI et intervient volontairement à l'instance en ses lieu et place, conformément aux dispositions 328 et suivants du code de procédure civile. La Cour la reçoit en cette intervention.
Le RSI, puis la CLDSSTI et la CPAM ayant été ou étant régulièrement parties à l'instance, l'arrêt leur est de facto commun.
Sur la liquidation des préjudices de Madame [W]
La Cour, dans son jugement du 18 novembre 2021, a infirmé le jugement dont appel, notamment en ce qui concerne l'indemnisation des préjudices subis par Madame [W]. L'évaluation proposée par les premiers juges sera rappelée pour mémoire.
Liminaire, sur la date de la consolidation de l'état de santé de Madame [W]
Il convient de tenir compte d'une consolidation de l'état de santé de Madame [W] à la date du 22 août 2011, telle que retenue par le professeur [FS], expert désigné par le juge des référés du tribunal de grande instance de Bordeaux, dans son rapport du 3 octobre 2016, ainsi que le docteur [Y], expert désigné par la Cour de céans, dans son rapport du 27 janvier 2023, et non discutée par les parties.
1. sur les préjudices patrimoniaux temporaires, avant consolidation du 22 août 2011
Madame [W] ne présente aucune demande au titre de dépenses de santé actuelles restées à sa charge. La créance de la CPAM à ce titre, présentée à hauteur de 156.289,62 euros, sera examinée plus bas.
(1) sur les frais divers
Les premiers juges ont évalué les frais divers indemnisables supportés par Madame [W] à hauteur de 3.942,10 euros.
Madame [W] fait état de frais en lien avec les expertises ou autres frais divers, dont elle demande le remboursement à hauteur de la somme totale de 9.340,85 euros.
Le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances évaluent ces frais à hauteur de 4.993,02 euros.
Sur ce,
Sur les frais en lien avec les expertises
Les frais d'assistance aux opérations d'expertise ainsi que les frais de déplacement pour se rendre aux réunions constituent des préjudices indemnisables.
Madame [W] justifie d'une note d'honoraires du 7 octobre 2013 du docteur [U] [DG] au titre de son « assistance à une expertise judiciaire pratiquée par le Dr [R] », sans établir avoir effectivement réglé cette facture qui est adressée à son conseil (qui a alors pu la lui refacturer dans le cadre de ses propres honoraires). Sa demande de ce chef sera rejetée. Elle communique ensuite une note d'honoraires du même médecin, qui l'a assistée au cours des deux expertises judiciaires, dressée à son nom le 11 avril 2016 pour la somme de 1.500 euros HT, soit 1.800 euros TTC. Il sera donc fait droit à sa demande à ce titre.
Elle verse ensuite aux débats une note d'honoraires du 31 octobre 2013 du docteur [I] [J] concernant une évaluation neuropsychologique pour la somme de 650 euros. Il n'est certes pas justifié de la demande d'une telle évaluation par une juridiction ou un expert, mais les experts judiciaires ont manifestement tenu compte de celle-ci pour évoquer sa fatigabilité, son anxiété, ses difficultés cognitives, ses troubles de l'attention, etc. Aussi sera-t-il fait droit à la demande d'indemnisation de l'intéressée à hauteur de ladite somme.
Le docteur [RU] et son assureur ne s'opposent pas à la prise en charge de la note d'honoraires du 17 janvier 2023 du docteur [A] [N], qui a assisté Madame [W] au cours de la dernière expertise judiciaire. La facture fait état d'une somme de 3.750 euros HT, soit 4.500 euros TTC. Madame [W] sollicite la seule somme de 2.756 euros. Il en est pris acte et celle-ci sera mise à la charge du médecin et de son assureur.
Il est ensuite pris acte de l'accord des parties concernant la demande de Madame [W] de prise en charge de ses frais de reproduction de ses dossiers médicaux, à hauteur de la somme de 15 + 15 + 15 + 6,03 = 51,03 euros (factures de la polyclinique de [25] des 29 juin 2009 et 27 décembre 2010, de la polyclinique de [24] du 17 juillet 2009 et du CMPRF des Grands Chênes du 10 juillet 2009).
Les frais de déplacement de Madame [W] pour son bilan neuropsychologique seront retenus, alors que l'évaluation en cause a été reconnue utile aux opérations expertales (128 kilomètres, sur la base d'un tarif de 0,697 euros le kilomètre, soit une somme de 267,65 euros). Il en sera de même des frais de déplacement pour les réunions de la CCI (sur la base du même tarif kilométrique et de 108 kilomètres, soit une somme de 75,28 euros) ainsi que pour les opérations d'expertise auxquelles le médecin et son assureur ont été parties (docteurs [L] et [T], docteur [FS] - étant rappelé que si Madame [W] a été déclarée irrecevable en sa demande de nouvelle expertise confiée au docteur [FS], sa première demande à ce titre a bien été reçue - et docteur [Y], correspondant à une somme, sur la base du même tarif kilométrique et de 374 kilomètres et 1.270 kilomètres et des billets de train produits, de 260,68 + 874,04 + 74 + 38 = 1.246,72 euros). La demande de Madame [W] au titre des frais de déplacement pour se rendre aux opérations expertales du docteur [R], auxquels le docteur [RU] et son assureur n'ont pas été parties, sera en revanche rejetée (885,19 euros). Le préjudice de Madame [W] au titre des frais de transport sera donc liquidé à hauteur de la somme totale de 267,65 + 75,28 + 1.246,72 = 1.589,65 euros.
Sur les autres frais divers
La polyclinique de [Localité 23] a facturé à Madame [W] 247,50 euros TTC de frais de télévision au titre de son hospitalisation du 3 octobre au 26 novembre 2008 outre 27,50 euros au titre de la période du 9 au 14 novembre 2009 (deux factures du 19 avril 2010), soit une somme totale de 275 euros. Ces périodes d'hospitalisation sont en lien avec le retard de la prise en charge de la fistule dont a souffert la patiente et les frais peuvent être mis à la charge du docteur [RU] et de son assureur.
Madame [W] justifie en outre de 90 séances de kinésithérapie auxquelles elle a dû se rendre, sollicitant, sur la base d'une distance parcourue de 6 kilomètres par séance et d'un tarif kilométrique de 0,697 euros, la somme totale de 376,38 euros. Ces séances sont indéniablement en lien avec les préjudices subis par l'intéressée du fait de la faute du docteur [RU], ainsi que cela ressort notamment des rapports d'expertise judiciaires. Les frais de déplacement constituent en conséquence un préjudice indemnisable et seront mis à la charge du médecin et de son assureur.
***
Le préjudice de Madame [W] lié aux frais divers, supportés au titre des expertises ou autres, doit ainsi, au vu de ces éléments, être liquidé à hauteur de la somme totale de 1.800 + 650 + 2.756 + 51,03 + 1.589,65 + 275 + 376,38 = 7.498,06 euros.
(2) sur l'assistance d'une tierce personne
Les premiers juges ont rejeté la demande de Madame [W] au titre de frais relatifs à la prise en charge des enfants par une famille d'accueil, puis au vu du rapport du docteur [FS] du 3 octobre 2016 ont évalué les besoins de Madame [W] au titre de l'aide d'une tierce personne à hauteur de la somme de 28.032 euros, pour deux heures par jour pendant 867 jours et sur la base d'un tarif horaire de 16 euros, outre 4.288 euros au titre de l'aide pendant ses périodes d'hospitalisation, soit une somme totale de 32.320 euros à ce titre.
Madame [W] sollicite l'indemnisation d'une tierce personne, tant pour la garde de ses enfants que pour ses besoins personnels, sur la base d'un tarif horaire de 30 euros et de 412 jours par an pour tenir compte des congés payés, à hauteur de 2 heures 30 par jour du 27 mars au 19 octobre 2009 (soit 17.524,11 euros), de trois heures par jour du 15 novembre au 15 décembre 2009 (soit 3.149,26 euros), de deux heures par jour du 16 décembre 2009 au 9 décembre 2010 (soit 24.313,64 euros) et de deux heures par jour du 10 décembre 2010 au 21 août 2011 (soit 12.952,60 euros). Elle réclame en outre une compensation pour ses enfants pendant ses périodes d'hospitalisation à hauteur de 147.100,93 euros pour la famille d'accueil et de 65.137,88 euros pour Monsieur [BC]. Elle réclame ainsi la somme totale de 270.178,42 euros au titre de l'aide d'une tierce personne avant consolidation de son état de santé.
Le docteur [RU] et son assureur s'opposent à l'allocation d'une indemnité pour tierce personne pour la garde des enfants assurée par Monsieur [BC], père des enfants, ainsi que lors des placements des enfants en famille d'accueil, rémunérée. Ils considèrent ensuite que l'aide d'une tierce personne pour Madame [W] elle-même doit être calculée sur la base d'un tarif horaire de 15 euros.
Sur ce,
Le docteur [Y], expert judiciaire désigné par la Cour, a dans son rapport déposé le 27 janvier 2023 évalué les besoins de Madame [W] au titre de l'aide d'une tierce personne, « spécialisée ou non », à compter de son retour à domicile le 26 mars 2009 à hauteur de deux heures par jour tous les jours de la semaine du 26 mars au 19 octobre 2009, d'une heure par jour tous les jours du 20 octobre 2009 au 30 décembre 2010 et de quatre heures par semaine du 31 décembre 2010 au 22 août 2011. Il a tenu compte des indications de l'ergothérapeute de Madame [W] évoquant les difficultés rencontrées par celle-ci lors de son retour à domicile pour préparer ses repas, faire sa toilette, s'habiller et faire le ménage (correspondant à la réalisation des gestes de la vie quotidienne). Cette évaluation des besoins de Madame [W] ne tient cependant pas compte de la présence de jeunes enfants à son domicile. Si [OI] [W], né le [Date naissance 2] 1989, était majeur au moment de l'accident médical dont sa mère a été victime au mois d'août 2008, [M] [K], née le [Date naissance 7] 1996, et [B] [K], né le [Date naissance 8] 2001, étaient encore jeunes et constituaient une charge nécessitant une aide. C'est ainsi que l'évaluation des besoins de Madame [W] par son médecin conseil, le docteur [N], qui tient compte de cette charge supplémentaire, apparaît plus réaliste et sera retenue par la Cour, avec une correction cependant pour la première période, alors que jusqu'au 3 juillet 2009 les enfants étaient hébergés en famille d'accueil :
- deux heures par jour du 27 mars au 3 juillet 2009 (sur 99 jours),
- deux heures et demi par jour du 4 juillet au 19 octobre 2009 (sur 108 jours),
- trois heures par jour du 15 novembre au 15 décembre 2009 (sur 31 jours),
- deux heures par jour du 16 décembre 2009 au 9 décembre 2010 (sur 359 jours),
- et une heure et demi par jour ensuite, du 10 décembre 2010 au 21 août 2011 (sur 255 jours),
étant constaté qu'il n'est ici pas tenu compte de la période du 20 octobre 2009 au 14 novembre 2009 (pendant laquelle Madame [W] n'a été hospitalisée que du 9 au 14 novembre 2009).
Madame [W] effectue légitimement ses calculs en les rapportant à une année de 412 jours, pour tenir compte des jours fériés et congés payés.
Le tarif horaire de 16 euros sur la base duquel les premiers juges ont évalué le coût de l'assistance d'une tierce personne et a fortiori le tarif de 15 euros proposé par le docteur [RU] et son assureur apparaissent insuffisants pour couvrir les besoins de Madame [W], mais le tarif horaire de 30 euros qu'elle-même propose est surévalué et la Cour retiendra un tarif horaire de 20 euros.
Lors de ses hospitalisations et entre le 4 janvier au 3 juillet 2009, les deux enfants mineurs ont été pris en charge par une famille d'accueil en semaine, du dimanche vers 18 heures au samedi suivant vers 10 heures (courrier du 29 décembre 2008 de l'assistante sociale du conseil général de la Gironde à l'inspectrice Prévention, également signé, pour accord, par Madame [W] et Monsieur [ZR] [K], père des enfants assurant le transport). Il n'y a donc pas lieu à indemnisation compensatrice pendant ces périodes, la prise en charge des enfants étant financée par le conseil général et n'entraînant aucun frais pour Madame [W].
Monsieur [K], père des enfants, atteste par ailleurs le 12 décembre 2023 qu'il prenait ses enfants en charge un week-end sur deux lorsque les enfants étaient placés en semaine pendant les hospitalisations de leur mère, et exceptionnellement l'autre week-end si Monsieur [BC], compagnon de Madame [W], ne pouvait les prendre. Si les périodes de garde des enfants par leur père ne peuvent donner lieu à indemnisation au profit de celle-ci, s'inscrivant dans le contexte classique de parents séparés, les périodes de garde des enfants par Monsieur [BC], qui n'est pas leur père mais le compagnon de Madame [W], s'inscrivent dans le cadre d'une aide familiale indemnisable. Aussi, pendant les périodes d'hospitalisation de Madame [W], du 29 août 2008 au 3 janvier 2009 (sur 128 jours), puis du 9 au 14 novembre 2009 (sur six jours), sera allouée à Madame [W] une indemnisation sur la base de deux heures par jour et un tarif horaire de 20 euros, une allocation supplémentaire n'étant pas justifiée au regard de l'âge des enfants et de leur scolarisation.
Ainsi et au terme de ces développements, il convient de liquider le préjudice de Madame [W] au titre de l'assistance d'une tierce personne avant consolidation de son état de santé, à hauteur des sommes de :
- [(128 + 6) X 2 X 20 X 412] ÷ 365 = 6.050,19 euros,
- (99 X 2 X 20 X 412) ÷ 365 = 4.469,91 euros,
- (108 X 2,5 X 20 X 412) ÷ 365 = 6.095,34 euros,
- (31 X 3 X 20 X 412) ÷ 365 = 2.099,50 euros,
- (359 X 2 X 20 X 412) ÷ 365 = 16.209,09 euros,
- (255 X 1,5 X 20 X 412) ÷ 465 = 8.635,06 euros,
soit une somme totale de 43.559,09 euros.
(3) sur les pertes de gains professionnels actuels
Les premiers juges ont évalué les pertes de gains professionnels actuels de Madame [W] à hauteur de 37.928 euros, au regard d'un salaire de référence de 1.381,25 euros, d'une période de 26 mois et des indemnités et prestations reçues, déduites.
Madame [W] évalue ce poste de préjudice à hauteur de la somme de 40.940 euros, sur 665 jours et sur la base d'un salaire mensuel moyen de référence de 1.900 euros actualisé à hauteur de 2.372 euros (et à titre subsidiaire, de 1.371,25 euros, actualisé à 1.758 euros).
Le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances chiffrent ce préjudice à hauteur de la somme de 17.948 euros, sur 400 jours et sur la base d'un salaire mensuel de 1.371,25 euros.
Sur ce,
Lorsqu'une sleeve gastrectomie est suivie de complications prises en charge dans les règles de l'art, les experts indiquent qu'en résultent un déficit fonctionnel temporaire total de dix à quinze jours puis un déficit fonctionnel temporaire partiel de 50% pendant un mois et de 25% pendant un nouveau mois, de sorte que Madame [W], face à des complications de son opération du 22 août 2008 prises en charge avec retard et en méconnaissance des règles de l'art, n'a subi un déficit indemnisable qu'à compter d'une date ne pouvant être fixée avant le 6 novembre 2008. Madame [W] ne réclame cependant l'examen de ses pertes de revenus actuelles qu'à compter du 7 novembre 2009, et il en est pris acte.
Le RSI a par courrier du 3 mars 2010 informé Madame [W] de ce qu'elle bénéficiait d'une invalidité partielle à compter du 1er décembre 2009 et la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) de la Gironde a reconnu sa qualité de travailleur handicapé du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2014 (notification du 4 mars 2010). Ainsi, si l'intéressée avait pu, après le 1er décembre 2009, reprendre une activité, celle-ci n'aurait été qu'à temps partiel et sur un poste adapté. Elle souffrait déjà, antérieurement à son opération et ses complications, d'autres pathologies qui ne l'avaient pourtant pas empêchée de travailler, et son absence de reprise d'une activité professionnelle après le mois de décembre 2009 est en lien avec ces complications et leurs suites. Il convient donc de retenir les pertes de revenus de Madame [W] entre le 7 novembre 2009 et le 31 août 2011, date de la consolidation de son état de santé, sur une période de 663 jours.
Madame [W] a déclaré avoir perçu des revenus de 7.020 + 5.913 = 12.933 euros en 2007 (salaires et bénéfices industriels et commerciaux) et de 14.492 en 2008, année de l'accident médical (revenus sur les huit premiers mois). Sa perte ultérieure de revenus doit donc être examinée au regard d'un revenu mensuel moyen de (12.933 + 14.492) ÷ (12 + 8) = 1.371,25 euros, qui sera actualisé, à ce jour, à la somme de 1.758 euros selon ses calculs raisonnables, soit 58,60 euros par jour.
Ainsi, Madame [W] a subi une perte de gains professionnels ensuite de la complication de son opération du 22 août 2008 d'un montant de 663 X 58,60 = 38.851,80 euros, somme de laquelle il convient de déduire les indemnités journalières servies par le RSI à hauteur de 6.247,23 euros (montant de la créance dont se prévaut à ce jour la CPAM, venant aux droits du RSI) et la pension d'invalidité réglée par l'Assurance Maladie à hauteur de 5.189,77 euros (somme comprise dans les arrérages échus en invalidité réclamés par la CPAM à hauteur de la somme totale de 56.656,78 euros).
En conséquence la Cour liquidera ce poste de préjudice à hauteur de la somme de 38.851,80 - (6.247,23 + 5.189,77) = 27.414,80 euros.
2. sur les préjudices patrimoniaux permanents, après consolidation du 22 août 2011
Madame [W] ne présente aucune demande au titre des dépenses de santé futures restées à sa charge. La créance de la CPAM, présentée à ce titre à hauteur de 818,50 euros sera examinée plus bas.
(1) sur l'assistance d'une tierce personne
Les premiers juges ont liquidé le préjudice de Madame [W] du chef de l'assistance d'une tierce personne après consolidation de son état de santé à hauteur de 24.710 euros du 23 août 2011 au 23 août 2018 (pendant sept ans, sur la base de trois heures par semaine et d'un tarif horaires de 20 euros), puis de la somme capitalisée de 100.236,07 euros ensuite, soit une somme totale de 124.946,07 euros.
Madame [W] estime cette évaluation insuffisante pour couvrir ses besoins et réclame la somme de 153.704,22 euros à la date de l'arrêt (une heure d'aide par jour sur la base d'un tarif horaire de 30 euros) outre la somme capitalisée de 455.404,20 euros ensuite, soit une somme totale de 609.108,42 euros.
Le docteur [RU] et son assureur évaluent ce poste de préjudice à hauteur de 76.747,86 euros.
Sur ce,
Le docteur [Y], expert désigné par la Cour, évalue les besoins de Madame [W] au titre de l'aide d'une tierce personne après consolidation de son état de santé à raison de deux heures par semaine (incluant une heure d'« aide administrative »).
Le docteur [N], médecin-conseil de Madame [W], évoque notamment dans son dire à l'expert du 14 janvier 2023 ses problèmes d'équilibre et de motricité, une baisse significative de la force musculaire, outre une fatigabilité à l'effort, des troubles de la coordination, etc., compliquant la réalisation du ménage, des courses et des tâches quotidiennes diverses et justifiant l'aide d'une tierce personne d'une heure par jour.
Si l'expert judiciaire a maintenu sa position malgré ces éléments, la Cour considère que son évaluation des besoins de Madame [W] est insuffisante au regard des séquelles de l'accident et retiendra les besoins de l'intéressée à hauteur d'une heure par jour hors les week-ends pendant lesquels lesdits besoins ne sont pas justifiés, soit cinq heures par semaine.
Madame [W] effectue légitimement ses calculs en les rapportant à une année de 412 jours, pour tenir compte des jours fériés et congés payés.
Le coût de l'aide d'une tierce personne sera retenu à hauteur de 20 euros de l'heure, suffisant pour couvrir les besoins de Madame [W].
Ainsi, du 23 août 2011 au 25 janvier 2024, sur une période de 4.539 jours, le coût de l'assistance d'une tierce personne au profit de Madame [W] doit être évalué à hauteur de [(4.539 X 412 ÷ 365) ÷ 7] X 5 X 20 = 73.192,48 euros.
Il convient ensuite de capitaliser les besoins de l'intéressée sur la base d'un point de rente viagère de 36,845 en tenant compte non du BCRIV (Barème de Capitalisation de Référence pour l'Indemnisation des Victimes, proposé par la Fédération française de l'assurance), mais du barème de capitalisation de la Gazette du Palais de 2022, qui reflète de manière sérieuse la situation des victimes, et d'un taux d'actualisation de (- 1%), au regard du contexte économique actuel et de l'âge de Madame [W], besoins qui s'élèvent ainsi à hauteur de (412 ÷ 7) X 5 X 20 X 36,845 = 216.859,14 euros.
Aussi, la Cour fixera le préjudice permanent de Madame [W] au titre de l'assistance d'une tierce personne à hauteur de la somme de 73.192,48 + 216.859,14 = 290.051,62 euros.
(2) sur les pertes de gains professionnels futurs
Les premiers juges ont évalué les pertes de gains professionnels futurs de Madame [W], après la consolidation de son état de santé et jusqu'au 31 mars 2018, sur la base d'un revenu de référence de 1.371,25 euros et déduction faite des revenus et pensions perçues, à hauteur de 58.641,44 euros.
Madame [W] fait état d'une perte de revenus totale et définitive, étant inapte à tout travail, et estime que ses pertes de gains professionnels futurs doivent être évaluées à titre viager. Sur la base d'un revenu mensuel de référence de 2.372 euros et déduction faite des quelques revenus déclarés et pensions versées par la CPAM, elle réclame une indemnisation à hauteur de 1.278.577,99 euros (ou, subsidiairement sur la base d'un revenu de référence de 1.758 euros par mois, à hauteur de 915.618,03 euros).
Le docteur [RU] et son assureur contestent les montants déduits par les premiers juges, erronés. Ils soutiennent ensuite que Madame [W] est apte à exercer une profession non physique, sédentaire et rémunératrice, observant qu'elle ne justifie pas de démarches pour retrouver un emploi et concluent au rejet de toute demande pour la période postérieure au 1er avril 2018 (ou à titre subsidiaire, à l'indemnisation d'une perte de chance de reprendre une activité, qu'ils évaluent à 30% et capitalisent sur la base d'un euro de rente temporaire jusqu'à 62 ans pour une femme âgée de 56 ans).
Sur ce,
Madame [W] était, avant l'accident médical dont elle a été victime, commerçante.
L'expert judiciaire (docteur [Y], rapport du 27 janvier 2023) indique qu'elle ne peut plus exercer une telle activité « en totalité » en raison de son caractère physique, ne pouvant demeurer en position debout de façon prolongée ni porter de charges lourdes. La Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) de Gironde lui a d'ailleurs le 4 mars 2010 notifié une décision de reconnaissance de sa qualité de travailleur handicapé du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2014, admettant que ses « possibilité d'obtenir, ou de conserver un emploi, sont effectivement réduites ».
Madame [W] souffre selon l'expert judiciaire de troubles de la mémoire, d'une grande fatigabilité, de manifestations anxio-dépressives, de séquelles de l'appareil locomoteur, de douleurs abdominales chroniques, etc. L'expert considère qu'il n'existe « pas d'inaptitude absolue et définitive à toute activité rémunératrice » et que l'intéressée peut exercer une activité « dont le poste devra en tout état de cause être adapté à son état de santé ». Madame [W] justifie avoir effectué un stage de pré-orientation du 28 septembre au 18 décembre 2015 au centre de la Tour de Gassies (sollicité par la MDPH de la Gironde) au terme duquel une formation « employé administratif et d'accueil » a été proposée. Le rapport de synthèse du 18 décembre 2015 de ce stage fait état de la fatigabilité de l'intéressée, de sensations de débordement du fait de son anxiété, d'un problème de repérage spatial, de difficultés cognitives du fait de troubles de l'attention et de la concentration, de difficultés à gérer le stress et note sa bonne volonté pour retrouver un emploi.
Mais si Madame [W] justifie d'un stage de formation non rémunéré du 1er juin au 13 juillet 2016 à l'INSUP (attestation du 1er juin 2016) et d'un stage de formation d'employé administratif au CRP de la Tour de Gassies du 21 août 2017 au 23 mars 2018 puis du 3 avril 2018 au 22 mars 2019 (attestation du groupe UGECAM du 22 mars 2019), elle ne démontre pas avoir ensuite mis en place des démarches de recherche d'emploi et avoir effectivement fait face à des refus de poste.
Si les conclusions expertales et celles qui ont été émises en fin de stage de pré-orientation mentionnent la nécessité d'un emploi sur un poste adapté et les difficultés que peut rencontrer Madame [W] dans un travail même sédentaire (difficultés confirmées par plusieurs arrêts de travail au cours de ses périodes de formation courant 2018, pour des malaises, pertes de connaissance et chutes), Madame [W] ne démontre aucunement la réalité d'une impossibilité de reprendre une activité professionnelle aménagée. Elle a d'ailleurs perçu quelques salaires entre 2014 et 2019. Il n'est ainsi pas établi qu'elle subisse une impossibilité totale d'exercer une activité professionnelle, du fait de sa situation ou encore de l'état du marché du travail.
Madame [W] sera en conséquence indemnisée non au titre d'une impossibilité de travailler, mais d'une perte de chance de retrouver un emploi adapté, qui au regard de sa situation physique et de son handicap ainsi que de son âge sera évaluée à 50%.
A l'instar de ce qui a été retenu au titre des pertes de revenus actuelles, la Cour tient compte d'un revenu de référence de 1.371,25 euros, actualisé à ce jour à la somme de 1.758 euros.
Entre le 1er septembre 2011 (date à partir de laquelle elle calcule ses pertes) et le 31 janvier 2024 (sur 149 mois), Madame [W] a subi une perte de chance de recouvrer des revenus similaires de (149 X 1.758) X 50% = 130.971 euros.
Si la pension d'invalidité servie à Madame [W] prendra fin lorsque celle-ci sera éligible à un départ à la retraite, à 62 ans (au titre d'une inaptitude au travail), sa perte de chance de retrouver un emploi rémunéré ne saurait cependant être capitalisée sur la base d'un euro de rente temporaire jusqu'à 62 ans pour une femme âgée de 56 ans, ainsi que le sollicitent le docteur [RU] et son assureur, ce mode de calcul ne tenant pas compte de la perte des droits à la retraite de l'intéressée. Ainsi, à compter du 1er février 2024, la perte de chance pour Madame [W] de retrouver un emploi rémunéré sera capitalisée sur la base du barème la Gazette du Palais de 2022 et d'un point de rente viagère de 36,845 en tenant compte d'un taux d'actualisation de (- 1%) au regard du contexte économique actuel et de l'âge de l'intéressée, à hauteur de (12 X 1.758 X 36,845) X 50% = 388.641,06 euros.
De la somme totale de 130.971 + 388.641,06 = 519.612,06 euros, il convient de déduire :
- les revenus effectivement perçus par Madame [W] et déclarés au titre des années 2014 à 2019 (aucun revenu n'ayant été déclaré ensuite), soit 60 + 2.577 + 4.030 + 11.720 + 16.487 + 5.167 = 40.041 euros,
- la pension d'invalidité servie par la CPAM, soit 56.656,78 euros (telle que réclamée par la Caisse) dont à déduire la somme de 5.189,77 euros déjà retranchée de la perte de gains professionnels actuels, soit un solde de 51.467,01 euros,
- le capital invalidité également versé par la CPAM à hauteur de 34.581,49 euros (tel que réclamé par la CPAM),
soit une somme due à Madame [W] de 393.522,56 euros au titre de ses pertes de gains professionnels futurs de Madame [W] à hauteur de ladite somme de 393.522,56 euros.
(3) sur l'incidence professionnelle
Les premiers juges ont sursis à statuer sur l'indemnisation de l'incidence professionnelle subie par Madame [W] du fait de l'accident médical en cause.
Madame [W] rappelle avoir dû abandonner une activité commerciale qui lui tenait à c'ur et sollicite une indemnisation au titre de l'incidence professionnelle de l'accident médical dont elle a été victime à hauteur de 100.000 euros.
Le docteur [RU] et son assureur proposent une indemnisation à hauteur de 30.000 euros du fait de l'abandon par Madame [W] de l'activité professionnelle qu'elle exerçait auparavant, mais s'opposent à l'indemnisation d'une incidence sur ses droits à la retraite, non établie.
Sur ce,
Un reclassement professionnel Madame [W] en suite de l'accident médical dont elle a été victime s'est selon l'expert judiciaire « de facto imposé », alors qu'elle a dû abandonner une activité commerciale choisie (qu'elle qualifiait de « passion ») pour suivre des stages de formation de ré-orientation et tenter de retrouver une activité plus sédentaire, adaptée, est reconnue par le docteur [RU] et son assureur.
Les développements de ces derniers concernant la perte des droits à la retraite de Madame [W] sont sans objet, alors que l'intéressée ne vise pas ces derniers au titre de l'incidence professionnelle qu'a pu avoir l'accident dont elle a été victime (elle demande la prise en compte de la diminution de ses droits à la retraite dans le cadre de l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels futurs).
Au regard de l'incidence réelle de l'accident médical en cause sur la situation professionnelle de Madame [W], la proposition d'indemnisation du docteur [RU] et de son assureur à hauteur de 30.000 euros apparaît satisfactoire et sera retenue par la Cour.
(4) sur les frais de véhicule adapté
Les premiers juges n'ont pas envisagé l'indemnisation de l'adaptation d'un véhicule, seulement évoquée par le docteur [Y] dans son rapport du 27 janvier 2023.
Madame [W] réclame l'allocation d'une somme de 26.500,04 euros à ce titre, prévoyant un remplacement de véhicule tous les cinq ans.
Le docteur [RU] et son assureur proposent une indemnisation hauteur de 9.130,71 euros, incluant l'acquisition initiale et un renouvellement tous les sept ans.
Sur ce,
Le docteur [Y], expert judiciaire désigné par la Cour, indique dans son rapport du 27 janvier 2023 que Madame [W] « doit pouvoir utiliser un véhicule dont les commandes sont au volant ou une voiture avec boite automatique ».
L'expert a également précisé que l'intéressée lui avait indiqué qu'elle « [venait] tout récemment de changer de véhicule avec ce type d'adaptation pour pouvoir faciliter ses déplacements (selon justificatifs) », mais aucune preuve d'achat n'est produite aux débats devant la Cour. Ainsi, Madame [W] n'établit pas la réalité du surcoût de 3.500 euros qu'a pu représenter l'acquisition d'un véhicule d'occasion équipé d'une boite de vitesse automatique par rapport à celle d'une voiture avec boite manuelle. La Cour retiendra en conséquence un surcoût de 1.500 euros, tel que raisonnablement proposé par le docteur [RU] et son assureur.
Madame [W] ne justifie ensuite pas de la nécessité d'un renouvellement de véhicule tous les cinq ans et la Cour retiendra celui-ci tous les sept ans, sur la base d'un euro de rente viagère pour une femme de 51 ans lors du premier renouvellement de 35,61 (taux proposé par le médecin et son assureur, supérieur au taux proposé par l'intéressée) représentant une indemnité de (1.500 X 35,61) ÷ 7 = 7.630,71 euros.
La Cour fixera en conséquence le préjudice de Madame [W] lié au surcoût d'un véhicule adapté à hauteur de la somme totale de 1.500 + 7.630,71 = 9.130,71 euros.
3. sur les préjudices extra-patrimoniaux temporaires, avant consolidation du 22 août 2011
(1) sur le déficit fonctionnel temporaire
Les premiers juges ont liquidé le déficit fonctionnel temporaire subi par Madame [W] à hauteur de 11.345 euros (sur la base du rapport du docteur [FS] du 3 octobre 2016 et d'un tarif journalier de 25 euros).
Madame [W] réclame la somme de 18.465 euros (sur la base d'un tarif journalier de 30 euros).
Le docteur [RU] et son assureur proposent une somme de 15.387 euros (sur la base d'un tarif journalier de 25 euros).
Sur ce,
L'expert judiciaire, le docteur [Y] (rapport du 27 janvier 2023) a estimé le déficit fonctionnel temporaire de Madame [W], en suite de la complication de son opération, à hauteur :
- de 100% du 26 août 2008 au 26 mars 2009, du 7 avril au 20 octobre 2009, du 9 novembre au 14 novembre 2009 et du 19 octobre au 8 décembre 2010, sur une période de 467 jours,
- de 50% du 27 mars au 6 avril 2009 et du 21 octobre au 8 novembre 2009, sur 30 jours,
- de 25% du 15 novembre 2009 au 18 octobre 2010 et du 9 décembre 2010 au 21 août 2011, sur 594 jours.
Aucune des parties ne conteste les conclusions de l'expert de ce chef.
Les premiers juges ont à juste titre retenu un tarif journalier de 25 euros.
Pour tenir compte du dernier examen médical de Madame [W] et du rapport du docteur [Y], la Cour retient un déficit fonctionnel temporaire subi par Madame [W] à hauteur des sommes de :
- (467 - 15) X 25 = 11.300 euros (après déduction de quinze jours d'hospitalisation, correspondant selon l'expert aux suites compliquées d'une sleeve gastrectomie prises en charge dans les règles de l'art) au titre du déficit fonctionnel temporaire total,
- (30 X 25) X 50% = 375 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel de 50%,
- (594 X 25) X 25% = 3.712,50 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire partiel de 25%,
soit une somme totale de 15.387,50 euros.
(2) sur les souffrances endurées
Les premiers juges ont évalué les souffrances endurées par Madame [W] à hauteur de la somme de 35.000 euros.
Madame [W] sollicite l'allocation de 50.000 euros.
Le docteur [RU] et son assureur estiment que la demande de Madame [W] doit être ramenée à de plus justes proportions sans dépasser 35.000 euros.
Sur ce,
L'expert judiciaire (le docteur [Y]) évalue les souffrances endurées par Madame [W] à « 6/7 [important] en rapport avec une durée d'intubation prolongée de 1 mois, avec deux reprises chirurgicales (') ainsi que la nécessité de réaliser une cure d'éventration (') », ce à quoi s'ajoutent une ponction radiologique d'un abcès abdominal profond, plusieurs séances de dialyse, un abcès « spontanément fistulisé par le vagin », une désorientation temporo-spatiale source de souffrances psychologiques, etc.
L'ensemble de ces éléments justifie la liquidation du préjudice lié aux souffrances endurées par Madame [W] à hauteur de la somme de 35.000 euros, telle que retenue par les premiers juges.
(3) sur le préjudice esthétique temporaire
Les premiers juges ont estimé le préjudice esthétique temporaire de Madame [W] à hauteur de la somme de 2.000 euros.
Madame [W] réclame la somme de 7.000 euros.
Le docteur [RU] et son assureur proposent 2.000 euros.
Sur ce,
L'expert judiciaire (le docteur [Y]) évoque les points de ponctions de cathéter mis en place pour la dialyse et les apports hydriques pendant un mois lors des phases de réanimation, ainsi que le redon pour drainage lors des reprises de chirurgie. Il estime le préjudice esthétique temporaire de Madame [W] à 3,5/7 (modéré à moyen).
Le premiers juges ont, au vu de ces éléments, sous-évalué ce poste de préjudice subi par Madame [W]. La Cour liquidera le préjudice esthétique temporaire subi par l'intéressée à hauteur de la somme de 7.000 euros.
4. sur les préjudices extra-patrimoniaux permanents après consolidation du 22 août 2011
(1) sur le déficit fonctionnel permanent
Les premiers juges ont évalué le déficit fonctionnel permanent de Madame [W] à hauteur de 56.000 euros (sur la base d'un point de 2.240 euros).
L'intéressée l'évalue à hauteur de 148.396,26 euros (sur la base de 8,25 euros par jour pendant 4.539 jours, puis par capitalisation) ou, à titre subsidiaire, à hauteur de 100.000 euros.
Le docteur [RU] et son assureur concluent à la confirmation du jugement quant au mode de calcul de l'indemnité et son montant.
Sur ce,
Après consolidation de l'état de santé de Madame [W], l'expert (le docteur [Y]) fixe son déficit fonctionnel permanent en rapport avec l'accident médical, relatif aux séquelles fonctionnelles de l'appareil locomoteur et notamment de la main droite (déficit et fatigabilité), aux troubles de mémoire, anxio-dépressifs et aux manifestations digestives douloureuses, à hauteur de 25%. L'expert, ainsi, évoque non seulement l'aspect fonctionnel - médical - du déficit dont souffre Madame [W], mais également les points susceptibles de troubler ses conditions d'existence, telles la fatigabilité, les douleurs, l'anxiété, les difficultés digestives, etc.
Ce déficit, fonctionnel, couvre l'aspect non économique de l'incapacité permanente, le préjudice non économique lié à la réduction du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel. Ainsi, ce poste de préjudice permet l'indemnisation non seulement de l'atteinte à l'intégrité physique et psychique, mais également, et contrairement aux affirmations de Madame [W], les douleurs physiques et psychologiques, et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence.
Il n'y a donc pas lieu de liquider ce préjudice au regard d'un forfait journalier, mais bien par référence à la valeur du point d'incapacité, méthode qui permet une indemnisation intégrale du préjudice subi.
Ainsi, les premiers juges ont justement évalué le déficit fonctionnel permanent subi par Madame [W], dont le taux de 25% n'est discuté d'aucune part, sur la base d'une valeur du point de 2.240 euros, liquidant ce poste de préjudice à la somme de 56.000 euros, qui sera également retenue par la Cour.
(2) sur le préjudice d'agrément
Les premiers juges ont débouté Madame [W] de sa demande en réparation d'un préjudice d'agrément, faute de justificatifs produits concernant ses activités. Madame [W] accepte le jugement sur ce point, ne pouvant apporter la preuve de la pratique antérieure de ses activités, notamment de salsa et natation. Le docteur [RU] et son assureur prennent acte de cette acceptation.
Aucune indemnisation ne sera en conséquence prévue au titre d'un préjudice d'agrément subi par Madame [W].
(3) sur le préjudice esthétique permanent
Les premiers juges ont évalué à 6.000 euros le préjudice esthétique permanent subi par Madame [W].
L'intéressée sollicite l'allocation de la somme de 8.000 euros.
Le docteur [RU] et son assureur proposent une somme de 3.000 euros.
Sur ce,
L'expert (le docteur [Y]) évalue le préjudice esthétique permanent dont souffre Madame [W], au vu de ses cicatrices et de sa démarche, à 2,5/7 (léger à modéré).
Les premiers juges ont au vu de ces éléments surévalué ce poste de préjudice et la Cour le fixera à hauteur de la somme de 4.000 euros.
(4) sur le préjudice sexuel
Les premiers juges ont évalué le préjudice sexuel de Madame [W] à la somme de 4.000 euros.
Madame [W] demande l'allocation d'une somme de 10.000 euros.
Le docteur [RU] et son assureur proposent 2.000 euros.
Sur ce,
Madame [W] a devant le docteur [Y] décrit une disparition quasi-complète de sa libido (mais sans impossibilité) et une dyspareunie, que l'expert a imputé au fait dommageable. Il n'a pas retenu d'atteinte à la fertilité de l'intéressée et indiqué que certains symptômes étaient liés à sa ménopause et non à l'accident médical.
Il apparaît au vu de ces éléments que les premiers juges ont justement évalué ce poste de préjudice et la Cour reprendra leur décision de ce chef à hauteur de 4.000 euros.
5. sur la condamnation du docteur [RU] et de la compagnie Panacéa Assurances
La Cour, dans son précédent arrêt du 18 novembre 2021, a dit que la rupture de la suture par agrafage constituait un accident médical non fautif auquel sont imputables 30% des préjudices subis par Madame [W], et mis en conséquence l'ONIAM hors de cause, et que le retard dans la prise en charge de cette complication de la sleeve gastrectomie pratiquée le 22 août 2009 était à l'origine de 70% des préjudices subis par l'intéressée, et qu'en conséquence, le docteur [RU] et son assureur étaient tenus in solidum à réparer les préjudices de celle-ci à hauteur de 70% de ceux-ci.
Ainsi, après liquidation de ces préjudices, le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances seront condamnés in solidum à payer à Madame [W] 70% des sommes suivantes :
Préjudices patrimoniaux temporaires :
- frais divers : 7.498,06 euros,
- assistance d'une tierce personne : 43.559,09 euros,
- perte de gains professionnels actuels : 27.414,80 euros,
Préjudices patrimoniaux permanents :
- assistance d'une tierce personne : 290.051,62 euros,
- perte de gains professionnels futurs : 393.522,56 euros,
- incidence professionnelle : 30.000 euros,
- surcoût d'un véhicule adapté : 9.130,71 euros,
Préjudices extra-patrimoniaux temporaires :
- déficit fonctionnel temporaire : 15.387,50 euros,
- souffrances endurées : 35.000 euros,
-préjudice esthétique temporaire : 7.000 euros,
Préjudice extra-patrimoniaux permanents :
- déficit fonctionnel permanent : 56.000 euros,
- préjudice d'agrément : débouté,
- préjudice esthétique permanent : 4.000 euros,
- préjudice sexuel : 4.000 euros.
Les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du jugement du 18 mars 2019 sur le montant des sommes accordées par le tribunal et à compter du présent arrêt sur le surplus, en application de l'article 1231-7 du code civil.
Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront également intérêts, conformément aux termes de l'article 1343-2 du code civil.
Sur le recours de la CPAM
Madame [W] a déduit de ses demandes les prestations servies par la CPAM.
La CPAM verse aux débats une attestation d'imputabilité de sa créance au retard de prise en charge de la complication post-intervention subie par Madame [W]. Elle demande le remboursement de prestations servies à celle-ci en nature au titre des dépenses de santé actuelles et futures, des indemnités journalières versées avant consolidation au titre des pertes de gains professionnels actuels et des arrérage de pension d'invalidité au titre des pertes de gains professionnels futurs (puis, si besoin, au titre de l'incidence professionnelle et du déficit fonctionnel permanent), outre une indemnité forfaitaire de gestion.
Le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances observent que la CPAM ne détaille pas sa demande au titre des frais d'hospitalisation et propose un remboursement au prorata temporis à hauteur de 44.352,30 euros et conclut au débouté de la Caisse de sa demande au titre des frais médicaux, faute de précision des frais concernés.
Sur ce,
La CPAM qui a été amenée à indemniser un patient dispose aux termes de l'article L376-1 du code de la sécurité sociale d'un recours subrogatoire contre l'auteur responsable de l'accident médical sur les sommes versées à la victime en réparation de son préjudice corporel.
La CPAM du Puy de Dôme fait en l'espèce valoir une notification actualisée et définitive de ses débours, datée du 8 janvier 2024, au titre des sommes versées à Madame [W] ainsi décomposée :
- frais hospitaliers (polyclinique de [Localité 23], centre de rééducation des Grands Chênes, centre hospitalier de [Localité 26]) : 55.279,68 + 29.272,76 + 50.014 + 1.835,94 + 11.456 = 147.858,38 euros,
- frais médicaux : 8.431,24 euros,
- indemnités journalières (servies du 3 octobre 2008 au 31 août 2009, puis du 27 mars au 31 août 2009) : 3.235,75 + 3.011,48 = 6.247,23 euros,
- frais de santé futurs : 818,50 euros,
- prestations d'invalidité (arrérages échus du 1er décembre 2009 au 30 septembre 2023, puis capital) : 56.656,78 + 34.581,49 = 90.238,27 euros.
Le docteur [D] [C], médecin-conseil du recours contre tiers de la direction du Service Médical de la CPAM, atteste le 7 mars 2023 de la « stricte imputabilité [des prestations servies à Madame [W] dont la CPAM sollicite le remboursement] au regard du seul acte du 21/08/2008 » [sic : il s'agit en fait de l'intervention du 22 août 2008, ainsi que les termes de l'attestation permettent de s'en convaincre], indiquant que « seules les prestations liées au retard de prise en charge de la complication post intervention ont été retenues » ajoutant que « celles qui y sont étrangères ont été écartées » (caractères gras et italiques de l'attestation) et énumérant les dates des actes et frais retenus.
Or il résulte des dispositions de l'article R315-2 du code de la sécurité sociale que les médecins-conseils relèvent du contrôle médical, lequel constitue un service national. Ainsi, non salarié de la CPAM du Puy de Dôme, le docteur [C], médecin-conseil, présente une réelle indépendance vis-à-vis de la Caisse. Le docteur [RU] et son assureur ne démontrent aucunement sa partialité.
Il apparaît en conséquence que la CPAM démontre suffisamment la réalité et le montant de sa créance au titre des sommes versées à Madame [W] en lien unique et certain avec les conséquences de la faute du docteur [RU].
Aussi convient-il de retenir une créance de la CPAM telle que celle-ci la présente, à hauteur des sommes de :
- 147.858,38 + 8.431,24 = 156.289,62 euros au titre des prestations en nature versées à Madame [W] avant consolidation de son état de santé, la Caisse exerçant ici son recours au titre des dépenses de santé actuelles,
- 818,50 euros au titre des prestations en nature prises en charge après consolidation, imputables aux dépenses de santé futures, le recours étant exercé au titre des dépenses de santé futures,
- 6.247,23 euros au titre des indemnités journalières versées à Madame [W] avant consolidation, le recours étant exercé au titre des pertes de gains professionnels actuels,
- 90.238,27 euros au titre de la pension d'invalidité (arrérages échus et capital). Il convient à ce titre de constater que les arrérages de la pension d'invalidité et le capital versé à ce titre à Madame [W] ont été déduit de la liquidation de sa perte de gains professionnel actuels à hauteur de 5.189,77 euros, et de sa perte de gains professionnels futurs à hauteur de 51.467,01 + 34.581,49 = 86.048,50 euros.
La CPAM est en outre bien-fondée à opposer une créance au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, prévue par L376-1 du code de la sécurité sociale, dont le montant est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu dans les limites de montants minimal et maximal initiaux de 90 et 910 euros, portés à 118 et 1.191 euros selon arrêté du 18 décembre 2023, applicable aux remboursement effectués au cours de l'année 2024 et qui, en l'espèce au regard de la créance de la Caisse, doit être fixée à 1.191 euros.
Le docteur [RU] et son assureur seront condamnés in solidum à rembourser 70% desdites sommes entre les mains de la CPAM.
La créance, dont la CPAM tiers payeur (venant aux droits du RSI puis de la CLDSSTI) poursuit le règlement par subrogation dans les droits de Madame [W], n'est pas indemnitaire mais porte sur le paiement d'une somme d'argent et produit en conséquence intérêts au taux légal à compter de la première demande portant mis en demeure de payer adressée au débiteur, conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil. Cette première demande correspond à sa première demande en justice au droit de son intervention volontaire devant les premiers juges par conclusions signifiées le 27 novembre 2017.
Aussi, les sommes de 156.289,62 euros (prestations en nature versées à Madame [W] avant consolidation), de 818,50 euros (prestations en nature prises en charge après consolidation) et de 6.247,23 euros (indemnités journalières avant consolidation) au titre desquelles une demande a été formulée dès la première instance, porteront intérêts au taux légal à compter de ce 27 novembre 2017. La somme de 90.238,27 euros portera intérêts à compter du 27 novembre 2017 sur la somme de 30.699,50 euros, du 12 novembre 2018 sur la somme de 42.268,07 - 30.699,50 = 11.568,57 euros, du 27 octobre 2023 sur la somme de 88.754 - 42.268 = 46.486 euros, et du 12 janvier 2024 sur la somme de 90.238,27 - 88.754,07 = 1.484,20 euros, au vu des demandes présentées par la Caisse au fur et à mesure de l'actualisation de sa créance.
Les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront également intérêts, conformément aux termes de l'article 1343-2 du code civil.
Sur les dépens et frais irrépétibles
Le docteur [RU] et la compagnie Panacéa Assurances, qui succombent à l'instance, seront condamnés in solidum aux dépens, avec distraction au profit des conseils de Madame [W] et de la CPAM qui l'ont réclamée, en application des articles 696 et suivants du code de procédure civile.
Tenus aux dépens, le médecin et son assureur seront également condamnés in solidum à payer la somme équitable de 4.000 euros à Madame [W] (complétant la somme de 3.000 euros accordée par la Cour dans son arrêt du 18 novembre 2021) et de 2.500 euros à la CPAM en indemnisation des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens, conformément aux dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Ces condamnations emportent le rejet des demandes du docteur [RU] et de son assureur de ces chefs.
Par ces motifs,
La Cour,
Dit recevable la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) du Puy de Dôme en son intervention volontaire, venant aux droits de la Caisse Locale Déléguée pour la Sécurité Sociale des Travailleurs Indépendants (CLDSSTI), venant elle-même aux droits du Régime Social des Indépendants (RSI),
Complétant son arrêt du 18 novembre 2021 sur les demandes de Madame [YN] [W] et de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) du Puy de Dôme,
Fixe les préjudices de Madame [YN] [W] ainsi :
- frais divers : 7.498,06 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2019 sur la somme de 3.942,10 euros et du présent arrêt sur le surplus,
- assistance d'une tierce personne temporaire : 43.559,09 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2019 sur la somme de 28.032 euros et du présent arrêt sur le surplus,
- perte de gains professionnels actuels : 27.414,80 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2019,
- assistance d'une tierce personne permanente : 290.051,62 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2019 sur la somme de 129.244,07 euros et du présent arrêt sur le surplus,
- perte de gains professionnels futurs : 393.522,56 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2019 sur la somme de 58.641,44 euros et du présent arrêt sur le surplus,
- incidence professionnelle : 30.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
- surcoût d'un véhicule adapté : 9.130,71 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,
- déficit fonctionnel temporaire : 15.387,50 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2019 sur la somme de 11.345 euros et du présent arrêt sur le surplus,
- souffrances endurées : 35.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2019,
- préjudice esthétique temporaire : 7.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2019 sur la somme de 2.000 euros et du présent arrêt sur le surplus,
- déficit fonctionnel permanent : 56.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2019,
- préjudice esthétique permanent : 4.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2019,
- préjudice sexuel : 4.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 28 mars 2019,
Dit qu'au titre de ces sommes, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront également intérêts,
Déboute Madame [YN] [W] de sa demande d'indemnisation d'un préjudice d'agrément,
Condamne in solidum le docteur [Z] [RU] et la SA Panacéa Assurances (groupe Pasteur Mutualité) à payer à Madame [YN] [W] 70% des sommes, avec intérêts, fixées au titre de son préjudice,
Fixe la créance de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) du Puy de Dôme ainsi :
- 156.289,62 euros au titre des prestations en nature versées à Madame [YN] [W] avant consolidation de son état de santé (somme imputable sur les dépenses de santé actuelles), avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2017,
- 818,50 euros au titre des prestations en nature prises en charge après consolidation (somme imputable sur les dépenses de santé futures), avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2017,
- 6.247,23 euros au titre des indemnités journalières versées à Madame [W] avant consolidation (somme imputable sur les pertes de gains professionnels actuels), avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2017,
- 90.238,27 euros au titre de la pension d'invalidité (somme imputable sur les pertes de gains professionnels actuels à hauteur de 5.189,77 euros et les pertes de gains professionnels futurs à hauteur de 86.048,50 euros), avec intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2017 sur la somme de 30.699,50 euros, du 12 novembre 2018 sur la somme de 11.568,57 euros, du 27 octobre 2023 sur la somme de 46.486 euros et du 12 janvier 2024 sur la somme de 1.484,20 euros,
- 1.191 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, avec intérêts au taux légal à compter du 18 mars 2019 sur la somme de 1.066 euros et du présent arrêt sur le surplus,
Dit qu'au titre de ces sommes, les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront également intérêts,
Condamne in solidum le docteur [Z] [RU] et la SA Panacéa Assurances (groupe Pasteur Mutualité) à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) du Puy de Dôme (venant aux droits de la Caisse Locale Déléguée pour la Sécurité Sociale des Travailleurs Indépendants - CLDSSTI, venant elle-même aux droits du Régime Social des Indépendants - RSI), 70% des sommes, avec intérêts, correspondant à sa créance,
Condamne in solidum le docteur [Z] [RU] et la SA Panacéa Assurances (groupe Pasteur Mutualité) aux dépens de l'instance d'appel, avec distraction au profit de la SELARL Cabinet Rémy Le Bonnois (Maître Frédéric Le Bonnois) et de Maître Sylvain Niel,
Condamne in solidum le docteur [Z] [RU] et la SA Panacéa Assurances (groupe Pasteur Mutualité) à payer à Madame [YN] [W] la somme de 4.000 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles d'appel,
Condamne in solidum le docteur [Z] [RU] et la SA Panacéa Assurances (groupe Pasteur Mutualité) à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) du Puy de Dôme la somme de 2.500 euros en indemnisation de ses frais irrépétibles d'appel.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,