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26/03/2024 | FRANCE | N°21/09020

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 26 mars 2024, 21/09020


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 11



ARRET DU 26 MARS 2024



(n° , 14 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09020 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CESQ5



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Septembre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 19/08016



APPELANT



Monsieur [L] [B]

[Adresse 1]

[Localité 3]

né le 24 Septembre 1989 Ã

  [Localité 16]



Représenté par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153



INTIMEE



S.A.S. ESPACE EXPANSION

[Adresse 2]

[Localité 4]

N° SIRET : 323 998 69...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRET DU 26 MARS 2024

(n° , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09020 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CESQ5

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Septembre 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 19/08016

APPELANT

Monsieur [L] [B]

[Adresse 1]

[Localité 3]

né le 24 Septembre 1989 à [Localité 16]

Représenté par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153

INTIMEE

S.A.S. ESPACE EXPANSION

[Adresse 2]

[Localité 4]

N° SIRET : 323 998 690

Représentée par Me Damien CHATARD, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : 1701

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 06 Février 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Isabelle LECOQ CARON Présidente de chambre

Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre

Monsieur Daniel FONTANAUD, Magistrat honoraire

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Isabelle LECOQ CARON, Présidente de chambre, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle LECOQ CARON Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

M. [L] [B], né en 1986, embauché par la SAS Espace Expansion par contrat à durée indéterminée à compter du 6 juin 2016, a occupé la fonction de chargé de commercialisation. Au titre de ses fonctions, il était chargé de la commercialisation d'emplacements dans les centres commerciaux et de la prospection de nouvelles enseignes. Il occupait la position de cadre niveau C1 telle que prévue par la convention collective de l'immobilier régissant la relation entre les parties.

M. [B] a été licencié pour insuffisance professionnelle par lettre du 22 janvier 2019 énonçant le motif suivant :

'... A. Des résultats éloignés des objectifs en raison d'un manque de rythme et de proactivité dans l'organisation des deals

En tant que chargé de commercialisation, et compte tenu des diverses remarques qui vous ont été adressées par votre hiérarchie, nous attendions de vous la mise en place d'une organisation vous permettant d'atteindre les objectifs fixés.

Force est de constater que votre manque de proactivité et de rythme quant à la conclusion de vos deals, ne vous a pas permis de réaliser vos objectifs.

En effet, ceux de 2017 n'ont pas été atteints :

Vous avez signé 17 baux contre 23 fixés au budget ;

Concernant le montant du nouveau loyer minimum garanti (new MGR), vous avez réalisé 1 990 373€ contre 3 471 701€ prévus au budget, soi seulement 57% de l'objectif atteint;

Concernant l'objectif du montant de création de valeur (MGR Uplift), vous avez réalisé 327 996€ contre 574 996€ prévus au budget, soit seulement 57% de l'objectif atteint ;

Concernant le droit d'entrée, vous avez réalisé 2 480 000€ contre 4 967 640€ prévus au budget, soit seulement 50% de l'objectif atteint.

Au 29 juin 2018, vous avez de nouveau fait un point avec votre supérieure hiérarchique sur les différents sujets en cours ainsi que sur les 8 opérations non signées mais prévues dans votre atterrissage à la fin du second trimestre. Alors que vous aviez un objectif de 25 baux signés à la fin du 3ème trimestre, seules 11 opérations ont été réalisées depuis le début de l'année. Pour rappel, 3 opérations ont été signées en août 2018, mais aucune durant le 3ème trimestre.

Votre supérieure hiérarchique avait pourtant attiré votre attention sur vos résultats quantitatifs très éloignés des objectifs fixés lors de votre évaluation de mi-année qui s'est tenu en juillet 2018. Il vous a été précisé que les indicateurs clefs de performance n'étaient pas atteints, que ce soit en volume (8 baux accomplis contre 19 demandés), en new MGR (36% de l'objectif semestriel réalisé), en Uplift (14%) et en DE (3%).

Malgré ces divers avertissements sur vos objectifs, force est de constater qu'au 31 décembre 2018, vos objectifs sont de nouveau très éloignés de ceux fixés :

Vous avez signé 21 baux contre 34 fixés au budget ;

Concernant le montant du nouveau loyer minimum garanti (new MGR), vous avez réalisé 2 689 614€ contre 4 532 088€ prévus au budget, soit seulement 59% de l'objectif atteint ;

Concernant l'objectif du montant de création de valeur (MGR Uplift), vous avez réalisé 251 309€ contre 417 619€ prévus au budget, soit seulement 60% de l'objectif atteint ;

Concernant le droit d'entrée, vous avez réalisé 2 324 000€ contre 4 130 000€ prévus au budget, soit seulement 56% de l'objectif atteint.

Malgré votre ancienneté grandissante, nous ne constatons pas d'amélioration quant à l'organisation de votre travail, votre rigueur et votre efficacité, conduisant à un décrochage entre les résultats produits et les objectifs fixés.

B. Manque de rigueur dans la production de votre travail et dans la gestion de vos dossiers

Malgré votre ancienneté et expérience grandissantes au sein de la Société et sur votre poste, force est de constater que votre manque de rigueur nuit à la qualité de votre travail, et notamment

Notes non anticipées ou incomplètes

Alors que vous étiez prévenu depuis plusieurs semaines, vous avez adressé à votre supérieure hiérarchique le 5 avril 2018 une note de synthèse interne Provalliance pour relecture pour un rendez-vous le 10 avril 2018. Cette note, prévue à l'attention du Chief Operating Officer Group, aurait dû être lui être adressée longtemps à l'avance afin de permettre une préparation du rendez-vous la plus optimale.

Afin que votre supérieure hiérarchique puisse préparer au mieux un rendez-vous avec le Groupe Provalliance lors d'un salon international de l'immobilier de commerce (MAPIC) se déroulant le 14 novembre 2018, vous étiez en charge de préparer une note récapitulative sur l'actualité du Groupe. Or lorsque le Directeur du Développement et le Directeur Général du Groupe lui ont demandé de présenter l'opportunité du découpage de l'enseigne Marionnaud aux [14] pour y implanter l'enseigne Bleu Libellule, elle s'est aperçue que vous ne l'aviez jamais informée de ce sujet, ni même oralement.

Absences aux réunions planifiées

Les équipes du département Operating Management ont mis en place une réunion hebdomadaire afin de discuter de l'avancement de la clôture de certains deals, et notamment du compte [Localité 9] Optical dont vous avez la charge. Alors que ces équipes ont spécifiquement demandé à ce que vous soyez présent à la réunion du 13 septembre 2018, vous n'y avez pas assisté. Idem pour la réunion du 22 novembre 2018. Ces absences contraignent votre manager à vous répéter les informations, ce qui implique une réelle perte de temps et d'efficacité pour l'équipe.

Manque d'approfondissement des sujets

Vous avez eu en charge le renouvellement du bail de l'enseigne Yves Rocher sur le centre commercial des [14]. Dans un mail du 26 novembre 2018, vous sollicitez le service juridique concernant le réajustement d'une garantie à première demande (GAPD) conformément aux exigences de l'enseigne. Or, ces clauses n'ont pas été modifiées depuis plus de 2 ans. Ainsi vous ne pouviez pas ignorer qu'il n'y a pas d'indexation prévue dans la GAPD. En sollicitant le service juridique sur un tel sujet, vous démontrez un manque de recul et d'analyse sur les situations dont vous avez la charge.

Également, l'enseigne affirmait que de nouvelles charges avaient nouvellement été mises à sa charge, et ainsi refusait d'en payer les frais. Sans avoir effectué de vérifications préalables, vous étiez prêt à demander une dérogation, alors même que ces charges étaient mentionnées différemment dans le bail échu, et donc non nouvelles.

Cet exemple reflète une nouvelle fois, le manque de rigueur et d'approfondissement dont vous pouvez faire preuve sur vos sujets, Pour toutes les raisons exposées ci-dessus, nous vous notifions votre licenciement pour insuffisance professionnelle....'.

Le 9 septembre 2019, M. [B] a saisi la juridiction prud'homale aux fins de fixer le salaire de référence à 4306 € bruts, de requalifier le licenciement pour insuffisance professionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de faire condamner la société Espace Expansion à lui payer des sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité de licenciement conventionnelle, de rappel de rémunération variable pour 2018 et congés payés afférents, de rappel de primes exceptionnelles sur objectif et congés payés afférents, de rappel d'heures supplémentaires de juin 2016 à janvier 2019 et congés payés afférents et subsidiairement de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la clause de forfait, de repos compensateur et congés payés afférents, de dommages et intérêts pour non respect du droit au repos et de dommages et intérêts du fait de l'inégalité de traitement.

M. [B] sollicitait en outre la remise de bulletins de paie, d'une attestation Pôle Emploi, d'un certificat de travail sous astreinte de 50 euros par jour par document ainsi que 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure. La société S.A.S. Espace Expansion demandait 4 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de M. [B] aux dépens.

Par jugement du 8 septembre 2021, le conseil de prud'hommes de PARIS a débouté M. [B] de toutes ses demandes et la société Espace Expansion de sa demande reconventionnelle.

M. [B] en a relevé appel le 29 octobre 2021.

Par conclusions récapitulatives du 13 juillet 2022 , auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, M. [B] demande à la cour d'infirmer le jugement, de fixer le salaire mensuel de base à 4 306 € bruts, de requalifier le licenciement pour insuffisance professionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de condamner la société Espace Expansion à lui verser les sommes suivantes, avec intérêt au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes :

- 15 071 euros nets à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1 045 euros nets au titre du rappel du solde de l'indemnité de licenciement

- 5 000 euros bruts au titre de rappel de la rémunération variable 2018

- 500 euros bruts au titre des congés payés afférents

- 200 euros bruts au titre du rappel de la prime exceptionnelle sur objectifs

- 20 euros bruts au titre des congés payés afférents

- 47 070 euros bruts au titre du rappel des heures supplémentaires effectuées

entre juin 2016 et janvier 2019, ou subsidiairement à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la clause de forfait

- 4 707 euros bruts au titre des congés payés y afférents

- 23 745,15 euros bruts au titre des repos compensateurs

- 2 374,51 euros bruts au titre des congés payés y afférents

- 5 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour non-respect du droit au repos

- 5 000 euros nets au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice du fait de l'inégalité de traitement.

Il sollicite la remise de bulletins de salaire, attestation Pôle Emploi et certificat de travail conformes sous astreinte de 50 euros par jour par document et demande à la cour de se réserver la liquidation de l'astreinte.

Il demande 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions récapitulatives du 20 avril 2022, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société Espace Expansion demande de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [B] de l'ensemble de ses demandes et condamné aux dépens et de l'infirmer en ce qu'il l'a débouté de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire, si la cour fait droit à la demande de nullité de la convention de forfait en jours sur l'année, la société Espace Expansion demande que les 14,05 jours de RTT dont M. [B] a bénéficié au titre de la convention de forfait en jours sur l'année soient remboursés à la société par déduction de la condamnation prononcée au titre des rappels de salaire.

La société Espace Expansion demande 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de M. [B] aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 10 janvier 2024.

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

****

MOTIFS

Sur la demande au titre de la rémunération variable 2018

Au terme du contrat de travail : ' La rémunération fixe de M. [L] [B] pourra être complétée d'une rémunération variable dont l'octroi reste à l'entière discrétion de la Société et sous réserve de ses résultats financiers'. M. [B] sollicite 5 000 euros au titre de rappel de la rémunération variable 2018 et 500 euros bruts au titre des congés payés afférents mais n'apporte pas d'élément de nature à justifier sa demande.

L'attribution d'une telle prime résulte en l'espèce d'une décision collégiale, soumise à l'approbation du Comité de revue. Au vu des éléments versés au débat, les premiers juges ont relevé à juste titre que le mode de calcul de ce variable était connu de tous, car publié au sein de la société, et que M. [B] procède par affirmation et ne prouve en rien son droit allégué du chef de cette demande.

En conséquence, le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [B] sur ce point.

Sur la demande au titre de la prime exceptionnelle sur objectifs

M. [B] sollicite 200 euros bruts au titre du rappel de la prime exceptionnelle sur objectifs et 20 euros bruts au titre des congés payés afférents. Au vu des éléments versés au débat, il a été convenu par la société Espace Expansion, lors de son licenciement, par courrier du 11 février 2019, que le salarié bénéficierait d'une prime exceptionnelle sur objectif proportionnellement au nombre de 'deals' signés selon les modalités suivantes :

« En accord avec votre hiérarchie, il a été convenu que, sous réserve d'une passation des comptes actifs et deals en cours et de l'atteinte des objectifs fixés ci-dessous, il vous serait versé une prime exceptionnelle d'un montant maximum de 3000 euros bruts sur la paie du mois avril 2019. Il est expressément précisé que le montant de la prime exceptionnelle pourra varier

en fonction du nombre de deals signés. Le montant variera selon les modalités suivantes:

- De 1 à 4 deals signés : 200 euros bruts par deals signés,

- De 5 à 12 deals signés : 300 euros bruts par deals signés.

Ainsi, pour bénéficier d'une prime exceptionnelle, vous devrez acter la signature de toute ou partie des deals suivants :

- Le Bar à ongles au sein du Centre Commercial de [8],

- Générale d'Optique au sein du Centre Commercial de [8]

- Avril au sein du Centre Commercial d'[5],

- Body Minute au sein du Centre Commercial du [7],

- [Localité 9] Optical au sein du Centre Commercial des [14],

- Micromania au sein du Centre Commercial [11],

- Micromania au sein du Centre Commercial de [12],

- Dock Games au sein du Centre Commercial de [10],

- Optique 2000 au sein du Centre Commercial de [6],

- Petit Bateau sein du Centre Commercial de [13].

- The Kase au sein du centre commercial de [13] ou [15] Alma...'.

A compter de la date de signature de ce courrier et jusqu'à son départ le 22 mars 2019 au (date de début de la dispense de préavis), M. [B] a signé trois opérations : Le Bar à Ongles, Avril et Petit Bateau. Le quatrième deal, invoqué par Monsieur [B], à savoir « Bleu Libellule à [5] » n'était pas mentionné dans le courrier visé ci-dessus, avec la liste des enseignes convenue entre les parties.

De plus, ce 'deal' a fait l'objet d'une signature en date 25 janvier 2019, soit antérieurement au courrier fixant la prime exceptionnelle du 11 février 2019.

Ainsi, sur la base de 200 € par 'deal' signé, M. [B] a valablement perçu une prime exceptionnelle de 600 €.

A cet égard, c'est à juste titre que les premiers juges ont constaté que M. [B] a été rempli dans ses droits sur ce point et a jugé que l'intéressé devait être débouté de cette demande.

En conséquence, le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé sur ce point.

Sur la demande au titre des heures supplémentaires

Le contrat de travail de M. [B] signé le 3 juin 2016 contient une clause intitulée 'convention de forfait annuel en jours' prévoyant un forfait de 217 jours travaillés (après prise en compte de la journée de solidarité) sur la base d'une année civile compléte d'activité. Il est précisé dans le contrat que : « Dans le cadre de son forfait annuel en jours, Monsieur [L] [B] est informé qu'il devra notamment déclarer à minima chaque mois via l'outil de gestion informatique des temps en vigueur dans la société, le nombre de journée et de demi-journées travaillées ainsi que le positionnement et la qualification d'absence.

Un entretien, a minima annuel, sera organisé entre le responsable hiérarchique ou la direction des ressources humaines et Monsieur [L] [B], afin d'évoquer notamment les questions relatives à la charge de travail est à l'articulation entre vie professionnelle et vie personnelle. Cet entretien sera distinct de l'entretien d'évaluation annuelle mais pourra cependant y être accolé. »

La convention collective de l'Immobilier prévoit une évaluation et un suivi de la charge de travail des salariés soumis à un forfait annuel en jours qui sont réalisés notamment par un document de suivi mensuel précisant le nombre et la date des journées et demi-journées travaillées, le positionnement et la qualification des journées ou demi-journées non travaillées, un entretien annuel formalisé entre le salarié et le supérieur hiérarchique, un entretien, à tout moment, à la demande du salarié pour prévenir ou remédier à des difficultés (surcharge de travail, amplitude des journées de travail...), un dispositif d'alerte pour le salarié en cas de non-respect des repos et/ou du nombre de jours travaillés prévu au forfait, ainsi qu'un droit à la déconnexion des outils de communication à distance.

L'accord d'entreprise UES UNIBAIL sur la durée du travail du 31/07/15 prévoit également des modalités de prise en compte de la charge de travail.

En l'espèce, l'employeur indique que M. [B] procédait à sa déclaration mensuelle d'activité de manière partielle et ainsi, ne remplissait pas correctement ses obligations permettant le suivi de son activité par l'employeur. Toutefois, l'employeur n'apporte pas la preuve d'une carence du salarié antérieure à la notification du licenciement intervenue 22 janvier 2019. Il ne retient que quelques omissions postérieures à l'engagement de la procédure de licenciement. Ainsi, il n'est pas établi que le salarié omettait de déclarer son temps d'activité sur l'outil informatique dédié. De plus, il est rappelé qu'une telle omission n'exonère pas l'employeur de son obligation de suivi de la charge de travail du salarié. A cet égard, l'employeur n'établit pas avoir rappelé à l'intéressé qu'il devait procéder mensuellement à cette déclaration.

Par ailleurs, au-delà de cette déclaration d'activité, il est prévu un entretien annuel relatif à la charge de travail et à l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personnelle et familiale. La société Espace Expansion indique qu'il ressort des comptes-rendus d'évaluation que la question de la charge de travail et de la conciliation vie personnelle / vie professionnelle figure au rang des thématiques abordées.

Les évaluations versées au débat établissent que cette question a été abordée au titre de l'année 2016 au début de la relation de travail. Il y est mentionné sans autre précision : « [L] est satisfait de son équilibre activité professionnelle et vie personnelle ». Une formule identique est mentionnée dans l'entretien de mi-année 2017. Cependant, les rubriques 'activité professionnelle et vie personnelle' de l'entretien annuel 2017 et de l'entretien de demi-année 2018 sont restées vierges. Pourtant, ces rubriques contiennent la précision suivante : 'Merci d'insérer ici le résumé de la discussion obligatoire que vous avez eue avec votre collaborateur au sujet de la charge de travail dans l'entreprise, et de l'articulation entre activité professionnelle et familiale, notamment avc l'utilisation des outils numériques'.

Ainsi, la convention est bien prévue par un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ainsi que dans le contrat de travail de l'intéressé. Elle a reçu l'accord du salarié et a été établie par écrit et un suivi précis a été prévu par déclaration mensuelle et par entretien, a minima annuel.

Cependant, au vu des pièces versées au débat, l'employeur ne s'est pas assuré régulièrement que la charge de travail du salarié était raisonnable et permettait une bonne répartition de temps de travail conformément à l'article L.3160 du code du travail.

Il s'ensuit que la convention de forfait n'est pas opposable à l'intéressé.

Il convient en conséquence d'examiner la demande du salarié au titre d'un rappel sur des heures supplémentaires.

Le salarié indique que son horaire était de 9h30 à 19h30h-20h avec une pause déjeuner d'une heure. Il produit quelques mails épars adressés après 19 heures (13 sur une période de 12 mois).

L'employeur répond que le salarié indique que ses journées débutaient à 9h30 alors qu'il ressort des pièces produites par la société Espace Expansion qu'il arrivait régulièrement en retard et commençait souvent aux alentours de 10h. L'employeur met par ailleurs en cause la crédibilité de la demande en relevant par ailleurs qu'il sollicite désormais 47 070 euros au titre des heures supplémentaires alors que sa demande initiale était de 62 000 euros.

Au vu des éléments versés au débat, la cour a la conviction que le salarié travaillait en moyenne 42 heures par semaine, soit 7 heures supplémentaires. Sur la base de son salaire mensuel de 3358,34 euros pour 151,67 heures, il percevait un salaire horaire qu'il convient de fixer à 22,14 euros bruts.

Le salarié rappelle, sans être contesté sur ce point, que l'accord sur l'aménagement du temps de travail prévoit que les heures supplémentaires à partir de 37h sont majorées de 130 %, soit : 28,78 euros bruts. Compte tenu du salaire de base de l'intéressé et déduction faite des semaines de congés payés ainsi que des jours de réduction du temps de travail, il est retenu la somme totale de 21171 euros au titre des heures supplémentaires effectuées entre 2016 et 2018.

Conformément, à la demande formulée par l'employeur, il convient de déduire de la somme retenue au titre des heures supplémentaires le montant des 14,05 jours de réduction de travail dont a bénéficié le salarié en application de la convention de forfait, soit 2 247euros.

Il s'ensuit que la société Espace Expansion sera condamnée à M. [B] la somme de 18.924 euros au titre des heures supplémentaires et de 1 892, 40 euros au titre des congés payés afférents.

Sur la demande au titre de repos compensateurs et du non-respect du droit au repos

M. [B] sollicite une somme au titre des repos compensateurs ainsi qu'une somme complémentaire à titre de dommages et intérêts pour non-respect du droit au repos.

L'accomplissement d'heures supplémentaires au delà du contingent annuel ouvre à un repos compensateur obligatoire en application de l'article L. 3121-30 du code du travail.

L'article L. 3121-38 du code du travail prévoir qu'à défaut d'accord, la contrepartie en repos due pour toute heure supplémentaire effectuée au-delà du contingent est de 50 % des heures accomplies au-delà du contingent pour les entreprises de 20 salariés au plus, et de 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de 20 salariés.

En l'espèce, compte tenu du volume d'heures supplémentaires retenu sur l'ensemble de la relation de travail et du contingent conventionnel de 205 heures, le dépassement est de 220 heures.

Il s'ensuit que l'employeur sera condamné à verser à M. [B] la somme de 4870,80 euros au titre des repos compensateurs.

Par ailleurs, au vu des éléments versés au débat, il n'est pas établi de préjudice spécifique devant donner lieu au versement d'une somme supplémentaire à titre de dommages et intérêts distincts pour violation de son droit au repos.

Sur le licenciement

Principe de droit applicable :

En vertu des dispositions de l'article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, c'est-à-dire être fondé sur des éléments objectifs, vérifiables et imputables au salarié.

L'insuffisance professionnelle, qui se définit comme l'incapacité objective et durable d'un salarié d'exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification, constitue une cause légitime de licenciement. L'appréciation des aptitudes professionnelles du salarié et de son adaptation à l'emploi relève du pouvoir patronal. Néanmoins, l'insuffisance professionnelle alléguée à son encontre pour fonder un licenciement doit être justifiée par des éléments précis et concrets de nature à perturber la bonne marche de l'entreprise ou le fonctionnement du service.

Pour constituer une cause légitime de rupture, l'insuffisance professionnelle ou de résultats doit être établie par des éléments objectifs, constatée sur une période suffisamment longue pour ne pas apparaître comme passagère ou purement conjoncturelle, être directement imputable au salarié et non la conséquence d'une conjoncture économique difficile ou du propre comportement de l'employeur.

Application du droit à l'espèce

M. [B] conteste les griefs qui lui sont reprochés. Il soutient notamment que l'insuffisance professionnelle alléguée par l'employeur n'est pas fondée en faisant valoir que ses résultats ont progressé entre 2017 et 2018 et s'inscrivent dans la moyenne des résultats des autres salariés. Il rappelle qu'il a contesté son licenciement par un courrier motivé en date du 30 juillet 2019.

La société Espace Expansion soutient notamment que l'insuffisance professionnelle de M. [L] [B] est justifiée et que l'investissement insuffisant du salarié est à l'origine de ses résultats non satisfaisants. Il fait valoir à cet égard des absences aux réunions et des retards.

Au vu des éléments produits au débat, la société Espace Expansion ne produit aucune pièce de nature à établir les griefs retenus dans la lettre de licenciement. En particulier, l'employeur ne produit aucune attestation émanant de la hiérarchie, de collègues, de clients ou d'autres personnes, que ce soit sur les résultats de l'intéressé ou le manque de rigueur dans la production du travail et dans la gestion des dossiers. A cet égard l'échange de messages entre Mme [S], M. [B], et Mme [V] à l'occasion du départ de la société de cette dernière n'apporte pas d'élément précis sur d'éventuels retards matinaux de M. [B]. Les seuls éléments tangibles concernent les évaluations de l'intéressé et la synthèse de carrière qui ne comportent aucune signature, mais qui sont produites par les deux parties et dont la validité n'est pas contestée.

Il ressort ainsi du dossier de l'employeur que, pendant la relation de travail qui a duré deux ans et sept mois, M. [B] n'a fait l'objet d'aucune sanction, d'aucune lettre, remarque ou observation négative sur sa manière de servir, sur son comportement, sur d'éventuels retards, ni d'une notification précise sur une insuffisance de résultats de la part de sa hiérarchie. L'employeur ne verse au débat aucune alerte spécifique de la hiérarchie sur une éventuelle insuffisance dans un domaine ou un autre afin de permettre au salarié de redresser une situation dans un délai raisonnable, si tel était le cas.

S'agissant du premier grief reprochant à M. [B] de ne pas avoir atteint ses objectifs : l'employeur invoque dans la lettre de licenciement un manque de proactivité et de rythme, notamment ceux de 2017. Il indique que sa supérieure hiérarchique avait attiré son attention sur ses résultats quantitatifs très éloignés des objectifs fixés lors de l'évaluation de mi-année qui s'est tenue en juillet 2018 et qu'au 31 décembre 2018, les objectifs étaient de nouveau très éloignés de ceux fixés.

En réalité, comme précédemment rappelé, les pièces produites ne comportent aucune trace d'alerte ou d'avertissements spécifiques émanant de la supérieure hiérarchique, les seuls éléments produits étant les évaluations 2016, l'entretien de demi-année 2017, l'évaluation 2017 et une synthèse de carrière 2018.

Les documents produits intitulés 'entretiens annuels -Evaluation -objectis - carrière -formation' contiennent de nombreux éléments dont une partie 'objectifs'. Il y a lieu d'en retenir les éléments suivants :

L'évaluation 2016 est globalement satisfaisante avec des mentions 'bien' sur l'essentiel des rubriques, y compris sur l'évaluation de la réalisation des objectifs (5 mentions 'bien' sur cette rublique) et une seule amélioration nécessaire sur la préparation des rendez-vous et l'approfondissement des sujets. L'évaluation note un très bon relationnel interne et des process en cours d'apprentissage, étant précisé que l'intéressé a fait l'objet d'un recrutement récent. L'appréciation générale de la performance indique aussi la mention 'bien' et l'évaluateur note notamment que M. [B] est arrivé dans l'équipe il y a 6 mois et a réalisé rapidement des signatures. Il doit améliorer l'anticipation et la rigueur en 2017. Différents objectifs sont mentionnés pour l'année à venir.

Le rapport d'entretien de mi-année 2017 effectué le 27 juillet 2017 contient une mise à jour des objectifs, mais aucun élément d'appréciation sur le salarié.

L'évaluation 2017 mentionne que M. [B] est impliqué et motivé et incite l'intéressé au respect des délais et à une meilleure organisation. Il est noté comme positif, constructif, agile, intelligent, ouvert d'esprit et curieux. L'évaluateur indique que M. [B] ' a réalisé cette année de belles signatures sur les locaux vacants et le pipeline. Il a une très bonne approche client. Il parvient à conclure des deals compliqués initiés de longue date (impayés, renouvellement franchisés) grâce à ses aptitudes commerciale et à sa recherche du compromis'. Il est mentionné comme étant 'au dessus des attentes' sur ce point. Il est aussi mentionné comme 'digne de confiance' et 'fait preuve de respect envers les collaborateurs en interne et les partenaires extérieurs. Respecte les procédure du Groupe et le code d'éthique. Est ouvert au débat'. L'évaluateur ajoute que ' les équipes apprécient de travailler avec [L]. [L] est parvenu à signer des protocoles sur les impayés grâce à sa ténacité et ses qualités relationnelle'. Il est noté 'bien' sur les compétences techniques et l'expertise. S'agissant de l'évaluation des réalisations sur objectifs, il est noté 'au dessus des attentes' dans deux rubriques, 'bien' dans deux autres rubriques et 'améliorations nécessaires' dans une seule rubrique (notamment sur la préparation des rendez-vous). L'évaluateur conclut que le niveau d'atteinte des objectifs ou projets mérite la mention 'bien'. L'appréciation générale de la performance annuelle est notée 'bien' et indique : ' [L] a une très bonne approche commerciale, très appréciée des enseignes avec lesquelles il a instauré un lien de confiance. Des résultats quantitatifs non représentatifs du fort investissement de [L] qui, en se concentrant sur ses axes d'amélioration, devrait réaliser une belle année 2018".

Par ailleurs, seul le document de synthèse de carrière 2018 non signé mentionne des résultats éloignés des objectifs.

Après analyse des pièces produites, il n'est en réalité établi aucun élément sérieux sur une insuffisance de résultat ou d'atteinte des objectifs notable et directement imputable à M. [B] qui traduirait une incapacité objective et durable d'exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification.

S'agissant du second grief consistant dans un manque de rigueur dans la production du travail et dans la gestion des dossiers, l'employeur invoque des notes non anticipées ou incomplètes, des absences aux réunions planifiées et un manque d'approfondissement des sujets, mais là encore, il n'est pas produit d'attestations ou de documents attestant de manquements précis et sur lesquels M. [B] aurait été alerté. M. [B] a néanmoins répondu aux différents griefs formulés dans une lettre de contestation du licenciement en date du 30 juillet 2019.

La société Espace Expansion reproche à M. [B] d'avoir adressé à sa supérieure hiérarchique le 5 avril 2018 une note de synthèse interne Provalliance pour relecture pour un rendez-vous le 10 avril 2018 en faisant valoir que cette note aurait dû être lui être adressée plus longtemps à l'avance afin de permettre une préparation du rendez-vous la plus optimale. Sur ce point, M. [B] a bien adressé une note pour relecture à sa supérieure le 5 avril pour un rendez-vous du 10 avril, ce qui ne révèle pas un retard, d'autant que la politique interne de l'entreprise impose seulement un envoi 48H avant le rendez-vous qui est d'ailleurs rappelé par un message adressé au personnel qui est produit au débat. Ce reproche n'est pas justifié, d'autant qu'il n'est produit aucune relance adressée à M. [B].

La société Espace Expansion reproche aussi à M. [B] de ne pas avoir informé sa supérieure hiérarchique pour préparer au mieux un rendez-vous avec le Groupe Provalliance lors d'un salon international de l'immobilier de commerce (MAPIC) se déroulant le 14 novembre 2018 alors que celui-ci devait préparer une note récapitulative sur l'actualité du Groupe. M. [B] s'explique précisément sur ce reproche dans sa lettre de contestation en rappelant, sans être utilement contredit, qu'au moment de la rédaction de la note, ils n'étaient pas au stade du plan ou de la proposition et qu'on ne l'avait pas relancé. Il indique qu'il a concentré la note sur les sujets plus aboutis. Par ailleurs, il a eu l'occasion de s'en expliquer avec sa supérieure sur ce point. Il reconnaît qu'il n'a pas inclus dans cette note le sujet dit 'du local Marionnaud', mais aucun élément ne permet de considérer que cette façon de procéder a été une source de difficulté. Ce grief reste beaucoup trop vague pour être retenu comme suffisamment sérieux pour conforter la décision de l'employeur de procéder au licenciement.

Il est par ailleurs reproché à M. [B] une absence aux réunions hebdomadaires du 13 septembre 2018 et du 22 novembre 2018 qui ont contraint le manager à lui répéter les informations. Sur ce point, M. [B] rappelle qu'en 2 ans et demi de relation contractuelle et plus d'une trentaine de réunions, on lui reproche son absence uniquement à 2 réunions, étant précisé que ces réunions ont été mises en place pour discuter de l'avancement de la clôture de certains dossiers. Aucun élément n'indique que la présence du salarié à ces deux réunions était indispensable. M. [B] n'a pas été rappelé à l'ordre sur ce point et il ne lui a pas été demandé de fournir des explications. M. [B] rappelle que les réunions informelles hebdomadaires se tenaient au gré des disponibilités de chacun. De plus, s'agissant de la réunion du 22 novembre, M. [B] avait prévenu sa supérieure qu'il serait en retard, mais il a bien assisté à celle-ci et en a fait un compte-rendu. Ces deux faits isolés ne permettent pas d'établir un manque de rigueur de M. [B] en l'absence d'une attestation de sa supérieure hiérarchique sur ce point et compte tenu des évaluation globalements positives de l'intéressé durant la relation contractuelle.

Enfin, la société Espace Expansion fait valoir un manque d'approfondissement et de rigueur des sujets en faisant notamment état d'une demande auprès du service juridique sans avoir effectué des vérifications sur des charges contestées par une enseigne cliente. M. [B] répond précisément sur ce point qu'il s'agit de l'indexation du dépôt de garantie de la GAPD d'Yves Rocher aux [14] et que l'enseigne lui a fait une remarque très spécifique sur la GAPD, ce qui l'a conduit à questionner le service juridique à ce sujet, ce qui est le processus habituel. M. [B] explique sans être utilement contredit sur ce point qu'il ne s'agit pas là d'un manque d'approfondissement, mais, au contraire, qu'il s'agissait d'améliorer ses connaissances sur le sujet. Par ailleurs, il n'est établi aucune précision sur des manquements circonstanciés de l'intéressé qui démontrerait un 'manque d'approfondissement et de rigueur' imputable au salarié. Ce grief n'apparaît pas sérieux.

Il est enfin observé que M. [B] produit plusieurs message de félicitations relatifs à son activité professionnelle au sein de la société Espace Expansion.

Ainsi, au vu des éléments versés au débat, les griefs reprochés à M. [B] n'apparaissent ni réels, ni sérieux et ne traduisent pas de manière objective l'insuffisance professionnelle alléguée par l'employeur. Il s'ensuit que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le jugement du conseil de prud'hommes sera donc infirmé sur ce point.

Evaluation du montant des condamnations

Aux termes de l'article L.1235-3 du code du travail, si un licenciement intervient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux en fonction de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise.

M. [B] avait une ancienneté de plus de deux ans.

La société Espace Expansion étant en l'espèce une entreprise employant habituellement plus de onze salariés, l'indemnité minimale est de 3 mois de salaire brut et l'indemnité maximale de 3,5 mois de salaire brut.

Au vu des pièces et des explications fournies, compte tenu des circonstances de la rupture, des bulletins de salaire versés aux débats et des sommes octroyées au titre des heures supplémentaires, de l'âge du salarié, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, la cour dispose des éléments nécessaires et suffisants pour fixer à 15 000 euros le montant de la réparation du préjudice subi en application de l'article L.1235-3 du code du travail

Compte tenu de la somme déjà percue par le salarié, de son salaire et de son ancienneté, il convient par ailleurs d'accorder à M. [B] la somme de 1 045 € au titre du rappel du solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement dans la limite de de la demande.

Sur la demande au titre d'une inégalité de traitement

M. [B] sollicite 5 000 euros nets au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice du fait de l'inégalité de traitement subie.

L'article L.3221-4 du code du travail précise que sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.

Le salarié qui invoque une atteinte au principe "A travail égal, salaire égal" doit présenter les éléments de fait laissant supposer l'existence d'une inégalité de traitement. Au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette inégalité.

M. [B] soutient avoir été victime d'une inégalité de traitement car plusieurs de ses collègues, à ancienneté équivalente ou légèrement supérieure, et ayant obtenu des résultats similaires ou inférieurs aux siens ont fait l'objet d'une promotion.

Selon M. [B], Mme [Z] [U] disposait de la même expérience et, en 2018, ne réalisait que 31,25 % de son objectif. Or, elle a bénéficié d'une promotion en 2019 en obtenant le statut de « senior ». Par ailleurs, M. [J] [C] ne réalisait que 59,25 % de son objectif en 2018. Pourtant, il a bénéficié d'une promotion en 2019, en obtenant le statut de « Manager ».

Il est cependant observé que les deux salariés visés par M. [B] sont plus anciens puisque M. [B] n'a été embauché qu'en juin 2016. M. [C] est entré au groupe le 24 juin 2013 et Mme [U] le 23 mars 2015. De plus, l'intéressé opère une comparaison uniquement sur les objectifs quantitatifs atteints par rapport à ceux qui étaient fixés, en omettant les éléments qualitatifs dans l'appréciation de la performance et de la valeur ajoutée.

Les deux collègues visés ont vu leur performance notée en « Au-dessus des attentes » sur l'année 2018 (soit une note de 4/5). Leurs très bons résultats qualitatifs étant soulignés dans leurs évaluations, ce qui n'est pas le cas de M. [B].

Ces deux salariés ont été promus postérieurement au licenciement de Monsieur [B] et ont poursuivi leur évolution de carrière au regard de leur niveau de performance. Mme [U], qui était Responsable commercialisation internationale Europe, a été promue Directrice Grands Comptes et M. [C] occupait en dernier lieu le poste de Responsable de secteur.

La demande au titre d'une inégalité de traitement n'est fondée sur aucun élément sérieux et n'apparaît pas pertinente.

En conséquence, le jugement du conseil de prud'hommes sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [B] sur ce point.

Sur la demande de remise de documents :

Compte tenu des développements qui précèdent, la demande tendant à la remise de documents sociaux conformes est fondée et il y est fait droit dans les termes du dispositif. Il n'y a pas lieu d'ordonner une astreinte.

Sur le remboursement des indemnités de chômage

S'agissant en l'espèce d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse prononcé en application de l'article 1235-3 du code du travail, M. [B] ayant plus de deux ans d'ancienneté au moment du licenciement et la société Espace Expansion occupant au moins 11 salariés, il convient, en application de l'article L 1235-4 du code du travail d'ordonner d'office le remboursement des allocations de chômage du jour du licenciement au jour de la présente décision dans la limite de six mois, les organismes intéressés n'étant pas intervenus à l'audience et n'ayant pas fait connaître le montant des indemnités.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement, mais seulement en ce qu'il a débouté M. [B] de ses demandes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au titre du rappel du solde de l'indemnité de licenciement, des heures supplémentaires, des congés payés afférents, et des repos compensateurs ; en ce qu'il a débouté la SAS Espace Expansion de sa demande au titre des jours de RTT ;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

CONDAMNE la société SAS Espace Expansion à payer à M. [L] [B] les sommes de :

- 15 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1 045 euros nets au titre du rappel du solde de l'indemnité de licenciement

- 18 924 euros au titre des heures supplémentaires et 1 892, 40 euros au titre des congés payés afférents, déduction faite de la somme de 2 247 euros au titre du remboursement des jours de RTT ;

- 4870,80 euros au titre des repos compensateurs ;

CONFIRME le jugement en ses autres dispositions ;

Y ajoutant,

- DITque les condamnations au paiement de créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et que les condamnations au paiement de créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la mise à disposition du présent arrêt ;

- AUTORISE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article  1343-2 du code civil ;

- ORDONNE la remise par la société SAS Espace Expansion à M. [L] [B] de bulletins de paye, d'une attestation France Travail et d'un certificat de travail conformes au présent arrêt ;

DIT n'y avoir lieu à prononcer une astreinte ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société SAS Espace Expansion à payer à M. [L] [B] en cause d'appel la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

ORDONNE le remboursement par la société SAS Espace Expansion à France Travail des indemnités de chômage payées à la suite du licenciement de M. [L] [B], dans la limite de six mois et dit qu'une copie certifiée conforme du présent arrêt sera adressée par le greffe par lettre simple à la direction générale de France Travail conformément aux dispositions de l'article R. 1235-2 du code du travail ;

DEBOUTE les parties du surplus des demandes ;

CONDAMNE la société SAS Espace Expansion aux dépens de première instance et d'appel.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 21/09020
Date de la décision : 26/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-26;21.09020 ?
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