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21/03/2024 | FRANCE | N°23/02030

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 21 mars 2024, 23/02030


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7



ARRÊT DU 21 MARS 2024

(n° , 18 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/02030 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CHAT2



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Juillet 2022 par le Tribunal Judiciaire de CRÉTEIL - RG n° 22/00008





APPELANTE

SOCIÉTÉ AVENIR DÉVELOPPEMENT - GPSEA AMÉNAGEMENT

anciennement dénommée SPLA GRAND PARIS SUD EST AVENIR DEVELOPP

EMENT

Société publique locale d'aménagement, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 24]

repr...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 21 MARS 2024

(n° , 18 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/02030 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CHAT2

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 04 Juillet 2022 par le Tribunal Judiciaire de CRÉTEIL - RG n° 22/00008

APPELANTE

SOCIÉTÉ AVENIR DÉVELOPPEMENT - GPSEA AMÉNAGEMENT

anciennement dénommée SPLA GRAND PARIS SUD EST AVENIR DEVELOPPEMENT

Société publique locale d'aménagement, agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 3]

[Localité 24]

représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS- VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477 substituée à l'audience par Me Christine CASTERA, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉS

S.C.I. 2 Y

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 19]

[Localité 25]

non comparante, non représentée

DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DU VAL DE MARNE - Pôle Gestion Publique - Division Domaine -

Pôle Evaluation Domaniale - Commissaire du Gouvernement

[Adresse 1]

[Localité 24]

représentée par Monsieur [S] [U], en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 1er Février 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Hervé LOCU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Hervé LOCU, Président

Madame Valérie MORLET, Conseillère

Madame Valérie DISTINGUIN, Conseillère

Greffier : Madame Dorothée RABITA, greffier lors des débats

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, Président et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.

*

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Par délibération du 29 mars 2017, l'établissement public territorial Grand Paris Sud Est Avenir Développement a créé la ZAC du centre commercial du Grand Ensemble. L'aménagement de la ZAC a été confié à la société publique locale d'aménagement Grand Paris Sud Est Avenir Développement (ci-après « SPLA GPSEAD »), en vertu d'un traité de concession du 09 novembre 2018. En 2022, la SPLA GPSEAD est devenue la société publique locale d'aménagement AVENIR DEVELOPPEMENT - GPSEA Aménagement (ci-après « SPLA AD - GPSEAA ») (Pièce 24I).

Une enquête publique et parcellaire a été menée du 12 octobre 2020 au 13 novembre 2020.

Par arrêté préfectoral du 15 février 2021, la ZAC du centre commercial du Grand Ensemble a été déclarée d'utilité publique.

Un arrêté de cessibilité des biens a été pris le 15 avril 2021.

L'ordonnance d'expropriation, emportant transfert de propriété au profit de la SPLA GPSEAD, a été rendue le 08 juillet 2021.

Le centre commercial du Grand Ensemble est érigé sur la parcelle cadastrée section AD n°[Cadastre 22] d'une superficie totale de 6.010 m². Il s'agit d'une copropriété à usage commercial située au milieu d'une zone importante de logements.

Est notamment concernée par l'opération la SCI 2Y, en tant que propriétaire du lot 8 à usage commercial situé au sein du centre commercial du Grand Ensemble à [Localité 25].

Faute d'accord sur l'indemnisation, la SPLA GPSEAD a saisi la juridiction de l'expropriation du Val-de-Marne le 05 novembre 2021 aux fins de fixation de l'indemnité d'expropriation.

Par un jugement contradictoire du 04 juillet 2022, après transport sur les lieux le 05 avril 2022, le juge de l'expropriation de Créteil a :

Annexé à la décision le procès-verbal de transport du 05 avril 2022,

Fixé l'indemnité due par la SPLA GPSEAD à la SCI 2Y au titre de la dépossession des locaux situés du centre commercial Grand Ensemble sis à [Localité 25] à la somme de 235.750 euros HT/HD ;

Dit que cette indemnité de dépossession foncière se décompose de la façon suivante :

197.000 euros au titre de l'indemnité principale (1.914 euros/m² × 240 m²),

20.750 euros au titre de l'indemnité de remploi,

18.000 euros au titre de l'indemnité pour pertes de revenus locatifs ;

Condamné la SPLA GPSEAD à payer à la SCI 2Y la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la SPLA GPSEAD aux dépens ;

Rejeté toutes les autres demandes des parties.

La SLPA AD - GPSEAA a interjeté appel du jugement le 03 novembre 2022 sur le montant de l'indemnité de dépossession, les frais irrépétibles, les dépens et le rejet de ses autres demandes.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

1/ déposées au greffe le 02 février 2023 par la SLPA AD - GPSEAA, notifiées le 02 février 2023 (AR intimé le 06 février 2023 et AR CG le 06 février 2023), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

La déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

Y faisant droit,

Réformer le jugement rendu le 25 août 2022 par le tribunal judiciaire de Créteil en ce qu'il a fixé l'indemnité revenant à la SCI 2Y à la somme de 235.750 euros HT/HD se décomposant comme suit :

197.000 euros au titre de l'indemnité principale,

20.500 euros au titre de l'indemnité de remploi,

18.000 euros au titre de l'indemnité pour perte de revenus locatifs ;

Réformer le jugement rendu le 04 juillet 2022 en ce qu'il « condamne la SPLA GPSEAD à payer à la SCI 2Y la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile », « condamne la SPLA GPSEAD aux dépens » ;

Réformer le jugement en ce qu'il « rejette toutes les autres demandes des parties », mais uniquement lorsqu'il rejette les demandes de la SPLA AD - GPSEAA anciennement dénommée SPLA GPSEAD.

Statuant à nouveau,

Fixer l'indemnité principale en valeur occupée à 65.215,50 euros ;

Fixer en conséquence l'indemnité de remploi à 7.521,55 euros ;

Fixer l'indemnité pour perte de revenus locatifs à six mois de loyer HT/HC, soit 6.481,10 euros :

En tout état de cause,

Condamner la SCI 2Y aux entiers dépens liés à la procédure d'appel et à verser une somme de 7.500 euros à la SPLA AD - GPSEAA au titre des frais irrépétibles exposés par elle en cause d'appel en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Débouter la SCI 2Y de toutes demandes contraires au présent dispositif.

2/ adressées au greffe le 10 mars 2023 par le commissaire du gouvernement, intimé, notifiées le 04 avril 2023 (AR appelant le 06 avril 2023 et AR intimé le 05 avril 2022), aux termes desquelles il forme appel incident et demande à la cour de :

Fixer l'indemnité de dépossession foncière à la somme de 65.563,34 euros arrondie à 65.563 euros, décomposée comme suit :

Indemnité principale : 58.693,95 euros en valeur occupée,

Indemnité de remploi : 6.869,39 euros,

Indemnité de perte de revenus locatifs : six mois de loyers HT/HC

sur justificatifs.

La SCI 2 Y n' a pas constitué avocat.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES :

La SLPA AD - GPSEAA fait valoir que :

Concernant la consistance, l'état et la situation du bien, le premier juge considère, à tort, que le bien bénéficie d'une « attractivité particulière pour les investisseurs ». Le centre commercial au sein duquel est situé le bien exproprié est en désuétude et connaît un taux de vacance important, de nombreux commerces étant fermés depuis plus de dix ans (Pièce 9A). Le local est à usage de services d'ambulances. La visibilité du commerce depuis l'intérieur n'est donc pas valorisable. Les commerces du centre commercial ne bénéficient d'aucune visibilité depuis l'extérieur. En outre, il ne s'agit pas d'un bâtiment indépendant , car le gros 'uvre dont la toiture était intégrée aux parties communes. Ces éléments ont motivé le lancement de l'opération d'aménagement en 2017 (Pièce 21A). Aussi, le bien exproprié est également vétuste en ce que la procédure porte à la fois sur les parties privatives et les tantièmes de parties communes du bien. Or, le mauvais état d'entretien des parties communes impacte nécessairement la valeur du lot de copropriété. C'est en ce sens que la SPLA AD ' GPSEAA a fait valoir devant le juge de première instance des éléments de moins-value, dont le premier juge n'a pas tenu compte. Sur les treize lots de la copropriété composant le Grand Ensemble, sont recensés une supérette dont la fréquentation est à la baisse depuis plusieurs années, cinq commerces divers, une pharmacie, un local de stockage, un local professionnel occupé par une société d'ambulances, deux lots vacants et un local associatif. Les dysfonctionnements du centre commercial (enclavement, dégradation, accès par l'arrière, nature du bâti) rendent difficile l'intégration urbaine à l'échelle du territoire. En première instance, le commissaire du gouvernement a confirmé l'état vétuste et dégradé du centre commercial, l'absence d'exploitation de certains commerces autour du bien exproprié, et la situation d'enclave du centre commercial, en périphérie de la ville et en retrait par rapport aux axes de circulation. En ne tenant pas compte de ces éléments de moins-value, le jugement entrepris encourt l'infirmation.

Concernant la superficie du bien, le premier juge a retenu une surface de 79 m² correspondant à une surface de 70 m² à laquelle est ajoutée la surface de la mezzanine, à savoir 30 m², pondérée d'un coefficient de 0,3. Le procès-verbal de transport indiquait pourtant un accord sur la surface à 70 m² Carrez. Le local présente en réalité une surface de 70 m² en surface utile soit 65 m² Carrez. La cour d'appel de Paris a déjà refusé de prendre en compte la surface de mezzanines (Pièce 24A). Surtout, la mezzanine n'en est pas une au sens de la loi Carrez car elle ne présente une hauteur sous plafond maximale de 1 m et n'est accessible par aucun escalier. Le mesurage du lot exproprié par un géomètre-expert a été refusé par la SCI 2Y et par la société occupante. La comparaison avec d'autres lots sur la base des tantièmes de parties communes démontre l'incohérence de la surface de 70 m² alléguée par la SCI 2Y. Enfin, le titre de propriété de la SCI 2Y fait état d'une surface de 62,11 m² Carrez (Pièce 26A). C'est cette surface qu'il est demandé de retenir en cause d'appel.

Concernant les termes retenus et le calcul de l'indemnité principale, l'avis des Domaines du 08 avril 2020 estime l'ensemble des dix lots expropriés à la somme de 1.800.000 euros pour une surface utile de 1.683 m², soit environ 1.070 euros/m² (Pièce 8). Consultée à nouveau sur la seule valeur vénale du lot 8 de la copropriété, dont la superficie utile était alors estimée à 70 m², la DDFIP a évalué le bien à 54.000 euros en valeur occupée dans son avis du 12 octobre 2020 (Pièce 7). L'autorité expropriante a alors fixé l'indemnité principale à 56.000 euros en valeur occupée, soit 767 euros/m² en tenant compte d'un abattement de 30% pour occupation. Au regard de cette estimation, elle a proposé à la SCI 2Y une indemnité principale de 54.000 euros pour un local occupé et 70.200 euros pour un local vide. En s'appuyant sur les cessions des autres lots de copropriété, l'offre de la SPLA GPSEAD en 2020 a été fixée à 1.100 euros/m² en valeur occupée, compte-tenu de l'avis des Domaines du 08 avril 2020 et de la dépréciation dans le temps du centre commercial. Puis, dans ses conclusions du 18 mars 2022, le commissaire du gouvernement proposait de fixer la valeur unitaire à 1.200 euros/m² en valeur libre avec un abattement de 30% pour occupation, soit 840 euros/m² en valeur occupée. L'autorité expropriante a alors repris cette estimation en concluant à la fixation de la valeur unitaire du bien à 840 euros/m² en valeur occupée.

La SPLA AD - GPSEAA critique l'ensemble des six termes de comparaison produits par l'expropriée en première instance.

Le commissaire du gouvernement proposait de retenir un prix unitaire de 1.350 euros/m² en valeur libre d'occupation, outre un abattement pour occupation de 30%, au regard de huit termes de comparaison révélant une valeur unitaire moyenne de 1.721 euros/m². Le premier et le cinquième terme de comparaison du commissaire du gouvernement sont effectivement pertinents. En revanche, la SPLA AD - GPSEAA critique tous les termes de comparaison produits par le commissaire du gouvernement en ce qu'ils portent sur des biens de meilleure qualité et situés dans un environnement bénéficiant d'une meilleure commercialité.

La SPLA a commis le cabinet Expercia afin de réaliser un rapport d'évaluation du bien exproprié (Pièce 27). Il en ressort que les termes de comparaison discutés en première instance, excepté la mutation du 09 novembre 2021, sont situés au sein de secteurs bénéficiant d'une excellente commercialité, et ne sont donc pas comparables avec le bien exproprié. L'expert s'est fondé sur les éléments disponibles dans la base BIEN, sur les termes de comparaison de la base de la DDFIP, sur les offres de vente pour des locaux commerciaux, sur les statistiques fournies par la cote annuelle des valeurs vénales immobilières et foncières, sur les écarts de commercialité entre les différents secteurs de la commune d'[Localité 25], pour conclure que la valeur unitaire moyenne est de 1.500 euros/m². Dans la mesure où les droits du propriétaire sont limités, l'occupation du bien justifie une décote de 30%. Le bien exproprié souffre en effet de faiblesses, notamment en ce qu'il est peu liquide sur le marché, les acquéreurs potentiels étant des propriétaires exploitants. Le premier juge se méprend donc en considérant que le bien bénéficie d'une attractivité particulière pour les investisseurs et en retenant une absence de moins-value pour occupation. En effet, l'expert considère que le caractère peu liquide du bien limite les droits du propriétaire, ce qui justifie l'application d'un abattement pour occupation. Donc, la valeur unitaire doit être fixée à 1.500 euros/m², soit 1.050 euros/m² après abattement de 30%, portant l'indemnité principale à 65.215,50 euros.

Concernant l'indemnité de remploi, en application de l'article R.322-5 du code de l'expropriation, elle doit être fixée à 7.521,55 euros.

Concernant l'indemnité pour pertes de revenus locatifs, son montant doit s'apprécier au regard de la situation concrète de l'expropriée. À l'inverse, il ressort de la jurisprudence que lorsque l'exproprié ne justifie pas, de l'existence de difficultés particulières pour acquérir un nouveau local, l'indemnité est fixée sur la base de six mois HT/HC de loyer, et non douze mois (Pièce 28A). En l'occurrence, le premier juge fait référence à ce qui serait « alloué habituellement », pour justifier de fixer la base d'indemnisation à une année. Or, il ne ressort pas du marché une rareté particulière des locaux commerciaux sur la commune d'[Localité 25], bien au contraire au regard des énonciations du rapport du cabinet Expercia. Au surplus, il convient de relever que le premier juge a pris en compte non seulement le délai nécessaire à l'exproprié pour trouver un local, mais également le délai lui permettant de retrouver un locataire, alors même que le local exproprié ne constitue pas un bien de rapport mais un bien exploité par son propriétaire. L'allocation d'une indemnité équivalente à douze mois de loyer apparaît à cet égard inadéquate. Le montant du loyer annuel actualisé est de 12.962,20 euros/an (Pièce 30A). L'autorité expropriante sollicite donc la réformation du jugement entrepris en ce qu'il a fixé l'indemnité pour perte de revenus locatifs à douze mois de loyer en tenant compte à tort d'un loyer annuel de 18.000 euros, et demande la fixation de ladite indemnité par la cour à six mois de loyer soit 6.481,10 euros.

Concernant les frais irrépétibles, la SPLA AD - GPSEAA a été contrainte pour faire valoir ses droits d'interjeter appel et de mandater un expert immobilier aux fins d'établissement d'un rapport. Dans les circonstances de l'espèce, il lui sera alloué la somme de 7.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le commissaire du gouvernement conclut que :

Concernant la description du bien exproprié, la parcelle cadastrée section AD n°[Cadastre 22], d'une superficie de 6.010 m², est sise [Adresse 20] à [Localité 25] (94). Il s'agit d'une copropriété à usage commercial. Le commissaire du gouvernement reprend les descriptions telles qu'elles sont retenues dans le procès-verbal de transport sur les lieux. S'agissant de la surface, les documents fournis par l'appelant ne permettent pas de déterminer avec certitude la surface exacte des lots expropriés. Il est donc proposé de retenir la surface retenue par le premier juge à savoir 73 m² Carrez. S'agissant de la situation locative, les lots 3 et 3 bis sont chacun occupés en en vertu d'un bail commercial.

Concernant la date de référence, en vertu des articles L.322-2 du code l'expropriation et L.213-6 du code de l'urbanisme, puisque le bien exproprié est soumis au droit de préemption urbain, la date de référence est celle du 02 octobre 2019, date à laquelle la modification du plan local d'urbanisme a été approuvée par le Conseil territorial.

Concernant la situation d'urbanisme, la parcelle AD n°[Cadastre 22] est située en zone Ube à la date de référence. La zone UB correspond à des espaces à dominante d'habitat collectif. Le bien est dans le secteur Ube, correspondant au secteur sud-ouest du Grand ensemble, dans lequel les dispositions réglementaires organisent la rénovation urbaine.

Concernant les références relevées par le commissaire du gouvernement, l'étude de marché porte sur des mutations récentes de locaux commerciaux, situés sur la commune d'[Localité 25], les mutations restant assez rares sur cette zone géographique. Les termes de comparaison trouvés concernent des biens libres d'occupation. La moyenne des huit termes de comparaison s'établit à 1.743,38 euros/m².

Concernant l'examen des références de l'expropriant appelant en cause d'appel, le rapport du cabinet Expercia produit neuf termes de comparaison qui ne sont pas référencés et ne peuvent donc pas être retenus. Le rapport inclut également quatre annonces de biens à la vente qui ne sont pas des mutations effectives et ne peuvent donc pas être retenues.

Concernant l'examen des références citées par l'expropriée en première instance, deux des six termes de comparaison ne sont pas accompagnés de la référence de publication. De plus, les biens libres et occupés sont mélangés sans distinction et sans pratique d'abattement pour occupation. Les biens sont également situés dans un environnement complètement différent du bien à évaluer. Pour ces raisons, les termes de comparaison doivent être écartés.

Concernant la surface, l'expropriée proposait en première instance de retenir une surface de 79 m². L'autorité expropriante indique dans son mémoire d'appel que l'expropriée a refusé le mesurage par un géomètre. À défaut d'un rapport de géomètre-expert, le commissaire du gouvernement propose de retenir la surface inscrite dans le titre de propriété présenté par l'autorité expropriante dans son mémoire d'appel, soit 62,11 m².

En synthèse, le commissaire du gouvernement propose de privilégier la première mutation qui ressort de l'étude de marché, celle-ci ayant lieu dans le même centre commercial et étant la plus récente. De plus, les termes de comparaison produits dans le cadre de l'étude de marché concernent des mutations de biens libres, c'est pourquoi il convient de retenir un abattement de 30% pour occupation commerciale.

Concernant l'indemnité principale, le commissaire du gouvernement retient la méthode par comparaison globale, terrain et accessoires intégrés, montant exprimé HT/HD. L'estimation est réalisée en valeur occupée. La surface utile retenue est de 62,11 m² Carrez. La valeur unitaire retenue est de 1350 euros/m². Il applique un abattement de 30% pour occupation. L'indemnité principale s'élève donc à 73 m² × 1.350 euros/m² × 0,70 = 58.693,95 euros.

Concernant l'indemnité de remploi, elle doit être fixée à la somme de 6.869,39 euros.

Concernant l'indemnité de perte de revenus locatifs, elle doit être fixée à six mois de loyers HT/HC sur justificatifs.

SUR CE, LA COUR

- Sur la recevabilité des conclusions

Aux termes de l'article R 311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017 - article 41 en vigueur au 1er septembre 2017, l'appel de la SPLA AD-GPSEAA étant du 3 novembre 2022, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l'espèce, les conclusions de la SPLA AD-GPSEAA du 2 février 2023 et du commissaire du gouvernement du 10 mars 2023 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.

Sur le fond

Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s'impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.

Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.

L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l'article L 321-1 du code de l'expropriation, les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.

Aux termes de l'article L 321-3 du code de l'expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l'indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.

Aux termes de l'article L 322-1 du code de l'expropriation le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété ou lorsque l'expropriant fait fixer l'indemnité avant le prononcé de l'ordonnance d'expropriation, à la date du jugement.

Conformément aux dispositions de l'article L 322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.

L'appel de la SPLA GPSEAD concerne l'indemnité de dépossession foncière, l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

L'appel incident du gouvernement a trait à l'indemnité principale et l'indemnité de remploi.

S'agissant de la date de référence, le premier juge en application des articles L213-6 et L213-4 du code de l'urbanisme , le bien exproprié étant soumis au droit de préemption, a retenu le PLU modifié le 2 octobre 2019.

La SPLA GPSEAD n'a pas conclu sur ce point.

Le commissaire du gouvernement retient comme le premier juge en application de l'article L213-4 du code de l'urbanisme la date du 2 octobre 2019.

En l'absence de contestation de la SPLA AD - GPSEAA, il convient de confirmer le jugement qui a exactement retenu , le bien exproprié étant soumis au droit de préemption, en application de l'article L213-4 du code de l'urbanisme, la date du 2 octobre 2019, correspondant au PLU approuvé par le conseil territorial du 14 décembre 2016, modification numéro un approuvée le 2 octobre 2019 par le Conseil territorial.

S'agissant des données d'urbanisme, à cette date de référence, la parcelle AD numéro [Cadastre 22] est située en zone Ube, la zone UB correspondant à des espaces à dominante d'habitat collectif et la zone Ube, au secteur sud ouest du Grand Ensemble, dans lequel les dispositions réglementaires organisent la rénovation urbaine.

Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, il s'agit d'une parcelle cadastrée section AD numéro [Cadastre 22] d'une superficie de 6010 m², située 6, allée de la commune à [Localité 25] (94) sur laquelle se trouve une copropriété à usage commercial , la procédure visant le lot de copropriété numéro 8, correspondant à un local commercial se situant au milieu d'une zone importante de logements.

Ce lot est occupé par un propriétaire-exploitant, la SCI 2Y et la société YVES AMBULANCES, toutes deux représentées par M. [L], leur gérant (pièce n°2), avec des revenus générés par la location du local de 12 000 euros HT/HC par an (pièce n°30).

La SPLA GPSEAD indique que le jugement a retenu à tort « une attractivité particulière » du bien ; que le propriétaire a précisé le jour du transport que le lot n'est pas à destination de garage, et qu'il est utilisé comme tel en raison de l'accès par la façade arrière du bâtiment, permettant d'y rentrer un véhicule ; que le local ne bénéficie pas non plus d'une « très bonne visibilité » avec « trois façades » , le centre commercial étant tourné sur lui-même et n'étant pas traversé par les habitants alentours ; que s'agissant d'un service d'ambulances dans un commerce de détail, en aucun cas la présence de façades, l'une donnant à l'intérieur du centre commercial, l'autre donnant sous un porche constituant un accès secondaire au centre commercial et ne bénéficiant à ce titre d'aucune visibilité depuis l'extérieur du centre, n'est susceptible de valoriser ce local par rapport aux autres ; qu'en termes d'attractivité du bien, le tribunal se méprend, puisqu'il a été établi que le centre commercial, en désuétude, connaît un taux de vacance important, de nombreux commerces étant fermés depuis plus de 10 ans (pièce n° 9), situation qui a motivé la création de la Zac du Grand Ensemble en 2017 (pièce n° 21) ; que les commerces sont tous orientés vers l'intérieur du centre commercial et ne bénéficient d'aucune visibilité depuis l'espace public ; que le bien exproprié ne peut donc se prévaloir d'une situation privilégiée, au regard de la configuration des lieux ; qu'enfin le mauvais état d'entretien des parties communes a nécessairement affecté la valeur du lot de copropriété ; que les espaces extérieurs sont de faible qualité ;que le jugement ne tient donc pas compte des éléments de moins-value pour statuer sur la valeur vénale du bien.

Le commissaire du gouvernement, s'agissant des références, précise que les mutations restent assez rares sur la zone géographique avec peu de références sur ce centre commercial.

Le rapport d'évaluation expertise immobilière versée par SPLA AD - GPSEAA, EXPERCIA retient au titre des facteurs influençant l'évaluation du bien :

Forces :

'bien de taille moyenne pouvant intéresser plusieurs types d'activités ;

'forte densité de population au sein du quartier.

Faiblesses :

'centre commercial en désuétude ;

'commercialité en retrait par rapport aux autres secteurs de la ville ;

'localisation difficile d'accès ;

'bien peu liquide sur le marché (produit non pas d'investissements mais de propriétaire - exploitant).

S'agissant de la date à laquelle le bien exproprié doit être estimé, il s'agit de celle du jugement de première instance conformément à l'article L322-2 du code de l'expropriation, soit le 4 juillet 2022.

- Sur l'indemnité principale

1° Sur les surfaces

Le premier juge indique que la surface est de 70 m² plus une mezzanine de 30 m² ; il a retenu un coefficient de 0,3 soit une surface pondérée de 79 m², le bien étant à usage commercial et la mezzanine constituant un espace de stockage important tel que cela été constaté lors du transport.

La SPLA AD - GPSEAA sollicite l'infirmation en indiquant que le local présente une superficie d'environ 70 m² en surface utile soit environ 65 m en surface en loi Carrez,

et que cette superficie ne peut être augmentée de la surface de la partie qualifiée à tort de « mezzanine » par le jugement, puisque celle-ci ne présente une hauteur sous plafond que de quelques centimètres n'étant accessible par aucun escalier ; qu'il s'agit en réalité d'un volume de rangement qui ne peut être valorisé à hauteur de 70 % de la valeur unitaire du bien ; que l'exproprié a refusé un métrage ; que le titre de propriété (pièce numéro 26) fait ressortir une surface Carrez de 62,11 m², et qu'il est indiqué que le local comprend une boutique, vitrine, local sanitaire, sans mentionner une quelconque « mezzanine » ; il convient en conséquence de retenir la superficie précise du lot ressortant de l'acte de vente soit 62,11 m².

Le commissaire du gouvernement retient la surface utile du local commercial de 73 m², en notant une surface de 62,11 m² loi Carrez.

Le bien exproprié correspond au lot numéro 8.

En conséquence, il convient d'appliquer l'article 46 de la loi numéro 65 -557 du 10 juillet 1965 relative à la copropriété, le mesurage issu de la loi Carrez s'appliquant aux lots de copropriétés quels que soient leur usage, et de retenir la surface Carrez ressortant du titre de propriété, soit 62,11 m².

Le jugement sera infirmé en ce sens.

2° Sur la situation locative

Aux termes de l'article L 322-1 du code de l'expropriation le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété.

Le bien est occupé par la société YVES AMBULANCES.

Le premier juge n'a pas appliqué d'abattement pour occupation.

Cette question sera étudiée après examen des références des parties.

3° Sur la méthode

Le juge de l'expropriation dispose du pouvoir souverain d'adapter la méthode qui lui paraît la mieux appropriée à la situation des biens expropriés.

La méthode par comparaison retenue par le premier juge n'est pas contestée par les parties.

Le jugement sera confirmé en ce sens.

4° Sur les références des parties

Le premier juge a écarté les références de l'expropriant et celles de l'exproprié, a retenu les termes du commissaire du gouvernement, et en raison des éléments de plus-value a retenu une valeur unitaire de 2 500 euros/m².

Il convient en conséquence d'examiner les références des parties :

A) Les références de la SPLA AD-GPSEAA

Elle demande de retenir une valeur après abattement de 30% à 1 050 euros/m².

Elle invoque l'avis des Domaines du 8 avril 2020 (pièce n°8) pour une valeur de 1 070 euros/m² et l'avis du 12 octobre 2020 (pièce n°7) sur la seule valeur du lot n°8, soit 767 euros/m² en tenant compte d'un abattement pour occupation.

Les avis des Domaines ne correspondant pas à des mutations effectives seront écartés.

Elle invoque ensuite les mutations suivantes :

-cession en 2012 d'un local de 86 m² situé dans le centre commercial du Grand ensemble (pièce n°1) : selon jugement du 12 mai 2015 ordonnant la réitération de la vente et publiée au service de publicité foncière de [Localité 24] le 29 novembre 2019, ce local commercial a été cédé par sa propriétaire Madame [N] moyennant un prix de 65'000 euros, soit 756 euros/m² (pièce n°2).

Il ressort de l'avis du service des domaines rendu le 2 septembre 2012 que la préemption est effectuée au prix de 65'000 euros fixé par la venderesse (pièce n°3) ;

-cession de local commercial par M. et Mme [E] (lot 7), préempté en 2013 par l'ex-CAPCVM au prix fixé par les vendeurs de 68'000 euros (pièce n°4).

L'avis rendu par le service des domaines précise que le local présente une superficie de 60 m², ce dont il résulte une valeur de 1 133 euros/m² (pièce n°5).

Ces cessions datant de plus de cinq ans sont trop anciennes et seront donc écartées.

Elle produit un rapport d'un cabinet EXPERCIA (pièce n° 25) et indique que selon les éléments disponibles sur la base BIEN, les transactions concernent des locaux situés dans la partie nord d'[Localité 25], qui sont répartis en deux groupes : ceux situés [Adresse 30], bénéficiant de la meilleure commercialité pour une moyenne de 4 066 euros/m² et ceux situés à l'écart de l'artère commerciale principale pour une moyenne de 2 475 euros/m² ; que les offres de vente pour des locaux commerciaux correspondent à des valeurs unitaires comprises entre 2 000 euros et 2 800 euros pour des locaux situés en dehors des principaux axes commerçants, avec même une référence d'un produit neuf à proximité du RER cédé à un prix unitaire de 2 800 euros/m² ; que l'expert conclut : « nous retiendrons donc une valeur métrique moyenne de 1 500 euros/m², ayant posé l'hypothèse que les valeurs métriques supérieures ne puissent se retrouver que dans des secteurs de meilleur commercialité, comme par exemple au nord de la ville, à proximité de la [Adresse 30]. Enfin, le centre commercial affiche des problèmes structurels qui sembleraient de nature à limiter l'investissement dans cette cellule commerciale. La forte vacance au coeur du site en est un des exemples majeurs ».

L'expert EXPERCIA invoque neuf références issues de la base BIEN (page 28) correspondants à des commerces/magasins/boutique :

N° du terme

Date de vente

Adresse

Surface

Prix en euros

Prix en euros/m²

Observations

T1

30 août 2019

[Adresse 9]

38

115'000

3026

libre

T2

17 octobre 2018

[Adresse 13]

26

67'000

2577

libre

T3

18 juillet 2018

[Adresse 5]

69

138'680

2010

libre

T4

30 novembre 2017

[Adresse 11]

25

55'000

2200

libre

T5

29 mars 2017

[Adresse 2]

39

100'000

2564

libre

T6

25 janvier 2017

[Adresse 10]

47

180'000

3830

libre

T7

25 janvier 2017

[Adresse 10]

52

196'000

3769

libre

T8

17 juin 2017

[Adresse 16]

19

78'000

4105

libre

T9

14 novembre 2016

[Adresse 6]

57

260'000

4561

occupé

Moyenne

3183

L'expert indique qu'on peut répartir les transactions en deux groupes :

' les références 6/7/8/9 toutes situées le long de la [Adresse 30], présentant ainsi une valeur métrique moyenne de 4 066 euros/m² ;

'les références 1/2/3/4/5 dans la moyenne des valeurs métriques et de 2 475 euros/m² , celle-ci étant à l'écart de la principale commercial de la ville.

En l'absence des références de publication, s'agissant de termes issus de la base BIEN ne permettant pas d'accéder à l'acte de vente pour connaître ses caractéristiques, celles-ci seront donc écartées.

Le rapport invoque quatre annonces de commerces présentées à la vente entre le 1er octobre 2016 et le 1er octobre 2019 (page 31) :

' 9 septembre 2019 : commerce, [Adresse 15], à [Localité 25], 74 m², 150'000 euros, 2 027 euros/m² , rez-de-chaussée ;

' 11 août 2018 : commerce, proche RER D, 357 m², 996'800 euros, 2792 euros/m², dans un programme de standing, local commercial d'environ 356 m², deux places de stationnement ;

' 23 août 2019 : commerce, proche mairie, 51 m², 142'000 euros, 2784 euros/m², local commercial de plain-pied, disposant d'une enseigne sur un angle et axe passant, proche des transports et de toutes les commodités, à proximité de la mairie, se compose également de quatre caves en sous-sol ;

' 12 juin 2022 : commerce, [Adresse 12] à [Localité 25], 36 m², 129'000 euros, 3 583 euros/m², murs occupés, dans un immeuble en briques de 1930, vitrine et porte sur rue, porte d'accès secondaire sur cour.

L'expert indique que les valeurs métriques semblent cohérentes au vu des transactions et que l'on voit en effet des valeurs métriques comprises entre 2 000 et 2 800 euros pour des locaux situés en dehors des principaux axes commerçants.

Ces annonces ne correspondant pas à des mutations effectives seront écartées.

La rapport cite enfin des statistiques de la Cote Annuelle des Valeurs Vénales Immobilières et Foncières (page 32) qui ne correspondant pas à des mutations effectives et seront donc écartées.

c) Les références du commissaire du gouvernement

Le commissaire du gouvernement propose de retenir la même étude de marché qu'en première instance, soit une étude de marché portant sur des mutations récentes de locaux commerciaux, situés sur toute la commune d'[Localité 25], en indiquant que ce type de mutation reste assez rare sur cette zone géographique avec peu de références sur ce centre commercial, avec les références d'enregistrement et cadastrales, pour des biens libres d'occupation :

N° du terme

Date de vente

Adresse

surface Carrez

Prix en euros

Prix en euros/m²

année de construction

Observations

CG1

9 novembre 2021

[Adresse 23]

52

70'000

1346

1966

boutique, vitrine locale sanitaire

CG2

26 février 2020

[Adresse 14]

62, 88

130'000

2135

1967

une boutique situées au rez-de-chaussée, ayant très privatifs sur

le [Adresse 27] avec 3 pièces usage d'atelier à la suite. Droit à l'usage des water-closets communs situés dans

la cour,

un atelier

CG3

18 juillet 2018

[Adresse 21]

68,88

138'680

2019

1890

une boutique dite numéro 2 en façade sur la [Adresse 29], située au rez-de-chaussée gauche, comportant : boutique, arrière boutique, water-closets, lavabo, réserve,

2 accès vers la cour, un accès à une cave

CG4

4 mai 2018

[Adresse 17]

42,81

115'000

2686

1914

rez-de-chaussée porte gauche de l'entrée commune.

Un local comprenant : une salle avec accès sur rue, une autre salle, WC et une chambre sur rue.

Une cave accessible par trappe.

CG5

13 décembre 2017

[Adresse 4]

64,87

90'000

1387

1922

au rez-de-chaussée,

le local commercial,

2 pièces en arrière boutique,

une cuisine,

2 caves, une remise

CG6

4 mai 2018

[Adresse 7]

131,75

145'000

1101

1968

un magasin dans un ensemble immobilier comprenant un ensemble commercial

CG7

30 juin 2020

[Adresse 8]

238,64

380'000

1592

1968

au rez-de-chaussée, un magasin,

le bien est actuellement

à usage professionnel de bureaux

CG8

25 janvier 2021

[Adresse 18]

342,1

575'000

1681

Un bâtiment élevé sur 2 étages, et en façade sur le [Adresse 26], comprenant : rez-de-chaussée :

un accueil,

une arrière-boutique ; au 1er étage : deux bureaux sur

la [Adresse 28] ; dans la cour arrière, des bâtiments

à usage d'atelier, construit en équerre, comprenant : le premier,

un atelier,

une douche, WC et le second, un atelier, une réserve

Le commissaire du gouvernement propose de privilégier la mutation CG1 qui dans le même centre commercial et qui est la plus récente.

CG1: La SPLA GPSEAD demande de retenir ce terme situé dans le même centre commercial.

Ce terme récent, comparable en consistance et en localisation , puisque situé dans le même centre commercial que le bien exproprié sera retenu.

CG2 : La SPLA AD - GPSEAA demande d'écarter ce terme situé à plus de 3kms et de consistance différente.

Ce terme sera écarté en raison de l'éloignement géographique.

CG3 : La SPLA AD- GPSEAD demande d'écarter ce terme correspondant à la cession d'un bar-restaurant avec terrasse dans un quartier commerçant animé du centre-ville d'[Localité 25] implanté en rez-de-chaussée d'un immeuble de bonne facture, rénové, à l'angle de deux rues, ce qui constitue une situation privilégiée (photographies produites).

Ce terme est situé à 1,9 km du bien exproprié, au centre-ville n'est pas comparable en localisation et sera donc écarté.

CG4 : La SPLA GPSEAD indique que ce terme n'est pas comparable étant situé dans le centre-ville et bénéficiant d'une bien meilleure commercialité.

Ce terme situé à 2 km du bien exproprié, se trouve dans un quartier du centre-ville non comparable en terme de commercialité et sera donc écarté.

G5 : En raison de l'ancienneté de ce terme de près de 5 ans, et de sa consistance différente par rapport au bien exproprié, ce terme sera écarté.

CG6 : La SPLA GPSEA indique que ce terme se situe à 900 mètres au nord du Grand Ensemble et qu'il présente une superficie supérieure à celle du bien exproprié.

Ce terme se situe à proximité du bien exproprié étant à 900 m, est comparable en consistance s'agissant d'un magasin dans un ensemble immobilier comprenant un ensemble commercial.

En raison de la rareté des mutations au sein du centre commercial ou se trouve le bien exproprié, ce terme sera retenu.

CG7 : La SPLA GPSEAD demande d'écarter ce terme qui présente une surface supérieure au bien exproprié.

Ce terme étant actuellement à usage professionnel n'est pas comparable en consistance par rapport au bien exproprié et sera donc écarté

CG8 : La SPLA GPSEAD demande d'écarter ce terme qui présente une surface trop importante de 342,1m² par rapport au bien exproprié et de consistance différente s'agissant de plusieurs bâtiments dont atelier ; il sera donc écarté.

Les deux termes retenus par la cour correspondent à une moyenne de :

1 346 + 1 101=2 447/2=1 223,50 euros en valeur libre.

Il convient cependant de privilégier le terme CG 1 qui est récent et qui se trouve dans le même centre commercial que le bien exproprié.

5° sur l'abattement pour occupation commerciale

Le premier juge indique qu'en l'absence de moins value rapportée du fait de la situation d'occupation, il n'y a pas lieu d'appliquer un abattement pour occupation.

La SPLA AD-GPSEAA demande l'infirmation en indiquant que le cabinet EXPERCIA préconise l'application d'un abattement de 30 % et que la moins-value apportée par l'occupation du bien justifie l'application de celui-ci.

Le commissaire du gouvernement indique que l'étude de marché présente des termes de comparaison libre et propose de retenir un abattement de 30% pour occupation commerciale.

Un abattement est habituellement pratiqué sur la valeur libre d'un bien immobilier pour obtenir sa valeur occupée, en raison du fait qu'un bien occupé vaut généralement moins cher qu'un bien libre ; que toutefois, il ne s'agit pas d'une règle absolue, le juge de l'expropriation pouvant estimer que dans le cas d'espèce qui lui est soumis, il n'y a pas lieu de procéder à un abattement pour occupation commerciale.

En l'espèce, les deux termes retenus par la cour étant en valeur libre, il y a donc lieu d'appliquer l'abattement d'usage de 30 %.

6° sur la fixation de l'indemnité principale

Il convient également de tenir compte des éléments suivants :

'éléments de moins-value :

- enclave du centre commercial qui a motivé la création de la Zac en 2017,

-local situé au sein d'un centre commercial vétuste,

-mauvais entretien des parties communes.

'éléments de plus-value :

-bonne localisation du site au milieu d'habitation,

-bien de taille moyenne pouvant intéresser plusieurs types d'activités,

-état d'usage du bien .

En tenant compte enfin de l'évolution du marché, et en privilégiant la première référence, il convient de retenir la valeur unitaire la plus favorable à l'exproprié, proposée par l'expropriant, soit celle après abattement de 1 050 euros/m².

L'indemnité principale en valeur occupée est donc de :

1 050 euros X 62,11 = 65 215,50 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

- Sur les indemnités accessoires

1° Sur l'indemnité de remploi

Elle est calculée selon la jurisprudence habituelle comme suit :

20% entre 0 et 5 000 euros : 1 000 euros

15% entre 5 001 et 15 000 euros : 1 500 euros

10% sur le surplus soit : ( 65 215, 50 - 15 000 ) x 10% = 5 021,55 euros

soit un total de 7 521,55 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

2° Indemnité pour perte de revenus locatifs

Le premier juge a alloué à l'exproprié une indemnité pour perte de revenus locatifs correspondant à 12 mois de loyers soit la somme de 18 000 euros.

La SPLA GPSEAD demande l'infirmation en retenant une indemnité correspondant à six mois de loyers en indiquant qu'il ne ressort pas du marché une rareté particulière des locaux commerciaux sur la commune d'[Localité 25] comme cela ressort du rapport EXPERCIA.

Elle ajoute que le montant du loyer actuel annualisé est de 12 962,20 euros HT/HC.

Le commissaire du gouvernement retient 6 mois de loyers sur justificatifs.

En conséquence, l'indemnité pour perte de revenus locatifs sera fixée sur la base de 6 mois de loyers soit la somme de : 12 962,20 euros par an/2=6 481,10 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

L'indemnité totale de dépossession en valeur occupée est donc de :

65 215,50 euros (indemnité principale) + 7 521,55euros (indemnité de remploi) + 6 481,10 euros (indemnité pour perte de revenus locatifs)= 79 218,15 euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient d'infirmer le jugement qui a condamné la SPLA GPSEAD à payer à la SCI 2Y la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de débouter la SPLA AD - GPSEA de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en appel.

- Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance, qui sont à la charge de l'expropriant conformément à l'article L 312-1 du code de l'expropriation.

La SCI 2Y perdant pour l'essentiel le procès sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Statuant dans la limite des appels ;

Déclare recevables les conclusions des parties ;

Infirme partiellement le jugement entrepris en ses dispositions relatives à la fixation de l'indemnité de dépossession ;

Statuant à nouveau,

Fixe l'indemnité due par la SPLA GPSEA à la SCI 2Y au titre de la dépossession des locaux situés dans le centre commercial grand ensemble lot numéro 8 sis à [Localité 25] à la somme de 79 218,15 euros en valeur occupée se décomposant comme suit :

-65 215,50 euros (indemnité principale),

-7 521,55 euros (indemnité de remploi),

-6 481,10 euros (indemnité pour perte de revenus locatifs) ;

Confirme le jugement entrepris en ses autres dispositions ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Déboute la société AVENIR DÉVELOPPEMENT - GPSEA AMENAGEMENT de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne LA SCI 2Y aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 23/02030
Date de la décision : 21/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-21;23.02030 ?
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