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20/03/2024 | FRANCE | N°21/19837

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 20 mars 2024, 21/19837


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 20 MARS 2024



(n° /2024, 16 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/19837 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEVJD



Décision déférée à la Cour : jugement du 29 octobre 2021 - tribunal de commerce de PARIS RG n° 2021000511







APPELANTE



SAS SOLFERINO [Localité 10] NORD, enseigne : [9], prise en la personne de son représen

tant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 6]



Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Ayant pour avocat plaida...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 20 MARS 2024

(n° /2024, 16 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/19837 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEVJD

Décision déférée à la Cour : jugement du 29 octobre 2021 - tribunal de commerce de PARIS RG n° 2021000511

APPELANTE

SAS SOLFERINO [Localité 10] NORD, enseigne : [9], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Simon ESTIVAL, avocat au barreau de Paris

INTIMEES

S.A.S. ARTELIA venant aux droits de la société ARTELIA BATIMENT ET INDUSTRIE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 8]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Ayant pour avocat plaidant Me Stéphane LAUNEY, substitué à l'audience par Me Delphine LOISEAU, avocats au barreau de Paris

S.A.R.L. AXEL SCHOENERT ARCHITECTES - AS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée par Me Anne-Marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Anne PUYBARET, avocat au barreau de Paris

CASTLEBROOK FURNITURE AND DESIGN Ltd, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 11]

[Adresse 11] Irlande

Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LX PARIS-VERSAILLES-REIMS, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Ayant pour avocat plaidant à l'audience Me Maxime PONROY, avocat au barreau de Paris

S.E.L.A.F.A. MJA prise en la personne de Maître [Z] [V], mandataire Judiciaire, ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société TKS FRANCE SARL, nommée suivant jugement du tribunal de commerce de Paris du 16 octobre 2019

[Adresse 1]

[Localité 7]

N'a pas constitué avocat - Signification de la déclaration d'appel le 7 janvier 2022 remise à personne morale

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 30 janvier 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Ludovic JARIEL, président de chambre

Mme Sylvie DELACOURT, présidente faisant fonction de conseillère

Mme Viviane SZLAMOVICZ, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Viviane Szlamovicz dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffière, lors des débats : Mme Céline RICHARD

ARRET :

- réputé contradictoire.

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Ludovic Jariel, président de chambre et par Manon caron, greffière, présente lors de la mise à disposition.

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

La société Solferino [Localité 10] nord a engagé des travaux de réhabilitation de l'hôtel [9] à [Localité 10].

Dans le cadre de cette opération, la société Artelia bâtiment & industrie, aux droits de laquelle est venue la société Artelia, est intervenue en qualité d'assistant à la maîtrise d'ouvrage, la société Invesco Real Estate, en qualité de maître d'ouvrage délégué et la société Axel Schoenert architectes (la société Axel Schoenert) en qualité de maître d''uvre avec une mission complète.

La société Solferino [Localité 10] nord a confié le lot agencement à la société TKS France (la société TKS), qui a conclu le 19 mars 2018 un contrat de sous-traitance avec la société Castlebrook furniture & design (la société Castlebrook) pour un montant de 601 144 euros HT.

Par courrier du 8 janvier 2019, la société Artelia a prononcé la résiliation du contrat liant la société Solferino [Localité 10] nord à la société TKS, résiliation confirmée par la société Solferino [Localité 10] nord par courrier du 28 mars 2019.

Par courrier du 15 janvier 2019, la société TKS a résilié le contrat de sous-traitance la liant à la société Castlebrook.

La société Castelbrook a adressé à la société TKS son décompte définitif le 22 mars 2019, avec un solde en sa faveur à hauteur en principal de 147 566,91 euros HT.

Par courrier du 10 juillet 2019, la société Castelbrook a mis en demeure la société TKS de lui régler cette somme correspondant au montant des travaux à hauteur de 496 129,49 euros, déduction faite des travaux déjà facturés à hauteur de 323 756,11 euros HT et de la caution de 5%, auquel il convient d'ajouter la somme de 30 895,13 euros HT, correspondant à une facture émise et impayée.

Par jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 16 octobre 2019, la société TKS a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire et la société Mandataires judiciaires associés (la société MJA) a été désignée en tant que liquidateur. La société Castlebrook a déclaré sa créance pour un montant de 211 506,59 euros HT.

Par lettres recommandées avec demande d'avis de réception du 4 octobre 2019 et du 23 octobre 2019, la société Castelbrook a mis en demeure respectivement les sociétés Artelia et Solferino [Localité 10] nord de lui régler les sommes qui lui sont dues au titre du marché.

Par acte du 3 juin 2020, la société Castlebrook a assigné la société Solferino Paris nord devant le tribunal de commerce de Paris.

Par actes en date du 2 octobre 2020, la société Solferino [Localité 10] nord, a assigné en intervention forcée les sociétés TKS, Axel Schoenert et Artelia aux fins d'appel en garantie.

Par jugement du 29 octobre 2021, le tribunal de commerce de Paris a statué en ces termes :

Fixe la créance de la société Castlebrook au passif de la société TKS représentée par son liquidateur judiciaire la société Mandataires judiciaires associés (la société MJA), prise en la personne de Me [V] aux sommes de :

- 65 243,84 euros en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros.

- Les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40,00 euros,

Condamne in solidum les sociétés Solferino [Localité 10] nord et la société Artelia à payer à la société Castlebrook, en indemnisation de son préjudice les montants suivants :

- 65 243,84 euros en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros.

- Les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros,

Condamne in solidum la société Solferino [Localité 10] nord, la société Artelia à payer à la société Castlebrook une somme de 5000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de la présente procédure.

Condamne la société Solferino [Localité 10] nord à payer à la société Axel Schoenert la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Ordonne l'exécution provisoire

Par déclaration en date du 16 novembre 2021, la société Solferino [Localité 10] nord a interjeté appel du jugement, intimant devant la cour :

- la société Artelia,

- la société Axel Schoenert,

- la société Castlebrook,

- la société MJA, ès qualités.

EXPOSE DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 28 juillet 2022, la société Solferino [Localité 10] nord demande à la cour de :

A titre principal :

Déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par la société Solferino [Localité 10] nord

Et y faisant droit,

Infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 29 octobre 2021 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :

" fixé la créance de la société Castlebrook au passif de la société TKS représentée par son liquidateur judiciaire la société MJA aux sommes de :

- 65 243,84 euros en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros.

- Les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros. ".

Statuant à nouveau,

Mettre hors de cause la société Solferino [Localité 10] nord.

Rejeter purement et simplement toutes demandes dirigées à l'encontre de la société Solferino [Localité 10] nord.

Condamner in solidum les sociétés Castlebrook, TKS, Axel Schoenert et Artelia à payer chacune à la société Solferino [Localité 10] la somme de 2 500 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que tous les dépens de première instance et d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire :

Déclarer recevable et bien fondé l'appel interjeté par la société Solferino [Localité 10] nord.

Débouter la société Axel Schoenert de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; Débouter la société Artelia de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Débouter la société Castlebrook de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Infirmer le jugement du tribunal de commerce de paris en date du 29 octobre 2021 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a :

" fixé la créance de la société Castlebrook au passif de la société TKS représentée par son liquidateur judiciaire la société MJA, prise en la personne de Me [V] aux sommes de :

- 65 243,84 euros en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros.

- Les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros. ".

Statuant à nouveau

Déclarer la société Solferino [Localité 10] nord recevable et bien fondée en son appel en garantie des sociétés TKS, Axel Schoenert et Artelia

Condamner in solidum les sociétés TKS, Axel Schoenert et Artelia à garantir la société Solferino [Localité 10] nord de toutes condamnations prononcées à son encontre du chef des sommes dont le paiement est réclamé par la société Castlebrook.

Condamner in solidum les sociétés TKS, Axel Schoenert et Artelia à payer chacune à la société Solferino [Localité 10] nord la somme de 2 500 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que tous les dépens de première instance et d'appel conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 20 septembre 2022, la société Artelia demande à la cour de :

Déclarer la société Artelia recevable et bien fondé en son appel incident ;

Infirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés Solferino [Localité 10] nord et Artelia, à payer à la société Castlebrook, en indemnisation de son préjudice,

- 65 243,84 euros en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros.

- Les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros

Confirmer le jugement entrepris pour le surplus.

Et statuant à nouveau,

A titre principal :

Juger que la société Artelia n'a commis aucune faute dans l'exécution de sa mission d'assistant à maitrise d'ouvrage ;

Débouter la société Solferino [Localité 10] nord de sa demande d'appel en garantie dirigée à l'encontre de la société Artelia ;

Débouter les parties adverses de toutes leurs demandes, fins et conclusions formulées à l'encontre de la société Artelia ;

A titre subsidiaire, si la société Artelia devait être tenue pour responsable,

Confirmer le jugement en ce qu'il a limité la réparation du préjudice de Castlebrook à la somme de 65 243,84 euros en principal ;

Condamner la société Axel Schoenert et la société TKS, représentée par son liquidateur la société MJA, à relever et garantir intégralement la société Artelia de toutes condamnations qui seraient éventuellement mises à sa charge ;

En tout état de cause :

Condamner la société Solferino [Localité 10] nord ou tout autre succombant au paiement d'une somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 4 mai 2022, la société Axel Schoenert demande à la cour de :

Infirmer le jugement en ce qu'il a dit recevable l'action introduite par la société Solferino à l'encontre de la concluante

Et statuant à nouveau

Juger inapplicable a la concluante la loi du 31 décembre 1975

Juger que le maitre de l'ouvrage n'a pas préalablement à la saisine du tribunal soumis ce litige au CROAIF,

En conséquence,

Juger irrecevables les demandes formées par la société Solferino à l'égard de la société Axel Schoenert

La débouter de toutes ses demandes

Pour le surplus

Confirmer le jugement du 29 octobre 2021 en ce qu'il a retenu qu'aucune faute n'était établie à l'encontre de la concluante

Vu le contrat de maitrise d'oeuvre,

Juger que ni Solferino, ni aucune autre partie au litige, ne sont en mesure de démontrer une faute imputable à la société Axel Schoenert, en relation avec un prétendu préjudice.

Juger qu'il est, contractuellement, prévu que l'architecte n'assumera que les seules conséquences de sa propre responsabilité, sans pouvoir être tenu, solidairement, avec les autres participants au chantier

En conséquence,

Débouter la société Solferino ou toutes autres parties de toutes leurs demandes, fins et conclusions, telles que formées à l'égard de la société Axel Schoenert

Très subsidiairement, en cas d'infirmation : sur Ies appels en garantie,

Vu l'article 1240 du code civil,

Condamner la société Artelia à garantir la société Axel Schoenert de toutes condamnations qui pourraient intervenir à son égard

Condamner Castelbrook à supporter la moitié du montant des sommes qu'elle réclame en règlement du solde de son marché

Condamner tous succombants à verser à la concluante 3 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens qui pourront être recouvrés avec le bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 12 décembre 2022, la société Castlebrook demande à la cour de :

Infirmer le jugement en ce qu'il a :

- fixé le quantum du préjudice de la société Castlebrook aux montants suivants :

- 65 243,84 euros en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros.

- les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros.

- rejeté ses demandes à l'encontre de la société Axel Schoenert.

Confirmer le jugement pour le surplus

Et statuant à nouveau :

Constater que la société Solferino [Localité 10] nord a commis une faute délictuelle à l'origine du préjudice subi par la société Castlebrook.

Constater que les sociétés Axel Schoenert, Artelia et TKS ont contribué par leurs manquements fautifs au préjudice subi par la société Castlebrook.

En conséquence,

A titre principal :

Condamner in solidum les sociétés Solferino [Localité 10] nord, Axel Schoenert, Artelia à payer à la société Castlebrook, en indemnisation de son préjudice, les montants suivants :

- 172 373,38 euros HT en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros

- les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros HT soit la somme de 798,36 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros,

Fixer la créance de la société Castlebrook au passif de la société TKS représentée par son liquidateur judiciaire la société MJA, prise en la personne de Me [V] aux sommes de :

- 172 373,38 euros HT en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros.

- les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros HT soit la somme de 798,36 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros,

A titre subsidiaire :

Condamner in solidum les sociétés Solferino [Localité 10] nord, Axel Schoenert, Artelia à payer à la société Castlebrook, en indemnisation de son préjudice, les montants suivants :

- 65 243,84 euros HT en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros

- les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros HT soit la somme de 798,36 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros

Fixer la créance de la société Castlebrook au passif de la société TKS représentée par son liquidateur judiciaire la société MJA, prise en la personne de Me [V] aux sommes de :

- 65 243,84 euros HT en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros

- les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros HT soit la somme de 798,36 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros

En tout état de cause :

Débouter toutes demandes de toutes parties formulées à l'encontre de la société Castlebrook et contraires à ce dispositif ;

Condamner in solidum la société Solferino [Localité 10] nord et tous succombants aux dépens de la procédure d'appel ainsi qu'à payer à la société Castlebrook une somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

La société MJA, qui a reçu signification à personne le 10 février 2022 de l'appel de Solferino [Localité 10] nord, le 24 juin 2022 signification à personne de l'appel incident de la société Castlebrook, le 9 mai 2022 et signification à personne de l'appel incident de la société Artelia, n'a pas constitué avocat.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 23 janvier 2024 et l'affaire a été appelée à l'audience du 30 janvier 2024, à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré.

MOTIVATION

Sur la responsabilité de la société Solferino [Localité 10] Nord

Moyens des parties

La société Solferino [Localité 10] nord fait valoir que la société Axel Schoenert a sollicité, à de nombreuses reprises, auprès la société TKS les documents nécessaires pour compléter le dossier d'acception et d'agrément des conditions de paiement de la société Castelbrook.

Elle en infère que l'absence d'acceptation et d'agrément du sous-traitant résulte d'un manquement de la société TKS à ses obligations résultant de la loi du 31 décembre 1975, en sa qualité d'entrepreneur principal.

Elle soutient qu'elle n'a pas commis de faute dès lors qu'elle ignorait la présence effective de la société Castelbrook sur le chantier avant le 4 octobre 2019, soit plus de neuf mois après la résiliation du marché de la société TKS et l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à son encontre.

Elle précise qu'elle n'a pas été destinataire des comptes rendus de chantier et que l'unique compte-rendu de chantier mentionnant le nom du sous-traitant est celui du 15 mars 2018 et que la société Castelbrook apparaît comme " fabricant meuble ".

Elle souligne qu'elle n'était pas destinataire du courriel du 16 juillet 2018 mentionnant la société Castelbrook en qualité de sous-traitant.

La société Castelbrook soutient que par l'effet combiné des articles 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 et 1240 du code civil, la faute quasi délictuelle du maître d'ouvrage est constituée si :

- la preuve est rapportée de la connaissance par le maître d'ouvrage de l'existence du sous-traitant non agréé ;

- le maître d'ouvrage s'abstient de mettre en demeure l'entrepreneur principal ou tolère la présence du sous-traitant après une mise en demeure restée infructueuse

Elle expose que dès le démarrage du chantier, le maître d'ouvrage connaissait parfaitement l'intervention de la société Castelbrook en sa qualité de sous-traitant ainsi qu'en témoigne :

- le compte-rendu de chantier en date du 15 mars 2018 en présence de représentants de la maîtrise d'ouvrage mentionnant la société Castelbrook

- le courriel du 16 juillet 2018 émanant de la société Axel Schoenert à divers intervenants pour les sociétés Castelbrook, Artelia et TKS

Elle soutient que la société Solferino [Localité 10] nord était notamment parfaitement entourée d'une équipe à la fois en assistance à maîtrise d'ouvrage et en maîtrise d''uvre (Artelia Axel Schoenert et Invesco Real Estate) qui lui rendait compte de l'ensemble des problématiques relatives à la bonne marche du chantier.

La société Artelia soutient que la société Solferino [Localité 10] nord ne pouvait ignorer la présence du sous-traitant sur le chantier alors qu'elle a sollicité à de nombreuses reprises les pièces relatives à l'intervention de la société Castelbrook ainsi qu'il résulte du courrier du 30 octobre 2019 du conseil de la société Solferino [Localité 10] nord à la société Castelbrook et que la présence de ce sous-traitant résulte des comptes rendus de chantier et des courriers émanant de la société Artelia.

Réponse de la cour

Selon l'article 14-1 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, le maître de l'ouvrage doit, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant n'ayant pas fait l'objet des obligations définies à l'article 3 ou à l'article 6, ainsi que celles définies à l'article 5, mettre l'entrepreneur principal en demeure de s'acquitter des obligations lui incombant que sont l'acceptation du sous-traitant et l'agrément de ses conditions de paiement.

Aux termes de l'article 1382, devenu 1240, du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il résulte de la combinaison de ces textes qu'il appartient au maître de l'ouvrage de veiller à l'efficacité des mesures qu'il met en 'uvre pour satisfaire aux obligations mises à sa charge et que, à défaut, il commet une faute qui engage sa responsabilité à l'égard du sous-traitant.

Le maître de l'ouvrage, qui a manqué aux obligations lui incombant en application de l'article 14-1 de la loi précitée, ne peut être tenu de payer, à titre de dommages et intérêts, que des sommes dont il est redevable à l'entrepreneur principal au jour où il a eu connaissance de la présence du sous-traitant sur le chantier (3e Civ., 5 juin 1996, pourvoi n° 94-15.825, Bulletin 1996, III, n° 135 ; 3e Civ., 16 mars 2023, pourvoi n° 21-25.724 ; 3e Civ., 18 janvier 2024, pourvoi n° 22-20.995, 22-22.224, 22-22.302, publié).

Au cas d'espèce, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 4 octobre 2019, la société Castelbrook a indiqué à la société Solferino [Localité 10] nord que sa demande d'indemnisation était fondée sur le fait que cette société engageait sa responsabilité extra-contractuelle, puisqu'elle avait connaissance de son intervention sur le projet et n'avait adressé aucune mise en demeure à la société TKS France de respecter ses obligations légales à l'égard d'un sous-traitant.

Il résulte du courrier en réponse du 30 octobre 2019 du conseil de la société Solferino [Localité 10] nord au conseil de la société Castelbrook que la première société conteste l'existence du contrat de sous-traitance, la réalité des prestations réalisées par la société Castelbrook sur le chantier et dont elle demande paiement et le fait que la loi du 31 décembre 1975 soit applicable dès lors qu'il s'agirait du lot " agencement intérieur " et non d'un marché de travaux. Elle ajoute, qu'ayant procédé à toutes les diligences nécessaires et raisonnables pour obtenir un dossier complet d'agrément de la société Castelbrook, sa responsabilité extra-contractuelle ne saurait être engagée.

Il se déduit de ce courrier que la société Solferino [Localité 10] nord n'ignorait pas l'intervention de la société Castelbrook sur le chantier et qu'en ne mettant pas la société TKS en demeure de respecter ses obligations à l'égard de son sous-traitant et en ne veillant pas à l'efficacité des mesures qu'il met en 'uvre pour satisfaire aux obligations mises à sa charge, elle a engagé sa responsabilité délictuelle à l'égard de la société Castelbrook.

S'agissant du préjudice, la société Solferino [Localité 10] nord expose qu'elle ne devait plus aucune somme à la société TKS à compter du 9 janvier 2019, date de la résiliation du contrat avec la société TKS.

Il est cependant établi que la société Solferino [Localité 10] nord connaissait la présence effective de la société Castelbrook sur le chantier depuis au moins le 14 mars 2018, date à laquelle la société Artelia demande, par courrier, à la société Castelbrook de régulariser l'intervention de son sous-traitant.

Or, à cette date, la société Solferino [Localité 10] nord ne conteste pas qu'elle était redevable à l'égard de la société TKS de sommes au moins équivalentes aux factures dont la société Castelbook sollicite le paiement.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Solferino [Localité 10] nord à indemniser le préjudice de la société Castelbrook, à hauteur des sommes dues par la société TKS à la société Castelbrook.

Sur la responsabilité de la société Artelia

Moyens des parties

La société Castelbrook soutient que la société Artelia a commis une faute en ne s'assurant pas du respect des dispositions légales et réglementaires relatives à la sous-traitance alors qu'elle avait connaissance de la présence effective de la société Castelbrook sur le chantier et du défaut d'agrément des conditions de paiement par le maître d'ouvrage.

La société Artelia fait valoir qu'elle ne dispose d'aucune mission dans le cadre de la constitution des dossiers marchés et, a fortiori, dans l'élaboration des dossiers d'agréments des sous-traitants. Elle souligne que la coordination des intervenants et la préparation des dossiers marché sont du ressort du maître d''uvre, qui seul dispose d'un pouvoir coercitif pour autoriser ou interdire une entreprise sur le chantier.

Elle indique qu'en sa qualité d'assistant à maître d'ouvrage, elle est tenue uniquement d'alerter ce dernier si des participants au projet ne respectent pas les dispositions de leurs contrats et les obligations qui en découlent.

Elle expose qu'elle a alerté à plusieurs reprises, par courriels du 14 mars et 3 juillet 2018, la société TKS de la nécessité de compléter le dossier d'agrément et qu'elle a rappelé à la société TKS ses obligations en matière de quotas de sous-traitance par courrier du 4 septembre 2018.

Elle souligne l'absence de lien de causalité entre les manquements allégués et le préjudice dont il est demandé indemnisation, dans la mesure où le maître d'ouvrage était informé des difficultés à obtenir un dossier d'agrément complet.

Réponse de la cour

Il résulte de l'article 1240 du code civil qu'un tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage (Ass. plén., 6 octobre 2006, pourvoi n° 05-13.255, Bull. 2006, Ass. plén, n° 9).

Au cas d'espèce, le contrat d'assistance à maîtrise d'ouvrage conclu entre la société Solferino [Localité 10] nord et la société Artelia a pour objet la fourniture au maître d'ouvrage d'une assistance générale à caractère administratif, financier et technique destinée à lui permettre de gérer au mieux son projet et de prendre, en temps utile, les décisions nécessaires lui appartenant.

Il est précisé à l'article 5.5 du contrat que la société Artelia " s'assure et veille au respect par l'ensemble des intervenants à l'opération de construction des dispositions légales et réglementaires, notamment celles relatives à la sous-traitance ".

Par courriel du 14 mars 2018, la société Artelia a écrit à la société TKS afin qu'elle régularise l'intervention de son sous-traitant, précisant qu'elle ne pouvait donner accès au chantier aux entreprises qui n'ont pas été approuvées par le maître d''uvre d'exécution.

Par courriel du 3 juillet 2018, elle lui a écrit que le dossier d'agrément n'était toujours pas complet, qu'elle avait dû gérer la livraison de meubles par un sous-traitant non agrée et que passé le délai du 5 juillet 2018, aucune intervention des sous-traitants ne serait acceptée sans agrément.

Il résulte de ces pièces que la société Artelia était informée de la présence sur le chantier de la société Castelbrook en qualité de sous-traitant non agrée, qu'elle était en mesure d'interdire à cette société d'accéder au chantier puisque dans son courriel du 3 juillet 2018, elle indique clairement qu'à défaut de régularisation, elle ne donnerait plus accès au chantier à cette entreprise. Par ailleurs, il n'est pas rapporté la preuve qu'elle aurait alerté le maître d'ouvrage des risques que ce dernier encourait du fait de l'intervention de la société Castelbrook sur le chantier.

Il existe enfin un lien de causalité entre ses manquements contractuels, constitutifs d'une faute délictuelle et le préjudice subi par la société Castelbrook, dès lors que cette dernière n'a pu de ce fait bénéficier des dispositions protectrices de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Artelia à indemniser le préjudice de la société Castelbrook.

Sur la responsabilité de la société Axel Schoenert

Moyens des parties

La société Castelbrook fait valoir que la société Axel Schoenert devait inviter formellement le maître d'ouvrage à régulariser la situation en matière de sous-traitance afin de s'assurer que les garanties étaient fournies à la société Castelbrook. Elle précise qu'en sa qualité de maître d''uvre la société Axel Schoenert disposait d'un pouvoir coercitif à l'encontre de la société TKS. Elle souligne que la société Axel Schoenert ne justifie pas avoir alerté le maître d'ouvrage de la difficulté à régulariser la situation de sous-traitance ou d'avoir demandé une validation auprès du maître d'ouvrage d'une mesure d'interdiction d'accès au chantier par le sous-traitant.

La société Artelia fait valoir que la société Axel Schoenert étant chargée d'une mission complète, avait une obligation d'information et de conseil renforcée et qu'elle ne justifie pas avoir mis en 'uvre des moyens coercitifs aux fins de s'assurer de la constitution du dossier d'agrément de la société Castelbrook.

La société Axel Schoenert expose qu'elle a informé le maître d'ouvrage et son assistant de l'intervention d'un sous-traitant, a demandé à ce dernier de constituer un dossier d'agrément et a mis en 'uvre les moyens dont elle disposait pour qu'il soit complété.

Elle en déduit qu'elle n'a failli ni à son obligation de moyens ni à son obligation d'information et de conseil. Elle précise que c'est la société Artelia qui a autorisé TKS et son sous-traitant à intervenir sur le chantier bien que le dossier ait été incomplet.

Elle fait valoir qu'elle ne peut être condamnée in solidum avec les autres défenderesses en application de l'article G6.3.1 des conditions générales annexées au contrat de maîtrise qui exclut toute condamnation in solidum avec d'autres intervenants participant à l'opération.

Réponse de la cour

Le maître d''uvre chargé d'une mission de surveillance des travaux a pour obligation d'informer le maître de l'ouvrage de la présence d'un sous-traitant et de lui conseiller de se le faire présenter, et, le cas échéant, de l'agréer et de définir les modalités de règlement de ses situations (3e Civ., 10 décembre 2014, pourvoi n°13-24.892, Bull. 2014, III, n° 162).

Au cas d'espèce, il n'est pas contesté par les parties qu'il a été confié à la société Axel Schoenert un contrat de maîtrise d''uvre complète incluant notamment la direction et l'exécution des contrats de travaux. En outre l'article G2.4 dudit contrat stipule que la société Axel Schoenert " fait accepter les sous-traitants et agréer leurs conditions de paiement par le maître d'ouvrage ".

S'il est établi que la société Axel Schoenert a réalisé des diligences en vue de permettre la constitution d'un dossier d'agrément par la société Castelbrook, il lui incombait, pour remplir entièrement ses obligations, d'interdire ou de demander au maître d'ouvrage d'interdire l'accès au chantier à la société Castelbrook.

Or, bien qu'elle n'ignore pas l'absence de respect des dispositions de la loi du 31 décembre 1975, la société Axel Schoenert n'a pas fait les diligences nécessaires pour interdire l'intervention effective sur le chantier de la société Castelbrook.

En effet par courriel du 5 juillet 2018, la société Axel Schoenert indique à la société TKS " please find attached the appovals granted by AS and Artelia ", ce qui est traduit par la société Castelbrook ainsi " veuillez trouver ci-joint les agréments accordés par AS et Artelia ", cette traduction n'étant pas contestée par les autres parties.

Il résulte par ailleurs du courriel du 16 juillet 2018 écrit par la société Axel Schoenert que cette dernière a connaissance de l'intervention sur le chantier de la société Castelbrook en qualité de sous-traitant.

Par conséquent il apparaît que la société Axel Schoenert a commis une faute en laissant intervenir sur le chantier la société Castelbrook sans s'assurer que la sous-traitance avait été acceptée par le maître d'ouvrage et les conditions de paiement agréées par ce dernier.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a rejeté les demandes formées à l'encontre de la société Axel Schoenert.

La société Axel Schoenert sera condamnée à indemniser la société Castelbrook du préjudice résultant du défaut d'agrément de ses conditions de paiement.

Les sociétés Solferino [Localité 10] nord, Axel Schoenert et Artelia, ayant toutes trois, contribué par leurs fautes à générer le préjudice subi par la société Castelbrook, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés Solferino [Localité 10] nord et Artelia à la réparation de ce préjudice et y ajoutant de condamner in solidum également la société Axel Schoenert.

La société Axel Schoenert ne peut se prévaloir des stipulations contractuelles résultant du contrat conclu avec la société Solferino [Localité 10] nord, qui ne sont pas opposables à la société Castelbrook, tiers au contrat, pour limiter l'étendue de son obligation à réparer l'intégralité du préjudice subi par la société Castelbrook.

Sur le quantum des demandes de la société Castelbrook

Moyens des parties

La société Castelbrook soutient qu'outre la somme de 65 243,84 euros, il lui est due la somme de 107129,54 euros au titre des préjudices qu'elle a subis en raison des retards accusés par le chantier, causés par les manquements et la désorganisation de la société TKS, ayant impacté les délais contractuellement prévus pour la réalisation par la société Castelbrook de ses prestations.

Elle fait valoir qu'elle détaille et justifie son préjudice et que la société TKS ne l'a pas contesté.

La société Artelia soutient que l'absence de contestation par la société TKS ne peut fonder les réclamations de la société Castelbrook et que cette dernière n'apporte pas davantage de preuve de sa créance que devant les premiers juges.

Réponse de la cour

En vertu de l'article 1353 du code civil, il incombe à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver.

Au cas d'espèce, il incombe à la société Castelbrook de rapporter la preuve du préjudice qu'elle invoque du fait des manquements contractuels imputables à la société TKS. L'absence de contestation de cette créance par la société TKS ne suffit pas à établir le bien-fondé de cette dernière.

La seule pièce produite aux débats par la société Castelbrook est une liste établie par elle détaillant des frais d'hébergement sans qu'elle ne produise les factures correspondant à ces frais d'hébergement ni qu'elle n'établisse le lien de causalité entre ces frais et le retard dans le chantier imputé à la société TKS.

Par conséquent il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de fixation de créance de la société Castelbrook au titre des préjudices subis du fait des retards du chantier.

L'entreprise sous-traitante est bien fondée à solliciter le paiement du solde des travaux resté impayé par l'entrepreneur aux sociétés Artelia et Axel Schoenert, dès lors que ce montant correspond au préjudice qu'elle subit du fait des fautes commises par ces sociétés, qui, en ne respectant pas leurs obligations contractuelles, n'ont pas permis à la société Castelbrook de bénéficier des dispositions protectrices de la loi du 31 décembre 1975, garantissant au sous-traitant le paiement des prestations effectuées.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Artelia à payer à la société Castelbrook :

- 65 243,84 euros en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros ;

- les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40,00 euros.

La société Axel Schoenert sera condamnée in solidum avec la société Artelia à payer à la société Castelbrook ces mêmes sommes.

Sur les recours en garantie

Moyens des parties

La société Solferino fait valoir que le tribunal a retenu à juste titre que la société TKS avait engagé sa responsabilité à l'égard de la société Solferino Paris nord en ne communiquant pas l'intégralité des documents nécessaires pour compléter le dossier de demande d'acceptation et d'agrément des conditions de paiement de la société Castelbrook mais que la condamnation de la société TKS à garantir la société Solferino Paris nord a été omise du dispositif.

Elle fait valoir que le contrat d'assistance à maîtrise d'ouvrage conclu avec la société Artelia stipule que cette dernière doit s'assurer et veiller au respect des dispositions légales relatives à la sous-traitance.

La société Solferino [Localité 10] nord expose que sa demande de garantie formée à l'encontre de la société Axel Schoenert est recevable, la clause contractuelle de conciliation préalable obligatoire n'étant pas applicable, dès lors que le différend survenu entre le maître d'ouvrage et le maître d''uvre est fondé sur la loi du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, dont les dispositions sont d'ordre public.

Elle soutient que la société Axel Schoenert, titulaire d'une mission de maîtrise d''uvre complète, n'a pas entrepris les démarches suffisantes pour permettre la constitution du dossier d'acceptation et d'agrément des conditions de paiement de la société Castelbrook.

La société Artelia sollicite la garantie de la société Axel Schoenert, et la société Axel Schoenert celle de la société Artelia, pour les motifs identiques à ceux invoqués par ces deux sociétés pour s'exonérer de leur responsabilité à l'égard de la société Castelbrook.

La société Artelia sollicite en outre la condamnation de la société TKS à la garantir.

La société Axel Schoenert soulève l'irrecevabilité de la demande de la société Solferino [Localité 10] nord qui n'a pas fait application de la clause de saisine préalable, soulignant que pour solliciter sa condamnation à garantie la société Solferino [Localité 10] nord ne se fonde pas sur la loi du 31 décembre 1975 mais sur un manquement contractuel au contrat de maîtrise d''uvre.

Elle fait valoir sur le fond qu'elle n'a commis aucune faute car elle a informé le maître d'ouvrage et son assistant de l'intervention d'un sous-traitant, lui a demandé la constitution d'un dossier d'agrément et a mis en 'uvre les moyens dont elle disposait pour qu'il soit complété.

Elle affirme que l'absence d'agrément n'est pas en soi constitutif d'un préjudice puisque si le sous-traitant avait été agréé la société Solferino [Localité 10] nord aurait dû procéder au paiement des travaux.

A titre subsidiaire, elle souligne qu'en application de l'article G63.1 des conditions générales du contrat de maîtrise d''uvre, aucune condamnation in solidum ne peut intervenir à raison des dommages imputables aux autres intervenants participants à l'opération.

Elle soutient enfin que la société Castelbrook devra supporter la moitié des sommes qu'elle réclame en règlement du solde de son marché, estimant que c'est en raison de sa propre carence qu'elle n'a pas été agréée.

La société Castelbrook fait valoir qu'elle n'a commis aucune faute, qu'elle a fourni à son donneur d'ordre tous les documents qui lui étaient demandés et qu'il n'incombe pas au sous-traitant de s'assurer du respect des obligations de l'entrepreneur ou du maître d'ouvrage au titre de la loi de 1975.

Réponse de la cour

Sur la recevabilité du recours en garantie de la société Solferino [Localité 10] nord à l'encontre de la société Axel Schoenert

L'article G 10 du cahier des clauses générales du contrat d'architecte stipule qu'en cas de litige portant sur le respect des clauses du contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le conseil régional de l'ordre des architectes, avant toute procédure judiciaire sauf conservatoire.

La clause imposant la saisine du conseil régional de l'ordre des architectes " avant toute procédure judiciaire " ne s'applique pas à une demande reconventionnelle formée en cours d'instance (3e Civ., 16 mars 2022, pourvoi n° 21-11.951).

Elle ne s'applique pas davantage à un recours en garantie engagée par la société Solferino [Localité 10] nord à l'encontre de la société Axel Schoenert alors que ce recours a été formé en cours d'instance, l'instance principale ayant été engagée par la société Castelbrook.

Il convient donc de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la société Axel Schoenert.

Sur le fond

Les sociétés Artelia et Axel Schoenert, dont les fautes sont à l'origine de l'action engagée par la société Castelbrook à l'encontre de la société Solferino [Localité 10] nord, seront tenues in solidum à garantir la société Solferino [Localité 10] nord des condamnations prononcées à son encontre.

En effet, le lien de causalité est établi ente les fautes commises par les sociétés Artelia et Axel Schoenert et le préjudice subi par la société Solferino [Localité 10] nord, qui n'aurait pas vu sa responsabilité engagée, si les sociétés Artelia et Axel Schoenert avaient pris les mesures nécessaires pour éviter la présence de la société Castelbrook sur le chantier alors que cette dernière n'avait pas été agréée par le maître d'ouvrage.

Néanmoins en application de l'article G63.1 des conditions générales du contrat de maîtrise d''uvre, la société Axel Schoenert ne pourra être tenue à garantir la société Solferino [Localité 10] nord au-delà de sa part de responsabilité dans la réalisation du dommage subi par la société Castelbrook.

A défaut d'éléments permettant de retenir la responsabilité prépondérante de la société Artelia ou de la société Axel Schoenert dans la réalisation du dommage subi par la société Castelbrook, chacune sera tenue pour responsable à hauteur de 50 %.

La société Artelia et la société Axel Schoenert seront donc tenues à se garantir réciproquement à hauteur de la moitié des condamnations prononcées in solidum à leur encontre.

La loi du 31 décembre 1975 ne crée aucune obligation à la charge du sous-traitant dont la violation serait susceptible de constituer une faute (3e Civ., 10 janvier 2001, pourvoi n° 99-12.836).

Au cas d'espèce, il ne peut donc être imputé aucune faute à la société Castelbrook en lien avec le non-respect de cette loi.

Il n'est pas davantage établi qu'elle aurait commis une quelconque faute qui aurait contribué à générer son préjudice, la société Castelbrook justifiant avoir produit tous les éléments demandés par la société TKS pour obtenir son agrément et qu'il lui a été signifié que cet agrément avait été obtenu et qu'elle était autorisée à intervenir sur le chantier.

Par conséquent il convient de rejeter la demande de la société Axel Schoenert de voir condamner la société Castelbrook à supporter la moitié du montant des sommes qu'elle réclame en règlement du solde de son marché.

Sur les frais du procès

Le sens de l'arrêt conduit à confirmer la condamnation in solidum de la société Artelia et de la société Solferino [Localité 10] nord au profit de la société Castelbrook au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il conduit en revanche à infirmer la condamnation de la société Solferino [Localité 10] nord au profit de la société Axel Schoenert au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à rejeter la demande de la société Axel Schoenert à ce titre.

En cause d'appel, la société Solferino [Localité 10] nord, la société Artelia et la société Axel Schoenert, parties succombantes, seront condamnées in solidum aux dépens et à payer à la société Castelbrook la somme de 3000 euros, au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a :

- rejeté les demandes formées à l'encontre de la société Axel Schoenert architectes ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- condamné la société Solferino [Localité 10] nord à payer à la société Axel Schoenert la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

L'infirme sur ces points et statuant à nouveau,

Condamne la société Axel Schoenert architectes, in solidum avec la société Artelia et la société Solferino [Localité 10] nord, à payer à la société Castlebrook furniture & design les sommes de :

- 65 243,84 euros en principal outre les intérêts au taux légal majoré de 7 points à compter du 1er mai 2019 et une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40 euros,

- les intérêts au taux légal majoré de 7 points, à compter du 1er janvier 2019 et jusqu'au 30 avril 2019 sur la somme de 30 895,13 euros ainsi qu'une indemnité forfaitaire de recouvrement de 40,00 euros ;

Dit que la société TKS est tenue de garantir la société Solferino [Localité 10] nord et la société Artelia du paiement de ces sommes et que le montant des créances respectives de la société Solferino [Localité 10] nord et de la société Artelia, à hauteur de ces sommes, sera fixé au passif de la procédure collective ;

Déclare recevables les demandes de la société Solferino [Localité 10] nord à l'encontre de la société Axel Schoenert architectes ;

Condamne in solidum la société Axel Schoenert architectes, à hauteur de 50 %, et la société Artelia, dans son intégralité, à garantir la société Solferino [Localité 10] nord des condamnations prononcées à son encontre ;

Condamne la société Artelia à garantir la société Axel Schoenert architectes à hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre ;

Condamne la société Axel Schoenert architectes à garantir la société Artelia à hauteur de 50% des condamnations prononcées à son encontre au profit de la société Castlebrook furniture & design ;

Rejette la demande de la société Axel Schoenert de voir condamner la société Castelbrook furniture & design à supporter la moitié du montant des sommes qu'elle réclame en règlement du solde de son marché ;

Rejette la demande de la société Axel Schoenert de condamnation de la société Solferino [Localité 10] nord au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum la société Solferino [Localité 10] nord, la société Axel Schoenert architectes et la société Artelia aux dépens d'appel ;

Admet les avocats qui en ont fait la demande et peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de la société Solferino [Localité 10] nord, de la société Axel Schoenert architectes et de la société Artelia et les condamne in solidum à payer à la société Castelbrook furniture & design la somme de 3000 euros.

La greffière, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/19837
Date de la décision : 20/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-20;21.19837 ?
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