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20/03/2024 | FRANCE | N°21/06878

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 20 mars 2024, 21/06878


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 20 MARS 2024



(n°2024/ 128 , 14 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06878 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEEG7



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 juillet 2021 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F 20/00197





APPELANTE

S.A.S. ENTERPRISE SERVICES FRANCE

[Adr

esse 4]

[Localité 14]

Représentée par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153





INTIMÉS

Monsieur [Z] [H]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représen...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 20 MARS 2024

(n°2024/ 128 , 14 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06878 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEEG7

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 juillet 2021 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F 20/00197

APPELANTE

S.A.S. ENTERPRISE SERVICES FRANCE

[Adresse 4]

[Localité 14]

Représentée par Me Marie-Hélène DUJARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : D2153

INTIMÉS

Monsieur [Z] [H]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Nathalie LEHOT-CANOVAS, avocat au barreau D'ESSONNE

Syndicat UGICT-CGT

[Adresse 10]

[Localité 8]

Représenté par Me Nathalie LEHOT-CANOVAS, avocat au barreau D'ESSONNE

Syndicat CFTC METALLURGIE DU CHER

[Adresse 7]

[Localité 3]

Représenté par Me Nathalie LEHOT-CANOVAS, avocat au barreau D'ESSONNE

Syndicat CFTC METALLURGIE DE L'ISERE

[Adresse 15]

[Localité 8]

Représenté par Me Nathalie LEHOT-CANOVAS, avocat au barreau D'ESSONNE

Syndicat DEPARTEMENTAL CFTC DE LA METALLURGIE ET PARTIES SIMILAIRES DE L'ESSONNE

[Adresse 2]

[Localité 13]

Représenté par Me Nathalie LEHOT-CANOVAS, avocat au barreau D'ESSONNE

Fédération GENERALE DES MINES ET DE LA METALLURGIE (FGMM)

[Adresse 9]

[Localité 12]

Représentée par Me Nathalie LEHOT-CANOVAS, avocat au barreau D'ESSONNE

Syndicat CFE-CGC

[Adresse 6]

[Localité 11]

Représenté par Me Nathalie LEHOT-CANOVAS, avocat au barreau D'ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 janvier 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, Président de formation

Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, initialement prévu le 6 mars 2024 et prorogé au 20 mars 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, prorogé à ce jour,

- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Alisson POISSON, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

La société Hewlett Packard a employé M. [Z] [H], né en 1981, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er juillet 2008 en qualité de chef de projet.

Au mois de mars 2017, son contrat de travail a été transféré à la société Enterprise services France (SAS).

En dernier lieu, M. [H] occupait un poste de responsable clients infogérance.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie ainsi que la convention collective des industries métallurgiques, minières et connexes de la région parisienne.

Au mois de novembre 2018, la société Enterprise services France a accepté la demande de M. [H] de bénéficier d'une période de mobilité volontaire externe sécurisée (MVES). Un avenant a été conclu le 7 février 2019 pour une durée de 12 mois.

Le 13 août 2019, la société Enterprise services France a signé un accord collectif portant rupture conventionnelle collective.

M. [H] a informé la société Enterprise services France de son intérêt pour une rupture conventionnelle collective dans le cadre de l'accord précité.

Au terme du processus conventionnel de traitement de la demande de rupture conventionnelle de M. [H], la société Enterprise services France l'a informé le 2 octobre 2019 qu'il n'était pas éligible à une rupture conventionnelle du contrat de travail.

Le 22 janvier 2020, M. [H] a démissionné de la société Enterprise services France.

A la date sa démission, M. [H] avait une ancienneté de 11 ans et 6 mois et la société Enterprise services France occupait à titre habituel au moins onze salariés.

M. [H] a saisi le 12 mai 2020 le conseil de prud'hommes de Longjumeau pour former les demandes suivantes :

« - Condamner la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) à verser à Monsieur [H] la somme de 155 783,02 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du non respect de l'accord collectif portant rupture conventionnelle collective du 13 août 2019

- Requalifier la démission de Monsieur [H] en une rupture imputable à la société SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF)

- Dire et juger que cette rupture équivaut à un licenciement sans cause réelle ni sérieuse

- Condamner la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (SAS) à verser à Monsieur [H] les sommes de :

. indemnité de licenciement : 34 398,27 €

. indemnité compensatrice de préavis : 24 281,13 €

. congés payés afférents : 2 428,11 €

. indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse : 65 000 € nets de CSG CRDS

- Ordonner à la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (SAS) de remettre à Monsieur [H] une attestation POLE EMPLOI conforme au jugement

- Article 700 du Code de Procédure Civile : 1 500 €. »

Par jugement du 8 juillet 2021, auquel la cour se réfère pour l'exposé des moyens, le conseil de prud'hommes a rendu la décision suivante :

« Dit que le salaire de référence de Monsieur [H] sur les 3 derniers mois est de 8 093,71 €

Juge que la rupture du contrat de travail doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et que Monsieur [H] a subi une perte de chance en ne pouvant pas bénéficier de l'accord RCC

Condamne la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) prise en la personne de son représentant légal à verser à Monsieur [Z] [H] les sommes suivantes :

. 34 398,27 € (trente-quatre mille trois cent quatre-vingt-dix huit € et vingt-sept centimes) au titre de l'indemnité de licenciement

. 24 281,13 € (vingt-quatre mille deux cents quatre-vingt-un € et treize centimes) au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

. 2 428,11 € (deux mille quatre cents vingt-huit € et onze centimes) au titre des congés payés afférents

. 24 281,13 € (vingt-quatre mille deux cent quatre-vingt-un € et treize centimes) nets à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse)

. 8 100 € (huit mille cent €) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct pour la perte de chance

. 800 € (huit cents €) au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Ordonne à la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) de remettre à Monsieur [Z] [H] une attestation Pôle Emploi conforme au présent jugement.

Déboute les syndicats de leurs chefs de demande, la preuve de leur préjudice n'étant pas établie.

Déboute la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile

Met les dépens à la charge de la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF). »

La société Enterprise services France a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 28 juillet 2021.

La constitution d'intimé de M. [H] a été transmise par voie électronique le 26 août 2021.

La constitution d'intimées des organisations syndicales suivantes, l'UGICT-CGT, la CFTC métallurgie du Cher, la fédération générale des mines et de la métallurgie (FGMM) CFDT, la CFE-CGC, la CFTC métallurgie de l'Isère, la CFTC de la métallurgie et parties similaires de l'Essonne, a été transmise par voie électronique le 3 septembre 2021.

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 11 janvier 2022, la société Enterprise services France demande à la cour de :

« - Recevoir la Société en ses présentes conclusions ;

- L'en dire bien fondée.

Ce faisant :

- Confirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de LONGJUMEAU le 8 juillet 2021 en ce qu'il a débouté les syndicats de leurs chefs de demande, la preuve de leur préjudice n'étant pas établie.

- Infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de LONGJUMEAU le 8 juillet 2021 en ce qu'il a :

' Dit que le salaire de référence de Monsieur [H] sur les 3 derniers mois est de 8.093,71 € ;

' Jugé que la rupture du contrat de travail de Monsieur [H] doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et que Monsieur [H] a subi une perte de chance en ne pouvant pas bénéficier de l'accord RCC.

' Condamné la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) prise en la personne de son représentant légal à verser à Monsieur [Z] [H] les sommes suivantes.

. 34 398,27 € au titre de l'indemnité de licenciement ;

. 24 281,13 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

. 2 428,11 € au titre des congés payés afférents ;

. 24 281,13 € nets à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

. 8 100 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct pour la perte de chance ;

. 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

' Ordonné à la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE de remettre à Monsieur [H] une attestation POLE EMPLOI conforme au présent jugement.

' Débouté la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Statuant à nouveau :

- Dire que la démission de Monsieur [H] était claire et non équivoque ;

- Dire que Monsieur [H] n'a pas subi de perte de chance de bénéficier du dispositif de rupture conventionnelle collective ouvrant droit à une indemnisation.

- Débouter Monsieur [H] de l'ensemble de ses demandes et prétentions ;

- Condamner Monsieur [H] à payer à la Société ENTERPRISE SERVICES FRANCE la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile . »

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 21 décembre 2021, M. [H] demande à la cour de :

« Débouter la société ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) de ses demandes

Confirmer le jugement rendu le 8 juillet 2021 par le Conseil des Prud'hommes de LONGJUMEAU en ce qu'il a requalifié la démission de monsieur [H] en un licenciement sans cause réelle ni sérieuse, en ce qu'il a condamné la société SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE à des dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct pour la perte de chance, en ce qu'il a condamné la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) à verser à Monsieur [H] les sommes de

- 34 398,27 € à titre d'indemnité de licenciement

- 24 281,13 € d'indemnité compensatrice de préavis

- 2 428,11 € au titre des congés payés y afférents

L'infirmer dans les quantum alloués au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse et au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct pour la perte de chance.

L'infirmer en ce qu'il a débouté les Organisations Syndicales de leurs demandes.

Statuant à nouveau

Condamner la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE de verser à Monsieur [H], la somme de 155 783,02 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance du fait du non-respect par la société de l'accord collectif du 13 août 2019 portant rupture conventionnelle collective.

Condamner la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) à verser à Monsieur [H] les sommes de :

- 34 398,27 € à titre d'indemnité de licenciement

- 24 281,13 € d'indemnité compensatrice de préavis

- 2 428,11 € au titre des congés payés y afférents

- 65 000 € nets de CSG CRDS à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse

Ordonner à la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) de remettre à Monsieur [H] une attestation POLE EMPLOI conforme au jugement

Condamner la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) à verser au SYNDICAT UGICT-CGT, au SYNDICAT CFTC METALLURGIE DU CHER, à la FEDERATION GENERALE DES MINES ET DE LA METALLURGIE (FGMM) CFDT, au SYNDICAT CFE-CGC, au SYNDICAT CFTC METALLURGIE DE L'ISERE, au SYNDICAT DEPARTEMENTAL CFTC DE LA METALLURGIE et PARTIES SIMILAIRES DE L'ESSONNE la somme de 5 000 € chacun à titre de dommages et intérêts du fait du non-respect de l'accord collectif portant rupture conventionnelle collective du 13 août 2019.

Condamner la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) à verser à monsieur [H] la somme de 2 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du CPC

Condamner la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) à verser au SYNDICAT UGICT-CGT, au SYNDICAT CFTC METALLURGIE DU CHER, à la FEDERATION GENERALE DES MINES ET DE LA METALLURGIE (FGMM) CFDT, au SYNDICAT CFE-CGC, au SYNDICAT CFTC METALLURGIE DE L'ISERE, au SYNDICAT DEPARTEMENTAL CFTC DE LA METALLURGIE et PARTIES SIMILAIRES DE L'ESSONNE la somme de 1 500 € chacun au titre des dispositions de l'article 700 du CPC.

Débouter la SAS ENTERPRISE SERVICES FRANCE (ESF) de sa demande reconventionnelle. . »

L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 21 novembre 2023.

L'affaire a été appelée à l'audience du 22 janvier 2024.

MOTIFS

Sur les dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance en raison du non-respect par la société de l'accord collectif du 13 août 2019 portant rupture conventionnelle collective

M. [H] demande par infirmation du jugement la somme de 155 783,02 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance en raison du non-respect par la société de l'accord collectif du 13 août 2019 portant rupture conventionnelle collective (RCC) . Il soutient que :

- il était en MVES (mobilité volontaire externe sécurisée) jusqu'au 6 février 2020 (pièce salarié n° c),

- il remplissait tous les critères d'éligibilité de l'article 4 de l'accord collectif de RCC (pièce salarié n° 1) et s'est donc porté candidat selon la procédure décrite dans l'accord,

- la société BPI mandatée par la société Enterprise services France pour valider l'éligibilité et la viabilité du projet des candidats conformément aux critères d'éligibilité, a validé l'éligibilité de sa candidature au regard des critères de sélection et a validé son dossier décrivant son projet professionnel (pièce salarié n° d) ;

- son dossier a poursuivi l'ensemble du processus de sélection décrit dans l'accord de RCC, à savoir la validation du dossier en commission de validation RH et par la commission de suivi avec les représentants du personnel (pièce salarié n° e) où son dossier a été annoncé comme validé devant les représentants du personnel,

- par suite il a reçu la convention de rupture RCC signée par l'employeur et l'a renvoyée signée (pièce salarié n° f : convention de RCC signée par la société Enterprise services France et retournée signée par le salarié),

- il a aussi reçu l'estimation de ses droits dans le cadre de son départ en RCC (pièce salarié n° m),

- postérieurement, la direction a changé d'avis et il a reçu le 2 octobre 2019 une lettre de la société lui indiquant qu'il n'était pas éligible ; le motif était le suivant « Vous êtes d'ores et déjà sur un contrat en entreprise extérieure. Par conséquent, nous sommes amenés à considérer que vous n'êtes pas éligible au dispositif de RCC et ne pouvons finalement pas prendre en considération votre candidature. Par conséquent, votre congé de mobilité volontaire externe sécurisée se poursuit jusqu'au terme défini dans l'avenant » (pièce salarié n° g),

- lors de la réunion suivante de la commission de suivi, ainsi que cela ressort du compte rendu, la direction a annoncé qu'il avait été dévalidé (sic) : sa demande de RCC a été validée par la direction avant qu'elle change d'avis,

- contrairement à ce que soutient la société Enterprise services France, aucun point de l'accord RCC n'indique que des salariés en MVES seront écartés automatiquement de la RCC ; au contraire, le fait de trouver un contrat était la condition nécessaire pour déposer un dossier de RCC,

- le changement de dernière minute de la part de la direction face à sa candidature pour la RCC est inacceptable : il contredit le contenu de l'accord RCC et les informations données aux représentants du personnel lors de la commission paritaire de suivi RCC,

- la société Enterprise services France a rompu abusivement l'engagement de RCC contracté avec lui,

- ni les dispositions des articles L.1237-17, L.1237-19-2 du code du travail, ni celles de l'article 3 de l'accord collectif RCC ne confèrent à l'employeur un droit discrétionnaire de refus de la candidature d'un salarié répondant aux conditions d'exigibilité prévues par l'accord,

- la société Enterprise services France a signé un accord RCC avec des priorités de départ des candidats mais n'a pas respecté cet ordre puisque des départs moins prioritaires ont été acceptés alors que des départs plus prioritaires ont été refusés : une différence de traitement a donc été appliquée en violation de l'ordre écrit dans l'accord en ce qui concerne les CDI déjà en cours pourtant priorité 1 qui ont tous été refusés,

- il a été contraint de mettre fin à son contrat avec la société Enterprise services France (pièce salarié n° n) en démissionnant alors que, sans les man'uvres multiples de la direction, il aurait dû bénéficier d'un départ encadré dans le cadre de la RCC,

- du fait du non-respect de l'accord RCC par la société Enterprise services France, il a été privé du droit de recevoir la somme de 155 783,02 € correspondant à l'indemnité prévue (pièce salarié n° m).

En réplique, la société Enterprise services France s'oppose à cette demande et soutient que :

- M. [H] demande la condamnation de l'entreprise à supporter exactement les mêmes conséquences pécuniaires et indemnitaires que si le processus de rupture conventionnelle collective à son égard avait abouti ; il considère en effet qu'il était éligible à la procédure de rupture conventionnelle collective et que l'entreprise a indûment refusé de valider son adhésion au dispositif,

- pourtant M. [H] ne remplissait pas toutes les conditions requises pour le départ volontaire,

- l'engagement pris par M. [H] dans le cadre de la mobilité volontaire externe sécurisée (MVES) est exclusif de l'application de la RCC du fait que l'accord RCC exclut le bénéficie d'une rupture conventionnelle pour les salariés en MVES,

- étant en MVES, la situation de M. [H] est régie par l'avenant à son contrat de travail (art 5) et dont il ressort que s'il veut quitter l'entreprise, il démissionne,

- le dispositif de MVES étant exclusif de la RCC, le refus de faire bénéficier M. [H] du dispositif de RCC était légitime,

- ce n'est donc que si les deux parties sont d'accord que le contrat de travail du salarié est rompu dans le cadre de la rupture conventionnelle collective, et ce, quel que soit le stade de la procédure tant que la procédure n'est pas finalisée et formalisée,

- l'accord RCC stipule « l'accord n'ouvre pas droit au profit des salariés éligibles à un droit automatique à la rupture ; ainsi, sous réserve d'en informer les salariés avant la signature d'une convention de rupture d'un commun accord, la société pourra renoncer jusqu'à cette date à tout ou partie des suppressions de postes, sans que le salarié puisse revendiquer un droit à la rupture de son contrat de travail. » (pièce employeur n° 1 page 4),

- l'entreprise n'a pris aucun engagement envers M. [H].

Il ressort de l'accord RCC que ce dispositif renforcé, reposant sur le dispositif appelé « rupture conventionnelle collective » a pour objet de donner de la visibilité et des garanties aux salariés potentiellement concernés par un éventuel plan de transformation et d'anticiper au mieux les conséquences des mutations économiques, qu'il a été mis en place sur la base du strict volontariat, que cet accord correspond à la mise en 'uvre du nouveau dispositif de rupture conventionnelle collective avec application des mesures sociales d'accompagnement prévues dans l'accord de GPEC et que cet accord prévoit :

- le nombre maximal de départs envisagés, de suppression d'emplois associées et la durée de mise en 'uvre de la rupture conventionnelle collective,

- les conditions que doit remplir le salarié pour en bénéficier,

- les modalités de présentation et d'examen des candidatures au départ des salariés, comprenant les conditions de transmission de l'accord écrit du salarié au dispositif prévu par l'accord,

- les modalités de conclusion d'une convention individuelle de rupture entre l'employeur et le salarié et l'exercice du droit de rétractation des parties,

- les critères de départage entre les potentiels candidats au départ,

- les modalités de calcul des indemnités de rupture garanties au salarié,

- des mesures visant à faciliter l'accompagnement, la reconversion ou des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés,

- les modalités et conditions d'information des institutions représentatives du personnel,

- les modalités de suivi de la mise en 'uvre effective de l'accord portant rupture conventionnelle collective.

L'accord énonce les conditions d'éligibilité des salariés pour se porter volontaire à cet accord comme suit :

« - Être titulaire d'un contrat à durée indéterminée depuis au moins trois ans à la date d'ouverture de la période de volontariat ;

- Ne pas être en mesure de faire valoir ses droits à la retraite à taux plein avant le 1er janvier 2020 inclus ;

- Ne pas avoir été identifié comme ayant une expertise particulière rendant son départ non souhaitable au regard des nécessités du service ;

- Justifier d'un projet de reclassement externe mature validé par le Point Orientation Compétences et Carrière (POCC) et la Commission de Validation RH ;

- Ne pas être en suspension de contrat non rémunéré dont le motif de suspension a expiré à la date de la candidature et/ou absence injustifiée. »

L'ordre de priorité des projets était le suivant :

« 1. CDI en entreprise extérieure démarré (salarié en poste dans une autre société)

2. Entreprise démarrée (avec activité en cours facturable)

3. Départ à la retraite à taux plein entre le 1er janvier 2020 et le 1er octobre 2023 au plus tard)

4. Entreprise créée (avec projet dont la viabilité a été validé par BPI)

5. CDI ou CDD de plus de 12 mois en entreprise extérieure signé ou promesse d'embauche signée à la clôture du volontariat soit le 31/10/19)

6. Inscription ou démarrage d'une formation externe diplômante ou certifiante

7. Projet de repositionnement en contrat salarié, de création ou de reprise d'entreprise ou de formation diplômante ou certifiante ».

A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que M. [H] est bien fondé dans sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance en raison du non-respect par la société de l'accord collectif du 13 août 2019 portant rupture conventionnelle collective au motif que M. [H] prouve qu'il était en MVES jusqu'au 6 février 2020 (pièce salarié n° c), qu'il remplissait tous les critères d'éligibilité de l'article 4 de l'accord collectif de RCC et notamment le critère litigieux relatif au fait de ne pas être en suspension de contrat non rémunéré dont le motif de suspension a expiré à la date de la candidature, qu'il s'est donc porté candidat selon la procédure décrite dans l'accord en août 2019 (pièce salarié n° g), que la société BPI a validé l'éligibilité de sa candidature au regard des critères de sélection et a validé son dossier le 26 août 2019 (pièce salarié n° d), que son dossier a poursuivi l'ensemble du processus de sélection décrit dans l'accord de RCC, à savoir la validation du dossier en commission de validation RH et par la commission de suivi avec les représentants du personnel du 13 septembre 2019 où on dossier a été annoncé comme validé devant les représentants du personnel (pièce salarié n° e), qu'il a ensuite reçu le 20 septembre 2019 la convention de rupture RCC signée par l'employeur et l'a renvoyée signée le 21 septembre 2019 (pièce salarié n° f : convention de RCC établie à son nom signée par la société Enterprise services France et retournée signée par le salarié) sans que cela ne soit contredit par la société Enterprise services France avant de recevoir l'estimation de ses droits dans le cadre de son départ en RCC (pièce salarié n° m) en sorte que la société Enterprise services France s'est dégagée indûment de ses engagements relatifs à la RCC de M. [H] en lui écrivant le 2 octobre 2019 qu'il n'était pas éligible et qu'elle ne pouvait finalement pas prendre en considération sa candidature.

En effet le processus de contractualisation de la RCC de M. [H] avait été mené à son terme et seule l'exécution restait à mener quand la société Enterprise services France s'est dégagée unilatéralement des liens souscrits dans la RCC envoyée signée par l'employeur le 20 septembre 2019 et à signer pour M. [H], RCC qu'il a retournée signée le 21 septembre 2019.

C'est donc en vain que la société Enterprise services France soutient que M. [H] ne remplissait pas toutes les conditions requises pour le départ volontaire ; en effet, la cour retient que ce moyen est mal fondé au motif qu'il est contredit par le dossier validé par la société BPI et par le fait que M. [H] était titulaire d'un contrat à durée indéterminée depuis au moins trois ans à la date d'ouverture de la période de volontariat, qu'il n'était en mesure de faire valoir ses droits à la retraite à taux plein avant le 1er janvier 2020 inclus, qu'aucun élément produit ne permet de retenir qu'il était identifié comme ayant une expertise particulière rendant son départ non souhaitable au regard des nécessités du service, qu'il a justifié d'un projet de reclassement externe mature validé par le point orientation compétences et carrière (POCC) et la commission de validation RH et qu'il n'était pas en suspension de contrat non rémunéré dont le motif de suspension a expiré à la date de la candidature et/ou absence injustifiée ; en outre il était dans la situation prioritaire numéro 1 puisqu'il était en poste dans une autre société où il avait commencé un contrat à durée indéterminée dans le cadre de sa MVES.

C'est aussi en vain que la société Enterprise services France soutient que l'accord RCC exclut le bénéficie d'une rupture conventionnelle pour les salariés en MVES ; en effet, la cour retient que ce moyen est mal fondé au motif qu'aucune disposition de l'accord ne contient une telle exclusion : il s'agit d'un moyen invoqué par la société Enterprise services France pour les besoins de sa cause quand elle a changé de position.

C'est encore en vain que la société Enterprise services France soutient que la situation de M. [H] qui était MVES était régie par l'avenant à son contrat de travail (art 5) et que le refus de le faire bénéficier de l'accord RCC était légitime ; en effet, la cour retient que ces moyens sont mal fondés au motif que le fait qu'il soit en MVES n'excluait pas de le faire bénéficier de la RCC comme cela a d'ailleurs été convenu jusqu'à ce que la société Enterprise services France se dégage unilatéralement des liens de la RCC convenue avec M. [H].

C'est toujours en vain que la société Enterprise services France soutient que ce n'est que si les deux parties sont d'accord que le contrat de travail du salarié est rompu dans le cadre de la rupture conventionnelle collective, et ce, quel que soit le stade de la procédure tant que la procédure n'est pas finalisée et formalisée, que l'accord RCC stipule « l'accord n'ouvre pas droit au profit des salariés éligibles à un droit automatique à la rupture ; ainsi, sous réserve d'en informer les salariés avant la signature d'une convention de rupture d'un commun accord, la société pourra renoncer jusqu'à cette date à tout ou partie des suppressions de postes, sans que le salarié puisse revendiquer un droit à la rupture de son contrat de travail » et que l'entreprise n'a pris aucun engagement envers M. [H] ; en effet, la cour retient que ces moyens sont inopérants pour les premiers et mal fondé pour le dernier au motif que dans le cas de M. [H], la signature de la convention de rupture est intervenue le 21 septembre 2019 avant que la société Enterprise services France ne se libère unilatéralement de l'engagement souscrit le 2 octobre 2019.

La cour retient qu'en se dégageant de la convention de rupture de M. [H] comme elle l'a fait, la société Enterprise services France a rompu abusivement l'engagement de RCC contracté avec lui et l'a indûment privé du droit de recevoir la somme de 155 783,02 € correspondant à l'indemnité prévue (pièce salarié n° m) étant précisé que la chance qu'il a perdue de percevoir cette indemnité du fait de revirement de la société Enterprise services France est de 100 %.

C'est donc en vain que la société Enterprise services France conteste le droit de M. [H] à percevoir l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'indemnité relative au congé de mobilité, l'indemnité compensatrice et l'indemnité de volontariat au motif que ces indemnités sont bien incluses dans la feuille de calcul des indemnités que la société Enterprise services France adressée à M. [H] au cours de processus de contractualisation de la rupture conventionnelle collective (pièce salarié n° m) étant précisé que M. [H] justifie de surcroît du détail de la somme qu'il aurait dû percevoir avec un départ dans le cadre de l'accord RCC, à savoir :

- une indemnité conventionnelle de licenciement de 31 921,59 €

- une indemnité de volontariat de 89 030,81 € sur la base de 11 mois x le salaire de référence pour les salariés de 38 ans, comme c'est son cas,

- une indemnité compensatrice de 23 604 € (pour une ancienneté de 11,24 ans x 2 100 € compte tenu de son âge)

- un congé mobilité de 7 mois compte tenu de son âge et de son ancienneté soit (6 070 x 7 soit 42 491,98 €)

- soit 187 048,38 € avant plafonnement

- soit un total net de 155 783.02 € (pièce n° m).

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a condamné la société Enterprise services France à payer à M. [H] la somme de 8 100 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance en raison du non-respect par la société de l'accord collectif du 13 août 2019 portant rupture conventionnelle collective, et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne la société Enterprise services France à payer à M. [H] la somme de 155 783,02 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance en raison du non-respect par la société de l'accord collectif du 13 août 2019 portant rupture conventionnelle collective.

Sur la requalification de la démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse

M. [H] a démissionné par courrier électronique du 23 janvier 2020 dans les termes qui suivent : « Dans le cadre de mon avenant en mobilité volontaire externe sécurisée, ci-joint, se terminant le 6 février 2020, je vous informe ne pas souhaiter revenir chez ESF ni de la renouveler.

En effet, après contractualisation de notre convention de rupture conventionnelle collective, le 21 septembre 2019 ci-dessous pour laquelle ma candidature fut validée en amont par BPI group, par la commission paritaire, ainsi que, par la commission RH, votre prédécesseur a unilatéralement et à tort, décidé de ne pas respecter cette convention pour un motif totalement erroné, au travers du courrier ci-joint, et de rompre tout contact avec moi.

Vous comprendrez que dans ce contexte, je ne souhaite malheureusement pas prolonger notre collaboration.

(...) »

Lorsqu'un salarié démissionne en raison de faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture constitue une prise d'acte et produit les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifient, soit, dans le cas contraire, d'une démission.

Ainsi une démission provoquée par le comportement de l'employeur doit être requalifiée en prise d'acte et les griefs invoqués par le salarié doivent être analysés par les juges du fond ; le juge doit alors rechercher si les faits invoqués justifient ou non la rupture du contrat et de décider par la suite si cette dernière produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d'une démission.

A l'appui de sa demande de prise d'acte aux torts de l'employeur, M. [H] soutient qu'il a été contraint de démissionner du fait que la société Enterprise services France n'a pas respecté la rupture conventionnelle collective souscrite avec lui.

La société Enterprise services France s'oppose à cette demande et soutient que la démission de M. [H] n'était pas équivoque en l'absence de manquement grave de l'entreprise à ses obligations, qu'en effet, lorsque le 22 janvier 2020, M. [H] lui a notifié sa démission, il était parfaitement au fait de ce qu'elle ne procéderait pas à la rupture conventionnelle du contrat de travail, qu'il a poursuivi son contrat de travail avec la société Cap Gemini et démissionné en toute connaissance de cause : le fait générateur de sa démission était qu'il avait trouvé un nouvel emploi.

Il résulte de l'examen des pièces versées aux débats que M. [H] établit le manquement invoqué à l'encontre de la société Enterprise services France relativement au non-respect de la rupture conventionnelle collective souscrite avec lui et que, faute de pouvoir quitter l'entreprise dans le cadre de cette RCC comme il en avait le droit, il a été contraint de démissionner.

La cour retient donc que la société Enterprise services France a manqué gravement à ses obligations d'employeur à l'égard de M. [H] peu important qu'il aurait été amené à démissionner à la fin de sa MVES pour pouvoir poursuivre le contrat de travail souscrit dans ce cadre, s'il n'y avait pas eu l'accord RCC.

En conséquence, la cour juge que la demande de prise d'acte aux torts de l'employeur de M. [H] est bien fondée, et que la rupture du contrat de travail de M. [H], imputable à la société Enterprise services France, produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a jugé que la rupture du contrat de travail de M. [H], imputable à la société Enterprise services France, produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

M. [H] demande par infirmation du jugement la somme de 65 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; la société Enterprise services France s'oppose à cette demande.

Selon l'article L.1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés pour une ancienneté de11 ans entre 3 et 10,5 mois de salaire.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération de M. [H], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, la cour retient que l'indemnité à même de réparer intégralement le préjudice de M. [H] doit être évaluée à la somme de 24 281,13 €.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Enterprise services France à payer à M. [H] la somme de 24 281,13 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis

M. [H] demande par confirmation du jugement la somme de 24 281,13 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ; la société Enterprise services France s'oppose à cette demande sur le fondement de l'article 9.4.1.(B) de l'Accord portant RCC selon lequel que lorsque le salarié démissionne à l'issue de la MVES, « aucune indemnité compensatrice de préavis ne lui sera due ».

M. [H] soutient sans être utilement contredit que la durée de son préavis est de 3 mois du fait qu'il était cadre.

A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que M. [H] est bien fondé dans sa demande relative à l'indemnité compensatrice de préavis étant ajouté que c'est en vain que la société Enterprise services France invoque l'article 9.4.1.(B) de l'Accord portant RCC au motif que la demande relative à l'indemnité compensatrice de préavis est formée dans le cadre de la prise d'acte de la rupture aux torts de l'entreprise que la cour a retenue et non dans le cadre de l'accord RCC.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a condamné la société Enterprise services France à payer à M. [H] la somme de 24 281,13 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis.

Par voie de conséquence le jugement déféré est aussi confirmé en ce qu'il a condamné la société Enterprise services France à payer à M. [H] la somme de 2 428,11 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés afférente à la période de préavis.

Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement

M. [H] demande par confirmation du jugement la somme de 34 998,27 € au titre de l'indemnité de licenciement ; la société Enterprise services France s'oppose à cette demande et fait valoir que M. [H] a déjà intégré le montant de cette indemnité à l'indemnisation au titre de la perte de chance d'avoir bénéficié du dispositif de rupture conventionnelle collective.

A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que M. [H] est bien fondé dans sa demande relative à l'indemnité conventionnelle de licenciement mais seulement à hauteur de 3 076,68 € calculée comme suit : 34 998,27 € (indemnité conventionnelle de licenciement due à la date de la prise d'acte de la rupture) - 31 921,59 € (indemnité conventionnelle de licenciement intégrée au calcul des indemnités dues dans le cadre de la RCC et retenue à titre de dommages et intérêts pour perte de chance) ; en effet M. [H] ne peut pas bénéficier en plus des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance en raison du non-respect par la société de l'accord collectif du 13 août 2019 portant rupture conventionnelle collective qui intègre déjà une indemnité conventionnelle de licenciement de 31 921,59 € le bénéfice de l'intégralité de l'indemnité conventionnelle de licenciement demandée au motif que faire droit à sa demande reviendrait à lui accorder deux fois l'indemnité conventionnelle de licenciement.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a condamné la société Enterprise services France à payer à M. [H] la somme de 34 998,27 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et statuant à nouveau de ce chef, la cour condamne la société Enterprise services France à payer à M. [H] la somme de 3 076,68 € au titre de solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement.

Sur l'application de l'article L.1235-4 du code du travail

Il n'y a pas lieu à l'application de l'article L.1235-4 du code du travail du fait que M. [H] n'a pas été demandeur d'emploi par suite de la prise d'acte de la rupture.

Sur les demandes des organisations syndicales

A l'examen des moyens débattus, la cour retient que les demandes de dommages et intérêts pour non-respect de l'accord collectif portant rupture conventionnelle collective sont mal fondées au motif qu'il n'est pas justifié du quantum du préjudice demandé forfaitairement à hauteur de 5 000 € pour chacune des 6 organisations syndicales demanderesses sans aucune argumentation sur le quantum.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté les organisations syndicales de leurs demandes de dommages et intérêts pour non-respect de l'accord collectif portant rupture conventionnelle collective.

Sur les autres demandes

La cour condamne la société Enterprise services France aux dépens en application de l'article 696 du code de procédure civile.

Le jugement déféré est confirmé en ce qui concerne l'application de l'article 700 du code de procédure civile.

Il apparaît équitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de condamner la société Enterprise services France à payer à M. [H] la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

L'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande ou en défense est rejeté, leur rejet découlant des motifs amplement développés dans tout l'arrêt.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement mais seulement en ce qu'il a condamné la société Enterprise services France à payer à M. [H] les sommes de :

- 8 100 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice distinct pour la perte de chance,

- 34 398,27 € au titre de l'indemnité de licenciement.

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

Condamne la société Enterprise services France à payer à M. [H] les sommes de :

- 155 783,02 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la perte de chance en raison du non-respect par la société de l'accord collectif du 13 août 2019 portant rupture conventionnelle collective,

- 3 076,68 € au titre de solde de l'indemnité conventionnelle de licenciement.

Confirme le jugement déféré pour le surplus.

Y ajoutant,

Condamne la société Enterprise services France à verser à M. [H] une somme de 2 500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires.

Condamne la société Enterprise services France aux dépens de la procédure d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 21/06878
Date de la décision : 20/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-20;21.06878 ?
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