Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRÊT DU 15 MARS 2024
(n° , 11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/19913 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEVOY
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Septembre 2021 - Tribunal judiciaire de BOBIGNY - RG n° 20/04084
APPELANTE
SCI [H] immatriculée au RCS de Bobigny sous me numéro 843 428 624, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034
INTIMÉE
Fondation PERCE-NEIGE ladite Fondation venant aux droits de l'Association dite «Comité Perce-Neige» par suite de la publication au Journal Officiel du 15 mai 2016 du décret du 13 mai 2016 portant reconnaissance d'utilité publique de la Fondation «Perce-Neige» par transformation de l'Association «Comité Perce-Neige», immatriculée au SIREN sous le numéro 785 041 005, représentée par son Président en exercice domicilié en cette qualité audit siège.
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Francine HAVET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1250 et assistée de par Me Aliette LASNIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0358
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 décembre 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Nathalie BRET, conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Marie-Ange SENTUCQ , présidente de chambre
Nathalie BRET, conseillère
Catherine GIRARD- ALEXANDRE, conseillère
Greffier, lors des débats : Marylène BOGAERS.
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour initialement prévue le 16 février prorogée au 23 février 2024 puis au 15 mars 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Ange SENTUCQ , présidente de chambre et par Marylène BOGAERS, greffier, présent lors de la mise à disposition.
FAITS ET PROCÉDURE
La Fondation Perce-Neige, venant aux droits de l'association Comité Perce-Neige, est devenue propriétaire d'une maison à usage d'habitation sise [Adresse 1], cadastrée section AS n°[Cadastre 3].
Suivant un acte authentique du 25 septembre 2018, Me [B] [J] notaire a dressé un procès-verbal d'adjudication, aux termes duquel elle a donné lecture du cahier des charges, procédé à l'adjudication du bien susvisé, après enchères, au profit de la SCI [H], moyennant le prix de 360.000 €, et annexé à l'acte le cahier des charges.
Le cahier des charges dressé par le notaire le 25 juin 2018 stipule notamment le montant des frais, le paiement du prix en totalité au plus tard le 45ème jour suivant le prononcé de l'adjudication et la résolution de plein droit de l'adjudication, à défaut de paiement du prix, un mois après une sommation demeurée infructueuse.
Le 12 juillet 2019, un commandement de payer le solde du prix visant la clause résolutoire a été signifié à la SCI [H], selon un acte d'huissier remis à étude.
Par acte d'huissier du 31 décembre 2019, la fondation Perce-Neige, venant aux droits de l'association Comité Perce-Neige, a fait assigner la SCI [H] devant le tribunal de grande instance de Bobigny, aux fins, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, de voir :
- constater l'acquisition à son profit de la clause résolutoire visée au commandement de payer du 12 juillet 2019 et la résolution de la vente par adjudication du 25 septembre 2018,
- condamner la SCI [H] à lui payer la somme de 25.000 € de dommages et intérêts,
- condamner la SCI [H] aux dépens ainsi qu'à lui payer la somme de 3.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La SCI [H], assignée suivant un procès-verbal de recherches infructueuses, n'a pas constitué avocat.
Par jugement réputé contradictoire du 27 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Bobigny a :
- constaté la résolution de plein droit au 13 août 2019 de la vente intervenue entre la fondation Perce-Neige, venant aux droits de l'association Comité Perce-Neige, et la SCI [H], suivant procès-verbal d'adjudication reçu le 25 septembre 2018 par Me [B] [J], portant sur le bien immobilier sis [Adresse 1] à [Localité 6] et cadastré section AS n°[Cadastre 3],
- débouté la fondation Perce-Neige, venant aux droits de l'association Comité Perce-Neige, de sa demande de dommages et intérêts,
- condamné la SCI [H] aux dépens,
- condamné la SCI [H] à payer à la fondation Perce-Neige, venant aux droits de l'association Comité Perce-Neige, la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La SCI [H] a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 17 novembre 2021.
La procédure devant la cour a été clôturée le 16 novembre 2023.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Vu les conclusions en date du 16 février 2022 par lesquelles la SCI [H], appelante, invite la cour à :
Vu l'article 472 du code de procédure civile,
Vu les articles 1195, 1226, 1228 et 1343-5 du code civil,
Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- Constaté la résolution de plein droit au 13 août 2019 de la vente intervenue entre la
Fondation Perce-Neige venant aux droits de l'association Comité Perce-Neige et la SCI [H], suivant procès-verbal d'adjudication reçu le 25 septembre 2018 par Me [B] [J], portant sur le bien immobilier sis [Adresse 1] à [Localité 6] et cadastré section AS n°[Cadastre 3],
- Condamné la SCI [H] à payer à la Fondation Perce-Neige venant aux droits de l'association Comité Perce-Neige la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du cpc et aux dépens,
- Ordonné l'exécution provisoire,
- Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
Statuant à nouveau :
In limine litis,
- Déclarer irrégulière la saisine du tribunal judiciaire de Bobigny,
- Déclarer irrégulière et irrecevable la demande de la Fondation Perce-Neige de résolution
de plein droit de la vente intervenue entre la Fondation Perce-Neige venant aux droits de
l'association Comité Perce-Neige et la SCI [H], suivant procès-verbal d'adjudication
reçu le 25 septembre 2018 par Me [B] [J], portant sur le bien immobilier sis 10
[Adresse 7] à [Localité 6] et cadastré section AS n°[Cadastre 3],
A titre subsidiaire,
- Déclarer nul et non avenu le commandement de payer délivré le 12 juillet 2019,
- Juger que le commandement de payer délivré le 12 juillet 2019 ne pouvait pas produire
quelque effet que ce soit,
Subsidiairement
- Déclarer le commandement de payer litigieux inopposable à la SCI [H],
- Déclarer irrecevable et non fondée la demande de la Fondation Perce-Neige de
constatation de l'acquisition de la clause résolutoire de plein droit sur la base du commandement de payer délivré le 12 juillet 2019,
A titre très subsidiaire
- Juger que les conditions légales de l'acquisition de la clause résolutoire de plein droit de
l'adjudication du 25 septembre 2018 ne sont pas remplies,
- Débouter la Fondation Perce-Neige de sa demande de constatation de l'acquisition de la
clause résolutoire de plein droit de l'adjudication du 25 septembre 2018,
- Débouter la Fondation Perce-Neige de toute demande de prononcé de la résolution de la
vente intervenue entre la Fondation Perce-Neige venant aux droits de l'association
Comité Perce-Neige et la SCI [H], suivant procès-verbal d'adjudication reçu le 25
septembre 2018 par Me [B] [J], portant sur le bien immobilier sis [Adresse 1]
[Adresse 1] à [Localité 6] et cadastré section AS n°[Cadastre 3],
- Fixer le montant du prix de la vente restant dû par la SCI [H] à la date de l'adjudication
à la somme de 313.000 €,
- Autoriser la SCI [H] à verser à la Fondation Perce-Neige la somme de 51.065,37 €
disponible à la date du 14 février 2022 sur le compte de dépôt à vue Bred Banque Populaire n°620.05.3335,
- En conséquence, fixer le solde du prix de l'adjudication du 25 septembre 2018 restant dû
par la SCI [H] à la somme de 261.934,63 €,
- Accorder à la SCI [H] un délai de 24 mois pour régler la somme de 261.934,63 € restant dû au titre du solde du prix de l'adjudication du 25 septembre 2018,
- Juger nulle et non avenue la clause de stipulation des intérêts au taux légal majoré à compter du quarante-sixième jour figurant à l'article 'Paiement du prix' du cahier des charges de la vente du 25 juin 2018,
En tout état de cause,
- Condamner la Fondation Perce-Neige à payer à la SCI [H] la somme de 5.000 € au
titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la Fondation Perce-Neige aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de Me Maryse Diocos, conformément aux dispositions de
l'article 699 du code de procédure civile ;
Vu les conclusions en date du 16 mai 2022 par lesquelles la Fondation Perce-Neige, intimée, invite la cour à :
Vu les articles 1103, 1217, 1224, 1225 du code civil
Vu l'article 43 du code de procédure civile,
- Confirmer le jugement rendu le 27 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Bobigny en ce qu'il a constaté la résolution de plein droit au 13 août 2019 de la vente intervenue entre la fondation Perce-Neige et la SCI [H], suivant procès-verbal d'adjudication reçu le 25 septembre 2018 par Me [B] [J] portant sur le bien immobilier sis [Adresse 1] cadastré section AS n°[Cadastre 3],
En conséquence,
- Débouter la SCI [H] de toutes ses demandes, fins et conclusions contraires aux présentes,
- Confirmer le jugement rendu en ce qu'il a condamné la SCI [H] à payer à la Fondation Perce-Neige la somme de 2.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Y ajoutant,
- Condamner la SCI [H] à payer à la Fondation Perce-Neige la somme de 2.500 € à titre d'indemnité pour les frais irrépétibles exposés devant la cour en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la SCI [H] aux dépens de première instance et d'appel ;
SUR CE,
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;
En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;
Au préalable, il convient de constater que le jugement n'est pas contesté en ce qu'il a
débouté la fondation Perce-Neige, venant aux droits de l'association Comité Perce-Neige, de sa demande de dommages et intérêts ;
Sur la régularité de la saisine du tribunal judiciaire
La SCI [H] estime que la saisine du tribunal judiciaire est irrégulière et les demandes de la Fondation Perce-Neige irrecevables ; elle reproche au tribunal d'avoir failli dans la vérification de la régularité de l'assignation qu'elle a pas reçue alors qu'elle était bien domiciliée au [Adresse 1] à [Localité 6] ;
Aux termes de l'article 659 du même code, 'Lorsque la personne à qui l'acte doit être signifié n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connus, l'huissier de justice dresse un procès-verbal où il relate avec précision les diligences qu'il a accomplies pour rechercher le destinataire de l'acte.
Le même jour ou, au plus tard, le premier jour ouvrable suivant, à peine de nullité, l'huissier de justice envoie au destinataire, à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, une copie du procès-verbal, à laquelle est jointe une copie de l'acte objet de la signification.
Le jour même, l'huissier de justice avise le destinataire, par lettre simple, de l'accomplissement de cette formalité.
Les dispositions du présent article sont applicables à la signification d'un acte concernant une personne morale qui n'a plus d'établissement connu au lieu indiqué comme siège social par le registre du commerce et des sociétés' ;
En l'espèce, selon l'exploit d'huissier du 31 décembre 2019, la fondation Perce-Neige a fait assigner la SCI [H] à l'adresse de 'son siège social [Adresse 2] ... représentée par sa gérante Mme [X] [O] ...' ;
L'huissier a dressé un procès-verbal de recherches infructueuses selon l'article 659 du code de procédure civile en précisant 'Lors de l'enquête effectuée sur place les 11.12, 18.12 et 20.12.2019, à la dernière adresse connue indiquée par le demandeur de l'acte, chez SCI [H] ... [Adresse 2] ... il n'a pas été possible de rencontrer le destinataire pour les raisons suivantes :
- le nom ne figure pas sur la boite aux lettres
- j'ai rencontré différents voisins qui me déclarent que la susnommée est partie sans laisser d'adresse
Le services postaux opposent le secret professionnel.
De retour à l'étude, les recherches effectuées sur les pages jaunes de l'annuaire téléphonique ... les recherches informatiques auprès du registre du commerce et des sociétés ne m'ont pas permis d'obtenir un quelconque renseignement ...
Les 30 et 31.12.2019, après m'être entretenu avec mon correspondant, je me suis rendu au [Adresse 1] où là étant je n'ai pu rencontrer Mme [X] [O], gérante de la SCI [H], le nom ne figure pas sur la boîte aux lettres et le voisinage déclare la susnommée inconnue' ;
Il en ressort que l'huissier a respecté les dispositions légales, en effectuant les diligences pour vérifier les deux adresses, sur place, auprès du voisinage et par des recherches sur les pages jaunes de l'annuaire téléphoniques et auprès du registre du commerce et des sociétés ;
Il est justifié que la fondation Perce-Neige a communiqué à l'huissier non seulement l'adresse du siège social de la SCI [H], dont elle avait connaissance au [Adresse 2], mais encore, l'adresse correspondant au bien acquis par l'adjudication, [Adresse 1] à [Localité 6], alors même que la SCI [H] ne lui avait pas notifié un quelconque changement d'adresse de siège social et continuait de déclarer son adresse au [Adresse 2] ;
Selon les pièces du dossiers, le siège social de la SCI [H] au [Adresse 2] figure :
- dans l'acte authentique du 25 septembre 2018 (pièce 5 [H]),
- dans les statuts de la SCI [H] du 28 septembre 2018 (pièce 2 Perce-Neige) qui précisent que le premier gérant est l'associée Mme [X] [O] épouse [E] et que les autres associés sont Mrs et Mmes [C], [R], [K] et [H] [E],
- dans l'attestation de Me [J] notaire du 4 novembre 2018 (pièce 5 Perce-Neige),
- dans le courrier du 7 décembre 2018 (pièce 6 Perce-Neige), par lequel M. [Y] [T] [E], écrivant au sujet du 'justificatif de retard de paiement de la SCI [H]', mentionne l'adresse du [Adresse 2] à [Localité 6],
- dans l'accusé de réception de la lettre recommandée de mise en demeure du 5 avril 2019 (pièce 7 Perce-Neige), adressée à la 'SCI [H] Mme [X] [O] [Adresse 2]' et signé le 10 avril 2019,
- dans le commandement de payer du 12 juillet 2019, régulièrement délivré, selon l'analyse ci-après, à la SCI [H] (pièce 6 [H]), à l'adresse du siège social [Adresse 2] vérifiée par l'huissier,
- dans l'extrait Kbis de la SCI [H] à jour au 18 novembre 2019 (pièce 8 Perce-Neige);
Au surplus, la SCI [H] ne démontre pas qu'à la date du 31 décembre 2019, son siège social était fixé au [Adresse 1] à [Localité 6], sachant que le fait que Mme [X] [O], à titre personnel, demeurait au [Adresse 1], ne justifie pas que la SCI [H], dont elle est la gérante, avait son siège social à la même adresse :
- le procès-verbal de constat du 6 mai 2019 (pièce 9 [H]), par lequel l'huissier a constaté au [Adresse 1] la présence d'un monsieur qui 'lui indique être M. [E] [Y] [T]', 'occuper le pavillon avec sa femme Mme [X] [O] et leurs quatre enfants' et que 'la SCI a déjà versé la somme de 50.000 € et attend son prêt de la banque pour payer la somme complémentaire' ne démontre pas que le siège social de la SCI [H] était fixé à cette adresse à cette date,
- la facture d'électricité EDF du 1er juillet 2019 (pièce 10 [H]) au nom de '[E] [F] [O] épouse [E] [X] [Adresse 1]' ne démontre pas que le siège de la SCI [H] était fixé à cette date à cette adresse ;
Et les pièces du dossier produites démontrent que la SCI [H] a continué de déclarer l'adresse au [Adresse 2] même après le 31 décembre 2019, date à laquelle l'huissier a constaté qu'elle avait quitté ce lieu ;
En effet, selon les pièces du dossier :
- la facture d'électricité EDF du 5 avril 2020 (pièce 10 [H]) au nom de '[E] [F] [O] épouse [E] [X] [Adresse 1]' ne démontre pas que le siège de la SCI [H] était fixé à cette date à cette adresse,
- l'extrait Kbis de la SCI [H] à jour au 1er avril 2021 (pièce 9 Perce-Neige) mentionne le siège social au [Adresse 2] à [Localité 6],
- les chèques datés du 1er mai 2021, 1er juin 2021 et 1er avril 2021, édités sur le compte bancaire de la SCI [H] (pièce 14 [H]) mentionnent comme adresse 'SCI Taniza [Adresse 2]',
- les relevés de compte bancaire de la SCI [H] entre juillet et octobre 2021 (pièce 17 [H]) mentionnent comme adresse 'SCI Taniza [Adresse 2]',
- le 1er juillet 2021, la SCI [H] a adressé un courrier à la Fondation Perce-Neige (pièce 14 [H]), en indiquant comme adresse 'SCI [H] Mme [X] [O] [Adresse 2]' ;
Ce n'est que le 3 janvier 2022, que Mme [X] [O], associé gérante, a sollicité une inscription modificative au registre du commerce et des sociétés, relative au changement de siège social de la SCI [H], qui est intervenu selon elle à compter du 16 novembre 2021, ces deux dates étant bien postérieures à l'assignation du 31 décembre 2019 ;
En effet l'historique des inscriptions modificatives du registre du commerce et des sociétés mentionne 'Date 03/01/22 Objet de l'inscription modificative : ... Transfert du siège de l'entreprise à l'intérieur du ressort à compter du 16/11/2021 ... nouvelle valeur : adresse du siège et établissement principal [Adresse 1]' (pièce 10 Perce-Neige) ;
En conséquence, il y a lieu de rejeter la demande de la SCI [H] de déclarer irrégulière la saisine du tribunal judiciaire de Bobigny ;
Sur le fond
La SCI [H] sollicite de débouter la fondation Perce-Neige de sa demande de résolution de la vente par adjudication du 25 septembre 2018, au motif de la nullité du commandement de payer produit à l'appui de cette demande ; à titre subsidiaire, elle sollicite la révision du contrat ;
Sur la régularité du commandement de payer
La SCI [H] soulève la nullité du commandement de payer aux motifs d'une première part que la Fondation Perce-Neige l'a fait signifier à l'ancienne adresse de la SCI Taniza [Adresse 8] à [Localité 6] alors qu'elle avait connaissance de sa nouvelle adresse [Adresse 7] et d'une seconde part que le commandement de payer ne remplit pas les exigences légales puisque le montant des frais d'adjudication est indéterminé en raison des confusions et ambiguïtés ;
¿ Sur l'adresse
Aux termes de l'article 656 du code de procédure civile, 'Si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile. Dans ce cas, l'huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l'acte doit être retirée dans le plus bref délai à l'étude de l'huissier de justice, contre récépissé ou émargement, par l'intéressé ou par toute personne spécialement mandatée ...' ;
En l'espèce, il ressort de l'exploit d'huissier que le commandement de payer a été signifié à la SCI [H], le 12 juillet 2019, à l'adresse 'SCI [H] Mme [X] [O] [Adresse 2]', selon un procès-verbal de signification de l'acte à étude;
L'huissier précise que 'personne n'est présent ou ne répond à mes appels ... le domicile étant par ailleurs certain ainsi qu'il résulte des vérifications suivantes : le nom est inscrit sur la boîte aux lettres et le préposé PTT a confirmé l'adresse' ;
Il en ressort que l'huissier a respecté les dispositions légales, en effectuant les diligences pour vérifier l'adresse, sur place et auprès du préposé PTT ;
Il est justifié que la fondation Perce-Neige a communiqué à l'huissier l'adresse du siège social de la SCI [H], dont elle avait connaissance au [Adresse 2], en ce qu'elle figure, selon l'analyse ci-avant, dans l'acte authentique du 25 septembre 2018, dans les statuts de la SCI [H] du 28 septembre 2018, dans l'attestation de Me [J] notaire du 4 novembre 2018 et dans la lettre recommandée dont l'accusé de réception a été signé le 10 avril 2019, sachant que la SCI [H] ne lui avait pas notifié un quelconque changement d'adresse de siège social ;
Au surplus, la SCI [H] ne démontre pas qu'à la date du 12 juillet 2019, son siège social était fixé au [Adresse 1] à [Localité 6], et les pièces du dossier produites analysées ci-avant démontrent que, même après le 12 juillet 2019, date à laquelle l'huissier a confirmé l'adresse au [Adresse 2], la SCI [H] a continué de déclarer cette adresse, selon l'extrait Kbis à jour au 18 novembre 2019, selon l'extrait Kbis à jour au 1er avril 2021, selon les chèques datés du 1er mai 2021, 1er juin 2021 et 1er avril 2021, édités sur son compte bancaire, selon ses relevés de compte bancaire entre juillet et octobre 2021, selon son courrier adressé le 1er juillet 2021 à la Fondation Perce-Neige ;
Ce n'est que le 3 janvier 2022, que Mme [X] [O], associé gérante, a sollicité une inscription modificative au registre du commerce et des sociétés, relative au changement de siège social de la SCI [H], qui est intervenu selon elle à compter du 16 novembre 2021, ces deux dates étant bien postérieures au commandement de payer du 12 juillet 2019;
Ainsi il y a lieu de rejeter ce moyen de la SCI [H] ;
¿ Sur les frais d'adjudication
En l'espèce, le commandement de payer du 12 juillet 2019 précise une créance de 351.747,62 € dont les 'frais d'adjudication de 41.000 €' ;
Les frais d'adjudication comprennent les frais taxés connus le jour de l'adjudication (3.000 € TTC selon le cahier des charges du 25 juin 2018 et l'acte authentique du 25 septembre 2018) ainsi que d'autres frais (les émoluments, les frais de publication et les droits de mutation) ;
Il ressort de l'attestation notariée de Me [B] [J] du 14 novembre 2018 que les frais d'adjudication s'élèvent à la somme de 41.000 € (pièce 5 Perce-Neige), ce qui correspond au montant figurant sur le commandement de payer du 12 juillet 2019 ;
Il est donc démontré que ce montant est déterminé et justifié ;
Au surplus, il ressort de l'acte authentique du 25 septembre 2018 que 'L'adjudicataire a déclaré en ce qu'il le concerne ... qu'il a pris connaissance par lui-même, avant l'adjudication, du calcul des charges et de ses annexes' ;
Ce moyen de la SCI [H] est donc rejeté ;
En conséquence, il convient de rejeter la demande de la SCI [H] de prononcer la nullité du commandement de payer du 12 juillet 2019 ;
Sur la demande de la SCI [H] de révision du contrat
La SCI [H] oppose qu'elle a été victime d'un changement de position de sa banque qui a refusé le prêt après en avoir accepté le principe ; elle sollicite la révision du contrat, en application de l'article 1195 du code civil, aux fins de modifier les délais prévus et permettre ainsi le maintien de la validité de la vente avec des paiements échelonnés sur 24 mensualités ; elle sollicite toujours sur le fondement de l'article 1195 du code civil, que le juge statue en équité et dise, au vu de sa bonne foi, nulle et non avenue la clause de stipulation des intérêts au taux légal majoré à compter du quarante-sixième jour figurant à l'article 'Paiement du prix' du cahier des charges de la vente du 25 juin 2018 ;
Aux termes de l'article 1195 du code civil, 'Si un changement de circonstances imprévisible lors de la conclusion du contrat rend l'exécution excessivement onéreuse pour une partie qui n'avait pas accepté d'en assumer le risque, celle-ci peut demander une renégociation du contrat à son cocontractant. Elle continue à exécuter ses obligations durant la renégociation ...' ;
En l'espèce, le courrier adressé au notaire le 7 décembre 2018, ayant pour objet 'Justificatif de retard de paiement SCI [H]' (pièce 6 Perce-Neige), dans lequel M. [E] expose que tous ses comptes sont bloqués depuis le 12 octobre 2018, démontre que la SCI [H] rencontrait déjà des difficultés avec sa banque quelques semaines avant cette date et donc à la date de la vente du 25 septembre 2018, intervenue seulement 17 jours avant le 12 octobre 2018 ;
Ainsi la société [H] ne justifie pas que le refus de prêt de la banque soit un changement de circonstances qui était imprévisible lors de la conclusion du contrat du 25 septembre 2018 ;
En conséquence, il convient de débouter la SCI [H] de sa demande de révision du contrat incluant ses demandes de :
- accorder à la SCI [H] un délai de 24 mois pour régler la somme de 261.934,63 € restant dû au titre du solde du prix de l'adjudication du 25 septembre 2018,
- juger nulle et non avenue la clause de stipulation des intérêts au taux légal majoré à compter du quarante-sixième jour figurant à l'article 'Paiement du prix' du cahier des charges de la vente du 25 juin 2018 ;
Sur la demande de la fondation Perce-Neige de résolution de l'adjudication
Aux termes de l'article 1103 du code civil, 'Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits' ;
Aux termes de l'article 1656 du même code, 'S'il a été stipulé lors de la vente d'immeubles que, faute du paiement du prix dans le terme convenu, la vente serait résolue de plein droit, l'acquéreur peut néanmoins payer après l'expiration du délai, tant qu'il n'a pas été mis en demeure par une sommation ; mais, après cette sommation, le juge ne peut pas lui accorder ce délai' ;
En l'espèce, le cahier des charges dressé par le notaire le 25 juin 2018 (pièce 13 Perce-Neige), expressément rappelé dans l'acte authentique du 25 septembre 2018, stipule en page 15 :
'Paiement du prix
L'adjudicataire devra payer son prix en totalité au plus tard le 45ème jour suivant le prononcé de l'adjudication, par virement entre les mains du notaire pour le compte du vendeur ...
Privilège Action résolutoire
A défaut de paiement par l'adjudicataire de tout ou partie de son prix de la manière ci-dessus prévie, l'adjudication sera résolue de plein droit conformément aux dispositions de l'article 1656 du code civil, un mois après que cet adjudicataire ait été mis en demeure par une sommation contentant déclaration par le vendeur de son intention d'user du bénéfice de la présente clause et restée sans effet, sans préjudice pour ce dernier de son droit à tous dommages et intérêts ...' ;
Il est justifié que la SCI [H] n'avait pas réglé la totalité de la somme due à la date du vendredi soir 9 novembre 2018, 45ème jour suivant l'acte authentique du 25 septembre 2018, qu'elle a été mise en demeure, par le commandement de payer du 12 juillet 2019, de l'intention de la fondation Perce-Neige d'user du bénéfice de la clause résolutoire et que le délai d'un mois après ce commandement de payer est échu depuis le lundi soir 12 août 2019 ;
Ainsi c'est à juste titre que le premier juge a considéré que la résolution de plein droit de la vente litigieuse est acquise depuis le 13 août 2019, entraînant l'anéantissement rétroactif de la vente et restitutions réciproques du bien vendu et de la partie du prix versé ;
En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a constaté la résolution de plein droit au 13 août 2019 de la vente intervenue entre la fondation Perce-Neige, venant aux droits de l'association Comité Perce-Neige, et la SCI [H], suivant procès-verbal d'adjudication reçu le 25 septembre 2018 par Me [B] [J], portant sur le bien immobilier sis [Adresse 1] à [Localité 6] et cadastré section AS n°[Cadastre 3] ;
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
La SCI [H], partie perdante, doit être condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à la fondation Perce-Neige la somme supplémentaire de 2.500 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par la SCI [H] ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,
Rejette la demande de la SCI [H] de déclarer irrégulière la saisine du tribunal judiciaire de Bobigny ;
Confirme le jugement ;
Y ajoutant,
Déboute la SCI [H] de sa demande de révision du contrat incluant ses demandes de :
- accorder à la SCI [H] un délai de 24 mois pour régler la somme de 261.934,63 € restant dû au titre du solde du prix de l'adjudication du 25 septembre 2018,
- juger nulle et non avenue la clause de stipulation des intérêts au taux légal majoré à compter du quarante-sixième jour figurant à l'article 'Paiement du prix' du cahier des charges de la vente du 25 juin 2018 ;
Condamne la SCI [H] aux dépens d'appel, ainsi qu'à payer à la fondation Perce-Neige, venant aux droits de l'association Comité Perce-Neige, la somme supplémentaire de 2.500€ par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;
Rejette la demande de la SCI [H] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
LE GREFFIER,
LA PRÉSIDENTE,