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11/03/2024 | FRANCE | N°24/02914

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 7, 11 mars 2024, 24/02914


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 7



ORDONNANCE DU 11 MARS 2024



(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/02914 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CI42C







Ordonnance sur requête en récusation







DEMANDERESSE





SARL TROIS ACTES,

représentée par Monsieur [L] [D], associé-gérant

[Adresse 1]

[Localité 2]







COMPOSITION :



Madame Sylvie DELACOURT, Présidente de Chambre statuant en tant que délégataire du Premier Président.



Assistée de Mme Sonia DAIRAIN, greffier.





MINISTERE PUBLIC :



Le Parqu...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 7

ORDONNANCE DU 11 MARS 2024

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 24/02914 - N° Portalis 35L7-V-B7I-CI42C

Ordonnance sur requête en récusation

DEMANDERESSE

SARL TROIS ACTES,

représentée par Monsieur [L] [D], associé-gérant

[Adresse 1]

[Localité 2]

COMPOSITION :

Madame Sylvie DELACOURT, Présidente de Chambre statuant en tant que délégataire du Premier Président.

Assistée de Mme Sonia DAIRAIN, greffier.

MINISTERE PUBLIC :

Le Parquet général près la cour d'appel de Paris a adressé le 1er mars 2024 des observations écrites.

ORDONNANCE :

- rendue par mise à disposition.

- signée par Madame Sylvie DELACOURT, Présidente de Chambre et par Mme Sonia DAIRAIN, greffier.

Vu la requête en date du 9 février 2024 et réceptionnée le 13 février 2024, déposée par la société Trois actes représentée par M. [D], gérant, visant à la récusation de Mme [G], juge consulaire au tribunal de commerce de Paris ;

Vu les observations de M. Sayer, président du tribunal de commerce de Paris, en date du 16 févier 2024 auxquelles sont jointes les observations de Mme. [G], juge consulaire au tribunal de commerce de Paris ;

Vu l'avis de M. Vaissette, avocat général, en date du 1er mars 2024, tendant au rejet de la demande de récusation formée par la société Trois actes ;

Vu les conclusions de la société Trois actes enregistrées le 6 mars 2024 ;

Motivation

Sur la recevabilité de la requête en récusation

Aux termes de l'article 343 du code de procédure civile, à l'exception des actions portées devant la Cour de cassation, la récusation ou le renvoi pour cause de suspicion légitime peut être proposée par la partie elle-même ou par son mandataire lequel doit être muni d'un pouvoir spécial et la requête est formée par avocat devant les juridictions où celui-ci a seule qualité pour représenter les parties.

Aux termes de l'article 344 du code de procédure civile, la demande de récusation ou de renvoi pour cause de suspicion légitime est portée devant le premier président de la cour d'appel et elle doit, à peine d'irrecevabilité, indiquer les motifs de récusation ou de renvoi pour cause de suspicion légitime et être accompagnée des pièces justificatives.

Aux termes de l'article 853 du code de procédure civile, les parties sont, sauf disposition contraire, tenues de constituer avocat devant le tribunal de commerce et les parties sont dispensées de l'obligation de constituer avocat dans les cas prévus par la loi ou le règlement, lorsque la demande porte sur un montant inférieur ou égal à 10 000 euros ou qu'elle a pour origine l'exécution d'une obligation dont le montant n'excède pas 10 000 euros, dans le cadre des procédures instituées par le livre VI du code de commerce ou pour les litiges relatifs à la tenue du registre du commerce et des sociétés. Le montant de la demande est apprécié conformément aux dispositions des articles 35 à 37.

En l'espèce, la requête de la société Trois actes vise la récusation d'une juge consulaire dans un dossier portant sur un litige de 3 461,45 euros en principal et l'opposant à la société 27 Films, dont les dirigeants sont Mme. [T] [P], présidente, et M. [H] [P], directeur général.

La requête de la société Trois actes a été régulièrement portée devant M. le premier président de la cour d'appel de Paris et elle indique précisément les motifs de la récusation sollicitée.

La société Trois actes motive sa requête sur les liens que Mme [G] entretiendrait avec le groupe [V] [P] dans le cadre familial et professionnel, lesquels seraient de nature à créer des interférences dans l'affaire l'opposant à la société 27 Films.

La requête de la société Trois actes est donc recevable en la forme.

Sur le bien-fondé de la requête en récusation

Moyens de la société Trois actes

La requérante fait valoir que les activités professionnelles de Mme. [G] sont identifiables dans le Who's Who et que leur examen démontre que la juge consulaire désignée pour traiter du dossier l'opposant à la société 27 Films, ne dispose pas de l'impartialité nécessaire pour juger son affaire.

Elle soutient que notamment, en sa qualité de membre de l'Institut Français des Administrateur (IFA) depuis 2012, la juge désignée représente les intérêts de l'IFA, alors que la société Trois actes est l'agence de relations publiques attitrée de sa concurrente, l'association des administrateurs professionnels indépendants et associés (APIA).

Elle argue également que la juge consulaire désignée, est en relation directe ou indirecte, voire dans un lien de subordination, avec la famille ou des membres du groupe [P], alors même que les dirigeants de la société 27 Films sont membres de la famille [P].

La société Trois actes fait aussi valoir qu'une partie de la clientèle de la société de conseil S2E Partners-Strategy to execution dont Mme. [G] assure la présidence depuis 2013, est en relation avec des membres du groupe [P], particulièrement avec une société appartenant à la même fondation que les dirigeants de la société 27 Films et une senior vice-présidente finance de la société [P] systèmes.

La requérante soutient également que la juge consulaire est spécialisée dans la gouvernance des entreprises familiales et que son neveu est président du conseil d'administration de [Localité 3] aéroport, société exploitant l'aéroport de [Localité 3], laquelle a pour partenaire commercial la société [P] aviation.

La société Trois actes revendique encore les liens familiaux entre Mme. [G] et la société Raymond Weil, spécialisée dans la vente de montres haut de gamme lesquelles seraient vendues dans la maison de vente Artcurial, du groupe [V] [P].

La société Trois actes prétend également que l'activité sportive du juge consulaire au sein du [4] est de nature à établir ses liens particuliers avec les membres de la famille [P] et donc avec les dirigeants de la société 27 Films, son adversaire devant le tribunal de commerce de Paris.

Elle fait également valoir dans ses conclusions un ressenti d'audience de renvoi susceptible d'affecter encore l'exigence d'impartialité qu'elle est en droit d'attendre de la juge consulaire.

La société Trois actes estime que ces éléments ajoutés les uns aux autres, rendent ladésignation de Mme. [G] incompatible avec l'impartialité exigée dans l'instruction de son affaire.

Réponse

Selon l'article 341 du code de procédure civile, sauf disposition particulière, la récusation d'un juge est admise pour les causes prévues à l'article L.111-6 du code de l'organisation judiciaire.

Selon l'article L.111-6 du code de l'organisation judiciaire, dans ses dispositions en vigueur depuis le 20 novembre 2016, sous réserve de dispositions particulières à certaines juridictions, la récusation d'un juge peut être demandée :

1° Si lui-même ou son conjoint a un intérêt personnel à la contestation ;

2° Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une des parties ;

3° Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l'une des parties ou de son conjoint jusqu'au quatrième degré inclusivement ;

4° S'il y a eu ou s'il y a procès entre lui ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ;

5° S'il a précédemment connu de l'affaire comme juge ou comme arbitre ou s'il a conseillé l'une des parties ;

6° Si le juge ou son conjoint est chargé d'administrer les biens de l'une des parties ;

7° S'il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint ;

8° S'il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l'une des parties ;

9° S'il existe un conflit d'intérêts, au sens de article 7-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.

Les magistrats du ministère public, partie jointe, peuvent être récusés dans les mêmes cas.

Selon l'article 7-1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature, les magistrats veillent à prévenir ou à faire cesser immédiatement les situations de conflit d'intérêts et constitue un conflit d'intérêts toute situation d'interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l'exercice indépendant, impartial et objectif d'une fonction.

Selon l'article L721-1 du code de commerce, les tribunaux de commerce sont des juridictions du premier degré, composées de juges élus et d'un greffier et leur compétence est déterminée par le présent code et les codes et lois particuliers et les tribunaux de commerce sont soumis aux dispositions, communes à toutes les juridictions, du livre Ier du code de l'organisation judiciaire.

En application des articles 341 et suivants du code de procédure civile et L111-6 du code de l'organisation judiciaire, une requête en récusation est fondée dès lors qu'il existe un risque de défaut d'impartialité du magistrat.

L'exigence d'impartialité qui s'impose à toutes les juridictions, quel que soit l'enjeu du litige, s'apprécie aussi indépendamment de la mise en 'uvre des procédures de récusation ou de renvoi pour cause de suspicion légitime prévues par les articles article 341 et suivants du code de procédure civile.

Elle peut être remise en cause lorsqu'une partie émet un doute raisonnable quant à l'impartialité de la formation de jugement tenant à des circonstances particulières même si les hypothèses prévues par l'article L111-6 du code de l'organisation judiciaire ne sont pas avérées.

En l'espèce, la société Trois actes propose des éléments d'information épars qui ne permettent pas de considérer que l'une des causes de récusation de l'article L.111-6 du code de l'organisation judiciaire, est remplie.

Particulièrement, au vu des éléments fournis sur lesquels s'appuie la requérante, il n'est pas possible d'établir un conflit d'intérêt entre la juge consulaire désignée ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint du fait de sa qualité de membre de l'IFA, en l'absence de démonstration d'un pouvoir décisionnel.

La société Trois actes n'apporte pas la preuve qu'en sa qualité de présidente d'une société de conseil, Mme [G] exerce son activité commerciale sans indépendance et qu'elle serait notamment en situation de subordination avec des membres du groupe [P].

La requérante n'établit pas la réalité de l'amitié ou de l'inimitié notoire entre la juge consulaire désignée et les dirigeants de la société 27 Films, que ce soit directement au sein de l'association sportive qu'elle fréquente ou de façon indirecte par ses liens familiaux et les relations commerciales qu'entretiennent des membres de sa famille avec des sociétés du groupe [P].

Les autres causes de récusation ne sont pas plus démontrées par la société Trois actes.

En conséquence, il ne sera pas fait droit à la demande de récusation de la société Trois actes.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARONS recevable en la forme la demande en récusation formée par la société Trois actes ;

Sur le fond,

REJETONS la demande en récusation de la société Trois actes à l'encontre de Mme. [G].

Le Greffier,

La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 24/02914
Date de la décision : 11/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-11;24.02914 ?
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