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07/03/2024 | FRANCE | N°23/12623

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 07 mars 2024, 23/12623


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 07 MARS 2024



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/12623 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIADK



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 Juin 2023 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 23/50574





APPELANTE



S.A.R.L. MINA ET REMA, RCS de Paris sous le n°899 4

61 800, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 1]

[Localité 5]



Représentée par Me Olivier FOURGEOT, avocat au barrea...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 07 MARS 2024

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/12623 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CIADK

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 Juin 2023 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 23/50574

APPELANTE

S.A.R.L. MINA ET REMA, RCS de Paris sous le n°899 461 800, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Olivier FOURGEOT, avocat au barreau de PARIS, toque : D1369, présent à l'audience

INTIMEE

S.C.I. SAINT SEVERIN, RCS de Paris sous le n°412 521 957, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Alain RAPAPORT, avocat au barreau de PARIS, toque : K0122

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Janvier 2024, en audience publique, devant Laurent NAJEM, Conseiller, chargé du rapport, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Laurent NAJEM, Conseiller,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Aux termes d'un acte sous seing privé conclu le 9 juillet 2021, la SCI Saint Severin a consenti à la société Mina et Rema un contrat de bail portant sur un local commercial situé [Adresse 3], [Localité 5], moyennant le paiement d'un loyer annuel de 36.000 euros hors charges et hors taxes, payable trimestriellement d'avance.

Le bail fixe le montant des provisions sur charges à la somme annuelle de 3.000 euros HT, payables trimestriellement à l'avance. Des loyers étant demeurés impayés, le bailleur a fait délivrer au preneur, le 8 novembre 2022, un commandement de payer la somme en principal de 13.465,57 euros au titre des loyers et charges échus au 1er octobre 2022, le commandement visant la clause résolutoire.

Se prévalant de l'acquisition de la clause résolutoire stipulée au contrat de bail, la société Saint Severin a, par acte du 11 janvier 2023, a fait assigner la société Mina et Rema devant le président du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, aux fins de voir :

constater l'acquisition de la clause résolutoire prévue au bail ;

ordonner l'expulsion de la défenderesse et de tout occupant de son chef avec si besoin est le concours de la force publique et d'un serrurier ;

ordonner la séquestration, aux frais de la défenderesse, à ses risques et périls, des meubles laissés dans les lieux loués ;

condamner la société Mina et Rema à payer à la société Saint Severin la somme provisionnelle de 11.061,77 euros à titre de loyers, charges et taxes arriérés, somme arrêtée au 4ème trimestre 2022 inclus ;

condamner la société Mina et Rema à payer à la société Saint Severin une indemnité d'occupation égale au montant du loyer contractuel et des charges jusqu'à son départ définitif des lieux loués ;

condamner la défenderesse à payer à la société Saint Severin la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens qui comprendront le coût du commandement de payer du 8 novembre 2022 ;

ordonner l'exécution provisoire de l'ordonnance à intervenir.

Par ordonnance contradictoire du 29 juin 2023, le juge des référés a :

renvoyé les parties à se pourvoir au fond ainsi qu'elles en aviseront, mais dès à présent par provision, tous les moyens des parties étant réservés :

constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire sont réunies à la date du 8 décembre 2022 ;

condamné la société Mina et Rema à payer à la société Saint Severin la somme de 34.783,51 euros à titre de provision à valoir sur les loyers et charges échus au 1er avril 2023, deuxième trimestre 2023 inclus ;

autorisé la société Mina et Rema à se libérer de cette somme en douze mensualités égales à régler en sus du loyer courant, le premier versement devant être effectué le 5ème jour du mois suivant la signification de la présente ordonnance et tout paiement étant imputé en priorité sur les loyers en cours, puis le 5 de chaque mois, sauf meilleur accord des parties ;

suspendu pendant cette période, les effets de la clause résolutoire qui sera réputée n'avoir jamais été acquise en cas de respect des modalités de paiement ;

dit qu' défaut de paiement d'une seule mensualité (loyer ou arriéré) à son échéance et dans son intégralité, le solde restant dû deviendra immédiatement exigible et la clause résolutoire reprendra ses effets ;

constaté en ce cas la résiliation de plein droit du bail consenti à la société Mina et Rema portant sur des locaux situés [Adresse 3], [Localité 6] ;

autorisé en ce cas l'expulsion de la société Mina et Rema et celle de tous occupants de son chef des lieux précité, et disons qu'à défaut de départ volontaire, la partie défenderesse pourra être contrainte à l'expulsion avec, si besoin est, l'assistance de la force publique ;

rappelé que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

condamné en ce cas la société Mina et Rema à payer à la société Saint Severin une indemnité d'occupation provisionnelle équivalente au montant du loyer trimestriel, majoré des charges et taxes, soit à ce stade la somme trimestrielle de 11.920,65 euros HT, et ce à compter du non-respect des délais de paiement jusqu' à libération effective des lieux ;

condamné la société Mina et Rema à verser à la société Saint Severin la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société Mina et Rema au paiement des dépens, qui comprendront le coût du commandement de payer du 8 novembre 2022 ;

rappelé que la présente ordonnance bénéficie de plein droit de l'exécution provisoire.

Par déclaration du 12 juillet 2023, la société Mina et Rema a interjeté appel de la décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 22 décembre 2023, la société Mina et Rema, assistée de la Selarl AJRS, prise en la personne de Me [P], administrateur judiciaire et la Selafa MJA en la personne de Me [Z], mandataire judiciaire demande à la cour, au visa de l'article 1343-5 du code civil, de :

débouter le bailleur de toute demande tendant à voir constater l'acquisition de la clause résolutoire ;

constater la poursuite du bail commercial dans le cadre du redressement judiciaire dès lors que l'ordonnance n'a pas force de la chose jugée.

Elle fait valoir que le délai de paiement de 12 mois accordé par le premier juge était manifestement insuffisant au regard de ses disponibilités financières.

Elle soutient qu'il y a lieu dès lors d'infirmer la décision et d'accorder un délai de 20 mois au regard de la dette.

Elle fait état du jugement d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire en date du 26 octobre 2023 et du fait que le bailleur a déclaré sa créance.

Elle soutient que compte tenu de la procédure d'appel, le bailleur ne peut se prévaloir d'une décision passée en force de chose jugée ; que la clause résolutoire n'est pas définitivement acquise ; que le bailleur ne donc plus poursuivre l'action tendant à la constatation de la résiliation du bail ; que la cour devra constater la pérennité du bail.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 19 octobre 2023, la société Saint Severin demande à la cour de :

confirmer l'ordonnance de référé rendue le 29 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Paris dans toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

condamner à titre provisionnel la société Mina et Rema à lui verser la somme de 43.274,86 euros à titre de loyers et charges arriérés, somme arrêtée au quatrième trimestre 2023 ;

condamner la société Mina et Rema à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner la société Mina et Rema aux entiers dépens tant de première instance que d'appel dont le recouvrement s'opèrera au profit de Me Alain Rapaport, avocat à la cour, dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que c'est en cours de délibéré que le conseil de la locataire a adressé au tribunal la copie d'un ordre de virement ; que le premier juge a estimé que cet ordre ne valait pas preuve du bon encaissement des fonds et que la somme ne pouvait être déduite.

Elle considère que le délai de 12 mois accordé par le premier juge était donc justifié.

Elle souligne que la dette s'est accrue depuis l'ordonnance et s'élève désormais à la somme de 43.274,86 euros au quatrième trimestre 2023.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction de l'affaire est intervenue le 9 janvier 2024.

Par message électronique en date du 30 janvier 2023, la SCI Saint Severin indique que, compte tenu de la procédure de redressement judiciaire, l'ordonnance ne peut être exécutée et que la procédure d'acquisition est " sans objet ".

SUR CE, LA COUR,

Si l'intimée a indiqué que la procédure relative à l'acquisition de la procédure collective est "sans objet", elle n'a pas déposé de conclusions en ce sens, de sorte que la cour demeure saisie de sa demande notamment de confirmation de l'ordonnance déférée.

Un jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 26 octobre 2023 a effectivement ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Mina et Rema et a désigné la Selarl AJRS en la personne de Me [P] en qualité d'administrateur judiciaire et la Selafa MJA en la personne de Me [Z] en qualité de mandataire judiciaire.

L'article L 622-21 du code de commerce dispose que :

" I- Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L 622-17 et tendant :

1° à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;

2° à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.

II - Il arrête ou interdit également toute procédure d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture.

III - Les délais impartis à peine de déchéance ou de résolution des droits sont en conséquence interrompus. "

L'instance en cours est celle qui tend à obtenir, de la juridiction saisie du principal, une décision définitive sur l'existence et le montant de cette créance. Tel n'est pas le cas de l'instance en référé, qui tend à obtenir une condamnation provisionnelle, de sorte que la créance faisant l'objet d'une telle instance doit être soumise à la procédure normale de vérification et à la décision du juge-commissaire.

La société Mina et Rema a été placée en redressement judiciaire pendant la procédure d'appel.

En conséquence de cette procédure, les demandes la SCI Saint Séverin, tendant à la condamnation provisionnelle de sa locataire au paiement d'une somme d'argent, au titre d'une créance ayant son origine antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective, et à la constatation de la résolution du contrat de bail sont devenues irrecevables en vertu de la règle de l'interdiction des poursuites édictée par l'article L. 622-21 du code de commerce.

En effet, toutes les sommes réclamées par le bailleur aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 19 octobre 2023 sont nécessairement antérieures au jugement ayant ouvert une procédure de redressement judiciaire, le 26 octobre 2023.

Il sera par ailleurs rappelé qu'en application de l'article L.622-21 du code de commerce, le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L.622-17 tendant, notamment, à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.

Ainsi, l'acquisition des effets de la clause résolutoire ne pouvant être constatée en raison du non-paiement de l'arriéré locatif dans le délai imparti, la décision entreprise sera infirmée en ce qu'elle a constaté cette acquisition, ordonné l'expulsion de la société Mina et Rema à défaut de respect les délais alloués et condamné cette dernière au paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle.

L'ordonnance entreprise doit donc être infirmée en ce qu'elle a prononcé une condamnation provisionnelle à l'encontre de la société Mina et Rema.

La cour infirmera l'ordonnance entreprise et dira n'y avoir lieu à référé, sans qu'il y ait lieu de "constater" la poursuite du bail dans le cadre du redressement judiciaire. Il s'agit non d'une prétention mais de la reprise d'un moyen et le sort du bail dans la procédure collective échappe au pouvoir de la présente juridiction.

Eu égard à la solution du litige, chacune des parties conservera ses dépens. Il ne sera pas fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise ;

Statuant à nouveau,

Dit n'y avoir lieu à référé ;

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses dépens ;

Rejette le surplus des demandes, y compris au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 23/12623
Date de la décision : 07/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-07;23.12623 ?
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