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06/03/2024 | FRANCE | N°21/06569

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 06 mars 2024, 21/06569


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 06 MARS 2024



(n° 2024/ , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06569 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEC4S



Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Juin 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° 19/00778





APPELANT



Monsieur [R] [C]

[Adresse 2]

[Localit

é 4]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/042949 du 18/10/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

Représenté par Me Thibaut BONNEMYE, avoc...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 06 MARS 2024

(n° 2024/ , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/06569 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEC4S

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Juin 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° 19/00778

APPELANT

Monsieur [R] [C]

[Adresse 2]

[Localité 4]

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/042949 du 18/10/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

Représenté par Me Thibaut BONNEMYE, avocat au barreau de PARIS, toque : G0726

INTIMÉE

S.A.R.L. KEOLIS SEINE VAL DE MARNE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Alexis GINHOUX, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 janvier 2024, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Stéphane THERME, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, Président de formation,

Monsieur Didier LE CORRE, Président de chambre

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Joanna FABBY, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET PROCEDURE

La société Keolis Seine Val-de-Marne a employé M. [R] [C], né en 1979, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2014 en qualité de conducteur receveur. Ce contrat fait suite à un contrat de travail à durée déterminée daté du 14 octobre 2013 au 31 décembre 2013 dans les mêmes fonctions.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport .

M. [C] a été victime d'un accident du travail le 19 juin 2014. Il a fait l'objet de plusieurs arrêts de travail discontinus jusqu'au 1er février 2016. La qualité de travailleur handicapé lui a été reconnue par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées pour la période du 31 mars 2015 au 30 mars 2020.

M. [C] a déclaré plusieurs accidents à la caisse primaire d'assurance maladie, dont le caractère professionnel n'a pas toujours été reconnu.

M. [C] a reçu un avertissement le 30 mai 2016.

Une mise à pied disciplinaire de deux jours a été prononcée le 2 mars 2018.

Par lettre notifiée le 31 décembre 2018, M. [C] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 16 janvier 2019.

M. [C] a été licencié pour faute grave par lettre notifiée le 21 janvier 2019 ; la lettre de licenciement mentionne en substance :

« Nous faisons suite à l'entretien préalable à un éventuel licenciement du mercredi 16 janvier 2019 auquel vous vous êtes présenté accompagné de Monsieur [Z] [B], représentant du personnel, et au cours duquel nous vous avons exposé les motifs de la mesure envisagée.

Ces motifs nous vous les rappelons sont les suivants.

Le 30 décembre 2018 à 16h18, alors que vous effectuiez le service n°13707, votre encadrement a constaté que vous portiez le kit oreillettes de votre téléphone portable, et ce, pendant que vous conduisiez.

D'autre part, le 31 décembre 2018, alors que vous effectuiez le service n°1011, après vérification du Système d'Aide à l'Exploitation (SAE), nous avons constaté que vous aviez 5 minutes et 43 secondes d'avance à l'arrêt « LA FRESNAIE » à [Localité 6]. En effet, une cliente qui attendait le bus à l'arrêt susvisé a contacté notre service régulation et a indiqué que le bus n'est pas passé à l'heure prévue, soit à 17h08.

Par vos agissements fautifs, vous avez enfreint le règlement intérieur de l'entreprise et notamment les dispositions suivantes :

Article 4 - Prévention des accidents : « Les salariés ont l'obligation de respecter toutes les consignes qui leur sont données par le personnel de l'encadrement pour l'exécution de leur travail et notamment les instructions relatives à la sécurité. [...] Les salariés doivent circuler avec prudence sur les voies autorisées y compris dans l'enceinte du dépôt et respecter les panneaux de circulation, ou à défaut, les prescriptions du Code de la route. »

Article 5 - Utilisation des véhicules et du matériel : « Les conducteurs receveurs sont spécialement tenus d'une obligation de soins et de prudence pour la conduite des véhicules de transport en commun et se conformer strictement aux dispositions réglementaires des transports.

Article 14 - Discipline au travail : « Le personnel est soumis, de façon générale, aux directives et instructions émanant de la Direction de l'entreprise et devra en particulier se conformer aux ordres donnés par les responsables hiérarchiques directs ainsi qu'aux prescriptions et consignes portées à sa connaissance notamment par voie d'affichage ou note de service [...] Il est obligatoire de façon générale : [...] - de respecter les règles de sécurité à l'intérieur et à l'extérieur de l'entreprise, - de respecter les consignes de travail imparties à chaque service. »

Article 18 - Utilisation des véhicules de l'entreprise et des véhicules personnels : « Chaque conducteur est tenu de respecter la réglementation relative à la circulation routière [...] ».

Vous n'êtes pas sans savoir que pour des raisons de sécurité, l'utilisation de kit oreillettes est strictement interdite pour les usagers de la route. En effet, cette utilisation nuit considérablement à l'attention et à l'anticipation des conducteurs et peut mettre en péril la sécurité de ces derniers ainsi que celle des usagers présents dans le bus.

Par ailleurs, l'avance de 5 minutes et 43 secondes lors de votre service du 31 décembre 2018 a eu pour conséquence une importante désorganisation sur la ligne que vous desserviez. Vous n'ignorez pas que de tels incidents, outre le désagrément pour les usagers de ne pas bénéficier du service public de transport prévu, entraînent des pénalités financières pour l'entreprise conformément au contrat qui nous lie à Île-de-France Mobilités, notre client. Lors de l'entretien du mercredi 16 janvier 2019 vous avez partiellement reconnu les faits.

En effet, vous avez reconnu avoir porté des écouteurs lors de votre service du 30 décembre 2018 pendant que vous conduisiez. Vous avez notamment indiqué que vous écoutiez la radio par le biais d'écouteurs.

Les explications que vous nous avez fournies lors de cet entretien du mercredi 16 janvier 2019 ne nous ont malheureusement pas permis de modifier notre appréciation des faits.

Votre comportement contrevient ainsi à vos obligations professionnelles et est, par conséquent, fautif.

Nous ne pouvons tolérer de votre part ces comportements non professionnels. Outre le fait que votre attitude nuit à la bonne organisation du service auquel vous appartenez, vous avez, par vos agissements inappropriés, porté atteinte à la qualité de service que nous souhaitons offrir à nos clients.

D'autre part, nous vous rappelons qu'en tant que professionnel de la route, vous vous devez d'anticiper toutes les situations tout en étant vigilant à votre environnement de conduite. En effet, vous devez à tout moment respecter les consignes de sécurité de la société et les dispositions en vigueur du Code de la route.

Votre comportement est inadmissible et dénote un réel manque de professionnalisme.

Ceci est d'autant plus regrettable que vous avez déjà fait l'objet d'une mise à pied disciplinaire de deux jours en date du 02 mars 2018 et un avertissement en date du 30 mai 2016.

Force est de constater que vous n'en avez pas tenu compte.

Votre manque de professionnalisme dans l'exécution de votre contrat de travail et envers votre employeur est lourd de conséquences en termes de responsabilité et d'image pour l'entreprise. Vous avez ignoré purement et simplement vos obligations contractuelles et de sécurité.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible.

En conséquence de ce qui précède et après réflexion, nous avons donc décidé de procéder à votre licenciement pour faute grave, sans préavis, ni indemnité de licenciement.

Cette décision prend effet à la date d'envoi du présent courrier.

À l'expiration de votre contrat de travail, votre certificat de travail, votre reçu pour solde de tout compte et votre attestation Pôle emploi vous seront transmis. Préalablement, nous vous prions de bien vouloir nous déposer, le cas échéant, le matériel appartenant à l'entreprise (caisse, badge, ...).

Par ailleurs, nous portons à votre connaissance qu'en application de l'article L. 911-8 du Code de la sécurité sociale, les couvertures complémentaires santé garantissant les risques portant atteinte à l'intégrité physique de la personne ou liés à la maternité et les couvertures complémentaires prévoyance garantissant le risque décès ou les risques d'incapacité de travail ou d'invalidité (garanties frais de santé et prévoyance) dont vous bénéficiez au sein de l'entreprise vous seront maintenues à titre gratuit dès lors que la rupture de votre contrat de travail ouvrira droit à une prise en charge par le régime d'assurance chômage. Ces garanties peuvent être maintenues à compter de la date de cessation de votre contrat de travail et pendant une durée égale à la période d'indemnisation du chômage dans ta limite de la durée de votre contrat de travail, appréciée en mois entiers, sans pouvoir excéder douze mois de couverture. Nous vous rappelons que vous êtes tenue de prévenir le ou les organismes assureurs concernés de tout retour à l'emploi lors de la période de maintien de ces garanties.

Enfin, vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre, dans les quinze jours suivant sa notification, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous avons la faculté d'y donner suite dans un délai de quinze jours après réception de votre demande, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous pouvons également, le cas échéant et dans les mêmes formes, prendre l'initiative d'apporter des précisions à ces motifs dans un délai de quinze jours suivant la notification du licenciement. »

M. [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Longjumeau le 12 décembre 2019. Il a formé les demandes suivantes :

« - Indemnité pour licenciement nul : 12 359,58 Euros

- A titre subsidiaire indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 12 359,58 Euros

- Indemnité légale de licenciement : 2 703,66 Euros

- Indemnité compensatrice de préavis : 4 119,86 Euros

- Congés payés afférents : 411,99 Euros

- Article 700 du Code de Procédure Civile : 1 800,00 Euros

- Exécution provisoire - article 515 du CPC -

- Intérêts au taux légal

- Capitalisation des intérêts

- Dépens. »

Par jugement du 30 juin 2021, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes a rendu la décision suivante:

« DIT que le licenciement prononce à l'encontre de Monsieur [R] [C] n'est pas entaché de nullité.

DIT que le licenciement pour faute grave prononcé à l'encontre de Monsieur [R] [C] est fondé.

DEBOUTE Monsieur [R] [C] de l'intégralité de ses demandes.

MET les entiers dépens à la charge de Monsieur [R] [C]. »

M. [C] a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 18 juillet 2021.

La constitution d'intimée de la société Keolis Seine Val-de-Marne a été transmise par voie électronique le 23 août 2021.

Par ses dernières conclusions communiquées par voie électronique le 11 janvier 2022, auxquelles la cour fait expressément référence, M. [C] demande à la cour de :

«- INFIRMER en toutes ses dispositions le jugement du Conseil de prud'hommes de Longjumeau en date du 30 juin 2021.

Et, statuant de nouveau :

- CONSTATER que le licenciement de Monsieur [C] est nul ou, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse.

En conséquence :

- CONDAMNER la société KEOLIS à verser à Monsieur [C] les sommes suivantes, outre les dépens :

- 2.703, 66€ à titre de l'indemnité de licenciement

- 4.119,86€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 411,99€ à titre de congés payés afférents

- 12. 359,58€ à titre de l'indemnité de licenciement nul

- A titre subsidiaire : 12. 359,58€ à titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

- 1 800€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure devant le Conseil de prud'hommes

- 1 800€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure devant la Cour d'appel

Toutes condamnations assorties des intérêts au taux légal, à compter de la saisine du Conseil de prud'hommes, outre la capitalisation des intérêts. »

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 13 novembre 2021, la société Keolis Seine Val-de-Marne demande à la cour de :

« Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de LONGJUMEAU du 30 juin 2021 en toutes ses dispositions,

Débouter Monsieur [R] [C] de ses demandes, fins, prétentions et conclusions,

Condamner Monsieur [R] [C] aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel.»

L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 21 novembre 2023.

L'affaire a été appelée à l'audience du 22 janvier 2024.

MOTIFS

Sur la nullité du licenciement

L'article L1132-1 du code du travail dispose que ' Aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L 3221-3 des mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap.'

L'article L. 1134-1 du code du travail dispose que 'Lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du chapitre II, le candidat à l'emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie à l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en tant que de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.'

M. [C] fait valoir que le véritable motif de son licenciement est son état de santé et serait ainsi discriminatoire, pour faire suite à ses arrêts de travail, à l'accident du travail subi et à sa qualité de travailleur handicapé, des adaptations et aménagements de son temps de travail ayant été prescrits.

M. [C] a été reconnu travailleur handicapé pour la période du 31 mars 2015 au 30 mars 2020.

M. [C] produit les bulletins de paie qui indiquent qu'il a été absent pour maladie à de nombreuses reprises, de façon discontinue, de février à la fin de l'année 2017, de mars à décembre 2018, au mois de janvier 2019.

Le médecin du travail a émis des réserves sur la reprise du travail à plusieurs reprises :

- le 25 février 2016 conduite avec un véhicule le plus ergonomique possible,

- le 05 octobre 2017 une reprise à mi-temps thérapeutique, par des journées complètes en alternance avec des journées non travaillées,

- le 22 janvier 2018 ' véhicule adapté et horaire aménagé'

- le 28 avril 2018 'aménagement temporaire du temps de travail pour raison médicale',

- le 03 mai 2018 'ne pas commencer avant 10h avec horaires réguliers',

- le 21 décembre 2018 'il peut reprendre son poste de travail avec un travail qui va commencer après 10h, jusqu'au 21 février'.

Le 31 décembre 2018, M. [C] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement fixé au 16 janvier 2019. Le licenciement pour faute grave a été prononcé le 21 janvier 2019.

Pris dans leur ensemble, ces éléments laissent supposer l'existence d'une discrimination en raison de l'état de santé de M. [C].

La société Keolis Seine Val-de-Marne justifie que M. [C] avait déjà fait l'objet de sanctions disciplinaires avant le licenciement.

Le 30 mai 2016 un avertissement a été prononcé pour avoir adopté un comportement agressif à l'égard du régulateur et avoir manifesté un manque de respect à son égard.

Le 02 mars 2018 une mise à pied disciplinaire a été prononcée au motif que M. [C] n'avait pas desservi un arrêt de bus : il n'a pas achevé sa course jusqu'au terminus et est entré au dépôt, sans en avoir référé à sa hiérarchie.

Le 31 décembre 2018 le logiciel dans lequel sont notés les événements indique un appel d'une cliente qui a signalé que le bus n'était pas passé à un arrêt à 17h08. Il est indiqué que la recherche révèle que M. [C], en charge du bus, est passé avec 5 minutes 43 d'avance, que lorsque la question lui a été posée il a répondu qu'il avait eu une envie d'aller aux toilettes.

Le détail de la mission de la ligne sur laquelle M. [C] était affecté le 31 décembre 2018 indique en commentaire 'suite à une réclamation d'une cliente auprès de la régulation [Localité 5], M. [C] m'explique que sur le tour de 17h il avait besoin d'aller aux toilettes d'où son avance de 5 mn. Sinon tenue vestimentaire conforme aujourd'hui et pas d'écouteurs. Conducteur sensibilisé et respectueux suite aux remarques de la veille. Conduite souple et bonne utilisation des clignotants.'

Le salarié qui assistait M. [C] lors de l'entretien préalable indique qu'au cours de celui-ci le salarié a répondu 'j'avais le kit oreillette pour écouter l'actualité, mais depuis qu'un régulateur m'avait informé que le kit oreillettes est interdit, à ce moment là je ne l'utilisais plus. Pour 5 minutes d'avance, j'avais mal au ventre ce jour-là et je suis parti rapidement aux toilettes pour éviter de faire mes besoins sur moi.'

Le port d'oreillettes pendant la conduite du véhicule n'est pas établi par les éléments produits, qui sont très imprécis sur ce point. En revanche, il est démontré que M. [C] n'a pas respecté l'horaire prévu pour un arrêt de son parcours, passant trop tôt pour que les usagers soient présents à celui-ci, ce qui n'est pas contesté par le salarié.

Le jour de ces faits lorsqu'il lui a été demandé de s'expliquer sur l'appel de la cliente, M. [C] n'a pas fait état d'une douleur au ventre, mais d'un besoin de se rendre aux toilettes, ce dont il n'avait pas prévenu son responsable. Le service a été assuré jusqu'à la fin par le salarié, sans que l'événement ne soit signalé, M. [C] n'ayant pas prévenu son responsable qu'il n'avait pas assuré l'intégralité du parcours. Le problème de santé qui est invoqué par le salarié ne résulte d'aucune pièce du dossier.

L'employeur fait justement valoir que M. [C] avait déjà repris le service avec des horaires aménagés pour respecter les préconisations du médecin du travail du 03 mai 2018 d'un début de service à 10h, avec des horaires réguliers.

Le non-respect des horaires de passage à un arrêt, sans motif légitime, a été à l'origine d'une gêne pour le service, la cliente ayant appelé pour se plaindre de l'absence du service de transport. M. [C] avait déjà été sanctionné à une mise à pied disciplinaire de deux jours pour ce même comportement, sanction antérieure qui est rappelée dans la lettre de licenciement. Le renouvellement de ce manquement caractérise une faute dont la gravité rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. La faute grave est établie et justifiait bien le licenciement pour ce motif.

Le licenciement est ainsi justifié par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Il n'y a pas lieu de prononcer la nullité du licenciement.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le licenciement pour faute grave

A titre subsidiaire M. [C] expose que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse, soutenant que la sanction était disproportionnée.

Le renouvellement de faits similaires ayant perturbé le fonctionnement du service, malgré une sanction de mise à pied disciplinaire, constitue une faute d'une gravité qui empêchait la présence du salarié dans l'entreprise.

Le licenciement est fondé sur une faute grave.

Le jugement qui a débouté M. [C] de ses demandes sera confirmé de ce chef.

Sur les dépens et frais irrépétibles

M. [C] qui succombe supportera les dépens et la charge de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement du conseil de prud'hommes en toutes ses dispositions,

Condamne M. [C] aux dépens,

Déboute M. [C] de sa demande formée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 21/06569
Date de la décision : 06/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-06;21.06569 ?
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