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12/07/2023 | FRANCE | N°20/04720

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 5, 12 juillet 2023, 20/04720


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5



ARRET DU 12 JUILLET 2023



(n° 142 /2023, 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04720 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBT6U



Décision déférée à la Cour : jugement du 24 septembre 2019 - tribunal d'instance de JUVISY - RG n° -19-000560





APPELANT



Monsieur [E] [F]

[Adresse 2]

[Lo

calité 3]



Représenté par Me Joseph NSIMBA, avocat au barreau d'ESSONNE





INTIMEE



Madame [D] [B]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée et assistée de Me Charlie DESCOINS, avocat...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 5

ARRET DU 12 JUILLET 2023

(n° 142 /2023, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04720 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBT6U

Décision déférée à la Cour : jugement du 24 septembre 2019 - tribunal d'instance de JUVISY - RG n° -19-000560

APPELANT

Monsieur [E] [F]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Joseph NSIMBA, avocat au barreau d'ESSONNE

INTIMEE

Madame [D] [B]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée et assistée de Me Charlie DESCOINS, avocat au barreau de PARIS, toque : R099

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 8 évrier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Marie-Ange SENTUCQ, présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Ange Sentucq, présidente

Mme Elise Thévenin-Scott, conseillère

Mme Alexandra Pélier-Tétreau, vice-présidente placée faisant fonction de conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Céline RICHARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, délibéré initialement prévu le 28 juin 2023 et prorogé au 12 juillet 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Ange Sentucq, présidente de chambre et par Céline Richard, greffière, présente lors de la mise à disposition.

FAITS ET PROCEDURE

Madame [D] [B] a fait appel à M. [E] [F], artisan exerçant sous l'enseigne BLB BATIMENT à [Adresse 5], afin d'envisager des travaux de rénovation d'un appartement dont elle a fait l'acquisition à [Localité 4].

Monsieur [F] a établi un devis d'un montant de 29 370 euros TTC le 20 septembre 2018 prévoyant :

démolition des carrelages, coffrages des tuyauteries, murs de la cuisine et de l'entrée et installation électrique

maçonnerie : réagréage des carrelages, montages des murs

plomberie/chauffage : réalisation d'une installation de plomberie, fourniture d'une baignoire et pose d'un meuble vasque

électricité : cuisine, salle de bains, passage de fils de téléphone, changement complet du tableau électrique

carrrelage : salle de bains

menuiseries pour cacher les tuyauteries

peinture : ouverture des fissures, enduit, ponçage et peinture.

Madame [B] remettait un chèque d'acompte de 8 000 euros ainsi que la clé de son appartement, afin de permettre de démarrer le chantier conformément au devis prévoyant le versement d'un acompte de 30 %.

Par lettre recommandée du 28 septembre 2018 Madame [B] au rappel du refus de l'entrepreneur de transmettre une attestation d'assurance décennale couvrant les travaux au jour de l'ouverture du chantier, mettait en demeure la société BLD Bâtiment de lui restituer l'acompte de 8 000 euros encaissé.

Elle réitérait sa demande par courrier recommandé du 26 octobre 2018.

Par exploit délivré le 21 Mars 2019 Madame [B] a fait assigner Monsieur [F] devant le Tribunal d'Instance de Juvisy sur Orge en paiement de la somme de 8 000 euros visant à titre principal les dispositions du code des assurances, articles L 241-1 et L 243-2 et à titre subsidiaire les dispositions des articles L 221-18, 221-20, 221-1, 221-24 et L 242-4 du Code de la consommation.

Le jugement prononcé le 24 septembre 2019 par le Tribunal d'instance de Juvisy a :

Condamné Monsieur [E] [F] à payer à Madame [D] [B] la somme de 8 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2019, date de l'assignation ;

Débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Dit n'y avoir lieu à l'indemnité allouée au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

Condamné Monsieur [E] [F] aux dépens ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Monsieur [E] [F] a interjeté appel selon déclaration reçue au greffe de la cour le 3 mars 2020.

Par conclusions signifiées le 5 juin 2020 Monsieur [E] [F] demande à la cour de :

RECEVOIR Monsieur [E] [F] en son appel et l'y dire bien fondé.

INFIRMER en toutes dispositions le jugement dont Appel.

Statuant à nouveau,

DEBOUTER Madame [D] [B] en toutes ses demandes, 'ns et conclusions.

ACCUEILLIR la demande reconventionnelle de Monsieur [E] [F].

En conséquence,

CONDAMNER Madame [D] [B] à verser à Monsieur [E] [F] la somme de 5 O00 euros à titre des dommages et intérêts pour le préjudice subi.

ORDONNER l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir.

CONDAMNER Madame [D] [B] au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

La CONDAMNER aux entiers dépens

Par conclusions signifiées le 3 septembre 2020 Madame [D] [B] demande à la cour de :

RECEVOIR Mme [B] en ses conclusions et en son appel incident.

Vu le jugement en date du 24 septembre 2019,

Vu les dispositions des articles :

- L.124-1 et L.243-2 du Code des assurances,

- L.221-18 et L.221-5 du Code de la consommation,

- 1231-1 et 1217 du Code civil,

DIRE ET JUGER que le contrat est nul et de nul effet par application des dispositions des articles L.124-1 et L.243-2 du Code des assurances.

Subsidiairement,

DIRE ET JUGER que Mme [B] était fondée à exercer son droit de rétractation par application des dispositions des articles L.221-5 et L.221-18 du Code de la consommation.

Plus subsidiairement encore,

PRONONCER la résolution judiciaire du contrat aux torts et griefs de M. [F] par application des dispositions de l'article 1217 du Code civil.

En conséquence,

INFIRMER la décision entreprise en ce qu'elle a dit et jugé que le contrat a été valablement conclu.

CONFIRMER le jugement en ce qu'il condamne M. [E] [F] à payer à Mme [D] [B] la somme de 8.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2019, date de l'assignation.

LE CONDAMNER en conséquence à payer à Mme [B] une somme de 8.000 € avec intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2019, date de l'assignation, 5.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices subis, 5.000 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, y compris ceux de première instance.

L'ordonnance de clôture était rendue le 8 novembre 2022.

SUR QUOI,

LA COUR

La restitution de l'acompte de 8 000 euros

Le tribunal a retenu que le contrat a valablement été conclu entre les parties dès lors que Monsieur [F] a produit une attestation d'assurance couvrant la responsabilité civile décennale de la société BLD Bâtiment pour la période du chantier.Au visa des dispositions de l'article L 221-18 du Code de la consommation et au rappel de l'absence de contestation par les parties de la conclusion du contrat hors établissement, le devis ayant été reconnu par Monsieur [F] comme ayant été conclu à son domicile personnel, en l'absence de toute mention sur le devis faisant la preuve de l'information délivrée sur le droit de rétractation, le jugement a considéré que le délai de rétractation a été prolongé de 12 mois à compter de l'expiration du délai de rétractation initial soit à compter du 5 octobre 2018 et que Madame [B] ayant exprimé son intention de se rétracter dans son deuxième courrier du 26 octobre 2018, la rétractation avait valablement été formulée.

Monsieur [F], à l'appui de son appel, soutient que Madame [B] n'a pas exprimé dans son premier courrier du 28 septembre 2018 son intention de se rétracter mais seulement dans le second courrier du 26 octobre 2018, qui est hors délai, de sorte que le devis engageant les parties, le refus de poursuivre le marché imputable à Madame [B] est préjudiciable à l'appelant et justifie la condamnation de cette dernière au règlement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Madame [B], à l'appui de son appel incident, fait grief au jugement d'avoir retenu la validité du contrat d'assurance alors que l'attestation d'assurance produite par Monsieur [F] ne couvre pas les travaux de plomberie, chauffage et électricité auxquels il s'était engagé. Elle souligne également que le numéro de l'entreprise porté sur le devis est erroné, Monsieur [F] exploitant plusieurs entreprises et qu'elle n'était ainsi pas en mesure de vérifier, au moment du règlement de l'acompte la solvabilité de l'entreprise.

Réponse de la cour

Prolégomènes

Il sera rappelé que Monsieur [F] exerce son activité sous l'enseigne BLD Bâtiment mais qu'ayant encaissé le chèque litigieux de 8 000 euros sur son compte personnel ouvert à son nom l'action de Madame [B] est valablement dirigée à l'encontre de Monsieur [F].

Selon les dispositions du Code des assurances :

Article L 241-1 : « Toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, doit être couverte par une assurance.

A l'ouverture de tout chantier, elle doit justifier qu'elle a souscrit un contrat d'assurance la couvrant pour cette responsabilité. Tout candidat à l'obtention d'un marché public doit être en mesure de justifier qu'il a souscrit un contrat d'assurance le couvrant pour cette responsabilité.

Tout contrat d'assurance souscrit en vertu du présent article est, nonobstant toute stipulation contraire, réputé comporter une clause assurant le maintien de la garantie pour la durée de la responsabilité décennale pesant sur la personne assujettie à l'obligation d'assurance. »

Article L 243-2: « Les personnes soumises aux obligations prévues par les articles L. 241-1 à L. 242-1 du présent code doivent justifier qu'elles ont satisfait auxdites obligations.

Les justifications prévues au premier alinéa, lorsqu'elles sont relatives aux obligations prévues par les articles L. 241-1 et L. 241-2, prennent la forme d'attestations d'assurance, jointes aux devis et factures des professionnels assurés. Un arrêté du ministre chargé de l'économie fixe un modèle d'attestation d'assurance comprenant des mentions minimales.

Lorsqu'un acte intervenant avant l'expiration du délai de dix ans prévu à l'article 1792-4-1 du code civil a pour effet de transférer la propriété ou la jouissance du bien, quelle que soit la nature du contrat destiné à conférer ces droits, à l'exception toutefois des baux à loyer, mention doit être faite dans le corps de l'acte ou en annexe de l'existence ou de l'absence des assurances mentionnées au premier alinéa du présent article. L'attestation d'assurance mentionnée au deuxième alinéa y est annexée. »

Les dispositions de l'article L 243-3 du Code de la construction et de l'habitation, excepté le cas d'une personne physique construisant un logement pour l'occuper elle-même ou le faire occuper par son conjoint, ses ascendants, ses descendants ou ceux de son conjoint, sanctionnent le défaut de souscription d'une assurance couvrant la responsabilité civile d'une peine d'emprisonnement de six mois et d'une amende de 75 000 euros ou de l'une de ces deux peines seulement.

Monsieur [F] produit une attestation d'assurance de responsabilité civile décennale et de responsabilité civile professionnelle n° de police 34231SWsouscrite pour le compte de la société BLD Bâtiment pour la période du 27 juillet 2018 au 26 octobre 2018 s'appliquant à l'activité professionnelle de « Maçonnerie et béton armé sauf précontraint in situ et Menuiserie extérieure. »

Contrairement à ce qui a été jugé, il n'est donc pas établi que lors de la signature du devis proposé par Monsieur [F] à Madame [B] pour le compte de la société BLD Bâtiment le 20 septembre 2018, cette dernière était couverte pour les activité autres que la maçonnerie à savoir plomberie, chauffage et électricité, par une assurance de responsabilité civile décennale alors que celle-ci est obligatoire en application des articles L 241-1 et L 243-2 du Code des assurances.

Madame [B] sollicite la résolution judiciaire du contrat sans avoir mis en cause la société.

Les dispositions de l'article 1224 du Code civil : « La résolution résulte soit de l'application d'une clause résolutoire soit, en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice. »

Selon les dispositions de l'article 1231 du Code civil : « A moins que l'inexécution soit définitive, les dommages et intérêts ne sont dus que si le débiteur a préalablement été mis en demeure de s'exécuter dans un délai raisonnable. »

Les dispositions de l'article 1231-1 énoncent que : « Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure. »

Il vient d'être démontré qu'en ne souscrivant pas une assurance de responsabilité civile décennale pour la totalité des travaux auxquels il s'est engagé, Monsieur [F] a gravement manqué à ses obligations professionnelles et engagé sa responsabilité personnelle en tant qu'exerçant une activité entreprenariale.

L'inexécution des obligations imputables à Monsieur [F] justifie donc le prononcé de la résolution du contrat et la condamnation de Monsieur [F] à régler à Madame [B], la somme de 8 000 euros correspondant à l'acompte versé pour des travaux non réalisables par le fait du défaut d'assurance augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2019 date de l'assignation.

Par conséquent le jugement sera infirmé en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande de résolution judiciaire du contrat et confirmé, par motifs substitués, en ce qu'il a fait droit à la demande de restitution de l'acompte augmentée des intérêts au taux légal à compter du 21 mars 2019 date de la délivrance de l'assignation.

2- Les dommages et intérêts

Madame [B] ne développe aucun moyen au soutien de cette demande et ne produit aucune pièce à l'appui d'un préjudice distinct de celui réparé par le remboursement de l'acompte.

Elle sera déboutée de ce chef.

3- Les frais irrépétibles et les dépens

Le sens de l'arrêt conduit à condamner Monsieur [F] à régler à Madame [B] une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande de résolution judiciaire du contrat ;

Statuant à nouveau de ce chef :

PRONONCE la résolution du contrat formé entre Monsieur [E] [F] exerçant sous l'enseigne BLD Bâtiment et Madame [D] [B] le 20 septembre 2018 ;

CONFIRME le jugement pour le surplus de ses dispositions par motifs substitués ;

Y ajoutant

DEBOUTE Madame [D] [B] de sa demande de dommages et intérêts ;

CONDAMNE Monsieur [E] [F] à régler à Madame [D] [B] une somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 20/04720
Date de la décision : 12/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-12;20.04720 ?
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