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07/07/2023 | FRANCE | N°20/01483

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 07 juillet 2023, 20/01483


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 07 Juillet 2023



(n° , 7 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/01483 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBPHQ



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Janvier 2020 par le Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE RG n° 20/00049





APPELANTE

SAS [5]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représen

tée par Me Antony VANHAECKE, avocat au barreau de LYON, toque : 1025 substitué par Me Frédéric CAZET, avocat au barreau de PARIS, toque : E1904



INTIMEE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D' YONNE

[Ad...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 07 Juillet 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 20/01483 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBPHQ

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 Janvier 2020 par le Tribunal de Grande Instance d'AUXERRE RG n° 20/00049

APPELANTE

SAS [5]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Antony VANHAECKE, avocat au barreau de LYON, toque : 1025 substitué par Me Frédéric CAZET, avocat au barreau de PARIS, toque : E1904

INTIMEE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE D' YONNE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 11 Mai 2023, en audience publique et double rapporteur, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence LE QUELLEC, présidente de chambre, et de Monsieur Gilles BUFFET, conseiller, chargés du rapport

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre

Monsieur Gilles BUFFET, Conseiller

Madame Natacha PINOY, Conseillère

Greffier : Mme Fatma DEVECI, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Mme Laurence LE QUELLEC, présidente de chambre et Mme Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la société [5] d'un jugement rendu le 17 janvier 2020 par le tribunal judiciaire d'Auxerre, dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Yonne.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que, le 17 novembre 2017, la société [5] (la société) a déclaré un accident du travail concernant son salarié, M. [K] [J] (l'assuré), conducteur de véhicule scolaire, survenu le 15 novembre 2017 à 12 heures 25, la déclaration mentionnant, sur les circonstances de l'accident : 'Le salarié se trouvait à son poste de conduite. Le salarié déclare avoir fait un malaise' ; que l'employeur a émis des réserves ; que le certificat médical initial établi le 15 novembre 2017 indique : 'hospitalisation en médecine B' ; que, par courrier du 3 janvier 2018, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Yonne (la caisse) a avisé la société qu'une décision relative au caractère professionnel de l'accident ne pouvait être arrêtée dans le délai réglementaire de 30 jours de l'article R.441-10 du code de la sécurité sociale et qu'un nouveau délai complémentaire d'instruction lui était nécessaire ; que, par courrier du 12 janvier 2018, la caisse a indiqué à la société que l'instruction du dossier était terminée, que la décision sur le caractère professionnel de l'accident interviendra le 1er février 2018 et que, préalablement à cette prise de décision, elle avait la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier ; que, par décision du 1er février 2018, la caisse a pris en charge l'accident au titre de la législation sur les risques professionnels ; que l'état de santé de la victime a été déclaré consolidé le 9 septembre 2018 ; qu'un taux d'incapacité permanente partielle a été fixé à 10% à compter du 10 septembre 2018 par le médecin conseil de la caisse pour 'AVC ischémique sylvien superficiel gauche, survenu sur le lieu de travail, révélé par des troubles de la parole fugace et un déficit sensitivomoteur de l'hémicorps droit prédominant à la main droite. Il persiste des troubles de sensibilités du pouce et de l'index droit avec gêne à la réalisation des gestes fins. Examen neurologique normal par ailleurs' ; qu'après vaine saisine de la commission de recours amiable, suivant requêtes des 28 juin 2018 et 28 janvier 2019, la société a contesté judiciairement tant la décision de prise en charge de l'accident par la caisse au titre de la législation professionnelle que le taux d'incapacité permanente partielle attribué à la victime.

Par jugement du 17 janvier 2020, le tribunal judiciaire d'Auxerre a :

- ordonné la jonction des recours,

- débouté la société de son recours visant à contester la décision de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de l'accident dont l'assuré a été victime le 15 novembre 2017,

- confirmé, en conséquence, la décision de la caisse du 1er février 2018,

- fixé, dans les rapports entre la caisse et l'employeur, à 7% le taux d'incapacité permanente partielle attribué à l'assuré à la suite de son accident du 15 novembre 2017,

- infirmé, en conséquence, la décision de la caisse du 28 novembre 2018,

- débouté la société et la caisse de leur demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rappelé que les frais de consultation du docteur [V] [Y] seront pris en charge par la Caisse nationale d'assurance maladie,

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Le jugement a été notifié à la société le 20 janvier 2020, laquelle en a interjeté appel par courrier recommandé avec demande d'avis de réception reçu par le greffe le 13 février 2020.

Aux termes de ses conclusions visées à l'audience et auxquelles son avocat se réfère, la société demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé son appel partiel,

- réformer le jugement en ce qu'il a débouté la société de son recours visant à contester la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident dont l'assuré a été victime le 15 novembre 2017,

- réformer le jugement en ce qu'il a débouté la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

et statuant à nouveau :

- déclarer inopposable à la société la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l'accident dont l'assuré soutient avoir été victime le 15 novembre 2017,

- déclarer que l'ensemble des conséquences financières résultant de la décision de prise en charge de l'accident déclaré par l'assuré ne soit pas à la charge de la société et ne doit notamment pas figurer à son compte employeur,

à titre subsidiaire :

- ordonner une mesure d'expertise médicale judiciaire, l'expert ayant pour mission procédant contradictoirement de consulter le dossier administratif et médical constitué par la caisse et son médecin conseil, dire si le malaise déclaré par l'assuré est en lien avec l'activité professionnelle ou s'il existe un état indépendant évoluant pour son propre compte justifiant la survenue du malaise en date du 15 novembre 2017, dire si le travail et les missions professionnelles ont eu un quelconque lien causal avec l'accident déclaré par le salarié,

en toute hypothèse :

- condamner la caisse à payer à la société la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, aux frais d'expertise et aux entiers dépens de l'instance,

- confirmer le jugement sur le surplus.

Aux termes de ses conclusions visées à l'audience et auxquelles son avocat se réfère, la caisse demande à la cour de :

- dire et juger non fondé en droit l'appel de la société,

- débouter la requérante de l'ensemble de ses demandes,

- confirmer, avec toutes conséquences de droit, la décision critiquée,

- y ajoutant, condamner la société au paiement de la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d'appel.

En application du deuxième alinéa de l'article 446-2 et de l'article 455 du code procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties déposées le 11 mai 2023 pour plus ample exposé des moyens développés.

SUR CE :

1- Sur la matérialité de l'accident du travail :

Le tribunal retient que l'ensemble des éléments, précis et concordants, confirme que l'accident déclaré par l'assuré est survenu à l'occasion du travail, la présomption d'imputabilité jouant donc en faveur de l'assuré ; qu'il résulte des conclusions du docteur [Y], désigné par le tribunal pour se prononcer à la fois sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ayant provoqué l'accident et sur le taux d'incapacité permanente de la victime, que la lésion subie par l'assuré peut être liée à son activité professionnelle, qu'il n'existe pas d'état antérieur susceptible d'en être l'origine et qu'en l'absence de preuve d'une cause totalement étrangère au travail par l'employeur, l'origine professionnelle de l'accident doit être confirmée.

La société fait valoir qu'en ordonnant une consultation sur pièces, le tribunal a écarté la présomption d'imputabilité et soulevé une problématique d'ordre médical nécessitant une expertise approfondie ; qu'elle n'a pas eu accès à cette consultation ; qu'aucun fait accidentel n'est justifié, aucun élément objectif ne corroborant les déclarations de l'assuré, son malaise ayant pu débuter avant sa prise de poste ; que l'origine de l'affection pour laquelle l'assuré a bénéficié d'arrêts de travail reste à ce jour indéterminée ; que la caisse ne justifie pas du lien entre le malaise déclaré par le salarié et le travail réalisé ; qu'il ne fait aucun doute que les symptômes présentés par le salarié relèvent d'une problématique physiologique personnelle sans lien avec son activité professionnelle, ce qui est confirmé par le docteur [O], médecin conseil de la société, étant ajouté que, le jour de l'accident, les conditions de travail du salarié étaient normales.

La caisse réplique qu'il est établi que l'assuré a fait un malaise alors qu'il se trouvait sur son poste de conduite ; que les déclarations de l'employeur, de la victime et de la première personne avisée sont corroborées par des éléments objectifs ; que l'employeur n'établit pas que le malaise de l'assuré a eu une cause totalement étrangère au travail, peu important que l'activité professionnelle n'en soit pas un facteur exclusif ; que la matérialité de l'accident est incontestable et que l'employeur ne produit aucune pièce pertinente de nature à contredire l'avis du médecin conseil de la caisse et du médecin consultant présent à l'audience du 6 décembre 2019, ou à justifier que la lésion résulterait d'un état pathologique préexistant évoluant en dehors de toute relation de travail.

Il résulte des dispositions de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale que constitue un accident du travail un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci. Les juges du fond apprécient souverainement si un accident est survenu par le fait ou à l'occasion du travail.

Le salarié ou la caisse substituée dans les droits de la victime dans ses rapports avec l'employeur doit ainsi établir autrement que par ses propres affirmations les circonstances exactes de l'accident et son caractère professionnel ; il importe qu'elles soient corroborées par d'autres éléments.

En revanche, dès lors qu'il est établi la survenance d'un événement dont il est résulté une lésion aux temps et lieu de travail, celle-ci est présumée imputable au travail, sauf pour celui qui entend la contester de rapporter la preuve qu'elle provient d'une cause totalement étrangère au travail.

C'est par des justes motifs que la cour adopte que le tribunal a retenu l'existence d'éléments précis et concordants établissant que l'accident déclaré par l'assuré est survenu à l'occasion du travail. A cet égard, la déclaration d'accident du travail mentionne que l'assuré a eu un malaise le 15 novembre 2017 à 12 heures 25, alors qu'il se trouvait à son poste de conduite, sur ses horaires de travail (production caisse n°1). L'employeur a été avisé de la survenance de l'accident le même jour, à 12 heures 45, soit 30 minutes après les faits. Aux termes de son questionnaire adressé à la caisse, l'assuré a précisé que, lors de son arrêt à [Localité 6], il n'a pas pu ouvrir la porte du car, ne pouvant plus bouger ni parler (production caisse n°4). Le maire de [Localité 6] a confirmé à la caisse qu'il avait été avisé de la survenance du malaise, l'assuré étant à moitié inconscient (production caisse n°6). L'assuré a été pris en charge à 12 heures 30 par les pompiers pour être conduit à l'hôpital de [Localité 4], ainsi que l'employeur le précise dans le questionnaire retourné à la caisse (production caisse n°5). Enfin, l'assuré a été hospitalisé le jour même à 13 heures 31 et n'est sorti que le 22 novembre 2017 (production caisse n°3).

La caisse justifie donc de la survenance d'une lésion aux temps et lieu du travail, résultant d'autres éléments que les déclarations de l'assuré.

Il est rappelé qu'à l'audience, le tribunal a désigné le docteur [Y] sur le fondement de l'article R.142-16 du code de la sécurité sociale. Il est constant que la consultation médicale faite à l'audience s'est fondée sur les pièces du dossier médical de l'assuré.

Contrairement à ce qu'affirme la société, la consultation médicale du docteur [Y] est intervenue contradictoirement, le tribunal ayant sollicité les observations éventuelles des parties sur les conclusions de ce praticien, tandis que la société n'a émis aucune observation.

Il résulte du rapport fait au tribunal par le docteur [Y], interrogé sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail à l'origine de l'accident, que l'assuré ne présentait pas d'état antérieur. Le docteur [Y] a rappelé que la Cour de cassation a toujours considéré que le malaise de type AVC, qu'il soit d'origine ischémique ou hémorragique, pouvait être lié à un accident du travail et indiqué que la charge mentale induite par la responsabilité de transporter des enfants pouvait être considérée comme un facteur de risque au niveau cardio-vasculaire, en provoquant de la tension ou de la tachycardie notamment. Le docteur [Y] a conclu que l'accident ne pouvait être rattaché à une cause totalement étrangère au travail.

Si le docteur [O], médecin conseil de la société, déclare, dans sa note médicale du 23 octobre 2019 (production société n°24) qu'à la différence d'un accident hémoragique éventuel, un accident thrombotique ne peut être d'origine accidentelle et il ne peut être établi aucun lien entre l'accident vasculaire cérébral qui a été diagnostiqué et l'activité professionnelle exercée, il procède par voie d'affirmation et ne donne aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation circonstanciée faite par le docteur [Y] qui constate l'absence d'état antérieur et précise que le travail exercé par le salarié est un facteur de risque cardio-vasculaire, de sorte qu'il existe un lien entre la lésion survenue et l'activité professionnelle.

Par conséquent, la société ne justifiant d'aucune cause étrangère ni d'un état antérieur ayant évolué pour son compte indépendamment du travail de l'assuré, la lésion survenue le 15 novembre 2017 est présumée imputable au travail.

2- Sur le devoir d'information de la caisse :

Le tribunal retient que la caisse a satisfait à son obligation d'information de l'employeur; qu'alors que le certificat médical initial a été reçu par la caisse le 11 décembre 2017, elle a informé l'employeur du recours au délai complémentaire d'instruction le 3 janvier 2018; que l'employeur a été informé par courrier du 12 janvier 2018, reçu le 16 janvier, de la fin de la procédure d'instruction, de la possibilité de venir consulter les pièces du dossier et de la date fixée pour la prise de décision, laquelle a été rendue à la date annoncée.

La société fait valoir que, sauf à rapporter la preuve d'une réception tardive du certificat médical initial, la caisse, qui a reçu la déclaration d'accident du travail le 17 novembre 2017, devait statuer sur le caractère professionnel de l'accident avant le 17 décembre 2017 par application de l'article R.441-10 du code de la sécurité sociale ; que la caisse ne justifie pas d'une réception tardive du certificat médical initial, la capture d'écran du logiciel de la caisse communiquée n'étant pas probante ; qu'ainsi, en n'informant la société du recours à un délai complémentaire d'instruction que le 3 janvier 2018, celui-ci est hors délai ; qu'une prise en charge implicite est donc intervenue le 17 décembre 2017, qui est inopposable à l'employeur, lequel n'a pas reçu de lettre de clôture d'instruction préalablement à cette reconnaissance implicite de prise en charge et n'a pas été invité à consulter les pièces du dossier, lui causant ainsi un grief.

La caisse réplique qu'elle a respecté ses obligations d'information ; qu'elle n'a reçu le certificat médical initial que le 11 décembre 2017, cette date étant celle du début du délai d'instruction du dossier ; que l'employeur a été questionné dans le cadre de l'instruction; qu'il a été informé du délai complémentaire d'instruction dans le délai prescrit ; qu'il a été avisé de la fin de l'instruction et mis en mesure de venir ou demander à consulter les pièces constitutives du dossier, ayant bénéficié d'un délai de 15 jours francs avant la prise de décision par la caisse, ce qui est un délai amplement suffisant ; que l'employeur ne peut donc soutenir qu'il aurait été mis dans l'impossibilité de faire valoir ses droits.

Conformément à l'article R.441-10 du code de la sécurité sociale, applicable en l'espèce, la caisse dispose d'un délai de trente jours à compter de la date à laquelle elle a reçu la déclaration d'accident et le certificat médical initial ou de trois mois à compter de la date à laquelle elle a reçu le dossier complet comprenant la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial et le résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prescrits par les tableaux de maladies professionnelles pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie. (...) Sous réserve des dispositions de l'article R. 441-14, en l'absence de décision de la caisse dans le délai prévu au premier alinéa, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.

Selon l'article R.441-11 III dudit code, en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès.

Enfin, l'article R.441-14 prévoit que lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime ou ses ayants droit et l'employeur avant l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article R. 441-10 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. A l'expiration d'un nouveau délai qui ne peut excéder deux mois en matière d'accidents du travail ou trois mois en matière de maladies professionnelles à compter de la date de cette notification et en l'absence de décision de la caisse, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.(...) Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.

La caisse justifie qu'elle a reçu la déclaration d'accident du travail le 20 novembre 2017, ainsi qu'il résulte de l'accusé de réception produit (production n°1).

Elle communique (production n°2) une copie écran de son logiciel métier reproduisant une version numérique du certificat médical initial du 15 novembre 2017. Le logiciel précise une date de réception du document le 11 décembre 2017.

La société ne démontre pas en quoi ce document, qui mentionne très clairement la date de réception du certificat médical initial par la caisse, ne serait pas probant, le certificat médical initial pouvant être envoyé par tout moyen sans qu'aucun formalisme ne soit imposé. L'argument tiré de l'absence de tampon de la caisse sur le certificat est, à cet égard, sans portée.

Aussi, le délai imparti à la caisse pour instruire le dossier a commencé à courir le 11 décembre 2017.

La caisse justifie avoir adressé un questionnaire à l'employeur qui avait émis des réserves, lequel a été rempli le 15 décembre 2017, ainsi qu'à l'assuré, conformément à l'article R.441-11 III du code de la sécurité sociale.

Le courrier recommandé du 3 janvier 2018 à l'employeur, reçu le 5 janvier 2018 aux termes duquel la caisse l'a informé qu'elle mettait en oeuvre un délai complémentaire d'instruction (production caisse n°7), est intervenu dans le délai de l'article R.441-14 dudit code qui expirait le 11 janvier 2017, de sorte que la société ne peut se prévaloir d'une prise en charge implicite de l'accident au titre de la législation professionnelle, laquelle en tout état de cause ne peut être invoquée que par l'assuré.

Enfin, il est justifié que, par courrier recommandé du 12 janvier 2018, reçu le 16 janvier 2018 (production caisse n°8), la caisse a avisé l'employeur que l'instruction du dossier était terminée, que la décision sur le caractère professionnel de l'accident interviendra le 1er février 2018 et que, préalablement à la prise de décision, il avait la possibilité de consulter le dossier.

L'employeur a donc bénéficié d'un délai de 12 jours francs pour prendre connaissance des pièces du dossier.

Par conséquent, l'employeur ne peut utilement se prévaloir d'un manquement de la caisse à son devoir d'information lorsqu'elle a arrêté sa décision de prise en charge de l'accident au titre de la législation sur les risques professionnels et le moyen soulevé à ce titre sera rejeté.

3- Sur l'expertise médicale :

A défaut pour la société de rapporter la preuve d'un état antérieur évoluant pour son propre compte, lequel est exclu par le docteur [Y], aux termes de sa consultation au tribunal, dont les conclusions ne sont pas sérieusement contestées, la demande d'expertise judiciaire formée à titre subsidiaire par la société sera rejetée.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société de sa demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge par la caisse de l'accident du travail subi par l'assuré au titre de la législation professionnelle.

Partie succombante, la société sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à la caisse 1.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés à hauteur d'appel.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DECLARE recevable l'appel interjeté par la société [5] ;

CONFIRME le jugement rendu le 17 janvier 2020 par le tribunal judiciaire d'Auxerre en toutes ses dispositions ;

DEBOUTE la société [5] de ses demandes ;

CONDAMNE la société [5] aux dépens d'appel ;

CONDAMNE la société [5] à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Yonne 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 20/01483
Date de la décision : 07/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-07;20.01483 ?
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