La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/07/2023 | FRANCE | N°19/07066

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 07 juillet 2023, 19/07066


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 07 JUILLET 2023



(n° , 7 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/07066 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAFXF



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 avril 2019 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 18/01829





APPELANTE

URSSAF ILE DE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par

M. [X] [U] en vertu d'un pouvoir général



INTIMÉE

SOCIÉTÉ [6]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053





COMPOSITION DE LA C...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 07 JUILLET 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/07066 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAFXF

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 avril 2019 par le Tribunal de Grande Instance de PARIS RG n° 18/01829

APPELANTE

URSSAF ILE DE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par M. [X] [U] en vertu d'un pouvoir général

INTIMÉE

SOCIÉTÉ [6]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Jean-Philippe AUTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0053

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 mai 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Natacha PINOY, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laurence LE QUELLEC, présidente de chambre

Madame Bathilde CHEVALIER, conseillère

Madame Natacha PINOY, conseillère

Greffier : Madame Alisson POISSON, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Laurence LE QUELLEC, présidente de chambre, et par Madame Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (l'URSSAF) Ile-de-France d'un jugement rendu le 30 avril 2019 par le pôle social du tribunal de grande instance de Paris dans un litige l'opposant à la SAS [6] ([6]) (la société).

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler qu'un contrôle a été effectué au cours du premier semestre 2017 par un inspecteur de l'URSSAF Île-de-France au sein des locaux de la société [6], société [6].

Une lettre d'observations en date du 4 mai 2017 a été notifiée à la société [6], fixant les cotisations dues à la somme de 10.933 euros.

Le 12 décembre 2017, l'URSSAF Ile-de-France a notifié à la société [6] une mise en demeure de payer la somme de 12.836 euros au titre des cotisations dues et des majorations de retard. L'avis de réception de la lettre recommandée a été signé le 13 décembre 2017.

Par courrier du 12 janvier 2018, la société [6] a saisi la commission de recours amiable de l'organisme social qui, par décision du 23 mars 2018, a rejeté son recours.

Par courrier daté du 25 avril 2018, reçu au secrétariat le 26 avril 2018, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris d'une contestation de la décision explicite de rejet.

Le 1er janvier 2019, le dossier a été transféré au pôle social du tribunal de grande instance de Paris, sous-pôle « contentieux général de la sécurité sociale ».

Par jugement du 30 avril 2019, le pôle social du tribunal de grande instance de Paris a :

- annulé la lettre d'observations datée du 4 mai 2017 ;

- annulé la mise en demeure datée du 12 décembre 2017 ;

- dit n'y avoir pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que les sommes éventuellement versées par la SAS [6], « société [6] » à l'URSSAF Île-de-France au titre du contrôle litigieux devront être remboursées à la société ;

- condamné l'URSSAF Île-de-France à supporter les éventuels dépens de l'instance.

Le jugement lui ayant été notifié par le tribunal de grande instance de Paris par un courrier daté du 3 juin 2019, sans que la mention de la date de réception par l'organisme social ne soit mentionnée sur le bordereau de lettre recommandée avec accusé de réception, l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (l'URSSAF) Ile-de-France a interjeté appel du jugement par courrier daté du 28 juin 2019 et envoyé par courrier du 4 juillet 2019.

Par conclusions écrites soutenues oralement à l'audience par son représentant, l'URSSAF Ile-de-France demande à la cour de :

- infirmer le jugement entrepris ;

- confirmer le redressement opéré par l'URSSAF au titre de la requalification des sommes versées à Mr [C] ;

- confirmer la validité de la mise en demeure du 12 décembre 2017 ;

En tout état de cause,

- condamner l'association à régler à l'appelante une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Au soutien de son appel, l'URSSAF Ile-de-France fait valoir pour l'essentiel que les sommes visées par le redressement, qui avaient été versées par la société ont le caractère de salaire et qu'elle n'est pas obligée de recourir à la procédure d'abus de droit pour remettre en cause les conventions de « management fees ». Elle soutient que les présidents et les dirigeants de SAS relèvent d'autorité du régime général de sécurité sociale au titre de leur mandat de gestion, quelle que soit l'étendue de leurs pouvoirs dans la société et sans qu'il soit besoin de démontrer l'existence d'un lien de subordination juridique et que les rémunérations qui leur sont versées à ce titre doivent donner lieu à cotisations et contributions sociales ; que s'il peut être démontré que les parties ont tenté d'échapper à leur statut social par le biais d'un montage juridique en ayant recours à une société imbriquée à une autre, les juges, négligent la personne morale pour requalifier la relation en contrat de travail ; que cette convention de prestations de services fait double emploi avec l'exercice des fonctions de direction déjà accomplies par M. [C] en sa qualité de président de la SAS [6] et qu'elle est donc dépourvue de cause ; que dans une telle opération, la société holding n'accomplit en réalité aucune prestation puisque celle-ci est assumée par le dirigeant en sa qualité de président de la société-filiale et non pas en tant que mandataire de la holding ; qu'en conséquence la convention litigieuse aurait dû être déclarée nulle par le tribunal pour défaut de cause et le redressement opéré confirmé. Elle soutient que le comité de l'abus de droit a pour seul rôle de permettre la mise en 'uvre des pénalités ; que l'article L.243-7-2 du code de la sécurité sociale ne prévoit aucune obligation de mise en 'uvre à peine de nullité du contrôle ; qu'au contraire, il prévoit une faculté pour les organismes d'avoir recours à une telle procédure ; que l'absence de mise en 'uvre de cette procédure spécifique ne saurait en aucun cas entrainer une nullité. Elle explique que l'employeur a été avisé des redressements envisagés par lettre d'observations du 4 mai 2017, a fait valoir ses observations par courrier du 1er juin 2017, auquel l'inspectrice a répondu le 6 juillet 2017 ; qu'il a ensuite pu saisir la commission de recours amiable de sa contestation et avoir accès au juge en saisissant le tribunal des affaires de sécurité sociale ; que dès lors, la société ne peut prétendre que ses droits n'auraient pas été respectés et qu'il n'y a donc aucun grief ; que le jugement du tribunal devra donc être réformé de ce chef, et il sera constaté que la SAS [6], est filiale de la SAS [5], elle-même détenue par M. [C] [H] et son épouse, M. [C] étant le Président des deux entités.

Elle relève que la SAS [6] a conclu avec la SAS [5] une « convention d'assistance et de prestations de service » le 11 janvier 2012 aux termes de laquelle, il apparait que la société [5] assure au profit de la SAS [6] des missions d'assistance et de conseil dans divers domaines (financier et comptable, commercial, technique, personnel, direction générale et administrative) ; que la société [5] décide seule du choix du personnel devant être affecté aux missions faisant l'objet de la convention litigieuse ; que les travaux effectués par la société [5] pour le compte de la société [6] font l'objet d'une facturation forfaitaire de 2.500 euros TTC par mois ; que cependant, la société [5] n'emploie aucun salarié, de sorte qu'elle ne dispose que de son seul Président, M. [C], pour réaliser ces prestations ; que les missions décrites dans cette convention correspondent dans les faits à celles exercées habituellement par un président de SAS au titre de son mandat social ; que c'est donc à bon droit que l'inspecteur a pu requalifier les prestations de service en salaires.

Par conclusions écrites soutenues oralement à l'audience par son avocat, la société [6] demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 30 avril 2019 en ce qu'il a :

annulé la lettre d'observations de l'URSSAF Ile-de-France datée du 4 mai 2017 à l'encontre de la SAS [6] ;

annulé la mise en demeure adressée par l'URSSAF Ile-de-France le 12 décembre 2017 à la société [6] ;

dit que les sommes éventuellement versées par la société [6] à l'URSSAF Ile-de-France au titre du contrôle litigieux devront être remboursées à la société ;

Statuant à nouveau

- condamner l'URSSAF Ile-de-France au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l'instance.

En réplique, la société [6] fait valoir pour l'essentiel que pour pouvoir requalifier en salaires les prestations litigieuses, l'URSSAF aurait dû suivre la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 243-7-2 du code de la sécurité sociale, ce qu'elle n'a pas fait ; que l'URSSAF conteste, pour la première fois dans ses conclusions d'appel, la nullité de la procédure, soutenant essentiellement par erreur que l'article L. 243-7-2 ne prévoit aucune obligation de mise en 'uvre de la procédure d'abus de droit à peine de nullité de contrôle, mais uniquement une faculté d'avoir recours à cette procédure ; que la Cour de cassation le 16 février 2023, a consacré la notion d'abus de droit implicite et confirmé, pour la première fois, le principe selon lequel l'URSSAF ne peut pas écarter un acte juridique constitutif d'un abus de droit, même implicite, sans respecter la procédure spécifique prévue par l'article L. 243-7-2, sauf à encourir la nullité des opérations de recouvrement ; qu'au cas d'espèce, l'URSSAF affirme dans ses conclusions d'appel, que « s'il peut être démontré que les parties ont tenté d'échapper à leur statut social par le biais d'un montage juridique en ayant recours à une société imbriquée à une autre, les juges, par esprit de réalisme, négligent la personne morale pour requalifier la relation en contrat de travail » ; que, l'URSSAF qualifie implicitement la convention d'acte constitutif d'un abus de droit au sens de l'article L. 243-7-2, afin de l'écarter comme ne lui étant pas opposable, et recourt ainsi nécessairement à la procédure de répression des abus de droit qu'elle aurait dû respecter, sauf à encourir la nullité des opérations de recouvrement ; qu'au cas d'espèce, la lettre d'observations ne comporte pas la contresignature du directeur de l'URSSAF Ile-de-France mentionnant la décision de mettre en 'uvre la procédure des répressions des abus de droit et ne mentionne pas la possibilité pour le cotisant de saisir le comité des abus de droit et les délais impartis pour ce faire ; que l'URSSAF n'a donc pas respecté la procédure de répression des abus de droit, alors qu'elle s'est nécessairement placée sur le terrain de l'abus de droit ; que dès lors, le non-respect de cette procédure entraîne la nullité des opérations de contrôle et celles, subséquentes de recouvrement.

Elle soutient que l'URSSAF ne serait pas recevable à demander la nullité de la convention; que n'étant pas partie à la convention litigieuse, l'URSSAF n'a pas qualité à agir en nullité de celle-ci. Elle expose également que la demande en nullité soit fixée au jour de la lettre d'observations de l'URSSAF (4 mai 2017) ou au jour où elle a été présentée en justice (29 janvier 2019), son action est prescrite pour avoir été intentée plus de cinq ans après la date de signature de la convention le 11 janvier 2012 ; qu'il convient de prononcer ainsi l'irrecevabilité de l'action en nullité de la convention litigieuse. Elle expose que l'URSSAF ne démontre pas que les prestations réalisées par la SAS [5] au profit de la SAS [6] reprendraient et n'excéderaient pas les pouvoirs du dirigeant de la SAS [6], contrairement à ce qu'impose la jurisprudence pour sanctionner les conventions de service pour défaut de cause ; qu'aucune fonction de direction n'a été confiée à la société [5] qui voit son intervention limitée à l'assistance et le conseil de telle sorte que le dirigeant de la société [6] conserve l'ensemble de ses missions de direction de la société en gardant l'aspect décisionnel, représentatif et stratégique ; que l'URSSAF ne peut donc pas nier l'existence d'une contrepartie pour la SAS [6] à la rémunération qu'elle verse à la société [5] et qui découle directement de la convention de prestation de services. A titre subsidiaire, elle rappelle que la nullité d'un contrat a pour conséquence son anéantissement rétroactif, de sorte que la conséquence de la nullité de la convention de la prestation de services consisterait à restituer à la société [6] les sommes litigeuses perçues au titre de cette convention. A titre infiniment subsidiaire, sur la requalification en elle-même des sommes versées en salaires, elle soutient que ne peut être qualifiée de « salaire » une somme versée à une personne morale et que la SAS [5], personne morale, est la seule destinataire des sommes litigieuses; que M. [C] n'a perçu aucune rémunération, directe ou indirecte de la société [6] en sa qualité de Président en 2014 et en 2015 ; que l'URSSAF soumet aux cotisations sociales des sommes qui ne sont pas versées à M. [C] et qui ne sont donc pas disponibles pour lui; qu'il ne peut donc être soutenu que M. [C] ait été rémunéré, même indirectement, dans le cadre de la mission exécutée à travers la convention de prestations de services et que les sommes versées à la société [5] au titre de la convention, ne peuvent donc pas être requalifiées en salaires.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie aux conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du lundi 15 mai 2023, et soutenues oralement par les parties.

Sur le chef de redressement n°2 « Assujettissement et affiliation au régime général: présidents et dirigeants des SAS et des sociétés d'exercice libéral par actions simplifiées»:

Dans le cadre du redressement opéré à l'encontre de la société [6], s'agissant du chef de redressement n°2 de la lettre d'observations du 4 mai 2017, intitulé « Assujettissement et affiliation au régime général : présidents et dirigeants des SAS et des sociétés d'exercice libéral par actions simplifiées », l'URSSAF Île-de-France a requalifié en salaires les prestations facturées par la société [5] à la société [6], ce qui constitue l'objet de la contestation

Aux termes de l'article L. 243-7-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige « Afin d'en restituer le véritable caractère, les organismes mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-1 sont en droit d'écarter, comme ne leur étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes aient un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'aient pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les contributions et cotisations sociales d'origine légale ou conventionnelle auxquelles le cotisant est tenu au titre de la législation sociale ou que le cotisant, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.

En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du premier alinéa, le litige est soumis, à la demande du cotisant, à l'avis du comité des abus de droit. Les organismes de recouvrement peuvent également, dans les conditions prévues par l'article L. 225-1-1, soumettre le litige à l'avis du comité. Si ces organismes ne se conforment pas à l'avis du comité, ils doivent apporter la preuve du bien-fondé de leur rectification. En cas d'avis du comité favorable aux organismes, la charge de la preuve devant le juge revient au cotisant.

La procédure définie au présent article n'est pas applicable aux actes pour lesquels un cotisant a préalablement fait usage des dispositions des articles L. 243-6-1 et L. 243-6-3 en fournissant aux organismes concernés tous éléments utiles pour apprécier la portée véritable de ces actes et que ces organismes n'ont pas répondu dans les délais requis.

L'abus de droit entraîne l'application d'une pénalité égale à 20 % des cotisations et contributions dues.

Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent article, notamment la composition, l'organisation et le fonctionnement du comité des abus de droit».

Aux termes de l'article R. 243-60-3 du I du code de la sécurité sociale, «  La décision de mettre en 'uvre les dispositions prévues à l'article L. 243-7-2 est prise par le directeur de l'organisme chargé du recouvrement, qui contresigne à cet effet la lettre d'observations mentionnée au premier alinéa du III de l'article R. 243-59. Ce document mentionne la possibilité de saisir le comité des abus de droit et les délais impartis à la personne contrôlée pour ce faire ».

En l'espèce, dans la lettre d'observations du 4 mai 2017, l'inspecteur du recouvrement énonce, « M. [C] [H], président de la SAS [6], est également associé et président de la SAS [5] société holding créée le 24/01/2012 dont le siège social est à son domicile, et n'employant aucun salarié. Une convention d'assistance et de prestations de services a été signée entre ces sociétés, représentées toutes les deux par M. [C] [H], en date du 11/01/2012 (') La convention précise également que "les travaux effectués par la société [7] pour le compte de la société [6] feront l'objet d'une facturation forfaitaire mensuelle de 2500 € hors TTC", payable trimestriellement ('). En l'espèce, M. [C] [H] ne perçoit pas de salaire de la SAS [6] au titre de l'exercice de son mandat social. Cependant, il est rémunéré dans le cadre d'une mission d'assistance à la direction et à l'administration de la SAS [6], mission exécutée à travers la convention de prestation de services conclue par la SAS [6] avec la SAS [5] dont il est également le président et dont il est associé. Par conséquent, les attributions dévolues à M. [C] [H] aux termes de cette convention correspondent dans les faits à celles qu'exerce habituellement un président de SAS au titre de son mandat social en application de l'article L 227-6 du code de commerce. Dans ces conditions les rémunérations de prestations perçues par M. [C] [H] sous la forme de "management fees" par l'intermédiaire de la SAS [7] dont il est le président, doivent être soumises aux cotisations et contributions sociales dues au régime général de la Sécurité sociale ('). Par conséquent les sommes en cause, 24 000 € HT au titre de l'année 2014 et 12 000 € HT au titre de l'année 2015 font l'objet d'une régularisation ».

Dans sa décision du 23 mars 2018, la commission de recours amiable de l'URSSAF évoquait notamment que « la convention de prestation de services fait double emploi avec l'exercice des fonctions de direction déjà accomplies par M. [C] en sa qualité de Président de la SAS [6], que la convention est dépourvue de cause et que dès lors il ne s'agit en réalité que d'un montage juridique par recours à une forme sociétaire, uniquement destiné à soustraire le président de la société [6] à son statut social dans le but de s'exonérer de charges sociales dues au titre du régime général ».

L'URSSAF réitère cette position dans ses conclusions devant la cour en affirmant que « s'il peut être démontré que les parties ont tenté d'échapper à leur statut social par le biais d'un montage juridique en ayant recours à une société imbriquée à une autre, les juges, négligent la personne morale pour requalifier la relation en contrat de travail » relevant également que « cette convention de prestation de services fait double emploi avec l'exercice des fonctions de direction déjà accomplies par M. [C] en sa qualité de président de la SAS [6]; elle est dépourvue de cause ».

Par sa position, en considérant que la rémunération prévue par la convention « d'assistance et de prestation de services » du 11 janvier 2012 faisait double emploi avec l'exercice des fonctions de direction accomplies par M. [C] en sa qualité de président de la SAS [6], l'URSSAF a écarté la convention en raison de son caractère présumé fictif, se référant implicitement à la notion d'abus de droit, en sorte qu'elle aurait dû respecter la procédure spécifique de répression des abus de droit et informer le cotisant de la possibilité de saisir le comité des abus de droit, l'URSSAF ne pouvant se prévaloir du fait qu'il n'y avait aucune obligation de mise en 'uvre de la procédure d'abus de droit à peine de nullité de contrôle, mais uniquement une faculté d'avoir recours à cette procédure, pour contester le recours à la notion d'abus de droit.

Par ailleurs, la lettre d'observations du 4 mai 2017 ne comporte pas la contresignature du directeur de l'URSSAF Ile-de-France mentionnant la décision de mettre en 'uvre la procédure des répressions des abus de droit et ne mentionne pas la possibilité pour le cotisant de saisir le comité des abus de droit et les délais impartis pour ce faire.

Ainsi, l'URSSAF n'ayant pas respecté la procédure prévue à l'article L. 243-7-2 du code de la sécurité sociale, il convient d'annuler les opérations de contrôle et celles, subséquentes de recouvrement.

En conséquence, et, par voie de confirmation du jugement entrepris s'agissant du chef de redressement n°2 de la lettre d'observations du 4 mai 2017 intitulé «Assujettissement et affiliation au régime général: présidents et dirigeants des SAS et des sociétés d'exerci­ce libéral par actions simplifiées», l'intégralité de la procédure liée à ce chef de redressement sera annulée et les sommes éventuellement versées par la société [6] à l'URSSAF du chef de ce redressement devront être remboursées à la société.

- Sur les dépens

L'URSSAF Ile-de-France, succombant en appel, devra en supporter les dépens.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DECLARE l'appel formé par l'URSSAF Ile-de-France recevable ;

CONFIRME le jugement du pôle social du tribunal de grande instance de Paris du 30 avril 2019 en toutes ses dispositions;

DEBOUTE l'URSSAF Ile-de-France de ses demandes ;

CONDAMNE l'URSSAF Ile-de-France aux dépens.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 19/07066
Date de la décision : 07/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-07;19.07066 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award