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06/07/2023 | FRANCE | N°22/20428

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 06 juillet 2023, 22/20428


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 06 JUILLET 2023



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/20428 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGZR5



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 18 Octobre 2022 -Tribunal de proximité d'AULNAY-sous-BOIS - RG n° 1222001381





APPELANT



LA COMMUNE DE [Localité 4], prise en la

personne de son Maire en exercice, Mme [G] [A]



[Adresse 3]

[Localité 4]



Représenté par Me Emmanuel VITAL DURAND de l'AARPI GIDE LOYRETTE NOUEL AARPI, avocat au barreau de PARIS...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 06 JUILLET 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/20428 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGZR5

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 18 Octobre 2022 -Tribunal de proximité d'AULNAY-sous-BOIS - RG n° 1222001381

APPELANT

LA COMMUNE DE [Localité 4], prise en la personne de son Maire en exercice, Mme [G] [A]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Emmanuel VITAL DURAND de l'AARPI GIDE LOYRETTE NOUEL AARPI, avocat au barreau de PARIS, toque : T03 et assistée par Me Léa COUTURIER

INTIMES

M. [Z] [X]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Mme [B] [X]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentés par Me Louis ROBATEL, avocat au barreau de PARIS, toque : A574

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Mai 2023, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

******

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte authentique du 20 janvier 1991, la commune de [Localité 4] a acquis la propriété de l'immeuble situé [Adresse 1], sur ladite commune.

L'immeuble était initialement affecté à usage de bureaux de la police municipale de [Localité 4], et appartient désormais au domaine privé de la commune de [Localité 4].

Le 24 décembre 2023, les agents de la police municipale de la commune de [Localité 4] ont constaté l'occupation de l'immeuble sans droit ni titre par trois individus, dont un enfant mineur.

Dans le cadre d'une opération d'intérêt public local, le 21 avril 2022, la commune de [Localité 4] expose avoir conclu une promesse de vente avec la société Green City Immobilier de plusieurs emprises, dont celle située au [Adresse 1], à [Localité 4] (93) afin que cette dernière développe un programme de construction de logements. Le permis de construire a été délivré le 29 décembre 2022 à la société Green City Immobilier et a autorisé la construction d'un ensemble immobilier de 52 logements avenue Nollet.

Par exploit d'huissier de justice du 7 février 2022, la commune de [Localité 4] à fait assigner en référé M. et Mme [X] et M. [C] [D] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Aulnay-sous-Bois aux fins de voir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- constater l'occupation sans droit ni titre de l'immeuble propriété de la commune de [Localité 4] par M. et Mme [X] ainsi que par M. [D] ;

- constater que ces occupants sans droit ni titre sont entrés dans l'immeuble par voie de fait ;

- ordonner l'expulsion immédiate de M. et Mme [X] et de M. [D], occupants sans droit ni titre de l'immeuble, et de tout autre occupant de leur chef de l'immeuble qu'ils occupent, avec au besoin le concours de la force publique ;

- supprimer le délai de deux mois suivant la délivrance du commandement d'avoir à quitter les lieux, visé à l'article L.411-l du code des procédures civiles d'exécution ;

- condamner solidairement les occupants sans droit ni titre à verser à la commune de [Localité 4] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et les

- condamner aux entiers dépens.

Par ordonnance contradictoire du 18 octobre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité d'Aulnay-sous-Bois, statuant en référé, a :

- mis hors de la cause [C] [D], né le [Date naissance 2] 2011 en Roumanie, mineur non représenté ;

- déclaré recevable l'intervention volontaire de Mme [U], M. [X], Mme [X], M. [L], Mme [L], M. [V] [M] et de M. [D] ;

- débouté la commune de [Localité 4] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamné la commune de [Localité 4] aux dépens ;

- débouté la commune de [Localité 4] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- rappelé que l'exécution provisoire est de droit ;

- rappelé que la présente décision sera réputée non avenue si elle n'est pas signifiée dans les six mois de son prononcé.

Par déclaration du 5 décembre 2022, la commune de [Localité 4] a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions remises le 21 avril 2023, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la commune de [Localité 4] demande à la cour, au visa des articles 835 et 700 du code de procédure civile, de l'article L. 213-4-3 du code de l'organisation judiciaire, des articles L. 411-1 et L. 412-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, de :

- infirmer l'ordonnance du juge des référés du tribunal de proximité d'Aulnay-sous-Bois, en ce qu'elle a :

débouté la commune de [Localité 4] de sa demande d'expulsion immédiate de M. et Mme [X], occupants sans droit ni titre de l'Immeuble, et de tout autre occupant de leur chef de l'Immeuble qu'ils occupent, avec au besoin le concours de la force publique,

débouté la commune de [Localité 4] de sa demande de suppression du délai de deux mois suivant la délivrance du commandement d'avoir à quitter les lieux, visé à l'article L.411-1 du code des procédures civiles d'exécution,

débouté la commune de [Localité 4] de sa demande formulée au titre la condamnation des occupants sans droit ni titre au versement de la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

condamné la commune de [Localité 4] aux entiers dépens ;

et, statuant à nouveau par l'effet dévolutif de l'appel,

- constater l'occupation sans droit ni titre de l'immeuble propriété de la commune de [Localité 4] par M. et Mme [X] ;

- constater que ces occupants sans droit ni titre sont entrés dans l'immeuble par voie de fait ;

- juger que la mesure d'expulsion était parfaitement justifiée et proportionnée ;

en conséquence,

- ordonner l'expulsion immédiate de M. et Mme [X], occupants sans droit ni titre de l'immeuble, et de tout autre occupant de leur chef de l'immeuble qu'ils occupent, avec au besoin le concours de la force publique ;

- supprimer le délai de deux mois suivant la délivrance du commandement d'avoir à quitter les lieux, prévu à l'article L. 411-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

- supprimer le bénéfice de la trêve hivernale en application de l'article L.412-6 du même code ;

- refuser tout délai supplémentaire à compter de la signification du commandement de quitter les lieux en application des dispositions des articles L.412-3 et suivant du même code ;

- débouter M. et Mme [X] de leurs demandes formulées au titre de leur appel incident ;

- condamner solidairement les occupants sans droit ni titre au versement de la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La commune de [Localité 4] fait en substance valoir :

- que les intimés occupent sans droit ni titre l'immeuble propriété de la commune de [Localité 4], ce qui constitue indéniablement un trouble manifestement illicite ; qu'au demeurant, les intimés n'établissent pas avoir entrepris la moindre démarche en vue de leur insertion et qu'ils n'ont d'ailleurs pas répondu à la proposition de la commune de [Localité 4] tendant à leur proposer un relogement sur son territoire ;

- que les occupants ont nécessairement pénétré dans les lieux par effraction, en forçant l'entrée de l'immeuble ; que, dans ces conditions, il est demandé à la cour d'appel de Paris de supprimer, lorsqu'elle ordonnera l'expulsion des intimés, le délai de préavis de deux mois prévu à l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution ; qu'en conséquence, la demande de prorogation de trois mois sollicitée par les intimés sur le fondement de l'article L. 412-2 du même code ne saura être accueillie ; que, par ailleurs, le bénéfice de la trêve hivernale sera automatiquement supprimé en application de l'alinéa 2 de l'article L. 412-6 du même code ;

- que la demande de délais de grâce n'est pas fondée, s'agissant d'occupants sans droit ni titre ayant pénétré par effraction.

Dans leurs conclusions remises le 21 mars 2023, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens, M. et Mme [X] demandent à la cour, au visa du code de l'organisation judiciaire, notamment ses articles L. 211-3 et L. 213-4-3, du code des procédures civiles d'exécution, notamment les articles L.412-1 et suivants, de :

- juger la constitution des intimés, recevable et bien fondée et l'accueillir dans l'ensemble de ses demandes ;

ce faisant,

- confirmer l'ordonnance du juge des référés du tribunal de proximité d'Aulnay-sous-Bois, en ce qu'elle a :

débouté la commune de [Localité 4] de sa demande d'expulsion immédiate de M. et Mme [X], occupants sans droit ni titre de l'Immeuble, et de tout autre occupant de leur chef de l'immeuble qu'ils occupent, avec au besoin le concours de la force publique,

débouté la commune de [Localité 4] de sa demande de suppression du délai de deux mois suivant la délivrance du commandement d'avoir à quitter les lieux, visé à l'article L.411-1 du code des procédures civiles d'exécution,

débouté la commune de [Localité 4] de sa demande formulée au titre la condamnation des occupants sans droit ni titre au versement de la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

condamné la commune de [Localité 4] aux entiers dépens ;

en conséquence, statuant de nouveau,

à titre principal,

- constater le caractère disproportionné de la demande d'expulsion formée par la commune de [Localité 4] ;

par conséquent,

- rejeter l'intégralité des demandes présentées par la commune de [Localité 4] ;

à titre subsidiaire,

- constater l'absence de voie de fait ;

en conséquence,

- appliquer le délai de deux mois, prévu à l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution ;

- proroger ce délai de trois mois sur le fondement des dispositions de l'article L. 412-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

en tout état de cause,

- accorder le bénéfice de la trêve hivernale en application de l'article L.412-6 du même code ;

- accorder un délai supplémentaire de 18 mois à compter de la signification du commandement de quitter les lieux eu égard aux circonstances particulières de l'espèce sur le fondement des dispositions des articles L.412-3 et suivant du code des procédures civiles d'exécution ;

- débouter la commune de [Localité 4] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires ;

- condamner la commune de [Localité 4] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la commune de [Localité 4] aux entiers dépens ;

- ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir.

M. et Mme [X] font en substance valoir :

- qu'il y a lieu de constater la disproportion de l'ingérence dans le droit au respect de la vie privée et familiale des occupants induite par l'expulsion sollicitée au regard du but poursuivi ;

- qu'il ne ressort d'aucun élément versé par la partie adverse que les occupants seraient entrés par effraction ; qu'il n'y a aucun constat d'huissier mais seulement un rapport d'intervention de la police municipale de [Localité 4] du 24 décembre 2021 ;

- que les intimés n'ont aucun autre endroit où aller en cas d'expulsion et qu'aucune solution de relogement stable n'est prévue.

A l'audience du 31 mai 2023, il a été constaté que les intimés n'ont pas réglé le timbre fiscal ni n'ont justifié d'une demande d'aide juridictionnelle.

SUR CE

En application de l'article 963 du code de procédure civile dans sa rédaction issue des dispositions du décret n° 2013-1280 du 29 décembre 2013, lorsque l'appel entre dans le champ d'application de l'article 1635 bis P du code général des impôts, les parties justifient, à peine d'irrecevabilité de l'appel ou des défenses selon le cas, de l'acquittement du droit prévu à cet article.

Sauf en cas de demande d'aide juridictionnelle, l'auteur de l'appel principal en justifie lors de la remise de sa déclaration d'appel et les autres parties lors de la remise de leur acte de constitution par l'apposition de timbres mobiles ou par la remise d'un justificatif lorsque le droit pour l'indemnisation de la profession d'avoué a été acquitté par voie électronique. En cas de requête conjointe, les appelants justifient de l'acquittement du droit lors de la remise de leur requête.

Lorsque la partie a sollicité le bénéfice de l'aide juridictionnelle, elle joint la décision accordant cette aide à l'acte assujetti à l'acquittement du droit. A défaut de décision rendue sur la demande d'aide juridictionnelle, l'acte est accompagné de la copie de cette demande. Si cette demande d'aide juridictionnelle est déclarée caduque ou rejetée ou que la décision l'octroyant est retirée, le demandeur justifie, à peine d'irrecevabilité, de l'acquittement du droit dans le mois suivant, selon le cas, la notification de la caducité ou la date à laquelle le rejet ou le retrait est devenu définitif.

L'irrecevabilité est constatée d'office par le magistrat ou la formation compétents. Les parties n'ont pas qualité pour soulever cette irrecevabilité. Elles sont avisées de la décision par le greffe.

En l'espèce, les intimés n'ont pas justifié de l'acquittement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts, pas plus qu'ils ne font état d'une demande d'aide juridictionnelle.

La lettre d'information circuit court du 9 mars 2023 a pourtant rappelé les dispositions applicables en la matière, de même qu'un courrier adressé par le greffe par voie électronique le 30 mai 2023.

Les intimés se sont abstenus de régulariser la situation jusqu'à la date du présent arrêt.

Il y a donc lieu de déclarer leurs conclusions irrecevables.

Il sera cependant rappelé qu'en l'absence de conclusions recevables d'une partie intimée, celle-ci est réputée s'être appropriée les motifs du premier juge, conformément à l'article 954 du code de procédure civile.

De surcroît, en application de l'article 472 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne fera droit aux demandes que si elle les estime régulières, recevables et bien fondées.

Sur le fond du référé, selon l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L'alinéa 2 précise que, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le trouble manifestement illicite ici visé s'entend de toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

L'occupation sans droit ni titre d'un immeuble est ainsi de nature à constituer un trouble manifestement illicite, ou, à tout le moins, l'obligation de quitter les lieux est non sérieusement contestable.

En outre, selon l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution, si l'expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L.412-3 à L.412-7. Toutefois, le juge peut, notamment lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l'article L. 442-4-1 du code de la construction et de l'habitation n'a pas été suivie d'effet du fait du locataire, réduire ou supprimer ce délai.

Le délai prévu au premier alinéa de l'article L.412-1 du code des procédures civiles d'exécution ne s'applique pas lorsque le juge qui ordonne l'expulsion constate que les personnes dont l'expulsion a été ordonnée sont entrées dans les locaux par voie de fait.

Par ailleurs, l'article L.412-6 du code des procédures civiles d'exécution dispose que, nonobstant toute décision d'expulsion passée en force de chose jugée et malgré l'expiration des délais accordés en vertu de l'article L.412-3, il est sursis à toute mesure d'expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu'au 31 mars de l'année suivante, à moins que le relogement des intéressés soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l'unité et les besoins de la famille.

Par dérogation au premier alinéa de l'article L.412-6 du code des procédures civiles d'exécution, ce sursis ne s'applique pas lorsque la mesure d'expulsion a été prononcée en raison d'une introduction sans droit ni titre dans le domicile d'autrui par voies de fait.

Le juge peut supprimer ou réduire le bénéfice du sursis mentionné au même premier alinéa lorsque les personnes dont l'expulsion a été ordonnée sont entrées dans tout autre lieu que le domicile à l'aide des procédés mentionnés au deuxième alinéa de l'article L.412-6.

Enfin, il résulte de l'article L. 412-3 du code des procédures civiles d'exécution que le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l'expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d'un titre à l'origine de l'occupation.

Le juge qui ordonne l'expulsion peut accorder les mêmes délais, dans les mêmes conditions.

L'article L. 412-4 précise que la durée des délais prévus à l'article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l'occupant dans l'exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l'occupant, notamment en ce qui concerne l'âge, l'état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d'eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l'occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés.

En l'espèce, il est établi que M. et Mme [X] occupent sans droit ni titre une maison pavillonnaire sise à [Localité 4], propriété de la commune de [Localité 4].

L'occupation sans droit ni titre, qui porte atteinte au droit de propriété du propriétaire de la parcelle, commande la mesure d'expulsion, seule à même de permettre à ce dernier de recouvrer la plénitude de son droit sur le bien occupé illicitement, le trouble manifestement illicite étant dès lors parfaitement caractérisé au sens de l'article 835 du code de procédure civile et la mesure proportionnée à l'atteinte portée au droit du propriétaire.

Contrairement à ce qu'a indiqué le premier juge, il ne saurait être considéré que l'expulsion de familles avec des enfants en bas âge serait en elle-même manifestement disproportionnée, alors que ladite expulsion constitue bien le seul moyen, pour l'appelante, de récupérer la jouissance de son droit de propriété sur le bien, dont elle est actuellement illicitement privée.

Par infirmation de la décision entreprise, il y a donc lieu d'ordonner l'expulsion des intimés, dans les conditions indiquées au dispositif.

La commune de [Localité 4] fait valoir qu'il y aurait lieu de supprimer le délai de deux mois de l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution, dans la mesure où les intimés ont pénétré par voie de fait dans les locaux en cause.

La voie de fait, au sens des dispositions précitées du code des procédures civiles d'exécution, suppose un acte matériel positif, de violence ou d'effraction, ayant permis l'introduction dans le bien des occupants sans droit ni titre et ne saurait résulter de la seule occupation illicite.

Or, la commune de [Localité 4] se fonde ici sur le rapport d'intervention de la police municipale du 24 décembre 2021 qui établit que les intimés se trouvaient dans les lieux à cette date, de sorte que, faute d'explication circonstanciée, ils auraient, selon l'appelante, nécessairement pénétré dans les lieux par effraction en forçant l'entrée.

L'appelante ne démontre toutefois pas une quelconque effraction, faute d'autres éléments versés aux débats.

Il y a donc lieu de dire que les intimés bénéficieront du délai de deux mois de l'article L. 412-1 et de la trêve hivernale de l'article L. 412-6, la cour n'étant pas saisie de demandes de délais complémentaires au sens des articles L. 412-2 et L. 412-3.

Les intimés seront condamnés aux dépens de première instance et d'appel.

Les circonstances de l'espèce commandent de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevables les conclusions de M. [Z] [X] et de Mme [B] [X] ;

Infirme l'ordonnance entreprise ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Constate que M. [Z] [X] et de Mme [B] [X] sont occupants sans droit ni titre de l'immeuble situé [Adresse 1] ;

Ordonne, à défaut de départ volontaire, leur expulsion des lieux, au besoin avec l'assistance d'un serrurier et de la force publique ;

Dit que les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place donneront lieu à l'application des dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

Dit que l'expulsion ne pourra avoir lieu qu'à l'expiration d'un délai de deux mois qui suit le commandement dans les conditions prévues par l'article L. 412-1 du code des procédures civiles d'exécution et qu'il sera sursis à la mesure d'expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu'au 31 mars de l'année suivante dans les conditions prévues par l'article L. 412-6 du code des procédures civiles d'exécution ;

Rejette toute autre demande ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [Z] [X] et Mme [B] [X] aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/20428
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;22.20428 ?
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