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06/07/2023 | FRANCE | N°22/20256

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 06 juillet 2023, 22/20256


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 06 JUILLET 2023



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/20256 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGZA6



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Novembre 2022 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2022036744





APPELANT



M. [T] [V]



[Adresse 1]

[Local

ité 2]



Représenté par Me Jehan-philippe JACQUEY de la SELARL GILBEY LEGAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0112







INTIMEE



S.A.S.U. SOGELEASE FRANCE, RCS de Nanterre sous le n°410 736 ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 06 JUILLET 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/20256 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGZA6

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Novembre 2022 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2022036744

APPELANT

M. [T] [V]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Jehan-philippe JACQUEY de la SELARL GILBEY LEGAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0112

INTIMEE

S.A.S.U. SOGELEASE FRANCE, RCS de Nanterre sous le n°410 736 169, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Guillaume DAUCHEL de la SELARL CABINET SEVELLEC DAUCHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : W09

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Mai 2023, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Sogelease et M. [V] ont signé un contrat de crédit-bail le 3 janvier 2019, portant sur la location d'une remorque forestière avec grue et une fagoteuse sur une durée de 60 mois et moyennant un loyer mensuel de 652,51 euros TTC.

La société Sogelease expose que M. [V] a cessé de régler les loyers.

Se prévalant de l'absence de régularisation des loyers, le 28 juin 2022, la société Sogelease a résilié le contrat et mis en demeure M. [V] de régler la somme de 17.956,82 euros à titre d'indemnité de résiliation.

Par acte du 31 août 2022, la société Sogelease France a assigné M. [V] devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, au visa de l'article 1103 du code civil et des articles 700 et 873 du code de procédure civile, aux fins de voir :

- déclarer celle-ci recevable et bien fondée,

- constater la résiliation du contrat de crédit-bail n°001588389-00 à compter du 28 juin 2022,

- condamner, en conséquence, M. [V] à lui payer la somme provisionnelle de 17.956,82 euros en principal, majorée d'un taux d'intérêt conventionnel de 1,5% par mois à compter de la mise en demeure du 28 juin 2022,

- condamner M. [V] à lui restituer sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir, le matériel suivant : une remorque forestière avec grue et fagoteuse FD 415 HQ (n° de série : TX9RF12MRHB075010),

- autoriser celle-ci à appréhender ledit matériel et quelques lieux et quelques mains qu'il se trouve, au besoin avec le recours à la force publique,

- condamner M. [V] au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

En réplique, M. [V] a soulevé l'incompétence de la juridiction, sollicité un sursis à statuer, fait valoir des contestations sérieuses et demandé la condamnation de la demanderesse à lui verser 2.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre sa condamnation aux dépens.

Par ordonnance contradictoire du 10 novembre 2022, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :

- débouté M. [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- constaté la résiliation du contrat de crédit-bail n°001588389-00 à compter du 28 juin 2022 ;

- condamné M. [V] à payer à la société Sogelease, au titre des loyers impayés, des intérêts sur loyers impayés et de la clause pénale sur les loyers échus, la somme provisionnelle de 2.938,52 euros en principal et, au titre des loyers à échoir, de l'option d'achat et de clause pénale au titre des loyers à échoir, la somme forfaitaire de 6.000 euros, sommes majorées d'un taux d'intérêt conventionnel de 1,5 % par mois à compter de la mise en demeure du 28 juin 2022 ;

- condamné M. [V] à restituer sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de 30 jours suivant la signification de la présente ordonnance à la société Sogelease, délai au-delà duquel il sera à nouveau fait droit, le matériel suivant :

une remorque forestière avec grue et fagoteuse FD 412 HQ n° de série : TX9RF12MRHB075010 ;

- autorisé la société Sogelease à appréhender ledit matériel en quelques lieux et quelques mains qu'il se trouve, au besoin avec le recours à la force publique ;

- condamné M. [V] au paiement de la somme de 200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, débouté pour le surplus ;

- condamné en outre M. [V] aux dépens de l'instance, dont ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 41,93 euros TTC dont 6,78 euros de TVA ;

- rappelé que la présente décision est de plein droit exécutoire par provision en application de l'article 514 du code de procédure civile.

Par déclaration du 02 décembre 2022, M. [V] a relevé appel de la décision.

Dans ses conclusions remises le 27 avril 2023, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, M. [V] demande à la cour, de :

- le déclarer recevable et bien fondé en son appel ;

en conséquence,

- infirmer l'ordonnance de référé prononcée le 10 novembre 2022 par le tribunal de commerce de Paris (RG 2022036744) en toutes ses dispositions ;

statuant à nouveau,

à titre principal,

- juger nulle et de nul effet la clause attributive de juridiction contenue dans le contrat de crédit-bail conclu le 03 janvier 2019 entre lui et la société Sogelease France ;

- juger que le tribunal de commerce de Paris était matériellement et territorialement incompétent ;

- juger que seul le juge des référés du tribunal judiciaire de Vesoul était et est matériellement et territorialement compétent ;

à titre subsidiaire,

- surseoir à statuer dans l'attente de la décision de la société Sogecap quant à sa prise en charge en application de son contrat d'assurance en lien avec le contrat de crédit-bail régularisé entre les parties le 03 janvier 2019 ;

à titre infiniment subsidiaire,

- juger qu'il existe des contestations sérieuses pour refuser la compétence du juge des référés ;

- déclarer irrecevables et mal fondées les demandes de la société Sogelease France et ses demandes présentées en référé ;

- débouter la société Sogelease France de l'ensemble de ses demandes ;

en tout état de cause,

- condamner la société Sogelease France à lui payer la somme de 3.500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Sogelease France aux entiers dépens de première instance et d'appel.

M. [V] soutient en substance :

- que la clause attributive de compétence n'est pas valable au regard des critères de l'article 48 du code de procédure civile ;

- qu'il y a lieu de surseoir à statuer dans l'attente d'une éventuelle prise en charge par son assureur Sogecap, dans le cadre de son contrat décès, perte totale et irréversible d'autonomie, invalidité et incapacité ;

- que sont soulevées plusieurs contestations sérieuses sur le fond du référé, tenant à la régularisation du règlement des loyers par son assureur, du pouvoir modérateur du juge en matière de clause pénale et du montant réellement dû.

Dans ses conclusions remises le 06 mars 2023, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Sogelease demande à la cour, au visa de l'article 1103 du code civil, des articles 700 et 873 du code de procédure civile, de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande en paiement de la somme de 9.018,30 euros ;

et, statuant à nouveau,

- condamner M. [V] à lui payer la somme provisionnelle de 9.018,30 euros majorée d'un taux d'intérêt conventionnel de 1,5 % par mois à compter de la mise en demeure du 28 juin 2022 ;

- confirmer pour le surplus le jugement déféré ;

y ajoutant,

- débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner M. [V] au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

La société Sogelease soutient en substance :

- que M. [V] est commerçant inscrit au registre du commerce et des sociétés, de sorte que la clause attributive de compétence demeure valable ;

- que les rapports entre l'appelant et son assureur lui sont parfaitement étrangers et ne commandent pas que soit prononcé le sursis à statuer ;

- que sa créance est certaine, liquide et exigible, le détail des sommes réclamées étant justifié.

SUR CE LA COUR

En application de l'article L. 110-1 du code de commerce, la loi répute actes de commerce notamment tout achat de biens meubles pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillés et mis en oeuvre.

L'article L. 121-1 du code de commerce dispose que sont commerçants ceux qui exercent des actes de commerce et en font leur profession habituelle.

En application de l'article L. 721-3 du code de commerce, les tribunaux de commerce connaissent :

1° Des contestations relatives aux engagements entre commerçants, entre artisans, entre établissements de crédit, entre sociétés de financement ou entre eux ;

2° De celles relatives aux sociétés commerciales ;

3° De celles relatives aux actes de commerce entre toutes personnes.

En outre, aux termes de l'article 42 du code de procédure civile, la juridiction territorialement compétente est, sauf disposition contraire, celle du lieu où demeure le défendeur.

L'article 46 du même code permet toutefois au demandeur, en matière contractuelle, de saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur, la juridiction du lieu de la livraison effective de la chose ou du lieu de l'exécution de la prestation de service.

L'article 48 du même code dispose que toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu'elle n'ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu'elle n'ait été spécifiée de façon très apparente dans l'engagement de la partie à qui elle est opposée.

En l'espèce, M. [V] fait valoir que le tribunal de commerce de Paris est doublement incompétent, à la fois matériellement et territorialement.

Il sera d'abord rappelé que le contrat de crédit-bail comporte, en article 15, une clause ainsi rédigée :

'Tout litige pouvant naître de l'interprétation et de l'exécution du présent contrat est de la compétence du tribunal de commerce de Paris. De convention expresse entre les parties, cette clause attributive de compétence s'appliquera en cas de référé'.

M. [V] expose que n'étant pas commerçant, la clause d'attribution ne lui serait pas opposable.

Il sera relevé à cet égard :

- que M. [V], à ce jour inapte, était exploitant agricole, exploitant forestier en bûcheronnage et débardage, dépendant du régime de la Mutualité sociale agricole (pièces 3 et 4) ;

- que l'agriculteur exerce une activité civile et non commerciale, en application des dispositions de l'article L. 311-1 du code rural et de la pêche ;

- que si M. [V] est inscrit au registre du commerce et des sociétés de Vesoul, cette seule circonstance ne suffit pas à établir sa qualité de commerçant, la vente de bois correspondant ici à un acte de commerce accessoire ;

- que dès lors, non commerçant, M. [V] fait à juste titre valoir que la clause attributive de compétence ne lui est pas opposable ;

- que le présent litige relève ainsi du tribunal judiciaire et non du tribunal de commerce, n'étant en cause ni un commerçant, ni un acte de commerce, s'agissant d'un contrat de crédit-bail signé par un exploitant agricole pour les besoins de son activité.

Par ailleurs, M. [V] demeure à [Localité 2], ressort du tribunal judiciaire de Vesoul.

En conséquence, le défendeur ayant son domicile à [Localité 2], et le lieu d'exécution de la prestation de service, à savoir la location d'une remorque forestière avec grue et une fagoteuse, étant au lieu de l'exploitation, le tribunal judiciaire de Vesoul est bien compétent pour connaître du litige.

La décision entreprise sera infirmée du chef de la compétence.

Aux termes de l'article 90 du code de procédure civile, lorsque le juge s'est déclaré compétent et a statué sur le fond du litige dans un même jugement rendu en premier ressort, celui-ci peut être frappé d'appel dans l'ensemble de ses dispositions ; lorsque la cour infirme du chef de la compétence, elle statue néanmoins sur le fond du litige si la cour est juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime compétente ; si elle n'est pas juridiction d'appel, la cour, en infirmant du chef de la compétence la décision attaquée, renvoie l'affaire devant la cour qui est juridiction d'appel relativement à la juridiction qui eût été compétente en première instance ; cette décision s'impose aux parties et à la cour de renvoi.

Il convient dès lors de renvoyer l'affaire devant la cour d'appel de Besançon, les autres demandes étant réservées.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a rejeté l'exception d'incompétence ;

Statuant à nouveau de ce chef,

Fait droit à l'exception d'incompétence soulevée par M. [T] [V] ;

Déclare le juge des référés du tribunal de commerce de Paris incompétent pour statuer sur le présent litige au profit du juge des référés du tribunal judiciaire de Vesoul ;

Vu l'article 90 du code de procédure civile,

Renvoie l'affaire devant la cour d'appel de Besançon, juridiction d'appel du tribunal judiciaire de Vesoul ;

Réserve les autres demandes.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/20256
Date de la décision : 06/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-06;22.20256 ?
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