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05/07/2023 | FRANCE | N°21/01462

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 05 juillet 2023, 21/01462


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 05 JUILLET 2023



(n° 2023/ , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01462 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDEJY



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Janvier 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 20/06782





APPELANT



Monsieur [E] [P]

[Adresse 3]

[Localité 2]



ReprÃ

©senté par Me François-Xavier EMMANUELLI, avocat au barreau de PARIS, toque : R105





INTIMÉE



S.A.R.L. BIO PHILIPPE AUGUSTE CHARONNE

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Frédéric SICA...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 05 JUILLET 2023

(n° 2023/ , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01462 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDEJY

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Janvier 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 20/06782

APPELANT

Monsieur [E] [P]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me François-Xavier EMMANUELLI, avocat au barreau de PARIS, toque : R105

INTIMÉE

S.A.R.L. BIO PHILIPPE AUGUSTE CHARONNE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Frédéric SICARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0082

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 mai 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Nadège BOSSARD, Conseillère, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

La société Bio Philippe Auguste Charonne (SARL) a engagé M. [E] [P], né en 1985, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er septembre 2016 en qualité d'employé polyvalent.

Par avenant en date du 20 janvier 2017, il a été promu adjoint au responsable de rayon avec effet au 1er novembre 2016.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du commerce de détail de fruits et légumes, épicerie et produits laitiers (IDCC 1505).

Par courrier en date du 6 avril 2020 adressé à la société Bio Philippe Auguste Charonne, M. [P] a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

A la date de la prise d'acte, M. [P] avait une ancienneté de 3 ans et 7 mois.

La société Bio Philippe Auguste Charonne occupait à titre habituel au moins dix salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

M. [P] a saisi le 21 septembre 2020 le conseil de prud'hommes de Paris pour voir :

«'A titre principal

- Juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. [P] doit avoir les effets d'un licenciement nul

- Dommages et intérêts pour le licenciement nul': 14 643,68 €

A titre subsidiaire

- Juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. [P] aux torts exclusifs de son employeur doit avoir les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse

- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse': 7 321,84 e

En tout état de cause

- Indemnité de licenciement légale': 1 639,79 €

- Indemnité compensatrice de préavis': 3 660,92 €

- Indemnité compensatrice de congés payés sur préavis': 366,09 €

- Dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail': 10 928,76 €

- Article 700 du code de procédure civile': 3 000,00 €

- Intérêts au taux légal

- Exécution provisoire.'»

Par jugement du 7 janvier 2021, le conseil de prud'hommes a :

-'débouté Monsieur [E] [P] de l'ensemble de ses demandes.

- condamné Monsieur [E] [P] aux dépens.

M. [P] a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 27 janvier 2021 régularisée par une seconde déclaration le 10 février 2021.

La constitution d'intimée de la société Bio Philippe Auguste Charonne a été transmise par voie électronique le 9 mars 2021.

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 15 mars 2023, M. [P] demande à la cour de :

A titre principal,

Dire et juger que M. [E] [P] est recevable et bien fondé en son appel ;

Réformer le jugement rendu le 7 janvier 2021 par le conseil de prud'hommes de Paris en toutes ses dispositions ;

En conséquence,

Juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. [E] [P] doit avoir les effets d'un licenciement nul ;

Prononcer la nullité du licenciement de M. [E] [P] ;

Condamner la société Bio Phillipe Auguste Charonne à verser à M. [E] [P] la somme de 14.643,68 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

A titre subsidiaire,

Juger que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail de M. [E] [P] aux torts exclusifs de son employeur doit avoir les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse;

Prononcer l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement de M. [E] [P] ;

Condamner la société Bio Phillipe Auguste Charonne à verser à M. [E] [P] la somme de 7.321,84 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En tout état de cause,

Condamner la société Bio Phillipe Auguste Charonne à verser à M. [E] [P] la somme de 1.639,79 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

Condamner la société Bio Phillipe Auguste Charonne à verser à M. [E] [P] la somme de 3.660,92 euros à titre d'indemnité compensatrice préavis.'

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 14 juin 2021, la société Bio Philippe Auguste Charonne demande à la cour de':

Confirmer le jugement entrepris,

Débouter M. [P] de toutes ses demandes,

Le condamner à payer à la société Bio Philippe Auguste Charonne la somme de 1800 euros en application de l'article 700 du code procédure civile.

Le condamner aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 21 mars 2023.

L'affaire a été appelée à l'audience du 23 mai 2023.

MOTIFS

Sur l'atteinte à la vie privée :

En vertu de l'article L1121-1 du code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché.

Il est établi que la gérante de la société a demandé le 30 décembre 2019 au supérieur de M. [P] de surveiller le comportement de celui-ci sur la vidéosurveillance alors qu'il avait été vu en train d'utiliser son téléphone personnel pendant son temps de travail. Il n'est cependant pas démontré que le supérieur de M. [P] y ait procédé.

Au demeurant, l'article 10 du contrat de travail stipule que 'le salarié reconnaît avoir été informé que le matériel de vidéo-surveillance clientèle est susceptible d'être utilisé à son égard'.

L'instruction donnée par la gérante au supérieur de M. [P] de contrôler son comportement avec la vidéo-surveillance ayant été donnée après qu'il ait été vu en train de téléphoner pendant son temps de travail portait néanmoins une atteinte disproportionnée à sa vie privée au regard de la faible gravité du fait constaté.

L'atteinte invoquée à sa vie privée est dès lors suffisamment caractérisée.

Sur le harcèlement moral :

Selon l'article L1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En vertu de l'article L1154-1 dans sa rédaction applicable au litige, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

M. [P] soutient avoir subi un harcèlement moral de la part de la gérante de 2019 à 2020 par dévalorisation de ses compétences

Il expose avoir été insulté de «'glando'» dans un courriel adressé par la gérante à un cadre et apparaissant sur l'écran d'ordinateur de celui-ci, la gérante ayant alors demandé à son supérieur de le surveiller spécialement et individuellement sur les caméras en suivant ses faits et gestes pour évaluer son travail.

Il soutient que la gérante envoyait des courriels à tout le personnel, faisant apparaître certains salariés comme prétendument « fainéant » à l'instar du requérant et insinuant fréquemment que la surcharge de travail des uns serait causée par le manque de motivation des autres.

M. [P] invoque également une absence d'équité dans l'attribution des congés, le non paiement de 10 heures de travail en janvier 2020 et un refus d'adapter son poste après un retour d'arrêt de travail en 2019.

Il produit un échange de courriels des 31 décembre 2019 et 8 et 9 janvier 2020 avec la gérante de la société et son supérieur N+1 aux termes duquel il indique à ses supérieurs avoir lu leur échange de courriels du 30 décembre 2019 dans lequel la gérante le qualifiait de 'glando' et demandait à son N+1 de vérifier les caméras.

Il communique également le courriel d'une salariée se plaignant de l'attitude de la gérante lorsqu'elle lui a indiqué qu'elle serait absente pour motif médical, la gérante ayant 'levé les yeux au ciel et soufflé très fort'.

M. [P] établit que celle-ci adressait régulièrement des courriels à l'ensemble de l'équipe pour critiquer l'attitude de ses salariés considérant ainsi qu'avoir les bras croisés ou les mains dans les poches revenaient à montrer ostensiblement aux clients et aux collègues qu'on ne faisait rien ou encore formulait des griefs qui pouvaient être justifiés mais étaient exprimés en des termes vulgaires.

Plusieurs salariés attestent également que le seul mode de communication de la gérante consistait dans des courriels de remontrances ou de remarques agressives.

Mme [X] atteste par ailleurs du refus de la directrice, Mme [S], d'accorder à M. [P] les congés d'été aux dates qu'il sollicitait alors même qu'il s'était concerté avec ses collègues.

Les nombreux courriels produits établissent que les relations étaient tendues entre les salariés et la direction dans un contexte de sous-effectif.

M. [P] établit également le non paiement de 10 heures de travail sur son salaire de décembre 2019 payable en janvier 2020.

Il produit un courriel reçu de la directrice de magasin lui demandant de faire un point chaque jour sur les produits en rupture.

Il n'établit pas que la gérante l'ait discrédité lorsqu'il s'est cassé la cheville en indiquant à ses collègues que ses problèmes de santé étaient fictifs, aucune des attestations n'en faisant état, et ne démontre pas le refus d'adapter son poste après un retour d'arrêt de travail en 2019.

Il démontre en revanche ne pas avoir bénéficié du maintien de salaire pendant son arrêt de travail en juillet 2019.

Pris dans leur ensemble, les faits établis permettent de faire présumer une situation de harcèlement moral.

La société Bio Philippe Auguste Charonne soutient sans le démontrer que M. [P] aurait reçu son salaire en février, mars et avril 2020.

Elle entend justifier le refus des congés de mars 2018 par une demande tardive de M. [P] et la nécessité d'une équipe au complet.

Elle fait valoir par ailleurs que M. [P] avait été rappelé à l'ordre en mars 2018 et avril 2019 dans le cadre du pouvoir de direction de l'employeur.

Pour autant, la société Bio Philippe Auguste Charonne n'apporte pas de justification objective au caractère vulgaire des propos tenus à l'égard de son salarié ni à l'atteinte disproportionnée à sa vie privée ni au défaut de maintien de salaire ni au non paiement de dix heures de travail en décembre 2019.

La cour a dès lors la conviction que M. [P] a subi une situation de harcèlement moral.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur la prise d'acte :

La prise d'acte de la rupture produit les effets d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse lorsque les manquements de l'employeur invoqués par le salarié sont établis et suffisamment graves pour justifier la rupture. A défaut, elle produit les effets d'une démission.

Le salarié peut invoquer des motifs autres que ceux figurant dans la lettre de la prise d'acte laquelle ne délimite pas le litige.

Le harcèlement moral subi par le salarié, imputable à l'employeur, caractérise une faute grave de ce dernier qui justifiait la prise d'acte de la rupture. Celle-ci produira en conséquence les effets d'un licenciement nul.

Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur l'indemnité légale de licenciement :

En vertu de l'article L1234-9 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

L'article R1234-2 prévoit que l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :

1° Un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à dix ans ;

2° Un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de dix ans.

Au regard de l'ancienneté de M. [P] de 3 ans et 7 mois, il lui est alloué dans la limite de sa demande la somme de 1 639,79 euros.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis:

Selon l'article L1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit :

1° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus inférieure à six mois, à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention ou l'accord collectif de travail ou, à défaut, par les usages pratiqués dans la localité et la profession ;

2° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus comprise entre six mois et moins de deux ans, à un préavis d'un mois ;

3° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, à un préavis de deux mois.

Toutefois, les dispositions des 2° et 3° ne sont applicables que si la loi, la convention ou l'accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages ne prévoient pas un préavis ou une condition d'ancienneté de services plus favorable pour le salarié.

Les dispositions conventionnelles de l'article 3.7. de la convention collective prévoient également un préavis de deux mois pour les salariés de niveau I, II, III, IV et V ayant plus de deux ans d'ancienneté.

Au regard de l'ancienneté de M. [P] de 3 ans et 7 mois, il lui est alloué une indemnité compensatrice de préavis de 3 660,92 euros et 366,09 euros de congés payés y afférents.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur l'indemnité pour licenciement nul :

En vertu de l'article L1235-3-1 du code du travail, l'article L. 1235-3 n'est pas applicable lorsque le juge constate que le licenciement est entaché d'une des nullités prévues au deuxième alinéa du présent article. Dans ce cas, lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de l'exécution de son contrat de travail ou que sa réintégration est impossible, le juge lui octroie une indemnité, à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Les nullités mentionnées au premier alinéa sont celles qui sont afférentes à :

1° La violation d'une liberté fondamentale ;

2° Des faits de harcèlement moral ou sexuel dans les conditions mentionnées aux articles L. 1152-3 et L. 1153-4 ;

3° Un licenciement discriminatoire dans les conditions mentionnées aux articles L. 1132-4 et L. 1134-4 ;

4° Un licenciement consécutif à une action en justice en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans les conditions mentionnées à l'article L. 1144-3, ou à une dénonciation de crimes et délits ;

5° Un licenciement d'un salarié protégé mentionné aux articles L. 2411-1 et L. 2412-1 en raison de l'exercice de son mandat ;

6° Un licenciement d'un salarié en méconnaissance des protections mentionnées aux articles L. 1225-71 et L. 1226-13.

L'indemnité est due sans préjudice du paiement du salaire, lorsqu'il est dû en application des dispositions de l'article L. 1225-71 et du statut protecteur dont bénéficient certains salariés en application du chapitre Ier du Titre Ier du livre IV de la deuxième partie du code du travail, qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité et, le cas échéant, sans préjudice de l'indemnité de licenciement légale, conventionnelle ou contractuelle.

Au regard de l'ancienneté de M. [P] de 3 années, de son âge et de sa qualification, le préjudice par lui subi du fait de la rupture de contrat de travail imputable à l'employeur et produisant les effets d'un licenciement nul sera réparé par l'allocation de la somme de 14 000 euros.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur les dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

Chacune des parties, employeur et salarié, est tenu d'exécuter le contrat de travail de manière loyale et de bonne foi.

M. [P] invoque une mauvaise organisation des congés payés et des jours de réduction du temps de travail, des erreurs de salaire, des relations difficiles avec les ressources humaines à la suite de son arrêt de travail et une mauvaise organisation générale du travail.

Le salarié ne démontre pas de volonté ou de refus systématique de ses congés et de prise en compte de ses contraintes familiales même si ses demandes n'ont pas toutes été satisfaites.

Il ne démontre pas que son employeur l'ait discrédité pendant son arrêt de travail.

Par ailleurs, si l'employeur a versé le salaire d'août le 10 septembre 2019 alors qu'habituellement, il était versé en fin de mois, ce délai demeure conforme aux obligations contractuelles de l'employeur, le contrat de travail stipulant que le salaire est payé dans les dix jours suivant la fin du mois civil.

Il n'est pas contesté qu'un trop versé en mars 2019 a donné lieu à un remboursement par prélèvement de 10% du salaire au cours des mois suivants sans qu'une faute de l'employeur soit toutefois caractérisée.

En revanche, il est établi que M. [P] n'a pas bénéficié du maintien de salaire pendant son arrêt de travail à compter de février 2020.

Le fait pour l'employeur de s'adresser à son salarié de manière irrespectueuse et de ne pas payer le salaire dû à la date d'exigibilité constituent des manquements fautifs de l'employeur caractérisant une exécution déloyale du contrat de travail qui justifie l'allocation de dommages-intérêts à hauteur de 2 000 euros.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur les intérêts :

Conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil, les créances salariales sont assorties d'intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes soit le 29 septembre 2020 pour celles qui étaient exigibles au moment de sa saisine.

En vertu de l'article 1231-7 du code civil, les dommages et intérêts alloués sont assortis d'intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La société Bio Philippe Auguste Charonne est condamnée aux dépens et au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Juge que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement nul,

Condamne la société Bio Philippe Auguste Charonne à payer à M. [P] les sommes de :

- 14 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul,

- 1 639,79 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 3 660,92 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 366,09 euros de congés payés y afférents,

- 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

Dit que les créances de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2020, date de convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation et les créances de nature indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt,

Condamne la société Bio Philippe Auguste Charonne à payer à M. [P] les sommes de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Bio Philippe Auguste Charonne aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 21/01462
Date de la décision : 05/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-05;21.01462 ?
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