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29/06/2023 | FRANCE | N°21/05280

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 29 juin 2023, 21/05280


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 29 JUIN 2023



(n° 2023/ , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/05280 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD2ZJ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Mai 2021 -Conseil de Prud'hommes de BOBIGNY - RG n° 19/00698





APPELANTE



E.P.I.C. AGENCE NATIONALE POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE S DES ADULTES prise en la personne de ses rep

résentants légaux domiciliés

en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Représentée par Me Audrey HINOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477



INTIMEE...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 29 JUIN 2023

(n° 2023/ , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/05280 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD2ZJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Mai 2021 -Conseil de Prud'hommes de BOBIGNY - RG n° 19/00698

APPELANTE

E.P.I.C. AGENCE NATIONALE POUR LA FORMATION PROFESSIONNELLE S DES ADULTES prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés

en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Audrey HINOUX, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

INTIMEE

Madame [H] [E] épouse [M]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par M. Jean-Pierre GACHE (Délégué syndical ouvrier)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 avril 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre, Présidente de formation,

Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre,

Madame Séverine MOUSSY, Conseillère

Greffier : Madame Philippine QUIL, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, prorogé à ce jour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Catherine BRUNET, Présidente et par Madame Philippine QUIL, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

L'établissement public industriel et commercial Agence Nationale pour la Formation Professionnelle des Adultes (ci-après l'AFPA) a publié le 31 juillet 2015 une annonce pour un emploi de pilote rédacteur, statut cadre en contrat de travail à durée indéterminée, moyennant une rémunération annuelle de 38 000 euros.

Madame [H] [E] épouse [M] a déposé une candidature pour ce poste.

A la suite d'un processus de sélection et par un courriel du 9 décembre 2015, l'AFPA a indiqué à Mme [E] : ' (...) nous avons le plaisir de vous accueillir dès le 4 janvier 2016 sur la fonction de Pilote-rédacteur sur la Plate-forme régionale d'appel d'offres. Nous préparons votre contrat de travail pour cette date. Nous souhaitons vous intégrer au mieux, et nous vous proposerons un parcours d'intégration à réaliser courant janvier. Cependant si vous êtes disponible les 16 et 17 décembre, je vous propose de prendre contact par mail (adresse en copie) avec [N] [V] qui devrait pouvoir ces deux jours-là commencer à vous présenter l'équipe et quelques modalités de fonctionnemenent '.

Par courriel du 10 décembre 2015, Mme [E] a confirmé sa motivation à occuper ce poste et sa disponibilité à partir du 4 janvier 2016 pour le poste de rédacteur. Elle a ajouté : ' Vous serait-il possible de me transmettre une proposition d'embauche dès que possible (...) '. Elle a réitéré sa motivation par un courriel du 14 décembre 2015.

Elle a passé les journées des 16 et 17 décembre 2015 au sein de l'AFPA.

Par courriel du 21 décembre 2015, l'AFPA lui a indiqué : ' (...) En réalité, nous avons de sérieux doutes sur votre mobilisation pour investir le champ entièrement nouveau pour vous de la formation professionnelle. Vous nous êtes apparu très, trop ', éloignée des spécificités et de la culture de ce domaine d'activité pour être en mesure d'assurer les missions de pilote rédacteur au sein de la plate-forme régionale d'appel d'offre. Il ne nous semble pas judicieux, ni pour vous, ni pour l' (AFPA) de commencer une collaboration dont on pense d'ores et déjà qu'elle sera inopérante. Je vous invite à un entretien le 4 janvier 2016 à 11h dans mon bureau (2409) pour vous expliciter les raisons pour lesquelles nous ne retiendrons pas, finalement, votre candidature '.

Lors de cet entretien, il lui a été indiqué qu'elle ne serait pas recrutée au sein de l'AFPA.

Considérant que l'AFPA avait formulé une promesse d'embauche, Mme [E] épouse [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny qui, par jugement du 7 mai 2021 rendu en formation de départage auquel la cour renvoie pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties a :

- jugé qu'un contrat de travail la liant à l'AFPA a été conclu le 9 décembre 2015 avec prise d'effet au 4 janvier 2016 ;

- fixé son salaire de référence à la somme annuelle brute de 38 000 euros sur treize mois, soit la somme mensuelle brute de 2 923,08 euros ;

- débouté Mme [E] de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents ;

- condamné l'AFPA à lui payer les sommes suivantes :

* 17 538,48 euros brut à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 2 923,08 euros brut pour avoir suivi une procédure de licenciement irrégulière ;

- débouté Mme [E] de sa demande de dommages et intérêts pour les journées des 16 et 17 décembre 2015 ;

- ordonné la remise des documents de fin de contrat conformes au jugement au plus tard un mois après la signification du jugement ;

- rappelé que les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d'indemnité de licenciement sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation tandis que les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris, conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil ;

- fait droit à la demande de capitalisation des intérêts échus en application de l'article 1343-2 du code civil ;

- condamné l'AFPA au paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné l'AFPA aux dépens ;

- ordonné l'exécution provisoire.

L'AFPA a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 14 juin 2021.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 29 mars 2023 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civile, l'AFPA demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel ;

- déclarer Mme [E] mal fondée en son appel incident et l'en débouter ;

En conséquence,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

* jugé qu'un contrat de travail la liant à Mme [E] a été conclu le 9 décembre 2015 avec prise d'effet au 4 janvier 2016, contrat rompu le 4 janvier 2016,

* fixé le salaire de référence de Mme [E] à la somme annuelle brute de 38 000 euros sur treize mois, soit la somme mensuelle brute de 2 923,08 euros,

* condamné l'AFPA à payer à Mme [E] les sommes de 17 538,48 euros brut à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 2 923,08 euros brut pour avoir suivi une procédure de licenciement irrégulière,

* ordonné la remise des documents de fin de contrat conformes au jugement au plus tard un mois après la signification du jugement,

* rappelé que les créances salariales ainsi que la somme allouée à titre d'indemnité de licenciement sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jour de la présentation à l'employeur de la lettre le convoquant devant le bureau de conciliation tandis que les créances indemnitaires sont productives d'intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris, conformément aux dispositions de l'article 1231-7 du code civil,

* fait droit à la demande de capitalisation des intérêts échus en application de l'article 1343-2 du code civil,

* condamnée l'AFPA au paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [E] de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents et de sa demande de dommages et intérêts pour les journées des 16 et 17 décembre 2015 ;

En conséquence et statuant à nouveau,

- juger que la proposition d'emploi du 9 décembre 2015 ne constitue ni une promesse d'embauche ni une offre de contrat de travail et que les journées des 16 et 17 décembre 2015 ne se sont accompagnées d'aucune prestation de travail ;

- débouter en conséquence Mme [E] de l'intégralité de ses demandes ;

- condamner Mme [E] aux entiers dépens ;

À titre subsidiaire,

- juger que la proposition d'emploi du 9 décembre 2015, si elle est susceptible de constituer une offre de contrat de travail, a été valablement rétractée le 21 décembre 2015;

- débouter en conséquence Mme [E] de l'intégralité de ses demandes ;

À titre infiniment subsidiaire,

- constater que Mme [E] ne justifie strictement aucun préjudice et cantonner en conséquence l'indemnisation de la rétractation à 1 euro symbolique.

Par conclusions adressées au greffe par lettre recommandée avec accusé de réception le 9 février 2022 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civile, Mme [E] demande à la cour de :

- déclarer recevables les conclusions et les pièces communiquées le 30 avril 2019 par M. [G] [F], défenseur syndical CGT, dans son intérêt ;

- confirmer le jugement, sur les points suivants :

* juge qu'un contrat de travail la liant à l'AFPA a été conclu le 9 décembre 2015 avec une prise d'effet au 4 janvier 2016, contrat rompu le 4 janvier 2021,

* fixe son salaire de référence à la somme de 38 000 euros sur treize mois, soit la somme mensuelle brute de 2 923,08 euros,

* condamne l'EPIC à lui verser les sommes suivantes :

. 17 538,48 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 2 923,08 euros à titre de procédure de licenciement irrégulière,

* ordonne la remise des documents de fin de contrat conformes au jugement,

* condamne l'AFPA au paiement de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

' En revanche, en s'appuyant par erreur sur l'inapplicabilité de la convention collective nationale des organismes de formation (hors domaine d'application) pour rejeter la demande d'indemnité compensatrice de préavis, alors que c'est à partir de l'accord d'entreprise même de l'AFPA qui prévoit un préavis sans condition d'ancienneté,' il est demandé :

- d'infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis et des congés afférents ;

- ainsi, condamner l'AFPA à lui verser les sommes suivantes :

* 8 769,24 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 876,92 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

A titre reconventionnel,

- condamner l'AFPA aux entiers dépens et frais éventuels d'exécution.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 avril 2023.

MOTIVATION

Sur l'existence d'un contrat de travail

L'AFPA soutient qu'il n'a jamais existé de contrat de travail entre elle et Mme [E] et que leurs échanges ne caractérisent ni une promesse d'embauche ni une offre de contrat de travail valant contrat de travail. Elle fait valoir que le courriel du 9 décembre 2015 adressé par le directeur des ressources humaines ne comporte pas les éléments caractéristiques du contrat de travail car la rémunération n'est pas mentionnée. Elle ajoute que y compris lors de la procédure, le montant de la rémunération était en discussion. Elle en déduit qu'elle pouvait ne pas donner suite à la proposition d'emploi.

Mme [E] fait valoir en premier lieu que les relations entre les parties sont antérieures au 1er octobre 2016 de sorte que la loi 2018-287 du 20 avril 2018 ne serait pas applicable au litige. Elle soutient que le courriel du 9 décembre 2015 s'analyse en une promesse d'embauche valant contrat de travail dès lors qu'elle l'a acceptée en ce qu'il indique la date de prise de fonction et les conditions de travail alors que l'annonce de l'APEC précisait la qualification, la rémunération et le lieu de travail.

Aux termes de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ratifiée par la loi 2018-287 du 20 avril 2018 visée par Mme [E], les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. Selon l'article L. 1221-1 du code du travail, le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun. Il peut être établi selon les formes que les parties contractantes décident d'adopter.

Il résulte de ces textes que la promesse unilatérale de contrat de travail est le contrat par lequel une partie, le promettant, accorde à l'autre, le bénéficiaire, le droit d'opter pour la conclusion d'un contrat de travail, dont l'emploi, la rémunération et la date d'entrée en fonction sont déterminés, et pour la formation duquel ne manque que le consentement du bénéficiaire.

En l'espèce, il ne peut être retenu que la rémunération était fixée par l'offre d'emploi diffusée, le salaire étant un point central de négociation entre la société qui recrute et le candidat à un emploi en prenant en compte notamment les qualifications de ce dernier et son expérience. Aucun élément produit aux débats ne permet de retenir que les parties avaient convenu d'une rémunération. Le courriel adressé le 9 décembre 2015 à Mme [E] et analysé par elle comme une promesse d'embauche, ne précise pas non plus la rémunération de sorte que cette proposition ne vaut pas contrat de travail. Au surplus, comme le souligne l'AFPA, elle ne constitue pas non plus une offre de contrat de travail, la précision de la rémunération étant également exigée.

En conséquence, la cour retient que Mme [E] et l'AFPA n'étaient pas liées par un contrat de travail.

Mme [E] sera déboutée de l'ensemble de ses demandes et la décision des premiers juges sera infirmée sauf en ce qu'ils l'ont déboutée de ses demandes au titre d'une indemnité compensatrice de préavis et d'une indemnité compensatrice de congés payés afférents.

Sur les dépens

Partie perdante, Mme [E] sera condamnée au paiement des dépens, le jugement étant infirmé en ce qu'il a mis les dépens à la charge de l'AFPA.

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement sauf en ce qu'il a débouté Madame [H] [E] épouse [M] de ses demandes au titre d'une indemnité compensatrice de préavis et d'une indemnité compensatrice de congés payés,

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

DÉBOUTE Madame [H] [E] épouse [M] de l'ensemble de ses demandes,

CONDAMNE Madame [H] [E] épouse [M] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/05280
Date de la décision : 29/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-29;21.05280 ?
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