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22/06/2023 | FRANCE | N°21/01627

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 5, 22 juin 2023, 21/01627


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 5



ARRET DU 22 JUIN 2023



(n° 127 , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 21/01627 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CC7SV



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Septembre 2020 - Tribunal de Commerce de MEAUX - RG n° 2019003738





APPELANTE



S.A.S. VICAT SERVICES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en

cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de GRENOBLE sous le numéro 539 397 711

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée par Maître Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT CABINET...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 5

ARRET DU 22 JUIN 2023

(n° 127 , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 21/01627 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CC7SV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Septembre 2020 - Tribunal de Commerce de MEAUX - RG n° 2019003738

APPELANTE

S.A.S. VICAT SERVICES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

immatriculée au RCS de GRENOBLE sous le numéro 539 397 711

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Maître Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT CABINET D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050, avocat postulant

Assistée de Maître Sophie DELON de IDEOJ AVOCATS, avocat au barreau de VIENNE, avocat plaidant

INTIMEE

S.A.S. SOGEA ILE DE FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

immatriculée au RCS de MEAUX sous le numéro 503 880 999

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée et assistée de Maître Jean-pierre CLAUDON de la SCP CLAUDON ET ASSOCIES substitué par Maître Laurence Biacabe de la SCP CLAUDON ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, toque : P0231

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marie-Annick Prigent, présidente de la chambre 5.5

Madame Nathalie Renard, présidente de chambre

Madame Christine Soudry, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Nathalie RENARD dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Monsieur Maxime Martinez

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Annick Prigent, présidente de la chambre 5.5 et par Monsieur Martinez, greffier, auquel la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Le 3 octobre 2018, la société Vicat Services (la société Vicat) a loué à la société Sogea Île-de-France (la société Sogea) une "Trancheuse Dalen Ds 250" avec chauffeur.

La société Vicat a émis une facture d'un montant de 35 662 euros HT, soit 42 794,40 euros TTC, que la société Sogea a contestée.

Par lettre recommandée, la société Vicat a mis en demeure la société Sogea de régler sa facture.

Par acte du premier mars 2019, la société Vicat a signifié à la société Sogea une ordonnance du 15 février 2019 du président du tribunal de commerce de Meaux enjoignant de payer la somme de 42 794,40 euros en principal avec intérêts, outre les frais et dépens.

La société Sogea a fait opposition à cette ordonnance.

Par jugement du 8 septembre 2020, le tribunal de commerce de Meaux a :

- reçu la société Sogea en son opposition, au fond l'a dite bien fondée ;

- reçu la société Vicat en sa demande, au fond l'a dite mal fondée, et l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamné la société Vicat à payer à la société Sogea la somme de 2 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- dit que tous les dépens resteraient à la charge de la société Vicat.

Par déclaration du 21 janvier 2021, la société Vicat a interjeté appel du jugement en ce qu'il :

- l'a dite mal fondée ;

- l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, et notamment :

* celle de voir condamner la société Sogea à lui régler la somme de 15 519,40 euros TTC, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 12 janvier 2019 ;

* celle de voir condamner la société Sogea à lui régler la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

* celle de voir condamner la société Sogea aux entiers dépens ;

- l'a condamnée à payer à la société Sogea la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- l'a condamnée aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions notifiées le 28 octobre 2022, la société Vicat demande, au visa des articles 1103, 1104, 1217 et suivants du code civil, ainsi que des articles 860-1 et 472 du code de procédure civile, de :

- juger le jugement nul et non avenu ;

Subsidiairement,

- annuler les condamnations prononcées contre elle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

- condamner la société Sogea à lui payer la somme principale de 15 519,40 euros TTC pour solde de sa facture du 6 novembre 2019 outre intérêts légaux à compter du 17 janvier 2019, date de la mise en demeure ;

- condamner la société Sogea à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance ;

- condamner la société Sogea à lui payer la somme de 9 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'appel ;

- condamner la société Sogea aux dépens de première instance et d'appel ;

En tout état de cause,

- réformer le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

- débouter la société Sogea de ses contestations au titre du nombre de jours travaillés/cadence garantie non-atteinte ;

- débouter la société Sogea de ses contestations au titre de la fourniture de carburant ;

- débouter la société Sogea de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles, fins et conclusions ;

En conséquence,

- condamner la société Sogea à lui payer la somme principale de 15 519,40 euros TTC pour solde de sa facture du 6 novembre 2019 outre intérêts légaux à compter du 17 janvier 2019, date de la mise en demeure ;

- condamner la société Sogea à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance ;

- condamner la société Sogea à lui payer la somme de 9 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'appel ;

- condamner la société Sogea aux dépens de première instance et d'appel.

Par ses dernières conclusions notifiées le 3 mars 2023, la société Sogea demande de :

- confirmer le jugement en toutes ces dispositions et débouter la société Vicat de toutes ses demandes, fins, et conclusions ;

- condamner la société Vicat à lui régler une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Vicat à tous les dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 9 mars 2023.

A l'audience des débats du 23 mars 2023, les parties ont été autorisées à produire des notes en délibéré sur la demande de nullité totale du jugement attaqué.

Par note en délibéré reçue le 27 mars 2023, la société Vicat a déclaré confirmer le retrait de sa demande en nullité totale du jugement et maintenir sa demande de nullité partielle du jugement pour avoir statué ultra petita sur la demande de l'article 700 du code de procédure civile.

Par note en délibéré reçue le 30 mars 2023, la société Sogea a déclaré acquiescer à cette renonciation.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la nullité totale du jugement :

La société Vicat a abandonné cette demande, sur laquelle il ne sera dès lors pas statué.

Sur la nullité partielle du jugement :

Selon l'article 4 du code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

La société Vicat sollicite la nullité partielle du jugement, soutenant que le tribunal a statué ultra petita sur la demande de la société Sogea au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a alloué à la société Sogea une somme de 2 000 euros sur ce fondement, supérieure à celle réclamée de 1 500 euros.

Il a statué ultra petita.

Cette irrégularité relève des dispositions des articles 463 et 464 du code de procédure civile, et non pas d'une nullité du jugement.

Par l'effet dévolutif de l'appel, il sera statué sur les demandes au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.

Sur la facture :

En application de l'article 1353, du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Selon les articles 6 et 9 du code de procédure civile, les parties ont la charge d'alléguer les faits propres à fonder leurs prétentions et il leur incombe de prouver conformément à la loi les faits nécessaires à leur succès.

Selon un "bon de commande de location de matériel avec chauffeur", conclu le 3 octobre 2018, la société Vicat a loué à la société Sogea une "Trancheuse Dalen Ds 250".

Il est stipulé une date de mise à disposition "à partir" du 8 octobre 2018, une durée prévisible "en fonction du planning vu sur site pour 3 semaines selon avancement", un prix unitaire de facturation de 1 600 euros HT par jour, avec une "cadence minimum garantie de 1000 ml/j hors aléa indépendant de Vicat Services".

Il est précisé qu'en "cas d'arrêt de la machine pour des raisons imputables à Vicat Services, le prix de la location sera diminué au prorata du temps d'arrêt sur 8 H", et qu'un "bonus de 100 euros/j sera appliqué par 100 ml supplémentaire par rapport au minimum garanti avec un plafond de 300 ml".

Le coût du transport est stipulé à la charge du locataire, à concurrence de 3 200 euros HT le transfert retour.

En ce qui concerne les "consommables", il est prévu un "pic de remplacement" de 11 euros HT.

La clause VII, intitulée "durée de location", stipule :

"La location commence à compter du moment où la totalité du matériel loué est opérationnel sur le site d'utilisation. Elle prend fin au moment où le matériel est remis à disposition du loueur à l'endroit convenu.

La durée prévisible de location indiquée sur la commande est donnée à titre indicatif. Elle ne revêt pas de caractère contractuel, et ne saurait donner lieu à indemnité ou révision de prix, en cas de modification.

Le matériel loué peut être utilisé à discrétion pendant la durée journalière du chantier, qui, à défaut de prescriptions particulières, est fixé à huit heures. Un bon de location est établi chaque jour par le loueur, est soumis à la signature du locataire en fin de journée. Ce bon doit préciser... le nombre d'heures de location effectives de la journée.

Un exemplaire en est remis au responsable du chantier.

En cas de panne, enlisement, ou tout autre motif, y compris cas de force majeure, entraînant l'arrêt du matériel, autre qu'une mise en attente clairement exprimée par le responsable du chantier, la location est suspendue pendant l'immobilisation.

..."

Il est précisé à la clause VIII, "entretien du matériel", que "l'approvisionnement en carburant et en lubrifiant ainsi que le remplacement de pièces d'usure ou d'outils d'attaque au sol ... sont l'affaire du loueur".

La clause XII, "prix", stipule que "le prix unitaire journalier ou horaire de facturation défini par les conditions particulières est établi sur la base d'une utilisation prévisionnelle du matériel pendant la durée journalière du chantier du locataire, qui, à défaut de prescriptions particulières, est fixé à huit heures" et précise que le prix comprend, sans que "cette liste soit limitative, les comptes de lubrifiant, d'entretien, d'assurance bris de machine, de taxe professionnelle."

L'article 1188 du code civil énonce que "le contrat s'interprète d'après la commune intention des parties plutôt qu'en s'arrêtant au sens littéral de ses termes."

L'article suivant précise que "toutes les clauses d'un contrat s'interprètent les unes par rapport aux autres, en donnant à chacune le sens qui respecte la cohérence de l'acte tout entier."

L'article 1192 du même code dispose qu'on "ne peut interpréter les clauses claires et précises à peine de dénaturation."

En l'espèce, le bon de commande ne prévoit aucune prescription particulière relative à l'utilisation prévisionnelle du matériel ou à la durée journalière du chantier.

Il convient alors de retenir que le prix de location est fixé selon une durée journalière de huit heures.

Si une cadence minimum est garantie par la société Vicat, il n'est pas prévu un prix proportionnel à la cadence effective et le prix de location ne peut être diminué qu'au prorata d'un temps d'arrêt imputable à la société Vicat.

La société Sogea n'argue pas d'un cas d'arrêt d'utilisation de la machine imputable à la société Vicat, ou d'une baisse de la cadence imputable à la société Vicat en-deçà de la cadence garantie, hormis la panne ayant fait l'objet d'une déduction par la société Vicat.

Elle n'est dès lors pas fondée à solliciter une réfaction du prix unitaire journalier de facturation de 1 600 euros HT par jour au prorata de la durée effective journalière d'utilisation de la trancheuse ou des mètres linéaires réalisés.

Le nombre de 19,50 jours de location n'est pas contesté, ni le montant de 1 122 euros HT de "pic de remplacement", ni celui de 3 200 euros HT de transport aller-retour.

En revanche, la facture émise par la société Vicat inclut une somme de 140 euros HT au titre de "gaz-oil", alors que les frais d'approvisionnement en carburant sont à la charge de la société Vicat, qui n'est pas fondée à invoquer les stipulations contraires de son offre de prix du 27 septembre 2018, en ce qu'elles mettent le gasoil à la charge du client, qui n'ont pas été acceptées par la société Sogea.

La société Sagea sollicite en outre la déduction d'une somme de 2 392 euros HT correspondant à 2 750 litres de fioul fournie par elle-même.

Si la société Vicat conteste le principe de prise en charge des frais de carburant, elle ne discute ni la quantité de fuel utilisée, ni le montant de 2 392 euros HT.

En conséquence, la société Sogea est redevable du paiement de la facture du 6 novembre 2018 pour un montant de 35'522 euros HT, comprenant les jours de location, le pic de remplacement et le transport aller-retour, dont il convient de déduire la dépense de fuel de 2 392 euros HT, soit 33 130 euros HT, soit 39 756 euros TTC

Ayant versé une somme de 27'276 euros, la société Sogea sera condamnée à payer à la société Vicat la somme de 12 480 euros au titre du solde de la facture du 6 novembre 2018, avec intérêts au taux légal à compter du 21 janvier 2019, date de réception de la mise en demeure.

Le jugement sera infirmé.

Sur les autres demandes :

Le jugement, qui a condamné la société Vicat à une indemnité au titre des frais irrépétibles et aux dépens, sera infirmé.

La société Sogea, qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

Il apparaît équitable de la condamner à payer à la société Vicat la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

constate que le tribunal a statué ultra petita sur la condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

dit n'y avoir lieu au prononcé d'une nullité partielle du jugement ;

infirme le jugement en toutes ses dispositions ;

statuant à nouveau, et y ajoutant,

condamne la société Sogea Île-de-France à payer à la société Vicat Services la somme de 12 480 euros au titre du solde de la facture du 6 novembre 2018, avec intérêts au taux légal à compter du 21 janvier 2019 ;

condamne la société Sogea Île-de-France à payer à la société Vicat Services la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamne la société Sogea Île-de-France aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/01627
Date de la décision : 22/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-22;21.01627 ?
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