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22/06/2023 | FRANCE | N°21/00251

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 9 - b, 22 juin 2023, 21/00251


République française

Au nom du Peuple français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - B



ARRET DU 22 Juin 2023

(n°135 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 21/00251 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEKIA



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Juin 2021 par le tribunal de proximité de Juvisy-sur-Orge RG n° 11-19-002124



APPELANTE



Madame [Z], [J], [M] [H] née le 03 avril 1969 à [Localité 32] (94)

Chez M. et Mme [W]

[Adres

se 3]

[Localité 14]

Comparante en personne



INTIMES



Madame [D] [K]

[Adresse 9]

[Localité 31]

Non comparante



Monsieur [U] [H]

[Adresse 13]

[Localité 21]

no...

République française

Au nom du Peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 9 - B

ARRET DU 22 Juin 2023

(n°135 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 21/00251 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEKIA

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Juin 2021 par le tribunal de proximité de Juvisy-sur-Orge RG n° 11-19-002124

APPELANTE

Madame [Z], [J], [M] [H] née le 03 avril 1969 à [Localité 32] (94)

Chez M. et Mme [W]

[Adresse 3]

[Localité 14]

Comparante en personne

INTIMES

Madame [D] [K]

[Adresse 9]

[Localité 31]

Non comparante

Monsieur [U] [H]

[Adresse 13]

[Localité 21]

non comparant

Monsieur [F] [P] (créancier-bailleur)

[Adresse 6]

[Localité 10]

non comparant

[28]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 20]

Non comparante

[30]

[Adresse 12]

[Adresse 12]

[Localité 18]

Non comparante

SIP [Localité 16]

[Adresse 1]

[Localité 16]

Non comparante

[25]

Service Surendettement

[Adresse 5]

[Localité 11]

Non comparante

[23]

Service [22] -Recouvrement

[Adresse 2]

[Localité 19]

Non comparante

GIE [27]

Service Surendettement

[Adresse 5]

[Localité 11]

Non comparante

SIP [Localité 17]

[Adresse 7]

[Localité 17]

Non comparante

CLINIQUE DU [29]

[Adresse 8]

[Localité 15]

Non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mai 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Fabienne TROUILLER, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, présidente

Mme Fabienne TROUILLER, conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, conseillère

Greffière : Mme Alexandra AUBERT, lors des débats et lors du prononcé

ARRET :

- Réputé contradictoire

- Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- Signé par Madame Muriel DURAND, présidente et par Madame Alexandra AUBERT, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 17 mai 2019, Mme [Z] [H] a saisi la commission de surendettement des particuliers de l'Essonne qui a, le 30 juillet 2019, déclaré sa demande recevable.

Le 19 novembre 2019, la commission a imposé le rééchelonnement des créances sur une durée de 84 mois, au taux de 0%, moyennant des mensualités de 83,30 euros affectées au remboursement de la créance de Mme [K] avec un effacement partiel pour toutes les autres dettes à l'issue de cette période.

M. [F] [P], créancier d'une dette locative effacée par ce plan, a contesté les mesures recommandées en faisant valoir que la débitrice était de mauvaise foi et donc irrecevable à la procédure de surendettement.

Par jugement réputé contradictoire en date du 24 juin 2021, le tribunal de proximité de Juvisy-sur-Orge a dit le recours recevable en la forme mais a déchu Mme [H] du bénéfice de la procédure de surendettement.

La juridiction a estimé que la débitrice avait souscrit un emprunt de 2 000 euros pour l'achat d'un véhicule et avait procédé à des versements pour apurer la dette sans que ce prêt n'ait été autorisé par le juge ni par la commission. Elle a considéré que la souscription de ce prêt avait privilégié le paiement d'un créancier hors plan, en violation des autres créanciers et notamment de M. [P] dont la créance s'élevait à la somme de 9 537,91 euros au 13 février 2018. Elle en a déduit que la débitrice devait être déchue du bénéfice de la procédure de surendettement.

Le jugement a été notifié à la débitrice le 30 juin 2021.

Par déclaration adressée le 13 juillet 2021 au greffe de la cour d'appel de Paris, Mme [H] a interjeté appel du jugement en demandant un échelonnement de ses dettes sur plusieurs années et en précisant que le prêt pour l'achat d'un véhicule avait été contracté dans l'ignorance, et qu'il lui était indispensable d'avoir un mode de transport pour se rendre à son travail. Elle précise avoir eu des problèmes de santé expliquant son impossibilité à régler ses loyers.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 9 mai 2023.

À cette audience, Mme [H] a comparu en personne. Elle a réclamé l'infirmation du jugement et le renvoi de son dossier à la commission de surendettement.

Elle affirme qu'elle est de bonne foi, qu'elle exerce désormais en tant qu'aide-soignante à temps plein et qu'elle a besoin d'un véhicule pour aller travailler.

Elle fait valoir que son ancien véhicule a été détruit, qu'elle l'a revendu 700 euros pour racheter un véhicule au même prix et qu'elle a été en litige avec son bailleur, estimant que son logement était insalubre, comme en atteste le constat d'huissier dressé le 5 janvier 2018. Elle ajoute qu'elle a fait l'objet d'une expulsion et qu'elle est actuellement hébergée chez un couple d'amis, mais que c'est une solution temporaire.

Elle précise qu'elle était avant à mi-temps thérapeutique après avoir bénéficié d'un congé longue maladie, que ses charges s'élèvent à 600 euros et qu'elle perçoit désormais environ 2 500 euros, soit plus qu'en 2019. Elle assure qu'elle veut rembourser ses créanciers.

Aucun créancier n'a comparu.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient d'indiquer à titre liminaire que l'appel en matière de procédure de surendettement des particuliers, est formé, instruit et jugé selon les règles de la procédure sans représentation obligatoire figurant aux articles 931 à 949 du code de procédure civile. La procédure applicable devant la cour d'appel est donc la procédure orale de droit commun dans laquelle la prise en considération des écrits d'une partie par la cour est subordonnée à l'indication orale à l'audience par cette partie ou son représentant qu'elle se réfère à ses écritures. Dès lors, la cour ne peut prendre en compte les demandes ou observations présentées par écrit par les parties non comparantes.

En l'absence de tout élément de nature à contredire le jugement sur ce point, la décision entreprise est confirmée en ce qu'elle a déclaré recevable le recours exercé par M. [P].

Il résulte de l'article L.711-1 du code de la consommation que la recevabilité de la demande de traitement de la situation de surendettement est subordonnée à la bonne foi du débiteur, conçue comme une absence de mauvaise foi. Il convient de rappeler que la bonne foi est présumée et qu'il appartient au créancier d'apporter la preuve de la mauvaise foi du débiteur. La simple imprudence ou imprévoyance n'est pas constitutive de mauvaise foi. De même, la négligence du débiteur ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi en l'absence de conscience de créer ou d'aggraver l'endettement en fraude des droits des créanciers. Les faits constitutifs de mauvaise foi doivent de surcroît être en rapport direct avec la situation de surendettement.

En application de l'article L.761-1 du code de la consommation, la mauvaise foi procédurale est également sanctionnée en ce qu'est déchue du bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement toute personne :

1° ayant sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts,

2° ayant détourné ou dissimulé, ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens,

3° ayant, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou ayant procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel, ou pendant l'exécution du plan ou des mesures de traitement.

Le débiteur doit donc être de bonne foi pendant la phase d'endettement mais aussi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.

Le juge doit se déterminer au jour où il statue.

Pour retenir l'absence de bonne foi et prononcer la déchéance du bénéfice de la procédure de surendettement, le premier juge a relevé que la débitrice avait contracté un prêt de 2 000 euros sans autorisation du juge, que ce prêt n'a pas permis de réduire son endettement et qu'ainsi, Mme [H] a privilégié le paiement d'un créancier hors plan, en violation des droits des autres créanciers.

Il ressort des pièces produites que Mme [H], domiciliée à [Localité 31] puis à [Localité 14] justifie qu'à la suite de la destruction le 28 mai 2020 de son véhicule Scenic, elle a, le 9 juin 2020, acheté à un ami qui l'hébergeait, une Twingo afin de pouvoir se rendre à son travail d'aide-soignante à l'hôpital [26] situé à [Localité 24], qu'elle a rencontré, entre 2017 et 2020, d'importants problèmes de santé qui l'ont contrainte d'être en congé maladie longue durée du 7 février 2017 au 15 mars 2020 puis en mi-temps thérapeutique du 16 mars au 15 juin 2020 et qu'elle a ensuite repris son travail d'aide-soignante à temps plein.

Il est manifeste que le fait de se rendre à son travail en voiture lui a permis de diviser par deux son temps de trajet (une heure par jour au lieu de deux heures en transport en commun). Mme [H] a néanmoins précisé que cet hébergement par M. et Mme [W] était temporaire.

S'il est manifeste qu'elle a entrepris cet achat sans autorisation alors qu'elle bénéficiait d'un plan de rééchelonnement de ses dettes sur une durée de 84 mois lui imposant de verser une mensualité de 83,30 euros à Mme [K], il doit être relevé que le remplacement de son véhicule détruit lui a permis de maintenir son contrat de travail, et même d'augmenter ses revenus puisqu'elle exerce désormais à temps plein et qu'il n'est pas contesté que le prêt de 2 000 euros a été remboursé à M. [W].

De surcroît, il doit être souligné que le plan imposé par la commission avait effacé d'office la créance de M. [P] et qu'il n'est pas établi que l'achat de ce véhicule ait empêché le respect du plan tel que prévu par la commission.

À hauteur d'appel, M. [P] n'a pas comparu ni maintenu son recours ni son moyen tiré de la mauvaise foi de sa locataire.

La production d'un état des lieux dressé le 5 janvier 2018 dans le logement loué par M. [P] à Mme [H] atteste pour le moins d'un litige concernant la décence du bien loué et permet de comprendre que le recours exercé par M. [P] était largement causé par l'effacement de sa créance imposé d'office par la commission de surendettement.

Au final, il doit être constaté que Mme [H], qui souligne avoir payé ses impôts, a fait en sorte d'augmenter le montant de ses revenus, par rapport à ceux qu'elle avait lorsqu'elle a déposé son dossier de surendettement. Elle a ainsi amélioré sa situation et fait preuve de sa bonne foi. Il doit lui être accordé que, bien qu'elle ait omis d'en demander l'autorisation, c'est sans mauvaise foi qu'elle a procédé à l'achat de ce véhicule au prix modique et dont l'utilité n'est pas contestable.

Ainsi, il n'est pas démontré d'aggravation de son endettement. La présomption de bonne foi s'applique aux débiteurs qui règlent leurs charges courantes et qui n'entendent pas se soustraire à leur obligation de remboursement, malgré des revenus limités.

Partant, le jugement est infirmé en toutes ses dispositions et, au vu du changement et de l'amélioration de la situation de Mme [H], il convient de renvoyer le dossier devant la commission de surendettement de l'Essonne afin qu'elle évalue la situation actuelle de la débitrice, qu'elle fixe sa capacité de remboursement et qu'elle détermine les mesures propres à traiter sa situation de surendettement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort ;

Infirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré le recours de M. [P] recevable ;

Statuant de nouveau,

Dit que Mme [Z] [H] est de bonne foi et recevable à bénéficier de la procédure de surendettement ;

Renvoie le dossier à la commission de surendettement de l'Essonne ;

Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre simple à la commission de surendettement et par lettre recommandée avec avis de réception aux parties.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 9 - b
Numéro d'arrêt : 21/00251
Date de la décision : 22/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-22;21.00251 ?
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