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22/06/2023 | FRANCE | N°20/01317

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 10, 22 juin 2023, 20/01317


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 10



ARRÊT DU 22 JUIN 2023



(n° , 11 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/01317 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBJ5C



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Décembre 2019 -Tribunal de Commerce de Paris RG n° 2019000609





APPELANTE



SAS FACILITY PARK, nouvelle dénomination de la SAS COBALT, venant aux droits et obligations d

e la société OXYPARK, par suite de la fusion simplifiée entre la société OXYPARK et la société COBALT, agissant poursuites et diligences ses représentants légaux, domiciliés ès qualités a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 10

ARRÊT DU 22 JUIN 2023

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/01317 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBJ5C

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Décembre 2019 -Tribunal de Commerce de Paris RG n° 2019000609

APPELANTE

SAS FACILITY PARK, nouvelle dénomination de la SAS COBALT, venant aux droits et obligations de la société OXYPARK, par suite de la fusion simplifiée entre la société OXYPARK et la société COBALT, agissant poursuites et diligences ses représentants légaux, domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représentée et assisté à audience par Me Jean-Emmanuel KUNTZ de l'ASSOCIATION KUNTZ & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : D0214

INTIMÉES

SOCIÉTÉ D'ECONOMIE MIXTE D'EQUIPEMENT DU PAYS D'[Localité 7] (SEMEPA), prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentée par Me Raphaël MITRANI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0658

Assisté à audience par Me Stéphane Denis COURANT, avocat au barreau de

SARL NERA PROPRETE LITTORAL, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 8]

[Adresse 8]

[Localité 1]

Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020

Assistée à audience par Me Philippe GENIN de la SELAS FIDUCIAL LEGAL BY LAMY, avocat au barreau de LYON, toque : 656, substitué à l'audience par Me Johana AGUILERA, avocat au barreau de LYON, toque : 656

SASU ATALIAN PROPRETE RHONE ALPES, anciennement dénommée TFN PROPRETE RHONE-ALPES (venant aux droits de la SAS TFN PROPRETE SUD

EST) ayant fait l'objet d'une absorption en date du 05 novembre 2021 par la SAS ATALIAN PROPRETE, qui vient à ses droits

ET

SASU ATALIAN PROPRETE PACA, anciennement dénommée TFN PROPRETE PACA (venant aux droits de la SAS TFN PROPRETE SUD EST), ayant fait l'objet d'une absorption en date du 05 novembre 2021 par la SAS ATALIAN PROPRETE, qui vient à ses droits

ET

S.A.S.U. EUROGEM, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

ET

SASU LANCRY PROTECTION SECURITE (LPS), nouvellement dénommée ATALIAN SECURITÉ, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentées et assistées toutes de Me Thierry GICQUEAU de l'ASSOCIATION GICQUEAU -VERGNE, avocat au barreau de PARIS, toque : R147, substitué à l'audience par Me Françoise VERGNE, avocat au barreau de PARIS, toque : R147

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été plaidée le 25 Mai 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Florence PAPIN, Présidente

Mme Valérie MORLET, Conseillère

M. Laurent NAJEM, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Florence PAPIN dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence PAPIN, Présidente et par Catherine SILVAN, greffier, présent lors de la mise à disposition.

***

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

La société d'économie mixte d'équipement du pays d'[Localité 7] (SEMEPA) s'est vue confiée, par délégations de service public de la commune d'[Localité 7], la gestion et l'exploitation de plusieurs parcs de stationnement de la ville (dates des délégations non précisées, pièces non produites).

Par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 14 février 2012, la liquidation judiciaire de la société PARK EXPERT SERVICES (PES), alors en charge pour le compte de la SEMEPA des prestations de nettoyage et de gardiennage, ayant été prononcée, cette dernière a passé commande temporaire le 16 février 2012 à la société GESTIPARK aux droits desquels est venue la société OXYPARK des prestations de nettoyage, de gardiennage et de surveillance des parkings, tout en précisant qu'elle mettrait en 'uvre par la suite une procédure d'appel d'offre pour trouver un nouveau prestataire.

La société GESTIPARK a signé de nouveaux contrats de travail avec les anciens salariés de la société PES pour les besoins de l'exécution des prestations commandées.

Un premier appel d'offre au terme duquel le marché avait été attribué à la société AMARYLLIS en mai 2012, ayant été annulé par la SEMEPA, cette dernière a lancé le 27 juillet 2012 un second appel d'offres pour les parcs de stationnement en opérant une modification substantielle : le marché initial global a été divisé en trois marchés distincts, un lot présence physique dans les parcs de stationnement, un lot nettoyage des parcs de stationnement ( ces deux lots concernant six parkings) et un lot dépannage 1er niveau concernant deux parkings supplémentaires.

La société GESTIPARK n'a pas été retenue ( rejet de ses trois offres par lettres du 25 octobre 2012) et ces lots ont été attribués à diverses sociétés dont les offres ont été jugées 'économiquement plus avantageuses' : TFN PROPRETÉ SUD EST (qui s'est scindée en deux sociétés : TFN PROPRETÉ PACA et TFN propreté Rhône Alpes) et LANCRY PROTECTION SÉCURITÉ (lot n°1), NERA PROPRETÉ LITTORAL (lot n°2), TFN PROPRETÉ SUD EST et MTO EUROGEM (lot n°3).

La société GESTIPARK a pris contact avec les attributaires de ces marchés afin de les informer du transfert de ses salariés, transfert qui a été refusé par eux.

Elle a ensuite saisi en référé le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence aux fins de faire constater que les contrats de travail des salariés affectés au marché de la SEMEPA avaient été transférés de plein droit aux nouveaux attributaires.

Par ordonnance du 22 février 2013, le conseil de prud'hommes a considéré que les contrats de travail n'avaient pas été transférés et que la société GESTIPARK demeurait employeur des salariés, décision confirmée par la cour d'appel d'Aix en Provence par arrêt du 4 juillet 2013.

La société OXYPARK, venue aux droits de la société GESTIPARK, évoquant une « fraude mise en place par la SEMEPA et les attributaires » puisque, selon elle, la division du marché en trois lots distincts n'avait d'autre but que d'empêcher le transfert automatique de ses salariés, les a assignés en vue d'obtenir la réparation de son préjudice devant le tribunal de commerce de Paris les 7 et 19 août 2015 (assignations non produites).

Par jugement en date du 5 septembre 2017, le tribunal de commerce de Paris considérant que le litige relevait du tribunal administratif a invité la société OXYPARK à mieux se pourvoir, décision infirmée par arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 31 mai 2018.

Selon procès- verbal en date du 18 septembre 2018, une fusion simplifiée est intervenue entre la société COBALT et la société OXYPARK et il a été opté pour une nouvelle dénomination sociale FACILITY PARK.

Le 10 décembre 2019, le tribunal de commerce de Paris a :

- Joint les affaires enrôlées sous les numéros de RG n° 2018056807 et 2018056790,

- Pris acte de l'intervention volontaire de la SAS FACILITY PARK nouvelle dénomination de la société COBALT, venant aux droits de la société OXYPARK,

- Débouté la société OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK de l'ensemble de ses demandes,

- Débouté la SARL NERA PROPRETÉ LITTORAL, la SAS EUROGEM, la SAS LANCRY PROTECTION SÉCURITÉ, la SAS TFN PROPRETÉ PACA, la SAS TFN PROPRETÉ RHÔNE-ALPES et SEMEPA de leurs demandes respectives de dommages intérêts,

- Condamné la société OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK au paiement de la somme de 10.000 euros à la SEMEPA, de 5.000 euros à chacune des sociétés NERA PROPRETÉ LITTORAL, LANCRY PROTECTION SÉCURITÉ, EUROGEM, TFN PROPRETÉ PACA, TFN PROPRETÉ RHÔNE-ALPES sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné la société OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 180,10 euros dont 29,80 de TVA.

La SAS FACILITY PARK a interjeté appel du jugement par déclaration du 9 janvier 2020.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par ses dernières conclusions n°4, notifiées par voie électronique le 4 mai 2021, la SAS FACILITY PARK demande à la cour de :

Vu l'article L.1224-1 du code du travail, Vu les articles 1382 et suivants anciens du code civil, vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 5 septembre 2017, vu l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 31 mai 2018, vu le jugement du tribunal de commerce de Paris du 10 décembre 2019, vu le procès-verbal du comité d'entreprise de la SEMEPA en date du 27 novembre 2012, vu la consultation de Monsieur le Professeur [I] [N],

- Juger la société FACILITY PARK, venant aux droits et obligations de la société OXYPARK recevable en son action,

- Infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 10 décembre 2019 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a joint les affaires enrôlées sous le numéro de RG 2018056807 et RG 2018056790 sous le n°j2019000609 et pris acte de l'intervention volontaire de la SAS FACILITY PARK,

En conséquence, et statuant à nouveau,

- Constater les man'uvres frauduleuses de la SEMEPA, appuyées par les sociétés Nera propreté littoral, TFN propreté sud est, Eurogem et Lancry protection sécurité, mises en 'uvre dans le seul but d'éluder le transfert des salariés de la SAS OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK,

- Constater les préjudices subis par la SAS OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK découlant directement des man'uvres fautives de la SEMEPA et des sociétés Nera propreté littoral, TFN propreté sud est, Eurogem et Lancry protection sécurité,

- Constater le lien de causalité direct existant entre les fautes de la SEMEPA et des attributaires avec les préjudices subis par la SAS OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK,

- Constater que l'action diligentée par la SAS OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK ne saurait valablement être qualifiée d'abusive au regard des faits et du droit applicable à la cause,

En conséquence, statuant à nouveau,

- Débouter les intimées de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions, et notamment la société NERA PROPRETÉ LITTORAL de sa demande de condamnation à hauteur de 20.000 euros formulée à l'encontre de la SAS OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK pour procédure abusive et la société SEMEPA de sa demande de condamnation à hauteur de 20.000 euros formulée à l'encontre de la SAS OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK pour procédure abusive,

- Condamner in solidum la SEMEPA et les sociétés NERA PROPRETÉ LITTORAL, ATALIAN PROPRETÉ PACA (venant aux droits de TFN PROPRETÉ SUD EST), ATALIAN PROPRETÉ RHÔNE-ALPES (venant aux droits de TFN PROPRETÉ SUD EST, EUROGEM et LANCRY PROTECTION SÉCURITÉ à verser à la société FACILITY PARK venant aux droits et obligation de la OXYPARK la somme de 745.848,45 euros sauf à parfaire, en réparation de son préjudice subi du fait de leur comportement abusif sur le fondement leur responsabilité délictuelle,

- Débouter les intimées de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de toutes demandes relatives aux dépens de première instance et d'appel,

- Condamner in solidum la SEMEPA et les sociétés Nera propreté littoral, Atalian propreté PACA (venant aux droits de TFN propreté sud), Atalian propreté Rhône-Alpes (venant aux droits de TFN propreté sud est), Eurogem e Lancry protection sécurité au paiement de la somme de 30.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction au profit du cabinet Kuntz & Associés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

- Rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires.

La société FACILITY PARK fait valoir :

- que la SAS OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK aurait dû pouvoir bénéficier des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail et donc, du transfert de plein droit des contrats de travail de ses salariés au nouvel attributaire du marché SEMEPA,

- que la SAS OXYPARK disposait en effet d'un effectif exclusivement dédié à l'exécution de ce marché, comme cela ressort des contrats de travail versés aux débats, salariés d'ailleurs pour l'essentiel antérieurement employés par le précédent attributaire, à savoir, la société PES et que les moyens matériels étaient mis à disposition par la SEMEPA, que ce soient le lieu d'exécution de la prestation ou encore les éléments corporels et incorporels, tandis que la clientèle était rattachée audit lieu, et non au prestataire chargé d'une mission temporaire,

- que dans ces conditions, l'existence d'une entité économique autonome dédiée à l'exécution du marché SEMEPA au sein de la SAS OXYPARK ne laisse nulle place au doute,

- que la caractérisation d'un transfert d'une entité économique autonome aurait été incontournable si la SEMEPA avait attribué le marché à un nouveau prestataire unique, en conservant son caractère global,

- que le conseil de prud'hommes d'Aix-en-Provence puis la cour d'appel ont considéré que la division du marché global en trois activités distinctes avait fait obstacle au transfert d'une entité économique autonome et donc au transfert des salariés,

- qu'il a été fait obstacle à un tel transfert au moyen d'une division en trois lots du marché litigieux, allotissement qui avait pour seul et unique but de faire échec à la reprise du personnel de la société OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK qui ne donnait pas satisfaction à la SEMEPA,

- que le directeur de la SEMEPA a très précisément indiqué lors d'une réunion de comité d'entreprise, concernant la division du marché en trois lots, que "l'intérêt d'avoir 3 prestataires, c'était d'éclater la prestation de PES, dans 3 sociétés différentes, de manière à ne pas reprendre leur personnel, qui ne donnait pas satisfaction" ,

- que ces agissements constituent une fraude caractérisée à l'article L. 1224-1 du code du travail, disposition d'ordre public,

- qu'en matière de gestion et d'exploitation de parcs publics

de stationnement, l'allotissement des prestations n'est pas le mode de dévolution normal et obligatoire : le recours à l'allotissement est fréquemment expressément écarté pour ce type de marché, compte tenu de l'unité technique et fonctionnelle des prestations faisant l'objet du marché, comme l'art. 10 al. 2 du code des marchés publics l'autorise,

- que du fait des man'uvres frauduleuses de la SEMEPA, soutenue par les attributaires, la SAS OXYPARK a été contrainte de conserver l'intégralité des 19 salariés affectés au marché perdu et a ainsi dû supporter le coût des salaires de décembre 2012 à juin 2013 mais également celui des licenciements économiques des salariés qui auraient dûs être transférés.

Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 6 juillet 2020, la société d'économie mixte d'équipement du pays d'[Localité 7] (SEMEPA) demande à la cour de :

- Débouter la société FACILITY PARK, venant aux droits et obligations de la société OXYPARK, de toutes ses demandes, fins et conclusions, et rejeter son appel,

- En conséquence confirmer le jugement du 10 décembre 2019 en ce qu'il a :

o Débouté la société OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK de l'ensemble de ses demandes,

o Débouté la SARL Nera propreté littoral, la SAS Eurogem, la SAS Lancry protection sécurité, la SAS TFN propreté PACA, la SAS TFN propreté Rhône-Alpes et SEMEPA de leurs demandes respectives de dommages intérêts,

o Condamné la société OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK au paiement de la somme de 10.000 euros à la SEMEPA, de 5.000 euros à chacune des sociétés Nera propreté littoral, Lancry protection sécurité, Eurogem, TFN propreté PACA, TFN propreté Rhône-Alpes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

o Condamné la société OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 180,10 euros dont 29,80 de TVA,

- Accueillir l'appel incident de la SEMEPA et y faire droit,

- Réformer le jugement du 10 décembre 2019 en ce qu'il a rejeté la demande de la SEMEPA de dommages-intérêts dirigée contre la société FACILITY PARK pour procédure abusive,

Statuant à nouveau :

- Condamner la société FACILITY PARK à payer à la SEMEPA la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- Enfin, condamner la société FACILITY PARK à payer à la SEMEPA la somme de 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel par la concluante,

- Condamner la société FACILITY PARK aux entiers dépens de l'instance, conformément à l'article 699 du code de procédure civile, dont distraction au profit de maître Mitrani, avocat.

La SEMEPA fait valoir :

- que la société FACILITY PARK dénonce une man'uvre qu'elle qualifie de frauduleuse consistant en l'allotissement du marché de prestations de services dans l'objectif d'empêcher le transfert des contrats de travail,

- que passer le marché en lots séparés tenant compte de l'existence de prestations distinctes est une obligation pour le pouvoir adjudicateur dans l'objectif de susciter la concurrence la plus large possible, permet aux entreprises quelle que soit leur taille d'accéder à la commande publique de sorte qu'elle ne peut avoir commis de faute, (article 10 alinéa premier du code des marchés publics dans sa version en vigueur lors des faits)

- que le transfert des contrats de travail n'a pas pu s'opérer, en raison de l'exclusion au cas d'espèce du jeu des dispositions de l'article L. 1224 ' 1 du code du travail, et de l'absence de transfert d'entité économique,

- que dans le domaine des prestations de services, comme celles de gardiennage, d'entretien et de nettoyage ou encore de restauration, la Cour de cassation s'est toujours refusée à admettre l'existence d'un transfert d'entreprise (ou transfert d'une entité économique) sur la seule constatation de la rupture des relations contractuelles (perte de marché) et l'accomplissement des prestations par le maître d'ouvrage ou par un nouveau prestataire et la jurisprudence nationale est conforme à la jurisprudence de la CJUE,

- la société FACILITY PARK est infondée à soutenir qu'elle aurait

subi un préjudice (étant de surcroît rappelé que la perte d'un marché et ses conséquences ne constituent pas un préjudice en soi),

- que la question de la garantie de l'emploi et de la continuité des contrats de travail en cours en cas de changement de prestataire ne relève pas du pouvoir adjudicateur mais des rapports directs entre l'entreprise sortante et l'entreprise entrante en considération des éventuelles obligations légales ou conventionnelles pesant sur elles,

- que la société OXYPARK/FACILITY PARK n'a pas cessé son activité, elle existe toujours dans la même situation juridique, elle n'a fait que perdre un client et qu'il n'est pas justifié que les salariés étaient affectés exclusivement au marché de la SEMEPA ni embauchés spécialement pour ce marché,

- que le juge prud'homal a écarté l'application de l'article L.1224-1 du code du travail parce que les « trois activités spécifiques ne disposaient pas d'une autonomie propre au sein de la société GESTIPARK, tant dans ses moyens en personnel en raison de la polyvalence de la plupart des salariés embauchés en qualité d'agent d'exploitation et d'entretien, que dans l'organisation de sa prestation»,

- qu'aucun lien de causalité n'est établi entre le préjudice allégué par la société FACILITY PARK et l'allotissement, lequel, dans les circonstances sus-évoquées, n'a pas un caractère fautif ou frauduleux et n'a eu aucune influence sur l'application de l'article L.1224-1 du code du travail.

Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 21 avril 2020, la société NERA PROPRETÉ LITTORAL demande à la cour de :

Vu l'article 1240 du code civil, Vu l'article L.1244-1 du code du travail,

- Confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

o Débouté la société OXYPARK aux droits et obligations de laquelle vient la société FACILITY PARK de l'ensemble de ses demandes,

- Infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

o Débouté la SARL NERA PROPRETÉ LITTORAL, la SAS EUROGEM, la SAS LANCRY PROTECTION SÉCURITÉ, la SAS TFN PROPRETÉ PACA, la SAS TFN PROPRETÉ RHÔNE-ALPES et SEMEPA de leurs demandes respectives de dommages et intérêts,

Et statuant à nouveau :

- Condamner la société FACILITY PARK, venant aux droits de la société OXYPARK au paiement d'une somme de 20.000 euros à titre de procédure abusive au profit de la société Nera propreté,

En tout état de cause :

- Condamner la société FACILITY PARK, venant aux droits de la société OXYPARK à verser une somme de 10.000 euros à la société Nera propreté au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

La société NERA PROPRETE LITTORAL, précisant qu'elle n'a pas participé à la décision prise par la SEMEPA demande à la cour de constater que la société OXYPARK ne rapporte pas la preuve de la commission d'une faute par elle et de débouter en conséquence la société FACILITY PARK venant aux droits de la société OXYPARK de sa demande de condamnation de la société NERA PROPRETE.

Les autres sociétés ATALIAN PROPRETÉ PACA et RHÔNE ALPES, EUROGEM, LANCRY PROTECTION SÉCURITÉ ( devenue ATALIAN SECURITE) ont constitué avocat mais n'ont pas fait déposer de conclusions en leurs noms.

La société ATALIAN PROPRETE est ultérieurement venue aux droits des sociétés ATALIAN PROPRETÉ PACA et RHÔNE ALPES.

Le présent arrêt est contradictoire.

La clôture a été prononcée le 29 mars 2023.

MOTIFS

Sur le fond

La société FACILITY PARK fonde son action sur les dispositions de l'article 1382 ancien du code civil soutenant l'existence d'une fraude à la loi en ce qu'elle aurait dû pouvoir bénéficier des dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail et qu'il a été fait obstacle au transfert des contrats de travail par la division par la SEMEPA en 3 lots du marché public.

Aux termes de l'article 10 (alinéa 1er) du code des marchés publics en vigueur lors des faits :

« Afin de susciter la plus large concurrence, et sauf si l'objet du marché ne permet pas l'identification de prestations distinctes, le pouvoir adjudicateur passe le marché en lots séparés (') A cette fin, il choisit librement le nombre de lots, en tenant notamment compte des caractéristiques techniques des prestations demandées, de la structure du secteur économique en cause et, le cas échéant, des règles applicables à certaines professions. Les candidatures et les offres sont examinées lot par lot. Les candidats ne peuvent présenter des offres variables selon le nombre de lots, susceptibles d'être obtenus. Si plusieurs lots sont attribués à un même titulaire, il est toutefois possible de ne signer avec ce titulaire qu'un seul marché regroupant tous ces lots. »

Il résulte de cette disposition que le marché alloti est le mode de dévolution normal et obligatoire des marchés publics, le législateur ayant souhaité favoriser ce mode d'appel d'offres afin d'ouvrir les marchés publics à plus de concurrence.

Il est soutenu par l'appelante qu'il aurait pu être dérogé à l'obligation d'allotir, l'alinéa 2 de l'article 10 du code des marchés publics l'autorisant en cas de coût excessif de l'allotissement ou de difficultés techniques.

Cependant déroger à ce principe aurait nécessité de la part de la SEMEPA de rapporter la preuve d'un des motifs d'exonération en cas de recours devant le tribunal administratif.

Or en l'absence de pièce visée par ses conclusions justifiant du surcoût allégué, l'appelante ne rapporte pas la preuve que la SEMEPA aurait été légitime à se prévaloir de la première des dérogations prévues.

Concernant la seconde dérogation, techniquement, chaque lot constituait bien une unité autonome pouvant être attribuée séparément, en ce qu'il comportait des prestations homogènes et dissociables de celles des autres lots, susceptibles d'être réalisées par une même entreprise :

- un lot n°1 pour les prestations de « maintien d'une présence physique »,

- un lot n°2 pour les prestations de nettoyage,

- un lot n°3 pour les prestations de dépannage.

Par suite, par le seul fait de se conformer au principe obligatoire de l'allotissement, la SEMEPA n'a commis aucune faute ni manoeuvre frauduleuse.

L'article L.1224-1 du code du travail, qui pose les conditions d'un transfert légal des contrats de travail en cours, dispose :

« Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. »

Ces dispositions d'ordre public reçoivent application de plein droit à tout transfert d'une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise.

Il ne peut y avoir de transfert légal des contrats de travail en cours lorsque les conditions de l'article L.1224-1du code du travail ne sont pas réunies, ce qui est précisément le cas dans l'hypothèse de la seule perte d'un marché.

Le nouveau titulaire d'un marché qui poursuit simplement une activité (sans qu'il y ait transfert d'une entité économique à cette occasion) n'est pas tenu légalement de reprendre et poursuivre les contrats de travail du personnel d'un marché de prestations de services précédemment confié à un autre prestataire.

Il ressort des pièces communiquées que le lot 3 tel que décrit dans l'avis d'appel public à la concurrence en date du 27 juillet 2012, comportait 3 parkings de plus et ne correspondait ainsi pas au périmètre géographique anciennement confié à la société GESTIPARK et que les lots 1 et 2 visaient à la spécialisation de personnels dédiés à ces activités.

Ainsi il résulte du procès-verbal du comité d'entreprise du 27 novembre 2012 que les nouveaux personnels dédiés à la surveillance seront titulaires de l'examen du SSIAP 1 (service de sécurité incendie et d'assistance à personne) et c'est à la lumière de ces précisions, comme l'indique le premier juge, que doivent être compris les propos du directeur de la SEMEPA tenus à l'occasion du comité d'entreprise du 27 novembre 2012 selon lequel l'ancien personnel, polyvalent et non spécialisé, ne donnait pas satisfaction.

Ces branches d'activité n'ayant pas d'autonomie propre au sein de la société GESTIPARK devenue OXYPARK, l'activité ne s'étant pas poursuivie à l'identique, la chambre sociale de la cour d'appel d'Aix en Provence par arrêts du 12 janvier 2018, 23 et 31 mai 2019 a considéré qu'il n'y avait pas de transfert d'une entité économique au sens de l'article L.1224-1 du code du travail.

Dès lors, la scission de l'ancien marché public correspondait à une volonté de modifier en profondeur les conditions d'exploitation des parcs de stationnement avec notamment une spécialisation et meilleure qualification du personnel et la preuve d'une fraude de la part de la SEMEPA aux dispositions de l'article L 1224-1 du code du travail et /ou d'une collusion frauduleuse entre la SEMEPA et les entreprises attributaires n'est pas rapportée par l'appelante.

La décision déférée est par conséquent confirmée.

Sur la demande de dommages-intérêts de la SEMEPA et de la société NERA PROPRETE LITTORAL pour procédure abusive :

L'exercice d'une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi, d'erreur grossière équivalente au dol, de légèreté blâmable ou de faute dont la preuve n'est pas rapportée en l'espèce.

La décision déférée est confirmée en ce qu'elle a débouté la SEMEPA et la société NERA PROPRETE LITTORAL de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La décision déférée est confirmée en ce qui concerne les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

La société FACILITY PARK est condamnée aux dépens d'appel et à payer à la société SEMEPA la somme de 10.000 euros et à la société NERA PROPRETE LITTORAL la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

PAR CES MOTIFS

CONFIRME la décision entreprise,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société FACILITY PARK aux dépens d'appel et à payer à la société SEMEPA la somme de 10.000 euros et à la société NERA PROPRETE LITTORAL la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de toutes demandes plus amples ou contraires.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 20/01317
Date de la décision : 22/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-22;20.01317 ?
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