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16/06/2023 | FRANCE | N°19/08507

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 16 juin 2023, 19/08507


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 16 Juin 2023



(n° , 11 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/08507 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CANT5



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Juillet 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY RG n° 19/00033





APPELANTE

SAS [6]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Marion C

ORNU, avocat au barreau de NANTES



INTIMEE

URSSAF ILE DE FRANCE

Département des Contentieux Amiables et Judiciaires

[Adresse 7]

[Localité 3]

représenté par M. [J] [H] en vertu d'un pouvoir géné...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 16 Juin 2023

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/08507 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CANT5

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 08 Juillet 2019 par le Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY RG n° 19/00033

APPELANTE

SAS [6]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Me Marion CORNU, avocat au barreau de NANTES

INTIMEE

URSSAF ILE DE FRANCE

Département des Contentieux Amiables et Judiciaires

[Adresse 7]

[Localité 3]

représenté par M. [J] [H] en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Mars 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Gilles BUFFET, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M Raoul CARBONARO, Président de chambre

M Gilles BUFFET, Conseiller

Mme Natacha PINOY, Conseillère

Greffier : Mme Fatma DEVECI, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par M. Raoul CARBONARO, Président de chambre et par Mme Fatma DEVECI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la société [6] (la société) d'un jugement rendu le 8 juillet 2019 par le tribunal de grande instance de Bobigny, dans un litige l'opposant à l'Urssaf Ile de France (l'Urssaf).

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été rapportées dans le jugement auquel il est référé pour plus ample exposé, il est rappelé que la société a fait l'objet d'un contrôle de l'Urssaf Pays de la Loire pour la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2015 ; que l'Urssaf Pays de la Loire a émis une lettre d'observations le 14 octobre 2016 portant sur 15 chefs de redressement entraînant un rappel de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance chômage et d'AGS d'un montant total de 2.122.659 euros réparti sur 17 établissements, et une observation pour l'avenir; que la société a adressé un courrier du 15 novembre 2016 contestant le redressement qui a donné lieu à une réponse de l'Urssaf Pays de la Loire le 28 novembre 2016, maintenant le redressement à hauteur de 2.063.876 euros; que, le 26 décembre 2016, l'Urssaf Ile de France a adressé une mise en demeure à la société portant sur la somme de 2.371.059 euros comprenant 2.063.876 euros de cotisations dues et 307.183 euros de majorations de retard ; qu'une seconde mise en demeure a été adressée à la société le 27 décembre 2016 portant sur la somme de 74.651 euros comprenant 64.540 euros de cotisations et 10.111 euros de majorations de retard ; que, par courrier du 26 janvier 2017, la société a contesté les chefs de redressement n°1, 3, 4, 6, 8, 12 et 13 devant la commission de recours amiable de l'Urssaf ; que, par deux requêtes du 25 avril 2017, la société a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny aux fins de contester la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable; que, dans sa séance du 15 octobre 2018, la commission de recours amiable a rejeté le recours de la société ; qu'à compter du 1er janvier 2019, le litige a été transféré au tribunal de grande instance de Bobigny.

Par jugement rendu le 8 juillet 2019, ce tribunal a :

- ordonné la jonction des recours enregistrés sous les n°19/00033 et 19/00034 au répertoire général,

- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par l'Urssaf,

- déclaré les recours de la société recevables,

- débouté la société de sa demande d'annulation de la mise en demeure adressée par l'Urssaf Ile de France le 26 décembre 2016 pour un montant de 2.371.059 euros,

- débouté en conséquence la société de sa demande d'annulation de l'intégralité du redressement notifié par l'Urssaf Ile de France par lettre d'observations du 14 octobre 2016,

- annulé la mise en demeure adressée par l'Urssaf Ile de France le 27 décembre 2016 pour un montant de 74.651 euros,

- débouté la société de sa demande de remboursement de la somme de 64.540 euros,

- validé le chef de redressement n°1 notifié par l'Urssaf Ile de France dans sa lettre d'observations du 14 octobre 2016 au titre des règles générales en matière de réduction générale des cotisations pour un montant de 473.856 euros,

- validé le chef de redressement n°4 notifié par l'Urssaf Ile de France dans sa lettre d'observations du 14 octobre 2016 au titre de l'assiette du versement transport,

- validé le chef de redressement n°6 notifié par l'Urssaf Ile de France dans sa lettre d'observations du 14 octobre 2016 au titre des licenciements pour faute grave pour un montant de 84.992 euros,

- validé le chef de redressement n°8 notifié par l'Urssaf Ile de France dans sa lettre d'observations du 14 octobre 2016 au titre de versement transport applicable aux élus des instances représentatives du personnel pour un montant de 90.167 euros,

- validé le chef de redressement n°12 notifié par l'Urssaf Ile de France dans sa lettre d'observations du 14 octobre 2016 au titre de la rupture non forcée d'un contrat de travail pour un montant de 3.757 euros,

- annulé le chef de redressement n°13 notifié par l'Urssaf Ile de France dans sa lettre d'observations au titre des indemnités transactionnelles versées à la suite de démissions pour un montant de 2.026 euros, outre les majorations de retard correspondantes,

- en conséquence, condamné l'Urssaf Ile de France à rembourser à la société la somme de 2.026 euros au titre du chef de redressement n°13 annulé,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

- débouté l'Urssaf et la société de leurs demandes formulées au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné l'Urssaf et la société à supporter à parts égales les dépens de l'instance exposés à compter du 1er janvier 2019.

Le jugement a été notifié à la société le 17 juillet 2019, laquelle en a interjeté appel par courrier recommandé avec avis de réception du 2 août 2019.

Aux termes de ses conclusions visées à l'audience et soutenues oralement par son avocat, la société demande à la cour de :

A titre principal,

- infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société de sa demande d'annulation de la mise en demeure du 26 décembre 2016 et conclu à la régularité de la procédure et de la mise en demeure notifiée,

- et ce faisant, annuler les deux mises en demeure notifiées par l'Urssaf les 26 et 27 décembre 2016 et les redressements afférents pour un montant de 2.128.416 euros,

- ordonner à l'Urssaf de procéder au remboursement de la somme,

A titre subsidiaire,

- infirmer le jugement en ce qu'il a validé les chefs de redressement critiqués par la société (à l'exception du redressement n°13),

- et ce faisant, annuler les redressements relatifs à la réduction générale de cotisations, aux indemnités transactionnelles et au versements transport,

- à tout le moins, prononcer l'annulation partielle du redressement relatif au versement transport salariés à hauteur de 710.058 euros,

- ordonner à l'Urssaf de procéder au remboursement des sommes afférentes,

en tout état de cause,

- condamner l'Urssaf à verser à la société la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'Urssaf aux entiers dépens.

Aux termes de ses conclusions visées à l'audience et soutenues oralement par son représentant, l'Urssaf demande à la cour :

- la confirmation de la décision de première instance du 8 juillet 2019, à l'exception de l'annulation du chef de redressement n°13 dont il est demandé validation,

- la condamnation de la société à payer 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il est renvoyé aux conclusions déposées par les parties à l'audience du 27 mars 2023 et exposées oralement pour plus ample exposé de leurs moyens.

SUR CE :

- Sur la nullité des mises en demeure et la régularité du redressement :

La société soutient que l'Urssaf a commis une erreur en lui adressant deux mises en demeure (l'une globale de 2.063.876 euros correspondant aux redresssements de l'ensemble de ses 17 établissements, l'autre de 64.540 euros correspondant au redressement de l'un de ses établissements situé à [Localité 4]); que ce double envoi a eu pour conséquence une erreur importante concernant le montant des cotisations dues dans la mesure où il revient à chiffrer le montant global du redressement à 2.128.416 euros, ce qui est inexact, et source de confusion pour la société qui n'a pas été en mesure d'identifier avec précision le montant des cotisations réellement dues ; que l'erreur de l'Urssaf n'ayant pas permis au cotisant de connaître la cause et l'étendue de son obligation à réception des mises en demeure, la mise en demeure du 26 décembre 2018 doit être annulée, comme celle du 27 décembre 2018 ; que, contrairement à ce que soutient l'Urssaf, l'envoi de la seconde mise en demeure a nécessairement affecté la validité de la première ; que les irrégularités entachent la validité de la procédure ;qu'enfin, elle a effectué auprès de l'Urssaf le versement correspondant à la seconde mise en demeure, de sorte qu'elle est fondée à en solliciter le remboursement.

L'Urssaf réplique que suffisent à la validité d'une mise en demeure suite à contrôle, outre la période, le montant des sommes dues en cotisations et majorations de retard et leur nature, la mention du contrôle et la référence aux chefs de redressement déjà communiqués; que la mise en demeure du 26 décembre 2016 remplit ces conditions, faisant référence à la notification du redressement établie le 14 octobre 2016 ; que la société a parfaitement eu connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de ses obligations par les indications combinées de la mise en demeure et de la lettre d'observations à laquelle elle se référait et qui lui avait été également notifiée ; que, si la mise en demeure du 27 décembre 2016 reprend des sommes déjà réclamées dans la première mise en demeure, seule la seconde mise en demeure, qui fait double emploi avec la première, doit être annulée ; que la mise en demeure du 26 décembre 2016 ne peut être affectée par une irrégularité intervenue postérieurement à celle-ci ; que la mise en demeure du 26 décembre 2016, qui est l'exact reflet du redressement, doit être validée ; qu'enfin, la société ne démontre pas avoir procédé à un quelconque paiement à la suite de l'envoi de la seconde mise en demeure, la seule copie d'un chèque, en l'absence de production des relevés bancaire de ses comptes, étant insuffisante.

Il résulte des dispositions des articles L. 244-2 et R. 244-1 du code de sécurité sociale que toute action ou poursuite est obligatoirement précédée d'un avertissement ou d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée qui précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

Selon la jurisprudence constante, la mise en demeure qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d'avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti et la contrainte délivrée à la suite de la mise en demeure restée sans effet doivent permettre à l'intéressé d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu'elles précisent, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice.

La mise en demeure peut procéder par référence à la lettre d'observations (Soc., 7 octobre 1999, pourvoi n° 97-19.133, Bull. 1999, V, n° 372 ; civ.2e, 20 décembre 2007, pourvoi n° 06-20.683, Bull. 2007, II, n° 278). Il convient cependant que cette référence ne soit pas source de confusion: ainsi une différence de montant entre la lettre d'observations et la mise en demeure est de nature à la voir annuler si elle conduit à des discordances qui ne peuvent s'expliquer (civ.2e., 9 octobre 2014, pourvoi n° 13-22.039).

En l'espèce, la mise en demeure du 26 décembre 2016 mentionne qu'elle concerne le recouvrement des cotisations et contributions sociales du régime général pour les années 2013, 2014 et 2015, soit 896.094 euros pour 2013, 565.741 euros pour 2014 et 602.041 euros pour 2015. La mise en demeure détaille les majorations correspondantes, de 170.257 euros pour 2013, 80.335 euros pour 2014 et 56.591 euros pour 2015. Sur les motifs du recouvrement, la mise en demeure reproduit les mentions suivantes : 'Contrôle-chefs de redressement notifiés par lettre d'observations en date du 14 octobre 2016 adressée en recommandé avec accusé de réception conformément à l'article R.243-59 et suivants du code de la sécurité sociale, confirmée ou révisée par courrier du 28 novembre 2016".

La mise en demeure renvoie donc expressément à la lettre d'observations du 14 octobre 2016, ainsi qu'à la lettre de réponse aux observations de la société de l'Urssaf Pays de la Loire du 28 novembre 2016 ramenant le redressement initial à 2.063.876 euros, réclamant précisément le paiement de ce montant.

Par conséquent, la mise en demeure du 26 décembre 2016 a incontestablement permis à la société, qui s'est vue notifier la lettre d'observations du 14 décembre 2016 et le courrier de réponse de l'Urssaf du 28 novembre 2016, d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.

S'il est constant que la seconde mise en demeure du 27 décembre 2016, qui vise des sommes déjà réclamées par celle du 26 décembre 2016, est irrégulière et doit être annulée, une telle irrégularité est sans effet sur la première mise en demeure dont la validité ne peut être affectée par l'envoi d'une mise en demeure postérieure, même sans fondement.

Par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté la société de sa demande de nullité de la mise en demeure du 26 décembre 2016, annulé la mise en demeure du 27 décembre 2016 et débouté la société de sa demande de nullité du redressement notifié par la lettre d'observations du 14 octobre 2016, étant rappelé, à cet égard, que la nullité de la mise en demeure ne peut affecter la validité du redressement qui en sert de fondement.

Enfin, c'est à bon droit que le tribunal a débouté la société de sa demande de remboursement de la somme de 64.540 euros, la société ne justifiant pas du paiement de cette somme auprès de l'Urssaf, la société ne produisant que la copie d'un chèque, dont la preuve de l'envoi n'est pas établie, sans joindre de documents bancaires de nature à établir un quelconque encaissement par l'Urssaf.

- Sur la validité des chefs du redressement contestés par la société :

Sur le chef de redressement n°1 (réduction générale des cotisations ) pour un montant de 473.856 euros :

La société rappelle que l'Urssaf a procédé à une régularisation pour un montant de 474.752 euros ramené à 473.856 euros ; qu'au regard de l'article R.243-59-7 du code de la sécurité sociale, l'absence d'observations de l'Urssaf lors d'un précédent contrôle vaut accord tacite sur les pratiques de l'entreprise et fait obstacle au redressement des cotisations ; que l'Urssaf a procédé à un précédent contrôle au sein de la société portant sur la période allant du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010 ayant donné lieu à une lettre d'observations du 4 octobre 2011 qui précise, dans la liste des documents consultés, que les inspecteurs ont examiné lors du contrôle, les 'états justificatifs des réductions Fillon' ; qu'à cette occasion, l'Urssaf n'a fait aucune observation concernant la réduction générale de cotisations, ni au sujet de la détermination du SMIC applicable, ni au sujet des heures rémunérées à prendre en compte, ni au sujet de la neutralisation des primes d'habillage ; que les circonstances de droit et de fait étant identiques, en l'absence de la moindre observation de l'Urssaf au cours du dernier contrôle, la société peut se prévaloir d'un accord tacite, la réglementation applicable à la réduction 'Fillon' n'ayant pas évolué sur les points précis des griefs relevés par l'Urssaf à l'encontre de la société; que la lettre d'observations du 14 octobre 2016 rappelle que, concernant la rémunération brute mensuelle à prendre en compte au dénominateur de la formule de calcul du coefficient de réduction 'Fillon', il convient de se référer à l'article L.241-13 dans sa rédaction modifiée par la loi du 21 août 2007 et par celle du 19 octobre 2007, dont les dispositions étaient en vigueur lors du précédent contrôle; qu'à titre subsidiaire, l'Urssaf a opéré un redressement en prenant en compte la rémunération annuelle versée à chaque salarié au cours de l'exercice social, sans prendre en considération le nombre de contrats successifs qui ont pu être éventuellement conclus avec le salarié en question alors que l'article D.241-7 du code de la sécurité sociale prévoit que, pour les salariés en contrat à durée déterminée (CDD) auprès d'un même employeur, le coefficient est déterminé contrat par contrat ; que la société a ainsi calculé la réduction contrat par contrat pour les salariés ayant conclu plusieurs CDD au cours d'une même année et les salariés ayant conclu plusieurs contrats à durée indéterminée (CDI) au cours d'une même année ; que l'Urssaf a donc effectué une erreur dans le calcul de la réduction des cotisations.

L'Urssaf réplique qu'au regard de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, l'accord tacite implique que les pratiques litigieuses aient été appliquées dans des conditions identiques lors du premier et du second contrôle et que la législation applicable n'ait pas été modifiée, mais également, que ces pratiques aient été vérifiées par l'inspecteur du recouvrement et qu'elles n'aient fait l'objet d'aucune observation de sa part ; qu'en l'espèce, la réglementation applicable au titre de la période contrôlée n'était pas similaire à celle relative au contrôle réalisé portant sur les années 2009 à 2010 ; qu'à cet égard, les modalités de calcul de la réduction 'Fillon' ont été considérablement modifiées à compter du 1er janvier 2011, le calcul ayant été annualisé et non plus mensualisé, étant désormais égal au produit de la rémunération annuelle brute telle que définie à l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale par un coefficient dont la formule de calcul est fixée par l'article D.241-7 dudit code ; qu'à compter du 1er janvier 2015, ont été intégrées dans la rémunération considérée pour le calcul, au même titre que les autres éléments de salaire, la rémunération des temps de pause, d'habillage et de déshabillage, y compris versée en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu en vigueur au 11 octobre 2007, la rémunération des temps de coupure et d'amplitude et la rémunération des temps de douche; qu'il n'est pas établi que la société procédait lors du précédent contrôle de manière identique en 2009 et 2010 au regard des observations formulées concernant les années 2013 à 2015 ; que l'absence d'observations ne saurait donc valoir accord tacite de l'Urssaf, la preuve n'étant pas de surcroît rapportée que l'Urssaf avait les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause sur la pratique antérieure ; que c'est bien en application de l'article D.241-7 du code de la sécurité sociale que la régularisation opérée au titre de la réduction 'Fillon' a été calculée ; que la société ne démontre pas que l'Urssaf a commis une erreur significative dans le calcul de la réduction des cotisations ; que s'agissant de la situation spécifique de certains salariés, pour lesquels la société a fourni des éléments complémentaires lors de la période contradictoire, l'Urssaf a procédé à un état correctif du calcul les concernant et qu'à défaut d'éléments complémentaires concernant la spécificité de certains salariés, ce chef de redressement doit être validé.

Aux termes de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale, l'absence d'observations vaut accord tacite concernant les pratiques ayant donné lieu à vérification, dès lors que l'organisme de recouvrement a eu les moyens de se prononcer en toute connaissance de cause. Le redressement ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement, n'ont pas donné lieu à observations de la part de cet organisme.

Il résulte de ce texte que l'absence d'observations de l'organisme de recouvrement au cours d'un précédent contrôle ne vaut accord tacite sur les pratiques ayant donné lieu à vérification qu'en l'absence de changement de circonstances de droit (Civ 2, 20 décembre 2018, n°17-27.021). Par ailleurs, il appartient au cotisant qui entend se prévaloir d'un accord tacite de l'organisme de recouvrement d'en rapporter la preuve (Civ 2, 26 novembre 2015, n°14-26.017).

Aux termes de la lettre d'observations du 14 octobre 2016, les inspecteur du recouvrement de l'Urssaf relèvent plusieurs irrégularités de calcul tenant à :

- la détermination du SMIC annuelle pour les années 2013 à 2015, (la société ayant retenu la valeur du SMIC annuelle de l'année civile (1er janvier au 31 décembre de l'année n) au lieu de celui applicable au titre de la période d'emploi (1 décembre n-1 au 30 novembre n+1)),

- la détermination des heures rémunérées à prendre en compte pour le calcul de la réduction pour les années 2013 à 2015 (le système de paie a systématiquement considéré que les rappels de salaire concernaient des rappels d'heures de travail alors que certains ne concernaient que la valorisation rétroactive de primes ou indemnités sans incidence sur le nombre d'heures de travail à prendre en compte pour le calcul de la réduction, la valorisation en heures de travail réalisée de ces éléments de rémunération ayant eu pour conséquence de majorer à tort les paramètres de la formule de calcul de la réduction relative au nombre d'heures de travail effectivement réalisées et au montant du SMIC à prendre en considération),

- et la neutralisation du montant de la prime d'habillage pour les années 2013 à 2014 ( ne pouvait être neutralisé de la rémunération à prendre en considération pour le calcul de la réduction des cotisations patronales que le montant mensuel maximum fixé par la convention collective, soit 19,82 euros, tandis que les éléments communiqués par la société laissent apparaître que la valorisation de cette indemnité pouvait être supérieure au montant mensuel fixé par la convention collective dès lors que les salariés effectuaient des heures supplémentaires à la durée légale du travail, de sorte qu'a été réintégrée dans l'assiette de la rémunération à prendre en compte pour le calcul de la réduction 'Fillon' la rémunération des temps d'habillage et de déshabillage qui excédait le quantum fixé par les dispositions conventionnelles).

Or, sur les griefs opposés par l'Urssaf aux termes de sa lettre d'observations du 14 octobre 2016, l'Urssaf oppose à juste titre que la réglementation applicable au titre de la période contrôlée était différente de celle relative au précédent contrôle effectué pour les années 2009 et 2010 aux termes de la lettre d'observations du 4 octobre 2011 produite par la société.

A cet égard, en application de la loi n°2011-1906 du 21 décembre 2011 de financement de la sécurité sociale pour 2012, le montant de la réduction 'Fillon' est égal, à compter du 1er janvier 2012, au produit de la rémunération annuelle par un coefficient déterminé en fonction du rapport entre le SMIC calculé pour un an et la rémunération annuelle du salarié, en prenant en compte divers paramètres, alors qu'antérieurement, le montant de la réduction étant calculée chaque mois pour chaque salarié.

De surcroît, si la société communique la lettre d'observations du 4 octobre 2011, elle ne produit cependant aucune pièce permettant d'établir que, pour les années 2009 et 2010, elle procédait de manière identique par rapport aux observations formulées par l'Urssaf dans le cadre de la lettre d'observations du 14 octobre 2016.

Aussi, la société ne peut se prévaloir des dispositions de l'article R.243-59 du code de la sécurité sociale pour invoquer l'existence d'un accord tacite de l'Urssaf qui fait défaut.

Aux termes de l'article D.241-7 du code de la sécurité sociale, pour les salariés en contrat à durée déterminée auprès d'un même employeur, le coefficient mentionné au I est déterminé pour chaque contrat.

La société fait valoir que l'Urssaf n'a pas appliqué ce texte de façon correcte, celle-ci ayant pris en compte la rémunération annuelle versée à chaque salarié, et non leurs contrats successifs, se prévalant de la situation de M. [K] [E], salarié ayant quitté l'entreprise le 31 janvier 2014 dans le cadre d'un départ à la retraite et qui a été réintégré le 1er août 2014 dans le cadre d'un nouveau CDI.

Si, à cet égard, l'Urssaf a procédé, dans sa lettre de réponse du 28 novembre 2016 dans le cadre de la période contradictoire, à un état correctif concernant M. [K] [E], la société, qui procède par voie d'affirmation générale, ne caractérise pas en quoi l'Urssaf aurait méconnu les dispositions de l'article D.241-7 précité concernant d'autres salariés, l'Urssaf rappelant à juste titre que le calcul de la régularisation a tenu compte des éléments communiqués par la société les 17 et 19 mai 2016, laquelle n'avait pas produit de justificatifs concernant la situation particulière de certains salariés.

Par conséquent, il convient de valider le chef de redressement n°1.

Sur le chef de redressement n°4 (versement transport) pour un montant de 1.216.125 euros:

La société fait valoir qu'à la lecture de la lettre d'observations, l'Urssaf a motivé le redressement uniquement par l'absence d'assujettissement de certaines rémunérations au versement transport; que ce grief ne permet cependant pas de justifier l'ensemble du redressement, n'expliquant que 6.217.955 euros sur 43.211.923 euros d'assiette réintégrée en 2013, 9.564.004 euros sur 13.992.400 euros d'assiette réintégrée en 2014 et 10.507.767 euros sur 16.422.641 euros d'assiette réintégrée en 2015 ; que l'Urssaf n'a donc pas motivé une grande partie du redressement au titre du versement transport ; qu'il est rappelé que, par ailleurs, la lettre d'observations, outre qu'elle doit mentionner les considérations de droit et de fait constituant le fondement du redressement, qui sont en l'espèce insuffisantes, doit également préciser le mode de calcul dudit redressement ; que la lecture de l'annexe 3.1 et plus précisément du fichier 'VT SECURITY' fait apparaître que la colonne intitulée 'commentaire' (colonne p permettant de retrouver la logique de calcul de la base SS pour déterminer l'assiette de redressement) est manquante s'agissant des années 2013 et 2014; qu'en n'informant pas la société de toutes les erreurs qui lui sont reprochées et, à défaut de précision quant au mode de calcul du redressement, en ne permettant pas à la société de rectifier ces éventuelles erreurs et de comprendre le chiffrage opéré, l'Urssaf a manqué à ses obligations; que, sur la base d'un taux médian de 1,5%, la société sollicite une annulation partielle à hauteur de 710.058 euros pour absence de motivation sur une assiette réintégrée d'un montant total de 47.337.238 euros sur les trois années concernées.

L'Urssaf réplique que, pour déterminer l'assiette du versement transport, il convient de prendre en compte l'ensemble des rémunérations versées aux salariés occupés dans le périmètre de la zone de transport, étant rappelé que l'assiette de cette contribution est, en principe, alignée sur l'assiette déplafonnée des cotisations sociales ; qu'il a été relevé à l'issue du contrôle que l'assiette des cotisations de sécurité sociale était d'un montant supérieur à celle du versement transport ; que des rubriques de paie n'ont pas en effet été soumises par l'employeur à la contribution ; que la fourniture par l'entreprise de différents fichiers informatiques ne permettait pas de justifier l'écart ; que, tant dans la lettre d'observations du 16 octobre 2016 que dans le courrier du 28 novembre 2016, les inspecteurs du recouvrement de l'Urssaf ont rappelé à la société le principe de l'alignement de l'assiette du versement transport sur celle des cotisations de sécurité sociale, tout écart devant pouvoir être justifié par l'employeur, relevé une minoration de l'assiette du versement transport au regard de celle de l'assiette des cotisations, en notant que cet écart résultait en partie de rubriques de paie exclues du versement transport, l'autre partie restant sans explication de la part de l'employeur ; que la société a donc été suffisamment informée sur la nature et le montant des irrégularités qui lui étaient reprochées, celle-ci n'apportant aucun élément permettant de justifier la minoration de l'assiette de la cotisation versement transport.

Aux termes de l'article R.243-59 III du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, à l'issue du contrôle, les agents chargés du contrôle communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant contrôlé une lettre d'observations datée et signée par eux mentionnant l'objet du contrôle, les documents consultés, la période vérifiée et la date de la fin du contrôle. Ce document mentionne, s'il y a lieu, les observations faites au cours du contrôle. Ces dernières sont motivées par chef de redressement. A ce titre, elles comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et, le cas échéant, l'indication du montant des assiettes correspondant, ainsi que pour les cotisations et contributions sociales l'indication du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-7-7 qui sont envisagés.

Aux termes de l'article L.2333-65 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, l'assiette du versement est constituée par les salaires payés aux salariés mentionnés à l'article L. 2333-64. Les salariés et assimilés s'entendent au sens des législations de la sécurité sociale et les salaires se calculent conformément aux dispositions de ces législations.

Dans la lettre d'observations du 14 octobre 2016, les inspecteurs du recouvrement de l'Urssaf rappellent à la société qu'en application de ce texte, l'assiette du versement transport est constituée par l'ensemble des rémunérations soumises à cotisations au sens de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale.

La lettre d'observations indique à la société qu'à l'analyse du versement transport (VT), il est constaté que l'entreprise n'assujettit pas la totalité des rémunérations des salariés.

A cet égard, les inspecteurs du recouvrement de l'Urssaf mentionnent qu'il a été demandé à la société de justifier des bases VT déclarées par AOT, l'entreprise versant du VT pour des Autorités Organisatrices de Transport-AOT- sans rapport avec l'établissement de rattachement.

Ils relèvent que, malgré la fourniture de plusieurs fichiers par la société ('transport-201x-ttesSTES.xlsx' remis le 18 juillet 2016, 'Transport-201x version 22072016" remis le 22 juillet 2016, 'table 2015 effectifs ccu.xlsx' remis le 4 octobre 2016), la société n'était pas en mesure de justifier les assiettes déclarées et les écarts avec les rémunérations soumises à cotisations; qu'il a été constaté que, pour l'ensemble des salariés assujettis, le montant de la rémunération brute allouée ne supportait pas pour son intégralité la cotisation au versement transport, certaines rubriques de paie ayant été omises.

Aux termes de leur lettre de réponse du 28 novembre 2016, les inspecteurs du recouvrement de l'Urssaf rappellent que si, pour expliquer l'écart entre l'assiette versement transport et l'ensemble des rémunérations soumises à cotisations, ils ont pu identifier une problématique de paramétrage de certaines rubriques de paie, elles ne suffisent pas cependant à expliquer la totalité des écarts et qu'à cet égard, dans les annexes (onglet 'analyse année xx'), ils ont scindé la fraction expliquée ('dt bug') et inexpliquée ('dt régul').

Par conséquent, l'Urssaf a motivé le redressement en rappelant à la société le principe de l'alignement de l'assiette du versement transport sur celle des cotisations sociales et en relevant une minoration de l'assiette du versement transport par rapport à celle des cotisations, cet écart resultant en partie de rubriques de paie exclues à tort de l'assiette par l'employeur et, pour l'autre partie, de raisons inexpliquées par la société.

Aussi, au regard de la constatation de l'écart entre l'assiette du versement transport et des rémunérations soumises à cotisations, sans motifs valables de la société, la lettre d'observations du 14 octobre 2016 apparaît motivée sur les considérations de droit et de fait fondant le redressement.

Sur le mode de calcul du redressement, les inspecteurs du recouvrement de l'Urssaf précisent dans leur lettre d'observations, qu'à partir des fichiers mensuels transmis pour les années 2013, 2014 et 2014, ils ont déterminé l'assujettissement au versement transport des rémunérations des salariés en tenant compte des données de l'outil de planification [5] de la société et des tables des effectifs CCU; que, pour chaque établissement, la régularisation correspond à l'écart entre l'assiette VT attendue (colonne 'bases attendues après retraitement') et l'ensemble des bases VT déclarées à l'Urssaf pour chaque établissement (onglet 'analyse201x' du fichier de l'annexe); qu'ils ont donc procédé à une réintégration de l'écart global de chaque établissement au prorata de chaque AOT portée sur les déclarations Urssaf (onglet 'récap VT'). A la lettre d'observations était jointe une annexe 3 sur le montant des bases réintégrées et leurs ventilations par AOT.

La société a donc été clairement informée du mode de calcul du redressement opéré par l'Urssaf.

Par conséquent, le chef de redressement n°4, qui ne souffre d'aucune contestation sérieuse en l'état d'une lettre d'observations motivée, sera validé, sans qu'il y ait lieu de faire droit à la demande d'annulation partielle de la société.

Sur le chef de redressement n°6 (rupture forcée du contrat de travail : transactions suite licenciement pour fautes graves) pour un montant de 84.992 euros :

La société indique que plusieurs anciens salariés ont transigé avec elle après avoir été licenciés pour faute grave ; que l'Urssaf a considéré à tort que le montant des indemnités compensatrices de préavis qui auraient été dues en l'absence de faute grave devait être réintégré dans l'assiette des cotisations sociales ; qu'il n'est pas justifié qu'en versant une indemnité transactionnelle, l'employeur avait décidé de renoncer au licenciement pour faute grave qui est privatif du préavis et du versement de l'indemnité de licenciement, celui-ci ayant simplement entendu mettre un terme au litige l'opposant à un salarié ; que l'Urssaf ne peut soutenir que seule une renonciation expresse du salarié à percevoir l'indemnité de préavis peut permettre d'exclure celle-ci de l'assiette sociale ; qu'à cet égard, la renonciation 'en toutes lettres' de l'indemnité compensatrice de préavis par le salarié dans le protocole d'accord transactionnel n'est pas une condition nécessaire à l'exclusion des sommes de l'assiette des cotisations sociales, ainsi que l'a précisé la Cour de cassation ; qu'aux termes des transactions conclues avec la société, il est expressément prévu que l'indemnité visait à réparer le préjudice subi par le salarié et n'incluait aucun élément de salaire, les protocoles d'accord précisant que l'employeur ne renonçait pas au licenciement pour faute grave et ses effets, étant ajouté que, concernant plusieurs salariés, les indemnités versées étaient inférieures au montant de l'indemnité compensatrice de préavis à laquelle ils auraient pu prétendre et ce, indépendamment des congés payés afférents.

L'Urssaf fait valoir que les indemnités transactionnelles allouées lors d'un licenciement doivent être exclues de l'assiette des cotisations dès lors qu'elles ont été convenues forfaitairement pour compenser le préjudice causé par la perte de l'emploi et qu'il n'est pas établi qu'elle comprenait des éléments constitutifs de salaire (indemnité de préavis, congés payés, rappels de salaires); que les juges doivent rechercher quelle a été la commune intention des parties lors de la signature de la transaction ; que le salarié peut, dans le cadre d'une transaction, renoncer à des éléments de rémunération, mais une telle renonciation doit être expresse et non équivoque ; qu'il appartient à l'employeur, qui se prévaut d'une renonciation de son salarié, de prouver et d'établir que l'indemnité transactionnelle est constituée exclusivement de dommages-intérêts destinés à réparer le préjudice subi par le salarié, pour l'exclure de l'assiette des cotisations ; que, lorsque les indemnités transactionnelles sont versées à la suite d'un licenciement pour faute grave, la Cour de cassation impose aux juges du fond la démonstration qu'elles ne comportent aucune somme à caractère salarial ; qu'il ne ressort pas des accords transactionnels qui ont été conclus en l'espèce que les salariés ont renoncé expressément au versement de leur indemnité compensatrice de préavis, ceux-ci ayant reconnu être intégralement remplis de l'ensemble de leurs droits, et notamment celui au titre du préavis ; qu'ainsi, les indemnités transactionnelles versées comprennent nécessairement des indemnités de préavis soumises à cotisations sociales.

En application de l'article L.242-1 du code de la sécurité sociale, sont soumises à cotisation de sécurité sociale toutes sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail.

Les sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail sont comprises dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale à moins que l'employeur ne rapporte la preuve qu'elles concourent à l'indemnisation d'un préjudice.

Il résulte de la lettre d'observations du 14 octobre 2016 que plusieurs transactions ont été conclues par la société avec des salariés licenciés pour faute grave ; qu'une indemnité transactionnelle forfaitaire et versée à un salarié licencié pour faute grave comprend, par principe, l'indemnité compensatrice de préavis dès lors que le salarié n'y a pas expressément renoncé ; que le versement d'une indemnité en plus des indemnités de congés payés implique que l'employeur a renoncé au licenciement pour faute grave initialement notifié et que, compte tenu de sa nature salariale, le montant de l'indemnité compensatrice de préavis doit être intégré dans l'assiette des cotisations ; qu'il est procédé à la réintégration dans l'assiette des cotisations de la part de l'indemnité transactionnelle représentative de l'indemnité de préavis, laquelle a été déterminée selon la valeur du salaire de base de chacun des salariés concernés telle qu'elle apparaît au sein de la rubrique 001 'salaire de base' du plan de paie.

Si la société objecte que la signature d'une transaction n'implique pas qu'elle ait renoncé à la procédure du licenciement pour faute grave retenu contre les salariés concernés et que les indemnités versées n'ont pour objet que de réparer le préjudice imputable à la rupture du travail à l'exclusion de tout élément de nature salarial comme l'indemnité de préavis, laquelle est en principe exclue en cas de licenciement pour faute grave, il est constaté que la société, pas plus qu'en première instance, ne produit en cause d'appel ni les accords transactionnels conclus avec les salariés licenciés concernés ni l'annexe 4 de la lettre d'observations détaillant les régularisations opérées individuellement par année et par site. Il est relevé que la société ne communique que les protocoles d'accord transactionnels conclus avec MM. [B] et [I] dans le cadre de leur démission qui ne sont pas concernés par le redressement opéré par l'Urssaf à ce titre.

Par conséquent, la cour étant dans l'incapacité d'apprécier l'étendue des transactions conclues avec les salariés licenciés et une quelconque renonciation de leur part à toute indemnité compensatrice de préavis, le chef de redressement n°6 sera validé.

Sur le chef de redressement n°8 (versement transport : assiette pour les élus aux instances représentatives du personnel) pour 90.167 euros :

La société fait valoir que les AOT retenus par l'Urssaf pour les représentants du personnel ne sont pas ceux de leur SIRET de rattachement, de sorte que l'Urssaf n'a pas pris en compte le bon taux de versement transport.

L'Urssaf réplique que, contrairement à ce que soutient la société, les AOT retenues par les inspecteurs du recouvrement étaient bien celles des SIRET de rattachement.

Il résulte des articles L.2333-64 et L.2531-2 du code général des collectivités territoriales que les personnes morales, qui emploient plus de 9 salariés dans une zone de transport, sont, sauf exceptions, assujetties au versement de transport.

Le lieu de travail effectif des salariés dans le ressort du périmètre des transports urbains détermine l'assujettissement au versement de transport et les taux applicables. Pour les salariés itinérants amenés à travailler à plusieurs endroits différents et dont le lieu de travail ne peut être précisément déterminé, il y a lieu de se référer au lieu principal d'activité où les salariés exercent leur activité durant la majeure partie de leur temps de travail, cette situation s'appréciant au cours du mois civil.

Aux termes de la lettre d'observations du 14 octobre 2016, les inspecteurs du recouvrement de l'Urssaf relèvent que la société a exonéré de l'assiette de la cotisation versement transport au titre des années 2014 et 2015 les rémunérations allouées aux salariés détenteurs d'un mandat électif aux instances de représentation du personnel en les considérant comme des salariés itinérants, que la société n'apportait pas d'éléments justifiant du caractère itinérant de l'activité des élus tandis que l'exercice d'un mandat électif ne pouvait être considéré comme une activité professionnelle et que le statut de représentant du personnel ne faisait pas partie des exceptions à l'assujettissement au versement transport, de sorte qu'il convenait d'asseoir les rémunérations de ces derniers sur les taux applicables au sein de leurs établissements de rattachement tel qu'ils figuraient sur les données sociales (DADS, contrat de travail,...).

La société, qui conteste les taux appliqués par l'Urssaf, se borne à communiquer un tableau mentionnant, pour chaque salarié concerné, le SIRET de rattachement, l'agence de rattachement, le taux de l'établissement de rattachement qui aurait dû être retenu, la base VT régularisée, le taux retenu par l'Urssaf et la commune de rattachement prise en compte par l'Urssaf.

Mais, outre que la société ne produit pas l'annexe 3.2 établie par les inspecteurs du recouvrement de l'Urssaf concernant la liste des salariés et les montants des rémunérations concernées, elle ne communique aucune pièce complémentaire au soutien de son tableau permettant de justifier de l'établissement de rattachement des salariés, s'étant abstenue de communiquer le moindre document durant la phase contradictoire, et n'apporte pas la preuve que les AOT retenues par l'Urssaf ne correspondraient pas au SIRET de rattachement des salariés concernés.

Par conséquent, le chef de redressement n°8 sera validé.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a validé les chefs de redressement n°1, 4, 6, 8 et 12 (lequel n'est pas discuté en appel par la société), sauf à réparer une erreur matérielle affectant le jugement en ce que la lettre d'observations du 14 octobre 2016 émane de l'Urssaf Pays de la Loire et non de l'Urssaf Ile de France qui n'a délivré que les mises en demeure.

Sur l'appel incident de l'Urssaf concernant le chef de redressement n°13 (transaction et démission) pour 2.026 euros :

Aux termes de la lettre d'observations du 14 octobre 2016, les inspecteurs du recouvrement de l'Urssaf indiquent que seules les indemnités versées dans le cadre d'une rupture du contrat de travail à l'initiative de l'employeur peuvent bénéficier d'une exonération à hauteur de la fraction non assujettie à l'impôt sur le revenu en application de l'article 80 duodécies du code général des impôts et que doivent être intégralement soumises à cotisations les indemnités versées à l'occasion d'une démission. Ils ont constaté qu'au cours des années 2013 à 2015, des salariés démissionnaires, MM. [B] et [I], ont perçu des indemnités, lesquelles doivent être réintégrées dans l'assiette des cotisations et contributions, la rupture des contrats de travail étant intervenue à l'initiative des salariés.

Aux termes du jugement contesté qui a annulé ce chef de redressement, le tribunal retient que que les indemnités transactionnelles versées à MM. [F] et [B] avaient pour objet de réparer des préjudices subis par les salariés du fait des circonstances de la rupture de leur contrat de travail et qu'il convenait donc de les exonérer de l'assiette des cotisations sociales.

L'Urssaf conteste ce jugement, rappelant que les sommes versées à l'occasion d'une démission, même dans le cadre d'une transaction, ne peuvent être exonérées de cotisations, en l'absence de justification de démissions forcées par l'employeur.

Il résulte des dispositions du premier alinéa de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale que les sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail autres que les indemnités mentionnées au dixième alinéa, sont comprises dans l'assiette des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales, à moins que l'employeur rapporte la preuve qu'elles concourent, pour tout ou partie de leur montant, à l'indemnisation d'un préjudice.

Les sommes versées par l'employeur lors de la démission d'un salarié n'ont pas, en principe, la nature de dommages-intérêts, mais constituent des éléments de rémunération soumis aux cotisations de sécurité sociale. Elles ne peuvent avoir, en tout ou partie, le caractère de dommages-intérêts que s'il est établi qu'en réalité, la rupture du contrat de travail a été provoquée par l'employeur, notamment pour une des causes énoncées à l'article L. 321-1, devenu L. 1233-3, du code du travail et que les sommes versées réparent le préjudice né de la perte de l'emploi (Civ 2, 8 juillet 2010, pourvoi n°09-15.801).

Il résulte des protocoles transactionnels conclus entre la société et MM. [I] et [B] les 16 décembre 2013 et 18 mai 2015 qu'ils ont été régularisés dans le cadre de démissions des salariés et qu'ils avaient pour objet de prévenir toute difficulté avec la société, M. [I] ayant exposé des griefs à l'encontre de son employeur liés à des difficultés d'organisation qui l'ont poussé à démissionner, tandis que M. [B] faisait valoir que son consentement quant à la rupture de son contrat de travail aurait été vicié, celui-ci ayant subi des pressions.

Les transactions ayant été régularisées alors qu'il n'est pas formellement caractérisé que la rupture des contrats de travail aurait été provoquée par l'employeur dans le cadre de démissions imposées par celui-ci, c'est donc à bon droit que l'Urssaf considère que les indemnités versées aux salariés devaient être soumises à cotisations sociales.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a annulé le chef de redressement n°13 qu'il convient de valider.

- Sur les demandes accessoires :

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a condamné l'Urssaf et la société à supporter à parts égales les dépens de l'instance exposés à compter du 1er janvier 2019 et en ce qu'il les a déboutées de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Partie succombante, la société sera condamnée aux dépens d'appel et à payer à l'Urssaf 3.000 euros au titre de ses frais irrépétibles exposés à hauteur d'appel, la demande formée sur ce fondement par la société étant rejetée.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

DECLARE l'appel recevable,

CONFIRME le jugement rendu le 8 juillet 2019 par le tribunal de grande instance de Bobigny en toutes ses dispositions, sauf en celles ayant annulé le chef de redressement n°13 au titre des indemnités transactionnelles versées à la suite de démissions pour un montant de 2.026 euros, outre les majorations de retard correspondantes, et condamné l'Urssaf Ile de France à rembourser à la société [6] la somme de 2.026 euros au titre de ce chef de redressement annulé,

Y ajoutant,

RECTIFIE une erreur matérielle affectant le dispositif du jugement en ce que le redressement a été notifié par l'Urssaf Pays de la Loire aux termes de sa lettre d'observations du 14 octobre 2016 et non l'Urssaf Ile de France,

Statuant à nouveau,

VALIDE le chef de redressement n°13 notifié par l'Urssaf Pays de la Loire, dans sa lettre d'observations du 14 octobre 2016, au titre des indemnités transactionnelles versées à MM. [D] [B] et [X] [I] à la suite de leur démission pour un montant de 2.026 euros,

DEBOUTE la société [6] de sa demande d'annulation partielle au titre du chef de redressement n°4 concernant l'assiette du versement transport,

CONDAMNE la société [6] aux dépens d'appel,

CONDAMNE la société [6] à payer à l'Urssaf Ile de France 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE la société [6] de sa demande formée au titre de ses frais irrépétibles.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 19/08507
Date de la décision : 16/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-16;19.08507 ?
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