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14/06/2023 | FRANCE | N°22/10274

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 14 juin 2023, 22/10274


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRET DU 14 JUIN 2023



(n° 091/2023, 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 22/10274 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CF4OT



Décision déférée à la Cour : Décision du 22 Avril 2022 -Institut National de la Propriété Industrielle n° DC21-0062







DECLARANTE AU RECOURS



S.A.S. POULET BRAISE

Immatriculée au registre du commerce e

t des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 508 485 851

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domciliés ès qualité audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représentée et a...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRET DU 14 JUIN 2023

(n° 091/2023, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 22/10274 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CF4OT

Décision déférée à la Cour : Décision du 22 Avril 2022 -Institut National de la Propriété Industrielle n° DC21-0062

DECLARANTE AU RECOURS

S.A.S. POULET BRAISE

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de BOBIGNY sous le numéro 508 485 851

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domciliés ès qualité audit siège,

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée et assistée par Me Jérôme TASSI de la SARL AGIL'IT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0084

EN PRESENCE

MONSIEUR LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Marianne CANTET, chargée de mission, munie d'un pouvoir général

APPELEE EN CAUSE

S.A.R.L. TIKJDA

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Créteil sous le n° 818 991 093,

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

N'ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Françoise BARUTEL, conseillère et Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre,

Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre

Mme Françoise BARUTEL, conseillère

Mme Déborah BOHEE, conseillère.

Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON

ARRET :

Réputé contradictoire

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Françoise BARUTEL, conseillère, faisant fonction de Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Vu la décision du 22 avril 2022, par laquelle le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI) a dit justifiée la demande en déchéance de la marque française n° 09-3640084 déposée par la société Poulet Braisé,

Vu le recours formé le 20 mai 2022 par la société Poulet Braisé et ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 9 août 2022,

Vu la signification à la société Tikjda, à personne habilitée, de la déclaration de recours et des conclusions de la société Poulet Braisé par acte du 5 septembre 2022,

Vu les observations écrites du directeur général de l'INPI transmises le 14 mars 2023,

Le conseil de la société Poulet Braisé et la représentante de l'INPI entendus en leurs observations orales reprenant leurs écritures,

SUR CE,

Il est expressément renvoyé à la décision ainsi qu'aux écritures et observations susvisées.

La société Poulet Braisé est titulaire de la marque 'POULET BRAISE ; POULETS BRAISES ; LE POULET BRAISE ; LES POULETS BRAISES ; BRAISE POULET' n° 09-3640084 déposée le 27 mars 2009 et régulièrement renouvelée depuis pour les produits et services suivants :

' Classe 29 : Poisson, fruits et légumes conservés, congelés, séchés et cuits ; gelées, confitures, compotes ; 'ufs, lait et produits laitiers ; huiles et graisses comestibles ; graisses alimentaires ; beurre ; salaisons ; crustacés (non vivants) ; conserves de poisson ; fromages ; boissons lactées où le lait prédomine ; Classe 30 : Café, thé, cacao, sucre, riz, tapioca, sagou, succédanés du café ; farine et préparations faites de céréales, pain, pâtisserie et confiserie, glaces comestibles ; miel, sirop de mélasse ; levure, poudre pour faire lever ; sel, moutarde ; vinaigre, sauces (condiments) ; épices ; glace à rafraîchir ; sandwiches, pizzas ; crêpes (alimentation) ; biscuiterie ; gâteaux ; biscottes ; sucreries ; chocolat ; boissons à base de cacao, de café, de chocolat ou de thé ; Classe 43 : Services de restauration (alimentation) ; hébergement temporaire ; services de bars ; services de traiteurs ; services hôteliers ; réservation de logements temporaires ; crèches d'enfants ; mise à disposition de terrains de camping ; maisons de retraite pour personnes âgées ; pensions pour animaux'.

Prétendant que cette marque n'a pas fait l'objet d'un usage sérieux, la société Tikjda a présenté une demande en déchéance contre la marque POULET BRAISE n°09-3640084.

La décision du directeur de l'INPI a dit que la demande en déchéance était justifiée et que la société Poulet Braisé était déclarée déchue de ses droits sur la marque n° 09-3640084 à compter du 26 avril 2021 pour tous les produits et services visés à l'enregistrement.

La société Poulet Braisé sollicite une réformation partielle de la décision en ce qu'elle a prononcé la déchéance de la marque pour les produits et services suivants : 'sauces (condiments); pâtisserie et confiserie ; biscuits ; gâteaux ; sucreries ; chocolat ; services de restauration ; services de bars'.

La cour constate que la décision n'est pas contestée pour les autres produits et services visés à l'enregistrement.

Sur l'appréciation de l'usage sérieux

Conformément à l'article L.714-5 du code de la propriété intellectuelle, le titulaire d'une marque peut être déchu de ses droits si, pendant une période ininterrompue de cinq ans, la marque n'a pas fait l'objet d'un usage sérieux en France pour les produits ou services pour lesquels elle est enregistrée et qu'il n'existe pas de justes motifs de non-usage.

L'article L.714-5 précité précise qu' 'est assimilé à un usage [sérieux] ('.) :

1° L'usage fait avec le consentement du titulaire de la marque ;

(')

3° L'usage de la marque, par le titulaire ou avec son consentement, sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif, que la marque soit ou non enregistrée au nom du titulaire sous la forme utilisée'.

En application de l'article L. 716-3 du même code, la déchéance prend effet à la date de la demande ou, sur requête d'une partie, à la date à laquelle est survenu un motif de déchéance.

L'article L.716-3-1 prévoit que la preuve de l'exploitation incombe au titulaire de la marque dont la déchéance est demandée. Elle peut être apportée par tous moyens.

Enfin, l'article R.716-6 1° du même code précise : '(...) Pour les demandes en déchéance fondées sur l'article L.714-5, les pièces produites par le titulaire de la marque doivent établir que la marque contestée a fait l'objet d'un usage sérieux au cours des cinq années précédant la demande en déchéance'.

Il est acquis qu'une marque fait l'objet d'un usage sérieux lorsqu'elle est utilisée conformément à sa fonction essentielle qui est de garantir l'identité d'origine des produits ou des services pour lesquels elle a été enregistrée, aux fins de créer ou de conserver un débouché pour ces produits et services, à l'exclusion d'usages de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque.

Il convient de prendre en considération, dans l'appréciation du caractère sérieux de l'usage de la marque, l'ensemble des faits et des circonstances propres à établir la réalité de son exploitation commerciale, en particulier les usages considérés comme justifiés dans le secteur économique concerné pour maintenir ou créer des parts de marché au profit des produits ou des services protégés par la marque, la nature de ces produits ou de ces services, les caractéristiques du marché, l'étendue et la fréquence de l'usage de la marque (CJUE,11 mars 2003, Ansul, C 40/01).

Pour examiner le caractère sérieux de l'usage de la marque contestée, il convient de procéder à une appréciation globale en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d'espèce. En effet, l'usage sérieux d'une marque ne peut être démontré par des probabilités ou des présomptions, mais doit reposer sur des éléments concrets et objectifs qui prouvent un usage effectif et suffisant de la marque sur le marché concerné.

En l'espèce, la marque contestée a été déposée le 27 mars 2009 et son enregistrement a été publié au BOPI le 23 avril 2010. La demande en déchéance a été formée le 26 avril 2021.

Il n'est pas contesté que la société Poulet Braisé doit prouver l'usage sérieux de sa marque au cours de la période de cinq ans précédant la date de la demande de déchéance soit du 26 avril 2016 au 26 avril 2021.

La cour observe que le directeur de l'INPI a pertinemment relevé que la plupart des éléments de preuve de l'usage sont datés dans la période pertinente, et que si certaines pièces ne sont pas datées ou font mention d'une date postérieure, elles ne doivent pas être pour autant exclues du cadre de l'appréciation globale dès lors qu'elles constituent un indice d'une certaine continuité dans l'usage de la marque contestée.

Sur l'usage sérieux pour les 'sauces (condiments)'

La société Poulet Braisé fait valoir, concernant l'exploitation pour les 'sauces', que le signe POULET BRAISE est apposé sur les emballages de sauces commercialisées dans les restaurants POULET BRAISE ; qu'ainsi que l'a retenu à juste titre l'INPI l'usage du signe est ainsi réalisé dans une forme modifiée, les termes POULET BRAISE, répétés à cinq reprises dans la marque contestée, étant dominants, et la présentation particulière, les couleurs et les lettres adjointes PB, n'en altérant pas le caractère distinctif ; que ce signe est globalement équivalent à la marque contestée ; que cette marque est distinctive pour des sauces ; que la sauce verte, qui accompagne les plats dans les restaurants POULET BRAISE, est vendue séparément en tube de 175 g ou en 'squeeze' de 280 g ; qu'elle a fait l'objet de nombreuses publications sur les réseaux sociaux en 2018, 2019 et 2020 en tube comme en squeeze ; que dans les restaurants la sauce est servie dan une coupelle marquée 'POULET BRAISE', ce qui est imposé dans les contrats de franchise ; qu'elle a vendu plus de 15 000 sauces en squeeze et plus de 6 000 sauces en tube en 2020, et plus de 34 000 sauces en squeeze en 2021 ; qu'elle a servi et vendu plus de 700 000 coupelles de sauces en 2020, et plus de 1,6 millions de coupelles en 2021.

La cour constate, ainsi que pertinemment relevé par le directeur de l'INPI, que l'apposition du signe POULET BRAISE, distinctif pour des sauces, sur les tubes, les squeeze, comme sur les coupelles, dans une typographie particulière, constitue, pour des sauces, un usage sous une forme modifiée du signe verbal litigieux n'en altérant pas le caractère distinctif et dominant de l'élément verbal POULET BRAISE.

Le directeur de l'INPI a relevé dans la décision contestée que les pièces produites devant lui ne comportent aucun élément de détail relativement aux sauces, et que les bons à tirer des conditionnements de sauce ne sont corroborés par aucun élément chiffré de sorte que les pièces transmises ne fournissent pas d'indication suffisante concernant l'importance de l'usage effectif de la marque contestée pour des 'sauces'.

Dans la présente instance le directeur de l'INPI observe que la société Poulet Braisé a versé de nouvelles pièces devant la cour, que la pièces 2-3 relative à une commande en 2017 de 25 000 tubes de sauces marqués POULET BRAISE, tout comme la pièce 2-4, attestée par l'expert comptable et faisant état des ventes de squeeze et de tubes de sauces sont des pièces pertinentes. Il ajoute que si la cour considérait que ces nouvelles pièces apportent la preuve d'un usage sérieux pour les 'sauces', elle pourrait réformer la décision de ce chef.

La cour constate que la société Poulet Braisé justifie dans la présente instance de publications sur les réseaux sociaux en 2019, 2020 et 2021 de photos de tubes de sauces et des 'squeezes' (conditionnement dont la forme facilite la pression pour faire sortir la sauce) POULET BRAISE, ainsi que de coupelles marquées POULET BRAISE dans lesquelles sont servies les sauces dans les restaurants POULET BRAISE. Elle produit aussi les chiffres de ventes, certifiés par un expert-comptable, pour l'année 2020, à savoir plus de 15 000 sauces en squeeze, plus de 6 000 sauces en tube, et plus de 700 000 coupelles de sauces. Elle verse également les données chiffrées pour l'année 2021, à savoir plus de 34000 sauces en squeeze et plus de 1,6 millions de coupelles, ces chiffres attestant d'une exploitation pendant les quatre mois de la période pertinente et d'une continuité d'exploitation postérieurement.

La cour rappelle que l'usage de la marque peut être minime, à condition qu'il ne soit ni sporadique ni symbolique car destiné au seul maintien des droits sur la marque, et que le caractère sérieux doit être apprécié au regard du secteur économique en cause.

En l'espèce, les différents éléments susvisés, pris dans leur ensemble, permettent d'établir que l'usage du signe contesté ne constitue pas un usage de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque mais répond bien à une réelle justification commerciale permettant de créer ou de conserver un débouché pour les sauces (condiments).

La décision sera dès lors réformée en ce qu'elle a déchu la société Poulet Braisé de ses droits sur la marque pour les 'sauces (condiments)'.

Sur l'usage sérieux pour des 'pâtisserie et confiserie ; biscuits; gâteaux ; sucreries ; chocolat'

La société Poulet Braisé fait valoir qu'elle propose des desserts, et notamment des tiramisus, dans des bocaux portant sa marque ainsi que cela ressort de nombreuses publications sur internet ; que sur la période 2019-2020 elle a vendu près de 65 000 gâteaux portant la marque POULET BRAISE, ce qui est significatif sur le territoire français ; que son exploitation est donc sérieuse pour des 'pâtisserie et confiserie ; biscuits; gâteaux ; sucreries'.

La cour constate, ainsi que pertinemment relevé par le directeur de l'INPI, que l'apposition du signe POULET BRAISE, distinctif pour des 'pâtisserie et confiserie ; biscuits; gâteaux ; sucreries ; chocolat', sur des bocaux de verre dans lesquels sont conditionnés des tiramisus, dans une typographie particulière, constitue, pour lesdits produits, un usage sous une forme modifiée du signe verbal litigieux n'en altérant pas le caractère distinctif et dominant de l'élément verbal POULET BRAISE.

Le directeur de l'INPI a relevé dans la décision contestée que les pièces produites devant lui ne comportent aucun élément de détail relativement aux desserts, de sorte que les pièces transmises ne fournissent pas d'indication suffisante concernant l'importance de l'usage effectif de la marque contestée pour des 'pâtisserie et confiserie ; biscuits; gâteaux ; sucreries'.

Dans la présente instance, le directeur de l'INPI observe que la société Poulet Braisé a versé de nouvelles pièces devant la cour, et notamment que la pièce 2-4, attestée par l'expert comptable, faisant état des ventes de plus de 60 000 tiramisus en 2019 et 2020, est une pièce pertinente. Il ajoute que si la cour considérait que ces nouvelles pièces apportent la preuve d'un usage sérieux pour les 'tiramisus', qui relèvent de la catégorie générale des 'pâtisserie' et 'gâteaux' couverts par l'enregistrement, elle pourrait réformer la décision de ce chef.

La cour constate que la société Poulet Braisé justifie dans la présente instance de publications sur les réseaux sociaux en 2019 et 2020 relativement à ses desserts de type tiramisus présentés dans des bocaux de verre portant la marque POULET BRAISE, distinctive pour de tels produits. Elle verse aussi au débat les chiffres de ventes, certifiés par un expert-comptable, pour l'année 2019, à savoir près de 20 000 tiramisus pour un chiffre d'affaires de près de 75 000 euros, et pour l'année 2020, plus de 45 000 tiramisus correspondant à un chiffre d'affaires de près de 200 000 euros. Elle verse également les données chiffrées pour l'année 2021, à savoir plus de 61 000 ventes de tiramisus, ces chiffres attestant d'une exploitation pendant les quatre mois de la période pertinente et d'une continuité d'exploitation postérieurement.

Les tiramisus et les desserts ainsi exploités sont des pâtisseries et des gâteaux. Les différents éléments versés au débat, pris dans leur ensemble, permettent ainsi d'établir que l'usage du signe POULET BRAISE pour les 'pâtisserie ; gâteaux' ne constitue pas un usage de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque mais répond bien à une réelle justification commerciale permettant de créer ou de conserver un débouché. Les 'biscuits' qui appartiennent à la catégorie générale des gâteaux ou des pâtisseries, ont les mêmes ingrédients et la même destination, et ne constituent pas pour le consommateur visé une catégorie autonome, de sorte que les preuves produites par la société Poulet Braisé valent aussi usage sérieux pour les biscuits.

La décision sera dès lors réformée en ce qu'elle a déchu la société Poulet Braisé de ses droits sur la marque pour les 'pâtisserie ; gâteaux ; biscuits'.

En revanche, la société Poulet Braisé ne justifie d'aucune exploitation de sa marque pour des 'confiserie ; sucreries ; chocolat', et les éléments de preuve rapportés relativement à des desserts et notamment des tiramisus ne permettent pas de démontrer l'usage sérieux de la marque pour les 'confiserie ; sucreries ; chocolat' qui n'appartiennent pas à la catégorie générale des pâtisseries, des gâteaux et des biscuits. La décision contestée sera confirmée sur ce point.

Sur l'usage sérieux pour des 'services de bar'

La société Poulet Braisé fait valoir qu'elle propose des services de bar pour des boissons apéritives, et notamment des cocktails, qu'elle promeut sur internet ainsi que par des flyers et des publicités portant sa marque POULET BRAISE ; qu'en 2019 elle a vendu plus de 15 000 cocktails, et en 2020, près de 35 000 cocktails ; qu'elle est en outre titulaire d'une licence IV lui permettant de vendre toutes les boissons ; que son exploitation est donc sérieuse pour des 'services de bar'.

La cour constate, ainsi que pertinemment relevé par le directeur de l'INPI, que l'utilisation du signe POULET BRAISE, distinctif pour des 'Services de bar', constitue, pour lesdits services, un usage sous une forme modifiée du signe verbal litigieux n'en altérant pas le caractère distinctif et dominant de l'élément verbal POULET BRAISE.

Le directeur de l'INPI a relevé dans la décision contestée que les pièces produites devant lui ne comportent aucun élément de détail relativement aux services de boissons de sorte que les pièces transmises ne fournissent pas d'indication suffisante concernant l'importance de l'usage effectif de la marque contestée pour des 'services de bar' .

Dans la présente instance, le directeur de l'INPI observe que la société Poulet Braisé a versé de nouvelles pièces devant la cour, et notamment que la pièce 2-4, attestée par l'expert comptable, faisant état des ventes de plus de 50 000 cocktails en 2019 et 2020, est une pièce pertinente. Il ajoute que si la cour considérait que ces nouvelles pièces apportent la preuve d'un usage sérieux pour les 'services de bar', elle pourrait réformer la décision de ce chef.

La cour constate que la société Poulet Braisé justifie dans la présente instance de publications sur les réseaux sociaux en 2019 et 2020 relativement à des services de boissons et notamment des cocktails offerts dans les restaurants de son enseigne POULET BRAISE. Elle verse aussi au débat les chiffres de ventes, certifiés par un expert-comptable, pour l'année 2019, à savoir plus de 16 000 Mojito sirop et Mojito Bissap vendus pour un chiffre d'affaires de plus de 80 000 euros, et pour l'année 2020, plus de 35 000 cocktails correspondant à un chiffre d'affaires de près de 180 000 euros. Elle verse également les données chiffrées pour l'année 2021, à savoir plus de 35 000 ventes de cocktails, ces chiffres attestant d'une exploitation pendant les quatre mois de la période pertinente et d'une continuité d'exploitation postérieurement pour des 'services de bar' sous la marque contestée.

Les différents éléments versés au débat, pris dans leur ensemble, permettent ainsi d'établir que l'usage du signe litigieux pour les 'services de bar' ne constitue pas un usage de caractère symbolique ayant pour seul objet le maintien des droits conférés par la marque mais répond bien à une réelle justification commerciale permettant de créer ou de conserver un débouché.

La décision sera dès lors réformée en ce qu'elle a déchu la société Poulet Braisé de ses droits sur la marque pour les 'services de bar'.

Sur l'usage sérieux pour les 'services de restauration'

La société Poulet Braisé fait valoir que les termes POULET BRAISE sont distinctifs pour des services de restauration en ce que ce n'est pas la désignation nécessaire d'un restaurant même spécialisé dans la volaille, et que les termes SUSHI et L'ENTRECOTE ont été jugés distinctifs pour des restaurants ; qu'en conséquence les exploitations du signe POULET BRAISE sont une exploitation de la marque litigieuse sous une forme modifiée n'en altérant pas le caractère distinctif, de sorte qu'elle justifie d'un usage sérieux pour des services de restauration.

Pour justifier de son usage de la marque complexe litigieuse pour des services de restauration la société Poulet Braisé produit des captures d'écran des devantures de restaurants, des extraits de comptes instagram et facebook, ainsi que des sites internet Uber Eats et Deliveroo et des articles de presse, sur lesquels figurent les signes 'PB' ou 'PB POULET BRAISE'.

Le directeur de l'INPI a retenu à juste titre que les termes POULET BRAISE désignent une préparation culinaire à base de poulet et renvoient donc à une caractéristique des services de restauration à savoir une offre de poulet braisé avec laquelle le signe POULET BRAISE présente un lien direct et concret, de sorte que le signe POULET BRAISE n'est pas distinctif pour des services de restauration. Il a en outre pertinemment relevé que la distinctivité de la marque complexe litigieuse au regard des services de restauration vient de ce qu'elle consiste en douze termes, étant ajouté qu'ils sont répétés et déclinés au singulier, au pluriel, avec et sans article, et qu'en conséquence les signes exploités 'PB' ou 'PB POULET BRAISE', qui modifient substantiellement la marque complexe litigieuse, ne peuvent être considérés comme un usage de ladite marque complexe pour des services de restauration.

Il résulte des développements qui précèdent qu'il y a lieu de confirmer la décision du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle du 22 avril 2022 portant déchéance des droits de société Poulet Braisé sur la marque française n°09-3640084 sauf en ce qu'elle l'a déclarée déchue de ses droits pour les 'sauces (condiments) ; pâtisserie; gâteaux ; biscuits ; services de bar'.

La procédure de recours contre une décision du directeur général de l'INPI ne donne pas lieu à condamnation aux dépens et à l'application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité ne commande pas de faire droit à la demande formée par la société Poulet Braisé sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Par arrêt réputé contradictoire,

Confirme la décision du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle du 22 avril 2022 portant déchéance des droits de la société Poulet Braisé sur la marque française POULET BRAISE n°09-3640084 sauf en ce qu'elle l'a déclarée déchue de ses droits pour les 'sauces (condiments) ; pâtisserie; gâteaux ; biscuits ; services de bar' ;

Dit n'y avoir lieu à condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que le présent arrêt sera notifié par le greffe aux parties et au directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle, par lettre recommandée avec accusé de réception.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 22/10274
Date de la décision : 14/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-14;22.10274 ?
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