Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 14 JUIN 2023
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/10745 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3NOI
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Avril 2017 -Tribunal de Commerce de Paris - RG n° 2015031610
APPELANTE
Madame [B], [P], [J] [M]
Née le [Date naissance 1] 1958 à [Localité 6] (34)
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Philippe PAINGRIS, avocat au barreau de PARIS, toque : E2050
INTIMEE
LA SOCIÉTÉ GÉNÉRALE FACTORING
anciennement Compagnie Générale d'Affacturage
Immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 702 016 312
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représentée par Me Christophe EDON de la SELEURL CHRISTOPHE EDON CONSEIL - C.E.C, avocat au barreau de PARIS, toque : B0472
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Vincent BRAUD, Président, et M. Marc BAILLY,Président de chambre.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M. Marc BAILLY, Président de chambre,chargé du rapport.
M. Vincent BRAUD, Président
MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère
Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marc BAILLY, Président de chambre et par Anaïs DECEBAL, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
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FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par déclaration reçue au greffe de la cour le 30 mai 2017, Mme [B] [M] a interjeté appel du jugement rendu le 27 avril 2017 par le tribunal de commerce de Paris dans l'instance l'opposant à la société Compagnie Générale d'Affacturage, jugement dont le dispositif est rédigé en ces termes :
'Condamne Madame [B] [M] à payer à la SA COMPAGNIE GÉNÉRALE D'AFFACTURAGE - CGA :
- la somme de 92 082,72 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 novembre 2011;
- la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du CPC ;
Ordonne la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil ;
Déboute Madame [B] [M] de ses demandes reconventionnelles ;
Déboute les parties de leurs demandes autres, plus amples au contraires ;
Ordonne l'exécution provisoire ;
Condamne Madame [B] [M] aux dépens.'
Par arrêt du 15 mai 2019 auquel il convient de se référer pour l'exposé des moyens et prétentions des parties, la cour a ordonné le sursis à statuer sur l'ensemble des demandes formées par les parties, dans l'attente d'une décision définitive de la juridiction pénale dans la procédure suivie au tribunal de grande instance de Bobigny sous les numéros d'instruction 8/14/6 et parquet 1312300187 à l'encontre de Mme [B] [M] du chef d'escroquerie, a dit que l'affaire sera rappelée à une audience de mise en état, sur conclusions de la partie la plus diligente justifiant de l'événement ayant motivé le sursis à statuer, et a réservé les dépens et les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
La procédure a été reprise à l'initiative de Mme [M] exposant avoir été relaxée des fins de la poursuite par arrêt de la Cour d'appel de Paris du 16 juin 2021, devenu définitif.
À l'issue de la procédure d'appel clôturée le 14 mars 2023 les moyens et prétentions des parties s'exposent de la manière suivante.
Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 9 mars 2023 l'appelante
en ces termes, demande à la cour de :
'INFIRMER le Jugement rendu le 27 Avril 2017 par le Tribunal de Commerce de Paris a l'encontre de Mme [M] et déféré à la censure de la Cour,
DEBOUTER la Société Générale Factoring de sa demande de condamnation envers Mme [M],
ORDONNER le remboursement par la Société Générale Factoring des sommes versées par Mme [M] au titre de l'exécution provisoire,
CONDAMNER la Société Générale Factoring au paiement d'une somme de Quatre Mille Cinq Cent Euros (4.500 €) sur le fondement de l'article 700 du C.P.C,
CONDAMNER la Société Générale Factoring au paiement des dépens.'
Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 15 février 2023 l'intimé
demande à la cour de :
'DECLARER recevable et bien fondée la SOCIETE GENERALE FACTORING en ses
conclusions ;
Ce faisant,
DECLARER Madame [B] [M] mal fondée en son appel du jugement rendu le 27 avril 2017 par le Tribunal de Commerce de Paris mal fondé et l'en débouter,
CONFIRMER le jugement rendu le 27 avril 2017 par le Tribunal de Commerce de Paris en l'ensemble de ses dispositions ;
CONDAMNER Madame [B] [M] à payer à la SOCIETE GENERALE FACTORING la somme de 92.082,72 € augmentée des intérêts au taux légal à compter du 5 septembre 2011 jusqu'à complet paiement,
ORDONNER la capitalisation des intérêts, conformément à l'article 1154 du Code Civil,
DECLARER la demande de Madame [B] [M] tendant à voir reconnaître la responsabilité de la SOCIETE GENERALE FACTORING pour manquement à son devoir de Conseil et de vigilance, irrecevable comme prescrite,
Subsidiairement,
DIRE ET JUGER que la SOCIETE GENERALE FACTORING n'a pas manqué à son devoir de Conseil et de vigilance,
DEBOUTER Madame [B] [M] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,
En tout état de cause,
CONDAMNER Madame [B] [M] à payer à la SOCIETE GENERALE FACTORING la somme de 5.000 € en cause d'appel, au titre de l'article 700 du CPC,
CONDAMNER Madame [B] [M] en tous les dépens de première instance et d'appel.'
Par application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions précitées.
MOTIFS DE LA DECISION
Liminairement, il doit être souligné qu'aux termes de ses conclusions d'appelante Mme [M] se saisit des fautes qu'aurait commises le factor dans la conclusion du contrat, au cours de son exécution, et en fin de contrat, pour demander à la cour de débouter celui-ci de sa demande de condamnation à son encontre, mais elle ne formule aucune demande de nullité ni demande de dommages et intérêts, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la question de la prescription qu'avait tranchée le tribunal et au sujet de laquelle l'intimé demande à la cour de déclarer irrecevable comme étant prescrite 'la demande de Madame [B] [M] tendant à voir reconnaître la responsabilité de la SOCIETE GENERALE FACTORING pour manquement à son devoir de Conseil et de vigilance.'
Le tribunal de commerce de Paris, pour entrer en voie de condamnation en paiement à l'encontre de Mme [M], a exactement relevé quant à la matérialité des faits:
- que Mme [M] dans le cadre de son activité d'auto entrepreneur sous l'enseigne Janet production est signataire du contrat d'affacturage, ce qu'elle ne conteste pas,
- qu'elle a signé de sa main les bordereaux de remise,
- qu'elle n'a élevé aucune contestation lorsque la CGA n'ayant pu obtenir le paiement des créances cédées au motif qu'aucune prestation n'avait été commandée, ni à Mme [M] ni à Janet Production, le 5 septembre 2011 lui a adressé les avis de litige suite à la contestation opposée par les (supposés) débiteurs et l'a mise en demeure de lui régler la somme de 92 082,72 euros correspondant à des 'prestations de réalisations de films publicitaires effectués pour le compte de communes du sud de la France', créances cédées et irrecouvrables,
- qu'elle s'est toutefois présentée à la réunion de concertation du 11 octobre 2011 qui a fait suite à la mise en demeure adressée par le factor, accompagnée de M. [X], lequel se présentait comme agent commercial de Janet Production, réunion à l'issue de laquelle des engagements ont été pris, sans que Mme [M] n'élève la moindre contestation, ni lors de cette entrevue, ni postérieurement,
- que ces engagements (produire la liste des communes concernées pour établir le plan de remboursement) n'ont pas été suivis d'effet (seul M. [X] répondant et en transmettant un projet de convention avec une commune du Nord de la France sans rapport avec les factures cédées) d'où une relance en ce sens, par mail du 17 octobre 2011 sommant Mme [M] de transmettre pour régularisation un récapitulatif des sommes dont elle attendait le versement et les actions propres à débloquer la situation vis à vis des communes concernées, auquel Mme [M] n'a pas répondu,
- qu'elle n'a jamais porté plainte contre M. [X] son ex-mari, alors même que selon ses propres déclaration, elle aurait été lé victime de ses agissements.
Il s'évince de ces constatations du premier juge que Mme [M] ne peut se dédouaner de ses obligations contractuelles en prétendant que seul son mari a agi à son total insu.
Au soutien de ses prétentions d'appelante, Mme [M] faisait valoir :
- que le contrat d'affacturage est nul dans la mesure où son activité de coiffure à domicile ne pouvait générer des factures à affacturer : l'objet du contrat est inexistant,
- que le contrat d'affacturage litigieux n'a pas pris effet, dans la mesure où il stipulait expressément qu'il était soumis à des conditions suspensives qui n'ont pas été remplies,
tenant au cautionnement personnel de Mme [M] et à la transmission à la CGA d'une
fiche de souscription complétée intégralement, de la dernière liasse fiscale, des statuts
signés, de la copie de sa pièce d'identité et de celle de la caution, du barème signé, qui n'ont
jamais été remis au factor,
- que la CGA ne peut engager la responsabilité de Mme [M] sur un contrat incomplet alors que Mme [M] ignore au départ que la banque va décider d'activer ce contrat sans les documents initialement prévus,
- que la CGA ne peut s'exonérer de sa responsabilité en prétendant qu'elle seule pouvait se prévaloir d'un défaut de production des documents contractuels, dès lors que la fourniture de ces documents était une condition suspensive pour la mise en place du contrat
d'affacturage,
- qu'elle doit être mise hors de cause en raison de la collaboration de la CGA avec M. [R] [X] qui a réalisé les opérations litigieuses alors qu'il n'avait aucun rôle juridique ni aucun pouvoir, ni habilitation, et n'était pas partie au contrat, le factor faisant
fonctionner le compte à la demande de M. [R] [X] et validant la prise en
charge des factures remises par celui-ci, de sorte que la faute ainsi commise par la CGA
exclut sa possibilité de recouvrement des sommes envers Mme [M].
En premier lieu il est établi que Mme [M] a signé le contrat d'affacturage en sa qualité d'entrepreneur exploitant sous l'enseigne 'Janet Production' - et non pas, comme elle le prétend, en qualité de 'coiffeuse à domicile'.
Ensuite, comme défendu par la Société Générale Factoring, les 'conditions suspensives' étant au seul bénéfice de la société CGA, seule cette dernière pouvait se prévaloir du défaut de production des documents sollicités, notamment pour refuser de consentir le concours. Le consentement de Mme [M] était déjà antérieurement exprimé, et l'exécution du contrat par le factor créditant le compte de la société du montant des factures présentées comme cédées, signifie qu'il a renoncé à réclamer la production desdis documents, ce qui n'est d'ailleurs guère surpenant dans la mesure où ils ne présentent pas d'intérêt s'agissant d'une activité commerciale exercée en nom personnel telle que celle exploitée par Mme [M] sous l'enseigne Janet Production.
Mme [M] n'est pas fondée à défendre que le contrat ne se serait jamais formé.
Ensuite, il est constant que ce contrat a été exécuté.
Par ailleurs, Mme [M] ne peut sérieusement soutenir que 'l'absence de respect de ce processus par la Société Générale Factoring est à l'origine exclusive des impayés subis dans le cadre de ce contrat d'affacturage', impayés qui en réalité trouvent leur source dans les malversations de M. [X] servi par la passivité complaisante de Mme [M], établie par les faits de l'espèce, quant bien même elle ne contitue pas une infraction pénale.
Aussi, contrairement à ce qu'elle soutient, arguant notamment de son abence de compétence professionnelle en matière de production de films et de ses choix professionnels qui ont toujours été en d'autres domaines (coiffure-esthétique et plus récemment, événementiel), Mme [M] ne s'est pas tenue à l'écart de la gestion de la société au profit de son ex-mari M. [X], puisque toutes les factures ont été signées par Mme [M] et que M. [X] n'a été connu du factor qu'à l'occasion de la réunion du 11 octobre 2011, où il a été présenté comme agent commercial de la société Janet Production, et à laquelle Mme [M] admet avoir assisté.
Surtout, bien que concluant longuement sur le rôle prédominant qu'a eu son ex-mari dans les relations avec la société de factoring, Mme [M] ne conteste pas expressément avoir signé de sa main les bordereaux de cession de créance. Dans ces conditions elle est particulièrement malvenue à faire reproche au factor de s'être abstenu de vérification préalable et d'avoir maintenu le contrat d'affacturage malgré un premier impayé.
En tout état de cause, le grief selon lequel le factor aurait fait preuve de 'la plus grande négligence' dans la mise en place du contrat puis dans son exécution, en traitant avec M. [X] qui n'avait aucun pouvoir de gestion dans la société et n'était pas partie au contrat, ne saurait avoir pour conséquence de libérer Mme [M] de la dette à laquelle elle est contractuellement tenue.
Par conséquent, le jugement déféré sera confirmé en ce que le tribunal est entré en voie de condamnation à l'encontre de Mme [M], au titre des dettes nées du contrat d'affacturage signé le 20 avril 2010, pour la somme de 92 082,72 euros avec intérêts au taux légal à compter du 2 novembre 2011, somme dont il est dûment justifé et que Mme [M] ne conteste d'ailleurs pas.
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Sur les dépens et les frais irrépétibles
L'appelant qui échoue dans ses demandes, supportera la charge des dépens et ne peut prétendre à aucune somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l'équité il y a lieu de faire droit à la demande de l'intimé formulée sur ce même fondement, mais uniquement dans la limite de la somme de 2 500 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant dans les limites de l'appel,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Et y ajoutant
CONDAMNE Mme [B] [M] à payer à la Société Générale Factoring auparavant dénommée Compagnie Générale d'Affacturage, la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à raison des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;
DÉBOUTE Mme [B] [M] de sa propre demande formulée sur ce même fondement;
CONDAMNE Mme [B] [M] aux entiers dépens d'appel.
LE GREFFFIER LE PRÉSIDENT