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13/06/2023 | FRANCE | N°20/01158

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 13 juin 2023, 20/01158


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRET DU 13 JUIN 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/01158 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBNPL



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Octobre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F18/00681



APPELANTE



Société SYNERGIE

[Adresse 1]

[Local

ité 3]/FRANCE

Représentée par Me Marion PAOLETTI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1669



INTIMEE



Madame [G] [T]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Nathalie LEHOT-C...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRET DU 13 JUIN 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/01158 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBNPL

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Octobre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° F18/00681

APPELANTE

Société SYNERGIE

[Adresse 1]

[Localité 3]/FRANCE

Représentée par Me Marion PAOLETTI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1669

INTIMEE

Madame [G] [T]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Nathalie LEHOT-CANOVAS, avocat au barreau d'ESSONNE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,

Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,

Madame Catherine VALANTIN, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [G] [T], née en 1979 a été engagée le 16 juin 2016, dans le cadre d'une succession de contrats d'intérim à temps plein en qualité de préparatrice de commandes par la SE Synergie [Localité 6] pour travailler au sein de la société XPO Logistics, devenue la société XPO Supply Chain France, à [Localité 5].

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective du travail temporaire.

La convention applicable dans l'entreprise utilisatrice était la convention collective des transports routiers et des activités auxiliaires du transport.

Le 15 février 2018, le contrat liant Mme [T] et la société Synergie a pris fin.

Sollicitant des rappels de salaires et diverses indemnités, outre des dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de bonne foi, Mme [T] a saisi le 12 juillet 2018 le conseil de prud'hommes de Longjumeau qui, par jugement du 14 octobre 2019, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a statué comme suit :

- condamne la société Synergie [Localité 6] prise en la personne de son représentant légal, à payer à Mme [T] les sommes suivantes :

* 714,63 € à titre de rappels de salaire,

* 71,46 € à titre de congés payés sur rappels de salaire,

* 71,46 € à titre d'incidence sur 13ème mois,

* 85,75 € à titre d'incidence indemnité de fin de mission,

* 2 231,33 € à titre de rappels de salaire 13ème mois,

* 2 280 € à titre de rappels de salaire prime de productivité,

* 355,5 € à titre de rappels de salaire prime de productivité,

* 484,68 € à titre d'incidence des rappels de salaire sur la prime de précarité (indemnité de fin de mission),

* 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement de la société à son obligation de bonne foi dans l'exécution du contrat de travail,

- ordonne à la société Synergie [Localité 6] de remettre à Mme [T] un bulletin de salaire récapitulatif conforme à la présente décision et ce sous astreinte de 15 euros par jour à compter du 15ème jour après la notification du présent jugement, et jusqu'au 90ème jour,

- dit que le conseil se réserve la liquidation de l'astreinte,

- condamne la société Synergie [Localité 6] à payer à Mme [T] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- déboute Mme [T] du surplus de ses demandes,

- déboute la société Synergie [Localité 6] de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles,

- condamne la société Synergie [Localité 6] aux entiers dépens de l'instance, y compris ceux afférents aux actes de procédure éventuels de la présente instance ainsi que ceux de l'exécution pour toute voie légale et notamment les frais des articles 10 et 12 du décret du 08 mars 2001 portant tarification des actes d'huissier.

Par déclaration du 07 février 2020, la société Synergie a interjeté appel de cette décision, notifiée le 08 janvier 2020.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 6 juillet 2020, la société Synergie demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 14 octobre 2019 par le conseil de prud'hommes de Longjumeau, et, statuant à nouveau :

- débouter Mme [T] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner Mme [T] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 12 août 2020, Mme [T] demande à la cour de':

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Longjumeau dans toutes ses dispositions, Y ajoutant,

- condamner la société Synergie [Localité 6] à verser à Mme [T] la somme de 2 500€ au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er février 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 6 avril 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de rappels de salaire

La société Synergie soutient que les calculs établis par Mme [T] ne sont pas fiables en ce qu'ils incluent des heures durant lesquelles elle a été absente ; que les intérimaires sont exclus de la mensualisation ; que le tableau produit établit que la salariée a été remplie de ses droits.

Mme [T] réplique qu'elle a été recrutée pour une durée du travail fixée à 35 heures hebdomadaires ; que son employeur était donc tenu de lui fournir le nombre d'heures de travail contractuellement fixé ; qu'il ne pouvait réduire unilatéralement cette durée ; qu'en tenant compte de ses absences, elle a procédé à un calcul des heures qui lui étaient dues par rapport à celles qui lui ont été rémunérées, qui correspond à 68,98 heures.

Aux termes de l'articles 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Il est de droit que l'employeur est tenu de payer la rémunération et de fournir un travail au salarié qui se tient à sa disposition.

En l'espèce, c'est en vain que la société Synergie sur qui repose la charge de la preuve du versement de l'entière rémunération, fait valoir que les bulletins de paie sont établis le 12 du mois, que certaines missions se chevauchent sur plusieurs mois et d'autres sont inférieures à un mois, que la rémunération est versée à partir des déclarations de l'entreprise utilisatrice et que la salariée sollicite le paiement d'heures pour des périodes durant lesquelles elle était absente alors que les pièces que l'employeur verse aux débats ne permettent pas à la cour de vérifier que l'intégralité des salaires a été versée à la salariée conformément aux contrats de mission. En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont condamné la société Synergie à verser à Mme [T] la somme de 714,63 euros à titre de rappels de salaire outre la somme de 71,46 euros ainsi que la somme de 85,75 euros au titre du reliquat de l'indemnité de fin de mission.

Sur la demande de paiement du 13ème mois

Pour infirmation de la décision critiquée la société Synergie fait valoir essentiellement qu'elle ne dispose d'aucun pouvoir décisionnel pour l'attribution d'une telle prime qui dépend de chaque entreprise utilisatrice selon les règles qu'elle applique ; qu'en tout état de cause, la salariée ne remplit pas les conditions fixées par les règles applicables au sein de la société XPO Supply Chain transmises à la société, notamment l'ancienneté de 6 mois et l'existence de missions en continu ; que cette prime n'est pas prévue par la convention collective contrairement à ce qu'a jugé le conseil de prud'hommes.

Mme [T] rétorque que la société Synergie n'apporte pas la preuve de l'usage invoqué ; que les interruptions dont la société Synergie se prévaut afin de l'écarter du bénéfice d'une telle prime faute de continuité dans ses missions correspond en réalité à ses congés estivaux, durant lesquels son contrat n'est pas interrompu ; qu'en tout état de cause que le 13ème mois est prévu par la convention collective dont la société utilisatrice relève.

En application de l'article L.3221-3 du code du travail, constitue une rémunération au sens du présent chapitre, le salaire ou traitement ordinaire de base ou minimum et tous les autres avantages et accessoires payés, directement ou indirectement, en espèces ou en nature, par l'employeur au salarié en raison de l'emploi de ce dernier.

En application des article L. 1251-18 et L. 1251-43 du code du travail, les salariés intérimaires doivent percevoir, au même titre que le personnel de l'entreprise utilisatrice, le montant de la rémunération avec ses différentes composantes, y compris, s'il en existe, les primes et accessoires de salaire que percevrait dans l'entreprise utilisatrice, après période d'essai, un salarié de qualification professionnelle équivalente occupant le même poste de travail.

Il résulte du courrier de la société XPO Supply Chain du 15 mars 2018 que la prime de 13ème mois fait l'objet d'un 'avantage sociétal' (sic) soumis à une ancienneté de 6 mois appréciée au 31 décembre de l'année considérée, la mission ou les missions devant être continues.

Alors que Mme [T] a travaillé 35 heures par semaines pour la société XPO Supply Chain depuis le 5 septembre 2016 jusqu'au 15 février 2018, les missions étant hebdomadaires, c'est en vain que la société Synergie oppose à la salariée que ces missions ont été interrompues les semaines 30 à 33 sur l'année 2017 alors que ces semaines d'interruption correspondent aux périodes de congé annuel que tous les salariés de la société XPO Supply Chain sont en droit de prendre. En conséquence, la cour retient que Mme [T] était en droit de percevoir le 13ème mois pour l'année 2017, soit la somme de 1 547,03 euros. Pour l'année 2016 en revanche, Mme [T] n'avait pas 6 mois d'ancienneté au 31 décembre. En conséquence, par infirmation de la décision déférée, il convient de condamner la société Synergie à verser à Mme [T] la somme de 1547,03 euros au titre du rappel de 13ème mois pour l'année 2017, en ce compris l'incidence du rappel de salaire accordé au titre de cette année.

Sur la demande de prime de productivité

Pour infirmation sur ce point, la société Synergie soutient que les contrats de mission signés par Mme [T] ne font mention d'aucune prime de productivité, l'entreprise utilisatrice ayant indiqué ne pas l'avoir mise en place ; que dès lors lui octroyer une telle prime constitue une rupture d'égalité avec les salariés de l'entreprise utilisatrice.

Mme [T] rétorque que l'entreprise utilisatrice versait une telle prime à ses salariés, que dès lors, celle-ci devait être incluse dans sa rémunération, au vu de sa productivité.

Il résulte du courrier du 12 avril 2018 de la société XPO Supply Chain que le site de [Localité 5] n'a pas mis en place de primes de productivité. Pourtant, la feuille de salaire versée aux débats par la salariée révèle qu'un ouvrier coefficient 115, statut dont bénéficiait également Mme [T] comme indiqué sur l'ensemble de ses contrats de mission, travaillant sur le site de [Localité 5] de la société XPO Supply Chain, a perçu une indemnité de productivité en décembre 2017.

A défaut d'élément pertinent opposé par la société Synergie, il convient de confirmer les premiers juges qui l'ont condamnée à verser à Mme [T] la somme de 2 280 euros au titre de la prime de productivité.

Sur la demande de panier repas

La société Synergie fait valoir qu'au vu de la grille de rémunération, la prime de panier repas est notamment soumise à une ancienneté de plus de trois mois ; que ce critère d'ancienneté était expressément spécifié par les contrats de mission conclus avec Mme [T], et que puisque celle-ci avait moins de trois mois d'ancienneté, il est normal qu'aucun panier ne lui ait été versé.

Mme [T] répond que cette différence de traitement entre les intérimaires et les salariés de la société n'est pas justifiée.

La société Synergie ne peut sérieusement soutenir que Mme [T] n'avait pas plus de trois d'ancienneté motif pris que les missions étaient hebdomadaires alors qu'elle a travaillé de manière continue pour la même société de septembre 2016 à février 2018. En conséquence, il convient de confirmer le jugement qui lui a octroyé la somme de 355,50 euros à titre de rappel de prime de panier.

Sur le manquement à l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat

Pour infirmation la société Synergie fait valoir essentiellement que n'ayant aucun droit d'ingérence ou d'accès à la politique de rémunération interne pratiquée par la société utilisatrice, elle n'a commis aucune faute ; qu'en tout état de cause dès lors que Mme [T] l'a informée de dysfonctionnements, la société Synergie s'est renseignée auprès de l'entreprise utilisatrice procédant à une analyse détaillée de la situation de Mme [T], et que lorsqu'une irrégularité qui ne lui était pas imputable a été détectée, elle a immédiatement procédé à une régularisation au bénéfice de Mme [T]. Elle fait en outre valoir que Mme [T] n'établit pas l'existence d'un préjudice causé par une prétendue exécution déloyale du contrat, ni son étendue.

Mme [T] réplique que durant l'entièreté de sa relation contractuelle, elle n'a pas été placée sur un pied d'égalité avec les salariés de l'entreprise utilisatrice, alors que c'était à l'entreprise de travail temporaire de prendre attache avec la société utilisatrice afin de déterminer le montant de son salaire et de ses avantages, que celle-ci n'a pas pris les mesures nécessaires, qu'elle aurait notamment pu se retourner contre l'entreprise utilisatrice. Elle fait valoir que suite à sa dénonciation de l'inégalité de traitement dont elle était victime, elle n'a plus été reconduite pour des contrats de missions ce qui fait suite selon elle à ses réclamations.

En application de l'article L.1222-1 du code du travail, le contrat de travail est présumé exécuté de bonne foi, de sorte que la charge de la preuve de l'exécution de mauvaise foi dudit contrat incombe à celui qui l'invoque.

Eu égard aux développements ci-avant, il appert que la société Synergie ne pouvait sans être de mauvaise foi, écarter sa salariée des avantages et compléments de rémunération dont bénéficiaient les salariés de l'entreprise utilisatrice en se retranchant derrière sa politique de gestion hebdomadaire des contrats de mission alors que ceux-ci ont été renouvelés durant plus d'une année.

L'exécution de mauvaise foi de ses obligations contractuelles de la part de la société Synergie a nécessité de nombreuses démarches de la salariée qui n'a plus vu ses missions renouvelées. C'est à juste titre que les premiers juges lui ont alloué la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice ainsi causé.

Sur les frais irrépétibles

La société Synergie sera condamnée aux entiers dépens et devra verser au titre des frais irrépétibles en cause d'appel la somme de 2 500 euros, la somme de 1 000 euros allouée par les premiers juges étant confirmée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la SE Synergie [Localité 6] à verser à Mme [G] [T] la somme de 2 231,33 euros à titre de rappels de salaire et la somme de 71,46 euros à titre d'incidence sur 13ème mois ;

Statuant à nouveau sur le chef de jugement infirmé ;

CONDAMNE la SE Synergie [Localité 6] à verser à Mme [G] [T] la somme de 1 547,03 euros au titre du rappel de 13ème mois pour l'année 2017 ;

CONFIRME le jugement pour le surplus ;

Y ajoutant ;

CONDAMNE la SE Synergie [Localité 6] aux entiers dépens ;

CONDAMNE la SE Synergie [Localité 6] à verser à Mme [G] [T] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 20/01158
Date de la décision : 13/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-13;20.01158 ?
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