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09/06/2023 | FRANCE | N°19/00003

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 09 juin 2023, 19/00003


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 09 JUIN 2023



(n° , 15 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/00003 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B67TV



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 septembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16-03039





APPELANTE

ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5]

[Adresse 2]

[Locali

té 4]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901





INTIMÉS

Monsieur [Y] [M]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Assunta SAPONE, avocat au barreau ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 09 JUIN 2023

(n° , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/00003 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B67TV

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 septembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16-03039

APPELANTE

ASSURANCE MALADIE DE [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

INTIMÉS

Monsieur [Y] [M]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me Assunta SAPONE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0404, substitué par Me Matthieu BLAESI, avocat au barreau de PARIS, toque : C0404

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 30 mars 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Raoul CARBONARO, président de chambre

Monsieur Gilles REVELLES, conseiller

Madame Bathilde CHEVALIER, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Alisson POISSON, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre, et Madame Fatma DEVECI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] d'un jugement rendu le 18 septembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à M. [Y] [M].

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [Y] [M], pharmacien propriétaire titulaire de la pharmacie [M] à [Localité 6], a fait l'objet d'une analyse des facturations remboursées entre le 1er janvier 2012 et le 30 septembre 2013 par les caisses primaires d'assurances maladie de l'Ile de France ; que la notification des griefs a eu lieu les 26 juin et 29 juin 2015 comportant la liste des anomalies constatée et des griefs retenus ; que suite à l'entretien avec le service du contrôle médical et au terme de la procédure contradictoire, la Caisse a fait valoir les suites qu'elle entendait donner aux griefs par courrier du 8 octobre 2015 ; que par courrier recommandé du 23 octobre 2015, le directeur général de l'Assurance Maladie a notifié à M. [Y] [M] un indu de 34 374,69 euros se répartissant sur plusieurs caisses, dont 14 635,29 euros concernaient la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5]; que M. [Y] [M] a contesté le caractère bien fondé des indus et a saisi les Commission de Recours Amiable de chaque caisse ; que par décision du 5 avril 2016, notifiée le 18 avril 2016, la Commission de Recours Amiable a confirmé partiellement le bien fondé de la créance de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] qu'elle a ramené à 14 620,94 euros sur la base de plusieurs anomalies ; que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie a déposé plainte à l'encontre du pharmacien devant la section des assurances sociales du Conseil de l'Ordre des pharmaciens pour les mêmes faits au cours de la même période ; que M. [Y] [M] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris le 13 juin 2016.

Par jugement en date du 18 septembre 2018, le tribunal a :

- déclaré M. [Y] [M] recevable en sa demande ;

- débouté la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] de sa demande en restitution d'indu ;

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires des parties ;

- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise à une date indéterminée à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] qui en a interjeté appel par déclaration formée par voie électronique le 18 décembre 2018.

Par conclusions écrites n° 3 visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] demande à la cour de :

- infirmer le jugement du 18 septembre 2018 en toutes ses dispositions ;

- la recevoir en sa demande reconventionnelle et l'y déclarer bien fondée ;

en conséquence,

- condamner M. [Y] [M] à lui verser la somme de 14 620,94 euros avec intérêts au taux légal à compter de la notification d'indu du 23 octobre 2015 ;

- condamner M. [Y] [M] à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que c'est toujours à celui qui réclame le bénéfice de prestations de justifier du bienfondé de sa demande ; que dans la mesure où le paiement est réalisé sur demande du professionnel de santé, il lui appartient en cas de contestation ultérieure de la Caisse de démontrer que les facturations qu'il a réalisées étaient justifiées, de sorte que c'est à bon droit qu'elles lui ont été réglées au vu de ses déclarations ; que les règles applicables quant à la charge de la preuve imposent à la partie sur laquelle celle-ci repose de prendre ses dispositions quant à la conservation des pièces nécessaires au soutien de ses prétentions ; que M. [Y] [M] ne peut dès lors se dédouaner de sa carence en indiquant qu'il n'a aucune obligation de conservation des ordonnances au-delà de 90 jours ; que l'argumentation tendant à dire que les jurisprudences précitées ne seraient pas applicables lorsqu'elles ne concernent pas un pharmacien apparaît parfaitement inopérante dans la mesure où, s'agissant des règles de preuves en matière de contrôle de facturation, la profession du professionnel de santé contrôlé importe peu car, qu'il soit médecin, kinésithérapeute, pharmacien, ambulancier ou infirmier, le fondement juridique du contrôle et de la notification d'indu est rigoureusement le même ; que toute la procédure de contrôle lui a donc permis de connaître précisément ce qui lui était reproché et de formuler des observations, étant rappelé que s'agissant d'un système déclaratif, les griefs retenus sont fondés sur les cotations qu'il a elle-même appliquées à la lumière de ses dossiers ; que les constats opérés par le Service médical sont donc suffisants pour justifier de l'indu notifié par la Caisse ; que le Conseil de l'Ordre composé de pairs de M. [Y] [M] a validé les conclusions des opérations de contrôle menées pour le compte de l'Assurance Maladie de sorte qu'une sanction devait lui être infligée ; que les griefs sont constitués par les points suivants : renouvellements anticipés de délivrances, la délivrance de médicaments prescrits hors compétence, des doubles facturations, des renouvellements non prescrits, l'absence de transmission de duplicatas d'ordonnances, la délivrance de médicaments dans des conditionnements inadaptés, la facturation en une seule fois d'une quantité de produit supérieure à un mois, le non-respect de la législation sur les hypnotiques et anxiolytiques, des facturations sur la base d'une ordonnance caduque, des incohérences thérapeutiques, des erreurs de délivrance et la facturation de produits non conformes.

Par conclusions écrites n° 2 visées et développées oralement à l'audience par son avocat, M. [Y] [M] demande à la cour de :

- confirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale du 18 septembre 2018 en ce qu'il a :

1- déclaré recevable M. [Y] [M] en sa demande ;

2- débouté la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] en sa demande de restitution d'indu ;

3- condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose que comme le confirme le jugement dont appel, pour ce qui relève de la procédure contentieuse devant le tribunal judiciaire, il y a lieu d'appliquer les règles de droit commun relative à la charge de la preuve ; que dans ses conclusions du 21 juillet 2022, la Caisse opère une confusion entre la procédure précontentieuse de contrôle et la procédure judiciaire en considérant qu'il a pu avoir accès aux pièces lors de cette procédure de contrôle ; que s'il a pu consulter les pièces, sans en obtenir de copie, dans les locaux de la Caisse, lors de la procédure de contrôle, tel n'est pas le cas ni du tribunal, ni de la cour alors même qu'il conteste les conclusions que la Caisse tire desdites pièces ; qu'à l'exception des ordonnances prescrivant des médicaments classés comme stupéfiants, le pharmacien n'a pas à conserver une copie des prescriptions, lesquelles appartiennent au patient et dont le double doit être adressé à la Caisse comme pièce justificative de la facture subrogatoire ; que sur la période considérée, la convention liant les pharmaciens aux caisses ne l'obligeait pas à conserver l'ensemble des prescriptions et, en cas de conservation, pas au-delà d'un délai de 90 jours ; que les sanctions ordinales ne sauraient justifier de l'indu ; que rien ne s'oppose à ce que le tribunal hier et aujourd'hui la cour puisse consulter les pièces justificatives et ainsi de permettre à la cour « de savoir les raisons qui ont conduit à retenir lesdites anomalies et à examiner leur bien-fondé ou non »; que dans la procédure l'opposant à la Caisse, le tableau, comme l'a justement relevé le tribunal des affaires de sécurité sociale, ne permet pas, à lui seul, d'examiner le bien-fondé des anomalies retenues par la Caisse ; que seules les prescriptions sur lesquelles figurent le nom des médicaments prescrits, la posologie, l'éventualité d'un ou de plusieurs renouvellements, et les mentions apposées par la pharmacie sur celles-ci et reprenant la date de prescription, la date de délivrance, les quantités délivrées et le montant facturé permettent de contrôler, voire d'apprécier, la réalité de l'indu ; que, s'agissant des anomalies relatives aux renouvellements anticipés, en aucun cas, les dispositions déontologiques visées par la Caisse ne peuvent avoir d'influence sur les règles régissant les rapports entre le professionnel de santé et l'assurance maladie ; que le nombre de produits délivrés n'a pas été au final supérieur au nombre de produits qui auraient dû être délivrés ; que, relativement aux anomalies résultant des prescriptions hors compétence, la Caisse ne démontre pas l'illégitimité médicale de la délivrance effectuée ; que, relativement aux anomalies relatives aux doubles facturations, ce fait concerne des recyclages de factures déjà présentées mais restées impayées ; que la pharmacie les a, à nouveau, télétransmises comme en témoigne le symbole c3 porté sur les captures d'écran produites, symbole signifiant recyclage ; que, par ailleurs, la facture 366530 représentant un indu de 74,52 euros (dossier n°5) n'existe pas, ainsi qu'il résulte de la capture d'écran produite ; que, s'agissant des anomalies résultant des renouvellements non prescrits, la Caisse ne les démontre pas ; qu'il a pu arriver que la pharmacie se trouve confrontée à des difficultés résultant de l'impossibilité, dans le cadre d'un traitement récurrent, de laisser le patient sans médicaments ; que, le patient présentant une double pathologie et bénéficiant d'une reconnaissance en ALD (Affection de Longue Durée), le renouvellement a été autorisé téléphoniquement par le médecin en vue d'éviter une mise en péril en cas d'interruption ; que, relativement aux anomalies résultant de duplicatas d'ordonnances non transmis, ces indus se rapportent à une seule et même prescription en date du 1er février 2013 ; que force est de constater qu'à l'envoi du dossier, celui-ci n'a fait l'objet d'aucun rejet de la part de la Caisse ; que si l'ordonnance n'avait pas été communiquée, tel aurait été le cas ; que, relativement aux anomalies résultant des conditionnements non adaptés, l'infraction ainsi reprochée a un aspect purement économique puisque, par ailleurs, il n'est pas contesté que la quantité de produits délivrés correspond très exactement à celle qui a été voulue par le médecin prescripteur ; que, relativement aux les anomalies résultant de la facturation en une seule fois de quantité de produits supérieurs à 30 jours, il n'y a pas eu de remise de produits supérieure à ceux qui pouvaient être délivrés et pris en charge, ni de facturation en une seule fois pour des durées supérieures à 28 ou 30 jours, mais recyclage d'une facture qui avait été impayée, ainsi qu'en témoignent les captures d'écran du dossier clients informatique et a pas eu de délivrance d'une quantité supérieure à celle qui aurait dû être délivrée ; que, s'agissant des anomalies résultent du non-respect de la législation sur les hypnotiques et les anxiolytiques, les délivrances qui ont été effectuées l'ont été dans le respect de la prescription médicale ; que, relativement aux anomalies résultant de délivrances établies sur la base d'une prescription, hors délai de 3 mois (substances vénéneuses), les patients concernés souffraient d'une pathologie chronique et la pharmacie ne pouvait, dans leur intérêt, interrompre le traitement ; que, relativement aux anomalies résultant de la délivrance d'ordonnances présentant des incohérences thérapeutiques, aucune pièce n'est rapportée par la Caisse du caractère médical non justifié de la prescription, la Caisse ne pouvant s'appuyer sur les textes déontologiques du code de la santé publique; que relativement aux anomalies résultant d'erreurs de délivrances, aucune erreur n'est démontrée ; que s'agissant des anomalies résultant de la facturation de produits non conformes à la prescription, les délivrances étaient donc parfaitement justifiées.

Pour un plus exposé complet des prétentions et moyens des parties, et en application du deuxième alinéa de l'article 446-2 et de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 30 mars 2023 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.

SUR CE

- Sur le droit de la preuve en matière d'indu

En cas d'inobservation des règles de tarification et de facturation des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-17, L. 165-1, L. 162-22-7 ou relevant des dispositions des articles L. 162-22-1 et L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale et des frais de transports mentionnés à l'article L. 321-1 du même code, l'organisme de prise en charge recouvre l' indu correspondant auprès du professionnel de santé ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé ou à un établissement. Il résulte de ces dispositions que l'organisme de prise en charge est fondé, en cas de non respect des règles de tarification et de facturation des médicaments et spécialités pharmaceutiques, à engager le recouvrement de l'indu correspondant auprès du pharmacien titulaire de l'officine qui a délivré ces derniers quelle que soit la forme juridique de l'exploitation de l'officine.

Les professionnels de santé, en cas de contestation ultérieure de la caisse, doivent démontrer que les facturations qu'ils ont réalisées étaient justifiées et qu'elles lui ont été réglées à bon droit au vu de ses déclarations. Il appartient donc à l'organisme d'assurance-maladie de rapporter la preuve du non-respect des règles de tarification et de facturation, puis au professionnel de discuter des éléments de preuve produits par l'organisme, à charge pour lui d'apporter la preuve contraire (2ème Civ., 28 novembre 2013, pourvoi n° 12-26.506).

En l'espèce, la caisse produit un tableau récapitulatif mentionnant la caisse créancière, le régime d'assurance maladie, le numéro de facture, le numéro du prescripteur, la date de délivrance des produits, le code nature des prestations, le code CIP ou LPP, le libellé du médicament délivré, la quantité délivrée, le prix unitaire, le montant du remboursement, le taux du remboursement, la date de mandatement, l'anomalie commentée et le montant du préjudice. A ce tableau était jointe une liste intitulée référentiels reprenant la nature de l'anomalie et les références textuelles du code de la santé publique ou du code de la sécurité sociale, ainsi que les références des arrêtés éventuellement applicables outre une table de correspondance entre les numéros de dossiers et les patients avec leur matricule de sécurité sociale, la date de naissance et le code de caisse de rattachement. Ces éléments suffisent à caractériser le manquement reproché.

Il appartient donc au pharmacien de démontrer, pour chaque anomalie dénoncée la régularité de la délivrance, le moyen tiré des règles de télétransmission et de conservation des ordonnances étant inopérant puisque tendant à renverser la charge de la preuve qui lui incombe.

S'agissant de la violation du secret médical, la production par la caisse des dossiers médicaux avec les prescription devant la juridiction de jugement rend inopérant ce moyen.

Le jugement déféré sera donc infirmé, sauf en ce qu'il a déclaré M. [Y] [M] recevable en sa demande.

- Sur les indus

Les textes du code de la santé publique visés par la Caisse ne constituent pas uniquement des obligations déontologiques mais les habilitations légales à exercer la profession et les conditions de son exercice. La validité de l'exercice par le professionnel constitue la base de l'obligation de remboursement de la Caisse.

Il n'y a donc pas lieu de qualifier un préjudice dès lors que les conditions de délivrance ne sont pas respectées.

- Sur les renouvellements anticipés de délivrances

L'article R.5132-14 du code de la santé publique énonce que : « Le renouvellement de la délivrance d'un médicament ou d'une préparation relevant de la présente section ne peut avoir lieu qu'après un délai déterminé résultant de la posologie et des quantités précédemment délivrées.

Le renouvellement fait l'objet d'un nouvel enregistrement. Lorsque le renouvellement est effectué par le même dispensateur, l'enregistrement peut consister en la seule indication du numéro afférent à la délivrance précédente.

Sont ajoutées sur l'ordonnance les mêmes indications que celles énumérées à l'article R. 5132-13 ».

Il résulte de ce texte que la délivrance de médicaments renouvelable ne peut se faire qu'en respectant le délai résultant de la posologie et des quantités précédemment délivrées.

L'article R 5132-22 précise en son dernier alinéa que : « Les dispensateurs sont tenus d'exécuter les renouvellements selon les modalités définies à l'article R. 5132-14, sous réserve des dispositions de l'article R. 5121-95 ».

L'article 9 de la Convention nationale organisant les rapports entre les pharmaciens titulaires d'officine et l'Assurance Maladie, applicable à compter du 25 juillet 2006, stipule que : « Les parties signataires considèrent que l'analyse pharmaceutique de l'ordonnance médicale effectuée par le pharmacien au cours de l'acte de dispensation est un facteur essentiel contribuant à la qualité de cet acte. Elle le conduit plus particulièrement à :

- opérer un suivi de l'utilisation des produits de santé pour chaque assuré qui recourt régulièrement à ses services, notamment en veillant à ce que les quantités délivrées à l'occasion de dispensations successives par son officine soient en adéquation avec le ou les traitements prescrits ».

Dès lors, en ne respectant pas les délais de renouvellement liés à l'ordonnance, M. [Y] [M] ne respecte pas la prescription et agit hors habilitation. En conséquence, la délivrance du médicament n'était pas licite et le droit à remboursement n'était pas acquis.

Pour chaque indu réclamé, la caisse dépose l'ordonnance sur la base de laquelle les délivrances litigieuses ont eu lieu, ou l'ordonnance antérieure, et la facture correspondant à la délivrance anticipée des médicaments. Elle communique la date de délivrance immédiatement antérieure, et celle de l'ordonnance à partir de laquelle la délivrance a été opérée, de telle sorte qu'il appartient au pharmacien de démontrer sur la base de l'ensemble des factures qu'il a adressées l'absence de chevauchement.

En s'abstenant de le faire, M. [Y] [M] ne communique aucune pièce susceptible de remettre en cause l'appréciation de l'indu réalisée par la caisse.

- Sur les prescriptions hors compétence

Deux séries d'indus son reprochées par la Caisse.

La première série relève de la prescription de médicaments par un médecin généraliste alors qu'ils ne pouvaient être prescrits que par un neurologue ou un psychiatre.

En l'espèce, M. [Y] [M] ne porte aucune contestation relativement à cet indu, le RIVOTRIL devant, à la date de délivrance, être soumis à une prescription renouvelée annuellement par un établissement hospitalier, ce qui n'était pas le cas de l'espèce, selon les productions de la caisse

La seconde série a trait à la prescription de médicaments par une personne non habilitée à le faire, un chirurgien-dentiste. En l'espèce, l'article L. 4141-2 du code de la santé publique dispose que « Les chirurgiens-dentistes peuvent prescrire tous les actes, produits et prestations nécessaires à l'exercice de l'art dentaire ».

Or, le contrôle opéré par la Caisse démontre que les médicaments délivrés pour les dossiers n°8, 9, 10, 11 et 12 concernaient une spécialité ne rentrant pas dans les compétences du prescripteur. Le fait que celui-ci soit éventuellement chirurgien-dentiste homéopathe ne lui permet pas de prescrite des médicaments pour prévenir la grippe, ce que les textes applicables n'autorisent pas, renvoyant à la compétence du médecin. M. [Y] [M] était tenu de vérifier l'habilitation de ce dernier à prescrire de tels médicaments.

L'indu est donc justifié.

- Sur les doubles facturations

Il résulte des pièces versées par la Caisse que pour les dossiers n°5 et 87, les factures de remboursement de médicaments ont été payées à deux reprises, respectivement les 11 juillet et 17 juillet 2012, d'une part, et 13 janvier et 17 janvier 2012, d'autre part.

M. [Y] [M] ne démontre pas ses allégations relatives à l'existence d'une seconde présentation en raison d'un non paiement de la première facture, la simple mention d'une nouvelle présentation ne signifiant pas que la première facture n'avait pas été réglée aux dates indiquées par la caisse.

L'indu est donc justifié.

- Sur les renouvellements non prescrits

Conformément aux règles de preuve, il appartient au pharmacien de démontrer que les ordonnances permettaient le renouvellent de sa part de la prescription ou que la délivrance des médicaments a été opérée sur production de la prescription y afférente.

L'article R. 165-1 du code de la sécurité sociale dispose que : « Les produits et prestations mentionnés à l'article L. 165-1 ne peuvent être remboursés par l'assurance maladie, sur prescription médicale ou sur prescription par un infirmier exerçant en pratique avancée dans les conditions prévues à l'article R. 4301-3 du code de la santé publique ou sur prescription d'un auxiliaire médical dans les conditions prévues aux articles L. 4311-1, L. 4321-1, L. 4341-1 et L. 4342-1, au cinquième alinéa de l'article L. 4322-1 et au 6° de l'article R. 4322-1 du code de la santé publique, que s'ils figurent sur une liste établie par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé de la santé après avis de la commission spécialisée de la Haute Autorité de santé mentionnée à l'article L. 165-1 du présent code et dénommée " Commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé " ».

L'article R. 5132-3 du code de la santé publique impose que l'ordonnance mentionne le renouvellement de la prescription pour une délivrance de médicament sans nouvelle ordonnance.

L'article R. 5132-22 du même code dispose, notamment pour les médicament figurant sur les Listes I et II, des dispositions particulières :

« Les pharmaciens ne sont autorisés à effectuer la première délivrance de ces médicaments que sur présentation d'une ordonnance datant de moins de trois mois.

La délivrance d'un médicament relevant de la liste I ne peut être renouvelée que sur indication écrite du prescripteur précisant le nombre de renouvellements ou la durée du traitement.

La délivrance d'un médicament relevant de la liste II peut être renouvelée lorsque le prescripteur ne l'a pas expressément interdit.

Dans tous les cas, le ou les renouvellements ne peuvent être exécutés que dans la limite du délai de traitement mentionnée à l'article R. 5132-21.

Les dispensateurs sont tenus d'exécuter les renouvellements selon les modalités définies à l'article R. 5132-14, sous réserve des dispositions de l'article R. 5121-95 ».

L'article R. 163-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige énonce enfin que : « Les médicaments auxquels s'applique l'article L. 5121-8 du code de la santé publique, ceux bénéficiant d'une autorisation d'importation parallèle, ainsi que ceux visés au premier alinéa de l'article 17 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992, ne peuvent être remboursés ou pris en charge par les organismes de sécurité sociale, sur prescription médicale, à l'exception des vaccins ou des topiques mentionnés respectivement aux articles R. 4311-5-1 et R. 4322-1 du code de la santé publique, ni être achetés ou fournis ou utilisés par eux que s'ils figurent sur une liste des médicaments remboursables établie par arrêté conjoint du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la sécurité sociale.L'arrêté mentionne les seules indications thérapeutiques ouvrant droit à la prise en charge ou au remboursement des médicaments.

Lorsqu'a été notifiée, dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article R. 5143-8 du code de la santé publique, la décision du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé identifiant un médicament comme spécialité générique, l'arrêté d'inscription de ce médicament sur les listes prévues respectivement au premier alinéa de l'article L. 162-17 du présent code et à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique mentionne sa dénomination suivie, s'il s'agit d'un nom de fantaisie, du suffixe prévu à l'article L. 162-17-1. Dans ce dernier cas, la dénomination est complétée par ce suffixe dans l'étiquetage et la notice définis à l'article R. 5000 du code de la santé publique, dans le résumé des caractéristiques du produit prévu à l'article R. 5128-2 du même code, ainsi que dans toute publicité au sens de l'article L. 551 dudit code.

L'inscription sur la liste peut être assortie, pour certains médicaments particulièrement coûteux et d'indications précises, d'une clause prévoyant qu'ils ne sont remboursés ou pris en charge qu'après information du contrôle médical, selon une procédure fixée par un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. Dans ce cas, est annexée à l'arrêté d'inscription du médicament sur la liste une fiche d'information thérapeutique établie par la commission mentionnée à l'article R. 163-15. Cette fiche rappelle, d'une part, les indications thérapeutiques mentionnées au premier alinéa ci-dessus, d'autre part, les modalités d'utilisation du médicament résultant de ses caractéristiques approuvées par l'autorisation de mise sur le marché et concernant notamment la posologie et la durée de traitement dans les indications ouvrant droit à la prise en charge ou au remboursement. La fiche rappelle également, le cas échéant, les restrictions apportées par l'autorisation de mise sur le marché à la prescription et à la délivrance du médicament.

L'inscription sur la liste prévue au premier alinéa peut, pour certains médicaments susceptibles d'être utilisés à des fins non thérapeutiques, être assortie d'une clause précisant qu'ils ne sont remboursés ou pris en charge par les caisses et organismes d'assurance maladie que si leur emploi est prescrit en vue du traitement d'un état pathologique.

Sous réserve des dispositions prévues au III de l'article R. 163-6, l'inscription sur la liste prévue au premier alinéa de l'article L. 162-17 est prononcée pour une durée de cinq ans ».

Ainsi, le pharmacien, tenu par les termes de la prescription médicale, ne peut présenter au remboursement la délivrance de médicaments si le prescripteur n'a pas prévu le renouvellement.

En application de l'article 5 de la NGAP, la caisse n'a d'obligation de prendre en compte que la prescription médicale initiale à défaut de toute prescription rectificative ultérieure (2e Civ., 26 novembre 2020, pourvoi n° 19-22.210). Dès lors, il ne peut être tenu compte des attestations déposées par les médecins prescripteurs.

En l'espèce, la caisse justifie par ses productions, notamment par la copie des ordonnances et des factures de remboursement qui y sont liées de délivrances multiples au-delà de la durée de la prescription.

- Sur les duplicatas d'ordonnances non transmis

L'article L 161-33 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige dispose que:

« L'ouverture du droit aux prestations de l'assurance maladie est subordonnée à la production de documents dont le contenu, le support ainsi que les conditions et délais de transmission à la caisse du bénéficiaire sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

Si le bénéficiaire, ayant reçu du professionnel, de l'organisme ou de l'établissement dispensant des actes ou prestations remboursables par l'assurance maladie, les documents nécessaires à la constatation des soins ou d'une incapacité de travail les transmet à la caisse hors du délai prévu, il encourt une sanction fixée par voie réglementaire, pouvant aller jusqu'à la déchéance du droit aux prestations pour la période pendant laquelle le contrôle de celles-ci aurait été rendu impossible.

En cas de transmission électronique, si le professionnel, l'organisme ou l'établissement dispensant des actes ou prestations remboursables par l'assurance maladie est responsable d'un défaut de transmission à la caisse du bénéficiaire de documents mentionnés à l'alinéa précédent ou s'il les a transmis hors du délai prévu, et sans préjudice d'éventuelles sanctions prévues par les conventions nationales mentionnées au chapitre 2 du présent titre, la caisse peut exiger du professionnel ou de l'organisme concerné la restitution de tout ou partie des prestations servies à l'assuré. Pour son recouvrement, cette restitution est assimilée à une cotisation de sécurité sociale.

Dans le cas de transmission électronique par les professionnels, organismes ou établissements dispensant des actes ou prestations remboursables par l'assurance maladie, l'identification de l'émetteur, son authentification et la sécurisation des échanges sont assurées par une carte électronique individuelle, appelée carte de professionnel de santé. Le contenu, les modalités de délivrance et d'utilisation de cette carte sont fixés par décret en Conseil d'Etat après avis de la Commission nationale informatique et libertés ».

L'article R 161-40 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable, énonce que : « La constatation des soins et l'ouverture du droit au remboursement par les organismes servant les prestations de l'assurance maladie sont subordonnées à la production d'une part de documents électroniques ou sur support papier, appelés feuilles de soins, constatant les actes effectués et les prestations servies, d'autre part de l'ordonnance du prescripteur, s'il y a lieu.

Les feuilles de soins nécessaires aux actes effectués et aux prestations servies, directement liés à une hospitalisation dans un établissement de santé mentionné au d de l'article L. 162-22-6, sont appelées bordereaux de facturation ».

Il appartient en l'espèce à M. [Y] [M] de démontrer qu'il a transmis l'ordonnance avec sa demande de remboursement. N'apportant pas la preuve exigée, il ne démontre pas le caractère erroné de la notification.

- Sur le conditionnement non adapté

L'article R. 162-20-6 du code de la sécurité sociale dispose que : « Ainsi qu'il est dit à l'article R. 5123-2-1 du code de la santé publique :

Art.R. 5123-2-1.-Dans le cadre d'un traitement chronique, lorsque la durée de validité d'une ordonnance renouvelable est expirée, le pharmacien dispense les médicaments nécessaires à la poursuite du traitement si les conditions suivantes sont remplies :

1° L'ordonnance comporte la prescription du médicament permettant, en application des dispositions de l'article R. 5123-2, une durée totale de traitement d'au moins trois mois ;

2° Ce médicament ne relève pas d'une des catégories mentionnées dans l'arrêté ministériel prévu à l'article L. 5125-23-1.

Le pharmacien délivre le conditionnement commercialisé comportant le plus petit nombre d'unités de prise. Il porte sur l'ordonnance la mention " délivrance par la procédure exceptionnelle d'une boîte supplémentaire " en indiquant la ou les spécialités ayant fait l'objet de la dispensation. Il appose en outre sur l'ordonnance le timbre de l'officine et la date de délivrance.

Il informe de la dispensation le médecin prescripteur dès que possible et par tous moyens dont il dispose.

La même ordonnance ne peut donner lieu qu'à une seule dispensation en application du présent article ».

En l'espèce, la caisse justifie par ses productions que les ordonnances prescrivant du MOSCONTIN mentionnaient 500 mg par jour en deux à trois prises selon les prescriptions, réparties de la manière suivante : 200 mg le matin et 300 mg le soir, ou 200 mg le matin, 100 mg à 14h et 200 mg le soir. La pharmacien a délivré à l'assuré, systématiquement et uniquement 10 boîtes de comprimés de 100 mg alors qu'il aurait dû lui délivrer 4 boîtes de comprimés de 200 mg et 2 boîtes de comprimés de 100 mg. M. [Y] [M] ne conteste pas cet état de fait. Il importe peu que le médecin atteste de la stabilité du traitement, la délivrance n'ayant pas été conforme.

L'indu sera donc confirmé.

- Sur la facturation en une seule fois d'une quantité de produit supérieure à un mois

L'article R. 160-20-5 du code de la sécurité sociale dispose que : « Ainsi qu'il est dit à l'article R. 5123-2 du code de la santé publique :

" Art. R. 5123-2.-L'ordonnance comportant la prescription d'un médicament pour une durée de traitement supérieure à un mois indique, pour permettre la prise en charge de ce médicament, soit le nombre de renouvellements de l'exécution de la prescription par périodes maximales d'un mois ou de trois mois pour les médicaments présentés sous un conditionnement correspondant à une durée de traitement supérieure à un mois, soit la durée totale de traitement, dans la limite de douze mois. Pour les médicaments contraceptifs, le renouvellement de l'exécution de la prescription peut se faire par périodes maximales de trois mois, quel que soit leur conditionnement.

Pour en permettre la prise en charge, le pharmacien ne peut délivrer en une seule fois une quantité de médicaments correspondant à une durée de traitement supérieure à quatre semaines ou à trente jours selon le conditionnement. Toutefois, les médicaments présentés sous un conditionnement correspondant à une durée de traitement supérieure à un mois peuvent être délivrés pour cette durée dans la limite de trois mois. En outre, quel que soit leur conditionnement, les médicaments contraceptifs peuvent être délivrés pour une durée de douze semaines. " ».

L'article R 5132-12 du code de la santé publique dispose que :

« Il ne peut être délivré en une seule fois une quantité de médicaments correspondant à une durée de traitement supérieure à quatre semaines ou à un mois de trente jours selon le conditionnement.

Toutefois, les médicaments présentés sous un conditionnement correspondant à une durée de traitement supérieure à un mois peuvent être délivrés pour cette durée dans la limite de trois mois. En outre, quel que soit leur conditionnement, les médicaments contraceptifs peuvent être délivrés pour une durée de douze semaines ».

Ce texte réglementaire, régissant la profession de pharmacien, est d'ordre public. Il s'en suit que le pharmacien ne peut délivrer de médicament que dans les conditions prévues par ce texte et pour les durées qu'il édicte.

S'agissant du dossier n° 3, M. [Y] [M] allègue qu'il s'agit d'un rattrapage de produits délivrés sans ordonnance le 12 mars 2012. Dès lors, sur ce seul fondement, l'indu est justifié.

S'agissant du dossier n° 22, M. [Y] [M] démontre des délivrances les 3 et 31 mai 2013 à 28 jours d'intervalle et en quantité unitaire des boites de médicaments, ce qui démontre un intervalle de 28 jours. La caisse ne démontre donc pas l'indu pour la somme de 19,58 euros.

S'agissant du dossier n° 61, les factures présentées démontrent qu'à un mois d'intervalle, la pharmacie a facturé un deuxième et un quatrième renouvellement, ce dont il résulte la délivrance de médicaments pour plus d'un mois en une seule fois. L'indu est donc justifié.

- Sur le non-respect de la législation sur les hypnotiques et anxiolytiques

L'article R. 5132-21 du code de la santé publique dispose que : « Une prescription de médicaments relevant des listes I et II ne peut être faite pour une durée de traitement supérieure à douze mois.

Toutefois, pour des motifs de santé publique, pour certains médicaments, substances psychotropes ou susceptibles d'être utilisées pour leur effet psychoactif, cette durée peut être réduite par décision du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé après avis des conseils nationaux de l'ordre des médecins et de l'ordre des pharmaciens ».

L'arrêté du 7 octobre 1991 précise la durée de prescription. Ainsi, l'article 1 limite à quatre semaines la durée de prescription des médicaments contenant les substances à propriétés hypnotiques, ainsi que leurs sels lorsqu'ils peuvent exister et l'article 1 bis, limite à deux semaines la prescription des médicaments contenant des substances à propriétés hypnotiques, ainsi que leurs sels. L'article 2 énonce enfin que : « Ne peuvent être prescrits pour une durée supérieure à douze semaines les médicaments contenant les substances à propriétés anxiolytiques, ainsi que leurs sels lorsqu'ils peuvent exister, inscrites sur la liste I des substances vénéneuses à des doses et à des concentrations non exonérées figurant à la deuxième partie de l'annexe du présent arrêté ».

En application de l'article 5 de la NGAP, la caisse n'a d'obligation de prendre en compte que la prescription médicale initiale à défaut de toute prescription rectificative ultérieure (2e Civ., 26 novembre 2020, pourvoi n° 19-22.210). Dès lors, il ne peut être tenu compte des attestations déposées par les médecins prescripteurs.

En l'espèce, sans contester la violation de la loi, c'est vainement que M. [Y] [M] s'abrite derrière la prescription erronée du médecin pour justifier de la délivrance indue des médicaments ou sur des ordonnances postérieures non transmises au soutien de la demande de remboursement.

Ainsi, le dossier n° 21 ne peut être régularisé. S'agissant du dossier n° 22, les productions de la caisse permettent à la cour de vérifier la pluralité de délivrance de médicaments qui ne pouvaient être prescrits au-delà de quatre semaines, à partir de la même ordonnance et ce, sur des ordonnances différentes, soit les 27 octobre et 15 décembre 2012 sur la base de l'ordonnance du 17 septembre 2012, les 19 mars et 24 avril 2013 sur la base de l'ordonnance du 19 mars 2013. En outre, sans respecter l'intervalle d'un mois, le pharmacien a délivré le même médicament (STILNOX) le 29 avril 2013 sur la base d'une ordonnance du même jour. Contrairement aux assertions de M. [Y] [M], relativement au dossier n° 34, la délivrance litigieuse a bien été opérée sur l'ordonnance du 19 février 2012. S'agissant du dossier n° 35, les pièces déposées par la caisse ne se rapportent pas à ses allégations. Toutefois, le tableau d'indu rappelle la date de prescription et les dates de délivrance, de telle sorte qu'il appartient à M. [Y] [M] d'établir la régularité de la délivrance, ce qu'il s'abstient de faire. S'agissant du dossier n° 55, la caisse ne démontre pas la pluralité de délivrance sur l'ordonnance du 22 mai 2013 au regard de la proximité des dates entre le 22 mai et la délivrance du 29 mai 2013, la facture ne permettant pas de justifier d'un renouvellement et le tableau ne faisant pas apparaître la date de la première délivrance. S'agissant du dossier n° 61, le tableau des indus ayant été établi sur la bas de factures transmises, il appartient à M. [Y] [M] de démontrer l'absence de toute facturation sur la basse de l'ordonnance contestée le 8 juin 2013. S'agissant du dossier n° 66, le XANAX, de la classe des anxiolytiques et hypnotiques, n'autorise aucune prescription de plus de quatre semaines. Dès lors l'ensemble des délivrances postérieures au 28 juin 2013 est à tout le moins irrégulier.

L'indu sera donc validé partiellement, la somme de 19,58 euros du dossier n° 55 devant être retranchée.

- Sur les facturations sur la base d'une ordonnance caduque

En application de l'article R. 5132-22 alinéa 1er du code de la santé publique, le pharmacien ne peut délivrer de médicament que sur présentation d'une ordonnance de moins de trois mois. Au delà, la prescription médicale n'est plus valide et doit être renouvelée. En conséquence, la délivrance de médicament sur une ordonnance ancienne de plus de trois mois ne peut faire l'objet d'un remboursement.

M. [Y] [M] reconnaît l'indu mais le justifie sur le caractère chronique de l'affection des patients. Les délivrances ayant été effectuées à plus d'un mois de la date d'expiration de la validité des ordonnances, le pharmacien ne peut s'abriter derrière l'urgence ou la nécessité pour valider la délivrance. L'indu est donc justifié.

- Sur les incohérences thérapeutiques

L'article R.4235-48 du code de la santé publique dispose que : « Le pharmacien doit assurer dans son intégralité l'acte de dispensation du médicament, associant à sa délivrance :

1° L'analyse pharmaceutique de l'ordonnance médicale si elle existe ;

2° La préparation éventuelle des doses à administrer ;

3° La mise à disposition des informations et les conseils nécessaires au bon usage du médicament.

Il a un devoir particulier de conseil lorsqu'il est amené à délivrer un médicament qui ne requiert pas une prescription médicale.

Il doit, par des conseils appropriés et dans le domaine de ses compétences, participer au soutien apporté au patient ».

Le pharmacien est donc tenu d'exercer une vigilance relative aux éventuelles contre indications et interférences entre médicaments.

Relativement au dossier n° 44, la caisse allègue de la prescription de deux médicament aux effets similaires, l'OMEPRAZOLE et l'ESOMEPRAZOLE. Toutefois, il ne ressort pas de l'ordonnance, ni des factures du pharmacien que les deux molécules aient été vendues, seul de l'OMEPRAZOL ayant été délivré. L'indu de 12,66 euros sera annulé.

Relativement au dossier n° 54, la caisse ayant justifié dans son tableau d'indu d'une nouvelle ordonnance du 3 octobre 2012, il appartient à M. [Y] [M] de démontrer qu'il l'a respectée. Il en avait connaissance, car, sur la base de cette ordonnance, il a délivré un médicament le 15 octobre 2012. L'indu est donc justifié. Il en est de même pour le dossier n° 58, la pharmacie ayant eu connaissance de l'ordonnance modificative du 3 décembre 2012, puisqu'elle a délivré des médicaments le même jour sur cette base. Dès lors, les délivrances postérieures n'étaient pas justifiées. Pour le dossier n° 62, l'ordonnance du 22 juillet 2012 a été modifiée le 14 janvier 2013 ayant donné lieu à une délivrance le 7 mars 2013, ce dont il résulte que le pharmacien avait connaissance de la nouvelle prescription. Dès lors, les délivrances postérieures n'étaient pas justifiées. Pour le dossier n° 63, l'ordonnance du 22 janvier 2013 a été modifiée le 14 février 2013. Cependant, les décomptes de remboursement ne permettent pas de démontrer que cette ordonnance a été présentée au pharmacien. Dès lors, l'indu n'est pas caractérisé et la somme de 2,24 euros sera créditée. Pour le dossier n° 72, l'ordonnance du 20 décembre 2012 a été modifiée le 17 avril 2013. Cependant, les décomptes de remboursement ne permettent pas de démontrer que cette ordonnance a été présentée au pharmacien. Dès lors, l'indu n'est pas caractérisé et la somme de 5,50 euros sera créditée. Pour le dossier n° 77, l'ordonnance du 29 mai 2012 a été modifiée le 10 janvier 2013 ayant donné lieu à une délivrance le 11 janvier 2013, ce dont il résulte que le pharmacien avait connaissance de la nouvelle prescription. Dès lors, les délivrances postérieures n'étaient pas justifiées. Pour le dossier n° 89, l'ordonnance du 8 novembre 2012 a été modifiée le 5 décembre 2012 ayant donné lieu à une délivrance le même jour, ce dont il résulte que le pharmacien avait connaissance de la nouvelle prescription. Dès lors, les délivrances postérieures n'étaient pas justifiées.

Au regard des motifs qui précèdent, l'indu sera minoré de 20,40 euros.

- Sur les erreurs de délivrance

L'article L. 5125-23 du code de la santé publique, dans sa version applicable au litige dispose que :

« Le pharmacien ne peut délivrer un médicament ou produit autre que celui qui a été prescrit, ou ayant une dénomination commune différente de la dénomination commune prescrite, qu'avec l'accord exprès et préalable du prescripteur, sauf en cas d'urgence et dans l'intérêt du patient ».

« Si la prescription libellée en dénomination commune peut être respectée par la délivrance d'une spécialité figurant dans un groupe générique mentionné au 5° de l'article L. 5121-1, le pharmacien délivre une spécialité appartenant à ce groupe dans le respect des dispositions de l'article L. 162-16 du code de la sécurité sociale ».

« Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, il peut délivrer par substitution à la spécialité prescrite une spécialité du même groupe générique à condition que le prescripteur n'ait pas exclu cette possibilité, pour des raisons particulières tenant au patient, par une mention expresse portée sur la prescription sous forme exclusivement manuscrite, et sous réserve, en ce qui concerne les spécialités figurant sur la liste mentionnée au premier alinéa de l'article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, que cette substitution s'effectue dans les conditions prévues par l'article L. 162-16 de ce code ».

« Lorsque le pharmacien délivre par substitution à la spécialité prescrite une spécialité du même groupe générique, il doit inscrire le nom de la spécialité qu'il a délivrée. Il en est de même lorsque le pharmacien délivre une spécialité au vu d'une prescription libellée en dénomination commune ».

« La prescription libellée en dénomination commune est obligatoire pour les spécialités figurant dans un groupe générique mentionné au 5° de l'article L. 5121-1 ».

« Lorsqu'un traitement est prescrit pour une durée d'au moins trois mois, y compris au moyen du renouvellement multiple d'un traitement mensuel, et qu'un grand conditionnement est disponible pour le médicament concerné ou pour sa forme générique, le pharmacien doit délivrer ledit conditionnement ».

L'article R.4235-48 du même code rappelle que le pharmacien doit assurer dans son intégralité l'acte de dispensation du médicament.

La caisse dépose la liste des dossiers et des erreurs relevées. Il appartient à M. [Y] [M] de démontrer les situations d'urgence et/ou l'accord du médecin pour la substitution de médicaments. Il ne saurait donc exiger de la caisse d'apporter la preuve inverse. De même, c'est vainement qu'il reproche à la caisse de ne pas déposer l'ensemble des prescriptions médicales. Alors qu'il ne dépose aucune pièce à ce sujet. S'agissant du dossier n° 36, la cour observe que M. [Y] [M] a délivré des comprimés séquables de 20 mg pour une prescription de 10 mg de SEROPLEX. La caisse ne démontre donc pas la délivrance d'un mauvaise dosage. La somme de 18,86 euros sera donc recréditée.

- Sur la facturation de produits non conformes

Aux termes de l'article R.5125-23 du code de la santé publique, le pharmacien doit se conformer à la prescription médicale et qu'il doit également, en application des dispositions de l'article R.4235-48, procéder à son analyse thérapeutique au regard des règles applicables à la prise en charge.

En l'espèce, la prescription portait sur la délivrance d'un lecteur glycémique, de bandelettes et de lancettes alors que le produit délivré étant celui-ci outre un auto-piqueur. Or, la prescription ne mentionnant pas cette délivrance, la pharmacie ne pouvait en obtenir le remboursement, nonobstant les raisons médicales invoquées.

Dès lors, au regard de l'ensemble des motifs développés ci-dessus, le montant total de l'indu justifié est de 14 562,82 euros et M. [Y] [M] sera condamné au paiement de cette somme.

La caisse ne démontrant pas la date de réception de la mise en demeure du 23 octobre 2015, les intérêts courront à compter de la demande en justice présentée à l'audience du 2 juin 2017, valant interpellation suffisante.

M. [Y] [M] qui succombe, sera condamné aux dépens de la procédure d'appel et au paiement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DÉCLARE recevable l'appel de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] ;

CONFIRME le jugement rendu le 18 septembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris en ce qu'il a déclaré M. [Y] [M] recevable en sa demande ;

L'INFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau :

CONDAMNE M. [Y] [M] à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] la somme de 14 562,82 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2017 ;

CONDAMNE M. [Y] [M] à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de [Localité 5] la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [Y] [M] aux dépens de la procédure d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 19/00003
Date de la décision : 09/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-09;19.00003 ?
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