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09/06/2023 | FRANCE | N°19/00001

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 09 juin 2023, 19/00001


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 09 Juin 2023



(n° , 9 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/00001 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B67TR



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Septembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16-05524





APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE SA INT DENIS

[

Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901



INTIME

Monsieur [D] [N]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représenté par Me Assunta SAP...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 09 Juin 2023

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 19/00001 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B67TR

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Septembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16-05524

APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE SA INT DENIS

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

INTIME

Monsieur [D] [N]

[Adresse 3]

[Localité 2]

représenté par Me Assunta SAPONE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0404 substitué par Me Matthieu BLAESI, avocat au barreau de PARIS, toque : C0404

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Mars 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Raoul CARBONARO, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M Raoul CARBONARO, Président de chambre

M Gilles REVELLES, Conseiller

Mme Bathilde CHEVALIER, Conseillère

Greffier : Mme Alisson POISSON, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par M Raoul CARBONARO, Président de chambre et par Mme Fatma DEVECI, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis d'un jugement rendu le 18 septembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à M. [D] [N].

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que M. [D] [N], pharmacien propriétaire titulaire de la pharmacie Lafragette à [Localité 2] a fait l'objet d'une analyse des facturations remboursées entre le 1er janvier 2012 et le 30 septembre 2013 par les Caisses Primaires d'Assurances Maladie de l'Ile de France ; que la notification des griefs a eu lieu les 26 juin et 29 juin 2015 comportant la liste des anomalies constatée et des griefs retenus ; que suite à l'entretien avec le service du contrôle médical et au terme de la procédure contradictoire, la Caisse a fait valoir les suites qu'elle entendait donner aux griefs par courrier du 8 octobre 2015 ; que par courrier recommandé du 23 octobre 2015, le directeur général de l'Assurance Maladie a notifié à M. [D] [N] un indu de 34 374,69 euros se répartissant sur plusieurs caisses, dont 6 109 euros concernaient la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis ; que M. [D] [N] a contesté le bienfondé des indus et a saisi les Commission de Recours Amiable de chaque caisse ; que par décision du 12 octobre 2016 notifiée le 19 octobre 2016, la Commission de Recours Amiable a confirmé le bien fondé de la créance de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis à hauteur de 6 109 euros sur la base des anomalies suivantes :

-délivrance de médicaments sans renouvellements prescrits (dossier 27 pour 527,52€),

-renouvellement d'une prescription en infraction avec la durée légale de prescription d'un anxiolytique (dossier 73 pour 25,20€),

-délivrance de préparations non remboursables (dossiers 70 et 71 : 5 483,80€) ;

que la Caisse Primaire d'Assurances Maladie a déposé plainte à l'encontre du pharmacien devant la section des assurances sociales du Conseil de l'Ordre des pharmaciens pour les mêmes faits au cours de la même période ; que M. [D] [N] a saisi le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Paris le 28 octobre 2016.

Par jugement en date du 18 septembre 2018, le tribunal a :

- déclare M. [D] [N] recevable en sa demande ;

- débouté la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis de sa demande en restitution d'indu ;

- rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires des parties ;

- dit n'y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement a été notifié par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception remise à une date indéterminée à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis qui en a interjeté appel par déclaration formée par voie électronique le 18 décembre 2018.

Par conclusions écrites n° 3 visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis demande à la cour de :

- infirmer le jugement du 18 septembre 2018 en toutes ses dispositions ;

- la recevoir en sa demande reconventionnelle et l'y déclarer bien fondée ;

en conséquence,

- condamner M. [D] [N] à lui verser la somme de 6 109 euros avec intérêts au taux légal à compter de la notification d'indu du 23 octobre 2015 ;

- condamner M. [D] [N] à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .

Elle expose que c'est toujours à celui qui réclame le bénéfice de prestations de justifier du bienfondé de sa demande ; que dans la mesure où le paiement est réalisé sur demande du professionnel de santé, il lui appartient en cas de contestation ultérieure de la Caisse de démontrer que les facturations qu'il a réalisées étaient justifiées, de sorte que c'est à bon droit qu'elles lui ont été réglées au vu de ses déclarations ; que les règles applicables quant à la charge de la preuve imposent à la partie sur laquelle celle-ci repose de prendre ses dispositions quant à la conservation des pièces nécessaires au soutien de ses prétentions ; que M. [D] [N] ne peut dès lors se dédouaner de sa carence en indiquant qu'il n'a aucune obligation de conservation des ordonnances au-delà de 90 jours ; que l'argumentation tendant à dire que les jurisprudences précitées ne seraient pas applicables lorsqu'elles ne concernent pas un pharmacien apparaît parfaitement inopérante dans la mesure où, s'agissant des règles de preuves en matière de contrôle de facturation, la profession du professionnel de santé contrôlé importe peu car, qu'il soit médecin, kinésithérapeute, pharmacien, ambulancier ou infirmier, le fondement juridique du contrôle et de la notification d'indu est rigoureusement le même ; que toute la procédure de contrôle lui a donc permis de connaître précisément ce qui lui était reproché et de formuler des observations, étant rappelé que s'agissant d'un système déclaratif, les griefs retenus sont fondés sur les cotations qu'il a elle-même appliquées à la lumière de ses dossiers ; que les constats opérés par le Service médical sont donc suffisants pour justifier de l'indu notifié par la Caisse ; que le Conseil de l'Ordre composé de pairs de M. [D] [N] a validé les conclusions des opérations de contrôle menées pour le compte de l'Assurance Maladie de sorte qu'une sanction devait lui être infligée ; que les griefs sont la délivrance de médicaments sur des renouvellements non prescrits ; que le fait que les patients soient atteints d'une pathologie chronique n'exonère pas la pharmacie de ses obligations au regard des règles de facturation ; qu'il a sollicité le remboursement de préparations magistrales non remboursables ; que le REVATIO prescrit est une spécialité pharmaceutique disponible correspondant au traitement nécessaire pour soigner les assurés quand bien même il n'existait pas à l'époque sous forme liquide, de sorte qu'aucune prise en charge de préparation magistrale réalisées pour le remplacer ne pouvait intervenir ; qu'il n'a pas respecté les règles relatives à la délivrance de médicaments hypnotiques et anxiolytiques.

Par conclusions écrites n°2 visées et développées oralement à l'audience par son avocat, M. [D] [N] demande à la cour de :

- confirmer le jugement du Tribunal des Affaires de sécurité sociale du 18 septembre 2018 en ce qu'il a :

- déclaré recevable M. [D] [N] en sa demande ;

- débouté la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis en sa demande de restitution d'indu ;

- condamner la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il expose que comme le confirme le jugement dont appel, pour ce qui relève de la procédure contentieuse devant le tribunal judiciaire, il y a lieu d'appliquer les règles de droit commun relative à la charge de la preuve ; que dans ses conclusions du 21 juillet 2022, la Caisse opère une confusion entre la procédure précontentieuse de contrôle et la procédure judiciaire en considérant qu'il a pu avoir accès aux pièces lors de cette procédure de contrôle ; que s'il a pu consulter les pièces, sans en obtenir de copie, dans les locaux de la Caisse, lors de la procédure de contrôle, tel n'est pas le cas ni du tribunal, ni de la cour alors même qu'il conteste les conclusions que la Caisse tire desdites pièces ; qu'à l'exception des ordonnances prescrivant des médicaments classés comme stupéfiants, le pharmacien n'a pas à conserver une copie des prescriptions, lesquelles appartiennent au patient et dont le double doit être adressé à la Caisse comme pièce justificative de la facture subrogatoire ; que sur la période considérée, la convention liant les pharmaciens aux caisses ne l'obligeait pas à conserver l'ensemble des prescriptions et, en cas de conservation, pas au-delà d'un délai de 90 jours ; que les sanctions ordinales ne sauraient justifier de l'indu ; que rien ne s'oppose à ce que le tribunal hier et aujourd'hui la cour puisse consulter les pièces justificatives et ainsi de permettre à la cour « de savoir les raisons qui ont conduit à retenir lesdites anomalies et à examiner leur bien-fondé ou non »; que dans la procédure l'opposant à la Caisse, le tableau, comme l'a justement relevé le tribunal des affaires de sécurité sociale, ne permet pas, à lui seul, d'examiner le bien-fondé des anomalies retenues par la Caisse ; que seules les prescriptions sur lesquelles figurent le nom des médicaments prescrits, la posologie, l'éventualité d'un ou de plusieurs renouvellements, et les mentions apposées par la pharmacie sur celles-ci et reprenant la date de prescription, la date de délivrance, les quantités délivrées et le montant facturé permettent de contrôler, voire d'apprécier, la réalité de l'indu ; que la preuve de renouvellements d'ordonnances sans respect de la volonté du prescripteur n'est pas rapportée ; qu'il ne peut refuser de délivrer un produit, sauf si l'intérêt de la santé l'exige ; que, s'agissant des anomalies résultant du renouvellement d'une prescription en infraction avec la durée légale de prescription d'un anxiolytique, au vu de l'indication qui serait portée sur la prescription, encore une fois non produite aux débats, il n'est pas possible de mesurer la faute qui aurait été commise par la pharmacie ; que, relativement aux anomalies résultant des préparations non remboursables, la Caisse n'a pas cru devoir produire les prescriptions litigieuses, de telle sorte qu'il n'est pas possible de déterminer le type de préparation en cause, ni de déterminer si le médecin n'a pas apposé la mention manuscrite visée à l'article R.163-1 du Code de la Sécurité Sociale sus-citée ; que le choix de la préparation a été préféré pour sécuriser l'administration par rapport à la forme liquide, dont la marge thérapeutique est étroite et pour faciliter l'administration, les gélules pouvant être ouvertes et mélangées à la nourriture.

Pour un exposé plus complet des prétentions et moyens des parties, et en application du deuxième alinéa de l'article 446-2 et de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 30 mars 2023 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.

SUR CE

- sur le droit de la preuve en matière d'indu

En cas d'inobservation des règles de tarification et de facturation des actes, prestations et produits figurant sur les listes mentionnées aux articles L. 162-1-7, L. 162-17, L. 165-1, L. 162-22-7 ou relevant des dispositions des articles L. 162-22-1 et L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale et des frais de transports mentionnés à l'article L. 321-1 du même code, l'organisme de prise en charge recouvre l' indu correspondant auprès du professionnel de santé ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé ou à un établissement. Il résulte de ces dispositions que l'organisme de prise en charge est fondé, en cas de non respect des règles de tarification et de facturation des médicaments et spécialités pharmaceutiques, à engager le recouvrement de l'indu correspondant auprès du pharmacien titulaire de l'officine qui a délivré ces derniers quelle que soit la forme juridique de l'exploitation de l'officine

Les professionnels de santé, en cas de contestation ultérieure de la caisse, doivent démontrer que les facturations qu'ils ont réalisées étaient justifiées et qu'elles lui ont été réglées à bon droit au vu de ses déclarations. Il appartient donc à l'organisme d'assurance-maladie de rapporter la preuve du non-respect des règles de tarification et de facturation, puis au professionnel de discuter des éléments de preuve produits par l'organisme, à charge pour lui d'apporter la preuve contraire (2ème Civ., 28 novembre 2013, pourvoi n°12-26.506).

La production par la Caisse de tableaux établis par elle, annexés à la notification de payer, qui reprennent, notamment, les numéros des bénéficiaires, les dates de prescription, les noms des assurés, les dates de mandatement, les numéros et noms du pharmacien, les produits délivrés, les bases de remboursement et les montants remboursés et des dossiers contestés incluant les prescriptions constitue une preuve suffisante de l'indu.

En l'espèce, la caisse produit un tableau récapitulatif mentionnant la caisse créancière, le régime d'assurance maladie, le numéro de facture, le numéro du prescripteur, la date de délivrance des produits, le code nature des prestations, le code CIP ou LPP, le libellé du médicament délivré, la quantité délivrée, le prix unitaire, le montant du remboursement, le taux du remboursement, la date de mandatement, l'anomalie commentée et le montant du préjudice. A ce tableau est jointe une liste intitulée référentiels reprenant la nature de l'anomalie et les références textuelles du code de la santé publique ou du code de la sécurité sociale ainsi que les références des arrêtés éventuellement applicables outre une table de correspondance entre les numéros de dossiers et les patients avec leur matricule de sécurité sociale, la date de naissance et le code de caisse de rattachement. Ces éléments suffisent à caractériser le manquement reproché.

Il appartient donc au pharmacien de démontrer, pour chaque anomalie dénoncée, la régularité de la délivrance, le moyen tiré des règles de télétransmission et de conservation des ordonnances étant inopérant puisque tendant à renverser la charge de la preuve qui lui incombe.

S'agissant de la violation du secret médical, la production par la caisse des dossiers médicaux avec les prescription devant la juridiction de jugement rend inopérant ce moyen.

Le jugement déféré sera donc infirmé, sauf en ce qu'il a déclaré M. [D] [N] recevable en sa demande.

- sur les indus

Les textes du code de la santé publique visés par la Caisse ne constituent pas uniquement des obligations déontologiques mais les habilitations légales à exercer la profession et les conditions de son exercice. La validité de l'exercice par le professionnel constitue la base de l'obligation de remboursement de la Caisse.

Il n'y a donc pas lieu de qualifier un préjudice dès lors que les conditions de délivrance ne sont pas respectées.

- sur les renouvellements non prescrits

La Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis expose que la délivrance de certains produits a été opérée à partir d'ordonnances ayant déjà donné lieu à délivrance.

M. [D] [N] réplique que des impératifs de santé exigeaient la délivrance des produits pour assurer la continuité des soins chez une patiente diabétique et que les copies d'écran ne démontraient rien.

Conformément aux règles de preuve, il appartient au pharmacien de démontrer que les ordonnances permettaient le renouvellent de sa part de la prescription ou que la délivrance des médicaments a été opérée sur production de la prescription y afférente.

L'article R. 165-1 du code de la sécurité sociale dispose que : « Les produits et prestations mentionnés à l'article L. 165-1 ne peuvent être remboursés par l'assurance maladie, sur prescription médicale ou sur prescription par un infirmier exerçant en pratique avancée dans les conditions prévues à l'article R. 4301-3 du code de la santé publique ou sur prescription d'un auxiliaire médical dans les conditions prévues aux articles L. 4311-1, L. 4321-1, L. 4341-1 et L. 4342-1, au cinquième alinéa de l'article L. 4322-1 et au 6° de l'article R. 4322-1 du code de la santé publique, que s'ils figurent sur une liste établie par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé de la santé après avis de la commission spécialisée de la Haute Autorité de santé mentionnée à l'article L. 165-1 du présent code et dénommée " Commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé " ».

L'article R. 5132-3 du code de la santé publique impose que l'ordonnance mentionne le renouvellement de la prescription pour une délivrance de médicament sans nouvelle ordonnance.

L'article R. 5132-22 du même code dispose, notamment pour les médicament figurant sur les Listes I et II, des dispositions particulières :

« Les pharmaciens ne sont autorisés à effectuer la première délivrance de ces médicaments que sur présentation d'une ordonnance datant de moins de trois mois.

La délivrance d'un médicament relevant de la liste I ne peut être renouvelée que sur indication écrite du prescripteur précisant le nombre de renouvellements ou la durée du traitement.

La délivrance d'un médicament relevant de la liste II peut être renouvelée lorsque le prescripteur ne l'a pas expressément interdit.

Dans tous les cas, le ou les renouvellements ne peuvent être exécutés que dans la limite du délai de traitement mentionnée à l'article R. 5132-21.

Les dispensateurs sont tenus d'exécuter les renouvellements selon les modalités définies à l'article R. 5132-14, sous réserve des dispositions de l'article R. 5121-95 ».

L'article R. 163-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige énonce enfin que : « Les médicaments auxquels s'applique l'article L. 5121-8 du code de la santé publique, ceux bénéficiant d'une autorisation d'importation parallèle, ainsi que ceux visés au premier alinéa de l'article 17 de la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992, ne peuvent être remboursés ou pris en charge par les organismes de sécurité sociale, sur prescription médicale, à l'exception des vaccins ou des topiques mentionnés respectivement aux articles R. 4311-5-1 et R. 4322-1 du code de la santé publique, ni être achetés ou fournis ou utilisés par eux que s'ils figurent sur une liste des médicaments remboursables établie par arrêté conjoint du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la sécurité sociale. L'arrêté mentionne les seules indications thérapeutiques ouvrant droit à la prise en charge ou au remboursement des médicaments.

Lorsqu'a été notifiée, dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article R. 5143-8 du code de la santé publique, la décision du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé identifiant un médicament comme spécialité générique, l'arrêté d'inscription de ce médicament sur les listes prévues respectivement au premier alinéa de l'article L. 162-17 du présent code et à l'article L. 5123-2 du code de la santé publique mentionne sa dénomination suivie, s'il s'agit d'un nom de fantaisie, du suffixe prévu à l'article L. 162-17-1. Dans ce dernier cas, la dénomination est complétée par ce suffixe dans l'étiquetage et la notice définis à l'article R. 5000 du code de la santé publique, dans le résumé des caractéristiques du produit prévu à l'article R. 5128-2 du même code, ainsi que dans toute publicité au sens de l'article L. 551 dudit code.

L'inscription sur la liste peut être assortie, pour certains médicaments particulièrement coûteux et d'indications précises, d'une clause prévoyant qu'ils ne sont remboursés ou pris en charge qu'après information du contrôle médical, selon une procédure fixée par un arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. Dans ce cas, est annexée à l'arrêté d'inscription du médicament sur la liste une fiche d'information thérapeutique établie par la commission mentionnée à l'article R. 163-15. Cette fiche rappelle, d'une part, les indications thérapeutiques mentionnées au premier alinéa ci-dessus, d'autre part, les modalités d'utilisation du médicament résultant de ses caractéristiques approuvées par l'autorisation de mise sur le marché et concernant notamment la posologie et la durée de traitement dans les indications ouvrant droit à la prise en charge ou au remboursement. La fiche rappelle également, le cas échéant, les restrictions apportées par l'autorisation de mise sur le marché à la prescription et à la délivrance du médicament.

L'inscription sur la liste prévue au premier alinéa peut, pour certains médicaments susceptibles d'être utilisés à des fins non thérapeutiques, être assortie d'une clause précisant qu'ils ne sont remboursés ou pris en charge par les caisses et organismes d'assurance maladie que si leur emploi est prescrit en vue du traitement d'un état pathologique.

Sous réserve des dispositions prévues au III de l'article R. 163-6, l'inscription sur la liste prévue au premier alinéa de l'article L. 162-17 est prononcée pour une durée de cinq ans ».

Ainsi, le pharmacien, tenu par les termes de la prescription médicale ne peut présenter au remboursement la délivrance de médicaments si le prescripteur n'a pas prévu le renouvellement.

En l'espèce, la caisse, qui produit l'ordonnance, les factures détaillées permettant la vérification des produits vendus, les décomptes de remboursement par facture, justifie des délivrances indues qu'elle reproche au pharmacien. Ce dernier ne peut s'abriter derrière la nécessité de la continuité des soins dès lors qu'il a procédé au renouvellement dans les mêmes quantités que prescrites initialement à plusieurs reprises, excluant toute urgence.

L'indu sera donc validé.

- sur les préparations magistrales non remboursables

L'article R. 163-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, dispose que : « I. - Les préparations magistrales et les préparations officinales, mentionnées aux 1° et 3° de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, délivrées sur prescription médicale, sont prises en charge par l'assurance maladie conformément aux articles R. 322-1 et R. 322-1-2, sauf lorsque ces préparations :

- soit ne poursuivent pas à titre principal un but thérapeutique, alors même qu'elles sont réalisées dans les conditions prévues aux 1° et 3° de l'article L. 5121-1 ;

- soit ne constituent qu'une alternative à l'utilisation d'une spécialité pharmaceutique, allopathique ou homéopathique disponible ;

- soit sont susceptibles d'entraîner des dépenses injustifiées pour l'assurance maladie, faute de présenter un intérêt de santé publique suffisant en raison d'une efficacité mal établie, d'une place mineure dans la stratégie thérapeutique ou d'une absence de caractère habituel de gravité des affections auxquelles elles sont destinées ;

- soit contiennent des matières premières ne répondant pas aux spécifications de la pharmacopée.

II. - Sont notamment exclues les catégories de préparations magistrales et de préparations officinales fixées par arrêté du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de la sécurité sociale répondant à au moins l'un des critères d'exclusion du remboursement mentionnés au I du présent article.

III. - La prise en charge des préparations magistrales et des préparations officinales par l'assurance maladie est subordonnée à l'apposition par le médecin sur l'ordonnance de la mention manuscrite : "prescription à but thérapeutique en l'absence de spécialités équivalentes disponibles" ».

En l'espèce, la préparation magistrale avait vocation à n'être qu'une alternative à l'utilisation d'une spécialité pharmaceutique, allopathique ou homéopathique disponible, dès lors que seule la commodité de la préparation par rapport à l'utilisation de la spécialité était en cause. Les explications données par le pharmacien ne permettent pas de remettre en cause cette appréciation.

L'indu est donc caractérisé.

- sur le non-respect de la législation sur les hypnotiques et anxiolytiques

L'article R. 5132-21 du code de la santé publique dispose que : « Une prescription de médicaments relevant des listes I et II ne peut être faite pour une durée de traitement supérieure à douze mois.

Toutefois, pour des motifs de santé publique, pour certains médicaments, substances psychotropes ou susceptibles d'être utilisées pour leur effet psychoactif, cette durée peut être réduite par décision du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé après avis des conseils nationaux de l'ordre des médecins et de l'ordre des pharmaciens ».

L'arrêté du 7 octobre 1991 précise la durée de prescription. Ainsi, l'article 1 limite à quatre semaines la durée de prescription des médicaments contenant les substances à propriétés hypnotiques, ainsi que leurs sels lorsqu'ils peuvent exister et l'article 1 bis, limite à deux semaines la prescription des médicaments contenant des substances à propriétés hypnotiques, ainsi que leurs sels. L'article 2 énonce enfin que : « Ne peuvent être prescrits pour une durée supérieure à douze semaines les médicaments contenant les substances à propriétés anxiolytiques, ainsi que leurs sels lorsqu'ils peuvent exister, inscrites sur la liste I des substances vénéneuses à des doses et à des concentrations non exonérées figurant à la deuxième partie de l'annexe du présent arrêté ».

La prescription du 6 août 2012 prévoit le renouvellement à trois reprises de la prescription de BROMAZEPAM. Même si le médecin a demandé le renouvellement, dès lors que le médicament en cause est classé comme hypnotique, le pharmacien, dans sa mission de professionnel de santé attaché au respect des dispositions impératives du code de la santé publique, aurait dû refuser de renouveler la délivrance sans nouvelle ordonnance. Or, la caisse démontre par la production des factures et des décomptes de remboursement correspondant plusieurs facturations sur la même ordonnance. Le remboursement n'était pas dû.

L'indu est donc justifié pour la somme de 6 109 euros et M. [D] [N] sera condamné au paiement de cette somme.

La caisse ne démontrant pas la date de réception de la mise en demeure du 23 octobre 2015, les intérêts courront à compter de la demande en justice présentée à l'audience du 2 juin 2017, valant interpellation suffisante.

M. [D] [N] qui succombe, sera condamné aux dépens de la procédure d'appel et au paiement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

DÉCLARE recevable l'appel de la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis ;

CONFIRME le jugement rendu le 18 septembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris en ce qu'il a déclaré M. [D] [N] recevable en sa demande ;

L'INFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau :

CONDAMNE M. [D] [N] à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis la somme de 6 109 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 2 juin 2017 ;

CONDAMNE M. [D] [N] à payer à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de Seine-Saint-Denis la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [D] [N] aux dépens de la procédure d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 19/00001
Date de la décision : 09/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-09;19.00001 ?
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