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09/06/2023 | FRANCE | N°18/02483

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 09 juin 2023, 18/02483


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 09 JUIN 2023



(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02483 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5CR5



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 novembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 17/01953





APPELANTE

ASSOCIATION [5] venant au droits de l'ASSOCIATION [6]

[Adresse 2]



[Localité 4]

représentée par Me Valérie DOLIVET, avocat au barreau de PARIS, toque : B0655



INTIMÉE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE [Localité 7]-[Localité 3]

[Adresse 1]

[L...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 09 JUIN 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02483 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5CR5

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 23 novembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 17/01953

APPELANTE

ASSOCIATION [5] venant au droits de l'ASSOCIATION [6]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Valérie DOLIVET, avocat au barreau de PARIS, toque : B0655

INTIMÉE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE [Localité 7]-[Localité 3]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901, substituée par Me Camille MACHELE, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 mars 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Gilles BUFFET, conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Raoul CARBONARO, président

Monsieur Gilles BUFFET, conseiller

Madame Natacha PINOY, conseillère

Greffier : Madame Fatma DEVECI, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Monsieur Raoul CARBONARO, président, et par Madame Alisson POISSON, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue à la suite de son arrêt avant dire droit du 21 janvier 2022, dans le litige opposant l'association [5], venant aux droits de l'association [6], à la CPAM de [Localité 7]-[Localité 3].

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été rapportées dans l'arrêt du 21 janvier 2022 auquel il est référé pour plus ample exposé, il est rappelé que Mme [F] [Z] a souscrit le 2 avril 2016 une déclaration de maladie professionnelle pour un syndrome dépressif sévère, sur la base d'un certificat médical initial du 26 mars 2016 ; que la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] a pris en charge cette pathologie le 13 décembre 2016 au titre de la législation professionnelle après avis favorable du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles du 7 décembre 2016 ; que l'association [6] a formé un recours devant la commission de recours amiable puis a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris le 12 avril 2017 de la décision de rejet implicite.

Par jugement du 23 novembre 2017, le tribunal a :

- dit l'association recevable mais non fondée en son action en inopposabilité ;

- dit que l'action de Mme [F] [Z] n'est pas prescrite ;

- dit que la décision de prise en charge de la maladie de Mme [F] [Z] reste opposable à son employeur.

Par arrêt du 21 janvier 2022, la cour, statuant sur l'appel interjeté par l'association [6], aux droits de laquelle est intervenue l'association [5], a :

- déclaré recevable l'appel de l'association [5],

- confirmé le jugement rendu le 23 novembre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris en ce qu'il a dit que la demande de reconnaissance de la maladie professionnelle formée par Madame [F] [Z] n'était pas atteinte par la prescription,

Avant dire-droit,

- désigné le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelle du Grand Est, pour donner un avis motivé sur le point de savoir si la maladie déclarée le 2 avril 2016 par Mme [F] [Z] a été ou non essentiellement et directement causée par son travail habituel,

- renvoyé l'affaire à l'audience du 2 novembre 2022,

- sursis à statuer sur les demandes,

- réservé les dépens de l'appel.

Le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelle (CRRMP) du Grand Est a rédigé son avis le 10 janvier 2023.

Aux termes de ses conclusions écrites visées et soutenues oralement à l'audience par son avocat, l'association [5], venant aux droits de l'association [6], demande à la cour de :

- la déclarer tant recevable que bien fondée en son appel,

- infirmer le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris du 23 novembre 2017,

Statuant à nouveau :

- prononcer l'inopposabilité de la décision de prise en charge de la maladie de Mme [Z] déclarée le 2 avril 2016.

L'association [5] fait valoir que l'avis du CRRMP du Grand Est conclut au rejet du lien direct et essentiel entre la maladie caractérisée soumise à instruction et le travail habituel de la victime; que cet avis est complet et sans ambiguïté ; qu'il repose sur l'ensemble des pièces du dossier transmises par les parties, et donc sur les éléments allant dans le sens d'une prise en charge de la maladie transmis par la caisse ; que l'avis du CRRMP est motivé ; que, s'il vise un élément extraprofessionnel, il est rappelé que le comité respecte le secret médical, tandis que la caisse a en sa possession tous les éléments transmis au CRRMP de sorte qu'elle ne peut ignorer ceux sur lesquels le comité a fondé sa décision ; que le CRRMP a bien rappelé le contexte professionnel dans lequel évoluait l'assurée ; que l'avis du CRRMP doit donc être entériné ; que l'avis du médecin conseil de la caisse du 8 février 2023 est critiquable et doit être écarté en ce qu'il n'a pas été soumis au CRRMP ; que cet avis se base sur deux comptes-rendus et un examen médical datant de 2016 qui ont été portés à la connaissance du CRRMP ; que la preuve de l'absence d'état antérieur n'est pas rapportée par le médecin conseil de la caisse.

Aux termes de ses conclusions écrites visées et soutenues oralement par son avocat, la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris en date du 23 novembre 2017,

- reconnaître le caractère professionnel de la maladie déclarée par Mme [F] [Z],

- déclarer opposable à l'association [6] la prise en charge de la maladie déclarée par Mme [F] [Z] au titre de la législation relative aux risques professionnels,

- condamner l'association [6] aux éventuels frais et dépens de l'instance.

La caisse fait valoir qu'elle ne peut se satisfaire de la position adoptée par le second CRRMP ; que l'ensemble des éléments du dossier démontre l'absence d'antécédents antérieurement à la psychopathologie survenue dans le contexte professionnel ; que le médecin conseil interrogé dans le cadre de ce dossier confirme également l'absence d'état antérieur ; que ce second CRRMP retient lui-même de l'analyse des pièces du dossier l'existence de relations délétères entre Mme [Z] et son supérieur hiérarchique de 2013 à juin 2015 et ce, alors même que la pathologie fut constatée médicalement pour la première fois le 8 mars 2013 ; que le second CRRMP ne peut donc valablement écarter le lien direct et essentiel en se servant d'un élément extra professionnel secondaire, donc postérieur à l'état lié directement et essentiellement aux conditions de travail; que, si ce second CRRMP retient un élément extraprofessionnel, non renseigné, qui a, selon lui, aggravé la pathologie, cet élément n'est en aucune façon de nature à justifier l'apparition de cette dernière, le CRRMP attribuant lui-même l'origine de cette pathologie aux conditions de travail de l'intéressée.

En application du deuxième alinéa de l'article 446-2 et de l'article 455 du code procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties déposées à l'audience pour plus ample exposé de leurs moyens.

SUR CE :

Selon les dispositions de l'article L 461-1 alinéas 4 et 5 du code de la sécurité sociale dans sa version issue de la loi n°2015-994 du 17 août 2015 : « Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L'avis du comité s'impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l'article L. 315-1 ».

Aux termes de son avis du 10 janvier 2023, le CRRMP de la région Grand Est émet un avis défavorable à la reconnaissance en maladie professionnelle de l'affection déclarée par Mme [Z]. Il conclut à cet égard qu'il ne peut établir de lien essentiel et direct entre l'activité professionnelle et cette affection.

Le CCRMP rappelle que Mme [Z] a déclaré le 2 avril 2016 un syndrome dépressif sévère appuyé d'un certificat médical initial du 26 mars 2016 du docteur [W] et une date de première constatation au 8 mars 2013 ; que Mme [Z] travaille comme responsable de pôle au sein d'un organisme d'accompagnement des entreprises depuis octobre 2006 ; que l'analyse des pièces présentes au dossier montre une première période avec des relations délétères avec son supérieur hiérarchique de 2013 à juin 2015 ; que ce supérieur a été écarté de son poste de travail; que, depuis 2015, un nouveau management a été mis en place ; que le nouveau supérieur de Mme [Z] a renforcé sa présence et son lien hiérarchique direct avec ses subordonnés ; que, si les contraintes psychosociales ont participé à la survenance de la pathologie déclarée par Mme [Z] sur la première période, les éléments du dossier font apparaître un élément extraprofessionnel qui a secondairement précipité la mise en arrêt et aggravé la pathologie de Mme [Z].

Si, dans sa note du 8 février 2023, le médecin conseil de la caisse fait valoir que de nombreux documents médicaux démontreraient l'absence d'état antérieur avant la date de première constatation médicale, notamment le compte rendu du docteur [H] du 23 mars 2016, l'examen du médecin conseil du 14 juin 2016 et le compte rendu du docteur [I] du 21 juin 2016, il est observé que le CRRMP a examiné la demande de Mme [Z] en ayant eu connaissance de ces pièces qui lui avaient été soumises, la caisse ayant transmis son entier dossier au CCRMP.

Par ailleurs, le CRRMP de la région Grand Est a pris en considération la situation professionnelle de Mme [Z], indiquant que les contraintes psychosociales ont participé à la survenance de la pathologie déclarée sur la première période.

Cependant, ce CRRMP, aux termes d'un avis suffisamment motivé et cohérent, en retenant qu'un élément extraprofessionnel avait secondairement précipité la mise en arrêt et aggravé la pathologie de Mme [Z], a considéré que cet élément faisait échec à l'établissement d'un lien direct et essentiel entre l'activité professionnelle et l'affection déclarée.

Le médecin conseil de la caisse, dans sa note du 8 février 2023, ne donne aucune information de nature à remettre en cause les conclusions du CRRMP.

Par conséquent, il convient de tirer les conséquences de cet avis et d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit l'association [6] non fondée en son action en inopposabilité et dit que la décision de prise en charge de la maladie de Mme [F] [Z] reste opposable à son employeur.

Statuant à nouveau, il convient de déclarer inopposable à l'association [5], venant aux droits de l'associartion [6], la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] de la maladie déclarée le 2 avril 2016 par Mme [F] [Z].

Partie succombante, la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Vu l'arrêt du 21 janvier 2022,

INFIRME le jugement rendu le 23 novembre 2017 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris en ce qu'il a dit l'association [6] non fondée en son action en inopposabilité et dit que la décision de prise en charge de la maladie de Mme [Z] reste opposable à son employeur,

Statuant à nouveau :

DECLARE inopposable à l'association [5], venant aux droits de l'associartion [6], la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] de la maladie déclarée le 2 avril 2016 par Mme [F] [Z],

CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 3] aux dépens d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 18/02483
Date de la décision : 09/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-09;18.02483 ?
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