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07/06/2023 | FRANCE | N°20/04903

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 07 juin 2023, 20/04903


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 07 JUIN 2023



(n° , 12 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04903 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCFHR



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Février 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 17/02093



APPELANT



Monsieur [U] [H]

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représen

té par Me Anissa BOURGUIBA, avocat au barreau de PARIS, toque : R167



INTIMEES



Me [O] [Z] (SELARL SELARL [O]) - Mandataire judiciaire de S.A.S. CONNECTING BAG SERVICES

[Adres...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 07 JUIN 2023

(n° , 12 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04903 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCFHR

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Février 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 17/02093

APPELANT

Monsieur [U] [H]

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représenté par Me Anissa BOURGUIBA, avocat au barreau de PARIS, toque : R167

INTIMEES

Me [O] [Z] (SELARL SELARL [O]) - Mandataire judiciaire de S.A.S. CONNECTING BAG SERVICES

[Adresse 5]

[Localité 7]

Représenté par Me Philippe GALLAND de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

Me [M] [Y] (SELAFA MJA) - Mandataire judiciaire de S.A.S. CONNECTING BAG SERVICES

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représenté par Me Philippe GALLAND de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

S.A. V.E AIRPORT Venant aux droits de la société CHARLIPISTE

[Adresse 10]

[Adresse 10]

[Localité 8]

Représentée par Me Annie GULMEZ, avocat au barreau de MEAUX

PARTIES INTERVENANTES :

Association AGS CGEA IDF EST

[Adresse 2]

[Localité 6]

Non représentée

Société L'UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Philippe GALLAND de la SCP SCP GALLAND VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame MARQUES Florence, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président de chambre

Madame Anne-Gaël BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Justine FOURNIER

ARRET :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Justine FOURNIER, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Suivant contrat de travail à durée déterminée en date du 20 décembre 1996, conclu pour trois mois, puis à durée indéterminée, M. [U] [H] a été engagé le 31 mars 1997 par la société Euronetec France, en qualité d'agent d'exploitation.

La convention collective applicable est celle du Nettoyage et Manutention pour les Aéroports (Région Parisienne) dite SAMERA.

Le 1er août 1998, M. [U] [H] a été promu chef d'équipe spécialisé, et à compter du 1er septembre 1999, il a exercé les fonctions de coordinateur, coefficent 225, catégorie agent de maîtrise.

Son contrat a ensuite été transféré à la société Charlipiste, filiale du groupe V.e Airport, le 16 janvier 2001, avec reprise d'ancienneté, de poste et de qualification.

La société Charlipiste a perdu le marché de manutention bagages du terminal 2C d'Air France en mai 2012 au profit de la société Connecting Bag Services désignée sous le sigle CBS à compter du 2 juillet 2012.

M. [U] [H] a été transféré à effet du 2 juillet 2012 à cette société après avoir signé, le 19 juin 2012, un avenant à son contrat de travail aux termes duquel il a intégré la société au poste de responsable opérationnel, coefficient 225, statut agent de maîtrise, moyennant un salaire de 2493,64 euros, outre notamment une prime mensuelle d'ancienneté conventionnelle.

La relation contractuelle entre la société CBS et M. [H] a cessé le 30 novembre 2016, date à laquelle le contrat de travail de M. [H] a été transféré, suite à la perte du marché.

M. [U] [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 24 juin 2013, aux fins de voir condamner la société V.E Airport venant aux droits de la société Chalipiste et la société CBS à lui payer diverses sommes. L'affaire a été radiée avant d'être ré-enrolée le 17 juillet 2017.

En cours de procédure, le salarié a modifié et complété ses demandes.

Par jugement en date du 25 février 2020, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Paris a :

- débouté M. [U] [H] de ses demandes,

- débouté les sociétés Ve.airport venant aux droits de la société Charlipiste et la société Connecting bag services de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [H] aux dépens.

Par déclaration au greffe en date du 23 juillet 2020, M. [H] a interjeté appel de cette décision.

Une procédure de redressement judiciaire de la société CBS a été ouverte par le Tribunal de commerce de Bobigny le 10 décembre 2020. Par jugement du 6 juillet 2021, le tribunal a adopté un plan de cession de l'activité de la société.

La procédure de redressement judiciaire a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Bobigny du 12 octobre 2021.

La SELARL [O] MJ prise en la personne de Me [Z] [O] et

la SELAFA MJA prise en la personne de Me [I] [M] ont été désignées en qualité de mandataires liquidateurs.

Aux termes de ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 5 janvier 2023, M. [U] [H] demande à la Cour de :

-infirmer en toutes ses dispositions le jugement du conseil des prud'hommes en date du 25 février 2020,

Statuant à nouveau,

A l'encontre de la société V.e. airport venant aux droits de la société Charlipiste,

- condamner la société V.e. airport venant aux droits de la société Charlipiste à verser à M. [H] les sommes suivantes :

* 11.843,63 euros et 1.184,36 euros de congés payés afférents pour la période de juin 2008 à juin 2012 à titre de rappel de la prime d'ancienneté,

* 5.619,25 euros et 561,92 de congés payés afférents pour la période de juin 2008 à juin 2012 à titre de rappel de salaire pour les temps de pause,

- ordonner la remise de bulletins de paie, solde de tout compte, attestation Pôle Emploi conformes, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,

- condamner la société V.e. airport venant aux droits de la société Charlipiste à la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société V.e. airport venant aux droits de la société Charlipiste à 10.000 euros d'amende civile et 5.000 euros de dommages et intérêts en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- condamner la société V.e. airport venant aux droits de la société Charlipiste aux dépens éventuels,

- dire que les sommes porteront intérêt au taux légal et la condamner au paiement desdits intérêts avec capitalisation annuelle de ceux-ci conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

A l'encontre de la SAS CBS (fixation au passif) :

- constater la violence économique subie par M. [H] et annuler les articles 3 et 6 de l'avenant du 19 juin 2012,

En conséquence,

- fixer au passif de la SAS CBS la créance suivante : 10.000 euros net à titre de dommages et intérêts,

- constater la violation par la SAS CBS de l'article 38 bis de la convention collective,

- constater la violation par la SAS CBS de l'article 6 de l'accord de négociations salariales du 28 décembre 2006 dont le salarié a été injustement privé,

- dire que M. [H] a été victime d'inégalité salariale,

En conséquence,

- fixer au passif de la SAS CBS la créance suivante : 30.000 euros net à titre de dommages et intérêts,

- faire application de l'accord de négociations salariales du 28 décembre 2006,

En conséquence,

- placer M. [H] au coefficient 236 avec effet rétroactif au 2 juillet 2012

En conséquence,

- fixer au passif de la SAS CBS les créances suivantes :

* 12.548,97 euros et 1.254,90 de congés payés afférents pour la période de juillet 2012 à novembre 2016 à titre de rappel du salaire fixe,

* 1.783,17 euros 178,32 euros de congés payés afférents pour la période de juillet 2012 à novembre 2016 à titre de rappel de la prime d'ancienneté,

- fixer au passif de la SAS CBS les créances suivantes :

*6.437,84 euros et 643,78 euros de congés payés afférents pour la période de juillet 2012 à novembre 2016 à titre de rappel du temps de pause,

- condamner Maîtres [O] et Maître [Y] [M], es qualité de liquidateurs judiciaires à la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- enjoindre Maîtres [O] et Maître [Y] [M], es qualité de liquidateurs judiciaires à remettre à M. [H] l'attestation Pôle Emploi, le solde de tout compte et les bulletins de salaires conformes à ses prétentions sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du prononcé de la décision,

- dire que les sommes fixées au passif de la SAS CBS porteront intérêt au taux légal jusqu'à la date d'ouverture de la procédure collective et condamner Maîtres [O] et Maître [Y] [M] es qualité de liquidateurs judiciaire, au paiement desdits intérêts avec capitalisation annuelle de ceux-ci conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

- déclarer opposable à l'AGS/CGEA IDF la décision à intervenir.

Par ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 5 janvier 2023, la société Connecting bag services, représentée par la société MJA, prise en la personne de Maître [I] [M], ès qualité de liquidateur judiciaire, et par la société [O] MJ, prise en la personne de Maître [Z] [O], ès qualité de liquidateur judiciaire, demande à la Cour de :

- dire et juger que M. [H] a été rempli de l'ensemble de ses droits et que la société CBS a respecté l'ensemble de ses obligations conventionnelles lors du transfert du salarié le 2 juillet 2012,

- débouter M. [H] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

- confirmer le jugement rendu le 25 février 2020 par le conseil de prud'hommes de Bobigny en toutes ses dispositions,

- condamner M. [H] à verser à la société Connecting bag services la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [H] aux entiers frais et dépens.

Par ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 5 décembre 2022, la société V.e airport demande à la Cour de :

- juger irrecevables les conclusions n°4 communiquées le dimanche 4 décembre 2022,

- juger en tout état de cause irrecevables les nouvelles prétentions au titre de l'amende civile et des dommages et intérêts pour procédure abusive au visa de l'article 32-1 du code de procédure civile,

- les juger à titre subsidiaire mal fondées,

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté débouté le salarié de l'ensemble de ses demandes à l'encontre la société V.e airport,

- juger en tant que de besoin les demandes à caractère salarial prescrites pour la période antérieure au 24 juin 2008,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [H] de ses demandes de condamnation solidaire avec la société CBS,

- condamner M. [H] à verser à la société V.e airport, venant aux droits de la SARL Charlipiste, la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'AGS n'a pas constitué avocat.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 24 janvier 2023.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé complet du litige.

MOTIFS DE LA DECISION

1-Sur les critiques émises par la Société VE Airport à propos de la déclaration d'appel du salarié.

Si dans le corps de ses conclusions, la société Ve Airport critique la déclaration d'appel au visa cumulé des articles 542, 954 et 901 et soutient que la cour ne pourra que confirmer le jugement, cette argumentation n'est pas concrétisée, dans le dispositif de ses conclusions par une quelconque demande, si bien que la cour n'en est pas saisie.

2-Sur la demande de la société V.E Airport de voir juger irrecevables les conclusions n°4 communiquées par le conseil du salarié le dimanche 4 décembre 2022.

Cette demande est sans objet, l'ordonnance de clôture initiale en date du 6 décembre 2022 ayant fait l'objet d'une révocation avec fixation d'une nouvelle date de clôture au 24 janvier 2023.

3-Sur la recevabilité des demandes tendant à voir condamner la société VE Airport à la somme de 10.000 euros d'amende civile et à celle de 5.000 euros de dommages et intérêts en application de l'article 32-1 du code de procédure civile

La société VE. Airport soutient que ces demandes nouvelles n'ayant pas été visées dans les conclusions d'appel prises dans le délai de l'article 908 du code de procédure civile sont irrecevables.

Aux termes de l'article 910-4 du code de procédure civile " A peine d'irrecevabilité, relevée d'office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l'ensemble de leurs prétentions sur le fond. L'irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

Néanmoins, et sans préjudice de l'alinéa 2 de l'article 802, demeurent recevables, dans les limites des chefs du jugement critiqués, les prétentions destinées à répliquer aux conclusions et pièces adverses ou à faire juger les questions nées, postérieurement aux premières conclusions, de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait."

La cour constate que les demandes sus-visées, d'ailleurs nouvelles en cause d'appel, n'étaient pas formulées aux termes des premières conclusions de l'appelant notifiées par RPVA le 23 octobre 2020.

Dès lors ces demandes sont irrecevables.

4-Sur les demandes à l'encontre de la société V.E Airport venant aux droits de la société Charlipiste

4-1 Sur la demande de rappel de la prime d'ancienneté du juin 2008 à juin 2012 et des congés payés afférents

Le salarié soutient que l'article 16 de l'annexe III de la convention collective de la manutention et nettoyage sur les aéroports de la région parisienne prévoit le versement d'une prime d'ancienneté au profit des agents de maîtrise et des cadres et fixe le calcul en fonction d'un pourcentage variant avec l'ancienneté dans la catégorie.

M. [U] [H] indique qu'alors qu'il bénéficie de l'ancienneté conventionnelle requise depuis le 1er septembre 2022, cette prime ne lui a jamais été payée, comme le démontrent ses bulletins de paie lesquels ne mentionnent aucune prime d'ancienneté.

Le salarié souligne que si son ancien employeur soutient que cette prime était intégrée dans sa rémunération au titre de son salaire fixe, il n'a jamais donné son consentement à cette intégration. Il indique par ailleurs que le fait d'avoir bénéficié d'un salaire supérieur au minimum conventionnel est insuffisant à prouver que la prime d'ancienneté était incluse.

La société VE Airport fait valoir en réponse que la majoration d'ancienneté conventionnellement prévue n'a pas à figurer distinctement sur les bulletins de salaire à défaut d'une disposition contractuelle prévoyant la prime d'ancienneté.

L'annexe III ( agents de maîtrise et cadres) de la convention collective régionale du nettoyage et de la manutention sur les aéroports de la région parisienne, dite Samera, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit des " majorations d'ancienneté, calculées sur le salaire de base de la catégorie" accordées en fonction de l' ancienneté et selon des pourcentages variant en fonction du nombre d'années de présence dans l'entreprise.

Ce texte fait référence de façon précise à une " majoration d'ancienneté " pouvant donc être intégrée à la rémunération et non à une prime d'ancienneté, distincte du salaire.

En tout état de cause, la majoration d'ancienneté, non contractualisée si bien que l'accord du salarié est indifférent, calculée sur le salaire de base pouvait être incluse dans le salaire de base. Il est souligné que les grilles de salaires conventionnels et les bulletins de paie produits aux débats permettent de vérifier que le salaire effectivement versé à M. [U] [H] par la société Charlipiste aux droits de laquelle vient la société VE Airport, a été supérieur au salaire minimum conventionnel majoré, calculé en fonction de son ancienneté, de sa classification et des barèmes de la convention collective.

Dès lors, M. [U] [H] est débouté de sa demande de rappel de prime sur ancienneté et de sa demande d'indemnité de congés payés afférents. Le jugement est confirmé de ce chef.

4-2-Sur la demande de rappel de salaire au titre des temps de pause

M. [U] [H] soutient qu'il n'a pas bénéficié des temps de pause de 20 minutes prévus par l'article L.3121-33 du code du travail ou de la pause prévue par l'article 31 de la convention collective.

L'article L.3121-33 du code du travail dispose : «Dès que le temps de travail quotidien atteint six heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes. Des dispositions conventionnelles plus favorables peuvent fixer un temps de pause supérieur.»

L'article 31 de la convention collective dispose : « Pour les salariés faisant une seule séance de travail, cette séance peut être, suivant le cas, soit interrompue par un casse-croûte ne comptant pas dans la durée du travail, soit ininterrompue si la nature des opérations permet au salarié de prendre un casse-croûte sans quitter son service.

- Dans le premier cas (cas d'interruption pour un casse-croûte) ne comptant pas dans la durée du travail : a) La durée de ce casse-croûte est comprise entre une demi-heure et quarante-cinq minutes ; b) Le moment du casse-croûte doit être nettement déterminé et ne pas dépendre uniquement des faits relatifs au service. Il ne peut être imposé moins de deux heures après le commencement ou trois heures avant la fin du service et ne peut être décalé qu'accidentellement par une décision du représentant local de l'entreprise. c) Pendant le casse-croûte, le salarié ne peut être tenu d'effectuer aucun travail ; s'il est maintenu ou rappelé en service, la durée du casse-croûte est entièrement comptée comme travail.

- Dans le second cas (cas du casse-croûte pris sans quitter le service et qui est le cas le plus général) : a) Le salarié prend le casse-croûte au moment convenable pour ne pas interrompre le service ; b) Le salarié qui prend le casse-croûte ne peut invoquer cette circonstance pour suspendre ou différer l'exécution du service qui lui est confié .».

Le salarié soutient que compte tenu de son poste ( seul responsable opérationnel sur les secteurs TBC et TBM) et du manque d'effectif, il était contraint de demeurer constamment à la disposition de son employeur.

L'employeur doit rapporter la preuve du respect des temps de pause.

La société VE Airport fait valoir que le salarié, qui ne s'était jamais manifesté sur ce point et n'a jamais réclamé d'heures supplémentaires, se trouvait, compte tenu de ses fonctions, dans le second cas prévu par l'article 31 de la convention collective et a disposé de ses temps de pauses conformément aux dispositions conventionnelles. La société échoue à en rapporter la preuve, se contentant de procéder par affirmations.

Pour autant, le salarié ne peut demander un rappel d'heures supplémentaires puisque qu'il n'a pas travaillé au delà de la durée légale du temps de travail, son temps de travail lui ayant été rémunéré mais uniquement des dommages et intérêts, ce qu'il ne fait pas.

A défaut, M. [H] ne peut qu'être débouté de sa demande de ce chef.

Le jugement est confirmé.

5-Sur les demandes à l'encontre de la société Connecting Bag Services (CBS)

5-1 Sur la demande de dommages et intérêts pour violence économique

Le salarié soutient que son consentement a été vicié par la violence économique subie, ayant été menacé de licenciement en cas de refus de signer l'avenant à effet du 2 juillet 2012. Il est demandé l'annulation des article 3 ( coefficient appliqué) et 6 ( rémunération) de cet avenant jugés lésionnaires et de condamner la société à lui payer des dommages et intérêts.

La société CBS répond que le salarié n'a l'objet d'aucune violence économique et a signé son contrat sans y être contraint.

La cour constate que le salarié n'établit d'aucune façon le chantage au licenciement dont il affirme avoir été la victime, les tracts syndicaux en date de juin 2013 produits étant, à cet égard inopérants. Il est d'ailleurs souligné que si le salarié avait refusé de signer l'avenant en question, il n'aurait pas été licencié et serait tout simplement resté le salarié de la société Charlipiste.

Les courriers de l'inspection du travail produits aux débats n'établissent pas plus le vice (violence) de son consentement que le salarié affirme avoir subi.

M. [U] est débouté de sa demande d'annulation des article 3 et 6 de l'avenant à effet du 2 juillet 2012 (il est d'ailleurs surprenant de ne solliciter que l'annulation de deux articles d'un document dont on affirme qu'il a été signé sous la violence économique).

Le salarié est débouté de sa demande de dommage et intérêts de ce chef.

Le jugement est confirmé.

5-2 : Sur la violation de l'article 38 bis de la convention collective et l'application de l'accord du 28 décembre 2006

M. [U] [H] soutient que lors du transfert de son contrat de travail à la société CBS, celle-ci lui a imposé la signature d'un avenant lésionnaire et contraire à l'article 38 bis de la convention collective.

Il indique que cet avenant du 28 juin 2012 à effet du 2 juillet 2012 en ce qu'il l'a exclu de l'accord de négociations salariales du 28 décembre 2006 en vigueur au sein de CBS lequel prévoit, au regard de sa situation professionnelle ( poste et ancienneté), un coefficient 236 alors que son ancien coefficient 225 a été appliqué, l'accord prévoyant pourtant un passage automatique au coefficient 236 après 5 années d'ancienneté. Le salarié estime en conséquence qu'il a subi un préjudice de qualification. Il indique que par ailleurs, il a subi un préjudice salarial, la société CBS en profitant pour réduire son salaire de base et incluant une prime d'ancienneté dont pourtant, il n'avait jamais été payé par la société Charlipiste.

La société répond que l'avenant régularisé par le salarié est conforme à la convention collective et qu'elle a maintenu le statut du salarié, sa qualification, son coefficient et sa rémunération tels que fixés par la société Charlipiste avant son transfert en juillet 2012. Elle soutient que la situation contractuelle de M. [U] [H] au sein de la société sortante a été maintenue en l'adaptant aux pratiques de paie de la société CBS.

Aux termes de l'article 38 bis de la convention collective applicable "

Dans tous les cas, la rémunération globale, l'ancienneté acquise, la qualification doivent être maintenues à un niveau équivalent pour chaque salarié concerné. Cette équivalence est

recherchée parmi les qualifications existantes chez le nouvel employeur. Par rémunération globale, il est entendu la rémunération brute des 12 derniers mois hors éléments exceptionnels, sans toutefois perpétuer les libellés de ses composantes et ses modalités de versement.

Il est procédé par l'entreprise entrante à un avenant au contrat de travail qui précisera expressément les points évoqués à l'alinéa précédent, cet avenant type sera présenté aux comités d'établissement ou aux comités d'entreprise concernés. Cet avenant précisera l'éventuel avantage individuel du salarié transféré et les avantages collectifs en vigueur dans la nouvelle entreprise, les usages ou autres avantages individuels et collectifs en vigueur au sein de l'entreprise cédante n'étant pas transférés."

Il est constaté que la société CBS ne s'explique pas sur la non application au salarié du coefficient 236 , se contentant d'indiquer qu'elle a appliqué au salarié le même coefficient que précédemment.

Compte tenu de la reprise de l'ancienneté du salarié, conformément à l'article 38 bis de la convention collective, et de l'accord de négociations salariales du 28 décembre 2006 qui avait vocation à s'appliquer à M. [H], aux termes duquel "le passage au coefficient 236 est conditionné par 5 années d'ancienneté au coéfficient 225", le salarié , qui était au coefficient 225 depuis le 1er septembre 1999, soit depuis plus de 5 ans, aurait dû bénéficier du coefficient 236 à compter du 2 juillet 2012.

Il y a lieu de faire droit à la demande du salarié de ce chef.

Le jugement est infirmé.

5-3-Sur la demande de rappel de salaire suite à l'application du coefficient 236

Le salarié soutient qu'il a été victime d'une inégalité de traitement comme fondement à sa demande qui correspondant en réalité à un rappel de salaire fondé sur l'application, durant la relation contractuelle, du coefficient 236 et que la cour est fondée à traiter comme telle.

Il résulte des piéces soumises à l'appréciation de la cour et notamment du tableau produit pas le salarié, que M. [H] peut prétendre à un rappel de salaire de 12548,97 euros, outre la somme de 1254,89 euros au titre des congés payés afférents. Ces sommes seront fixées au passif de la société CBS.

Le jugement est infirmé de ce chef.

5-4 Sur la demande de dommages et intérêts suite à la non application du coefficient 236

Aux termes de l'article 1231-6 du code civil, les dommages-intérêts dus à raison du retard dans le paiement d'une obligation de sommes d'argent consistent dans l'intérêt au taux légal, à compter de la mise en demeure. Le créancier auquel son débiteur en retard a causé par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages-intérêts distincts de l'intérêt dilatoire.

Le salarié ne rapportant pas la preuve de la mauvaise foi de l'employeur, il ne peut prétendre à des dommages et intérêts.

Le salarié est débouté de ce chef.

Le jugement est confirmé.

5-5 Sur la demande de rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté

Alors que la société Charlipiste incluait, comme il a été dit plus haut, la prime d'ancienneté dans le salaire, la société CBS a fait le choix de distinguer le salaire de base et la prime d'ancienneté, sans que la société n'en "profite" pour réduire le salaire de base, comme le soutient le salarié.

Il résulte des pièces produites aux débats que le salarié a été payé de sa prime

d'ancienneté selon ses droits.

Il est débouté de sa demande de ce chef.

Le jugement est confirmé

5-6-Sur la demande de rappel de salaire au titre des temps de pause

M. [U] [H] soutient qu'il n'a pas bénéficié des temps de pause de 20 minutes prévus par l'article L.3121-33 du code du travail ou de la pause prévue par l'article 31 de la convention collective.

L'article L.3121-33 du code du travail dispose : «Dès que le temps de travail quotidien atteint six heures, le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de vingt minutes. Des dispositions conventionnelles plus favorables peuvent fixer un temps de pause supérieur.»

L'article 31 de la convention collective dispose : « Pour les salariés faisant une seule séance de travail, cette séance peut être, suivant le cas, soit interrompue par un casse-croûte ne comptant pas dans la durée du travail, soit ininterrompue si la nature des opérations permet au salarié de prendre un casse-croûte sans quitter son service.

- Dans le premier cas (cas d'interruption pour un casse-croûte) ne comptant pas dans la durée du travail : a) La durée de ce casse-croûte est comprise entre une demi-heure et quarante-cinq minutes ; b) Le moment du casse-croûte doit être nettement déterminé et ne pas dépendre uniquement des faits relatifs au service. Il ne peut être imposé moins de deux heures après le commencement ou trois heures avant la fin du service et ne peut être décalé qu'accidentellement par une décision du représentant local de l'entreprise. c) Pendant le casse-croûte, le salarié ne peut être tenu d'effectuer aucun travail ; s'il est maintenu ou rappelé en service, la durée du casse-croûte est entièrement comptée comme travail.

- Dans le second cas (cas du casse-croûte pris sans quitter le service et qui est le cas le plus général) : a) Le salarié prend le casse-croûte au moment convenable pour ne pas interrompre le service ; b) Le salarié qui prend le casse-croûte ne peut invoquer cette circonstance pour suspendre ou différer l'exécution du service qui lui est confié .».

Le salarié soutient que compte tenu de son poste (seul responsable opérationnel sur les secteurs TBC et TBM) et du manque d'effectif, il était contraint de demeurer constamment à la disposition de son employeur.

L'employeur doit rapporter la preuve du respect des temps de pause.

La société CBS fait valoir que le salarié, qui n'a jamais rien réclamé de ce chef , se trouvait, compte tenu de ses fonctions, dans le second cas prévu par l'article 31 de la convention collective et a disposé de ses temps de pauses conformément aux dispositions conventionnelles. La société indique que le médecin du travail n'a jamais émis la moindre remarque ni réserve sur le rythme de travail des salariés et que les délégués du personnel ne se sont pas plus anifestées à ce propos. Elle indique que trois salariés attestent en ce sens.

La société échoue à rapporter la preuve du respect du temps de pause en ce qui concerne, non les salariés en général, mais M. [H] en particuler.

Pour autant, le salarié ne peut demander un rappel d'heures supplémentaires puisque qu'il n'a pas travaillé au delà de la durée légale du temps de travail, son temps de travail lui ayant été rémunéré mais uniquement des dommages et intérêts, ce qu'il ne fait pas.

A défaut, M. [H] ne peut qu'être débouté de sa demande de ce chef dans la mesure ou il n'appartient pas à la cour de requalifier sa demande.

Le jugement est confirmé.

6- Sur la remise des documents de fin de contrat

Il convient d'ordonner la remise un solde de tout compte, une attestation destinée au Pôle Emploi et des bulletins de salaire conformes à la présente décision, celle-ci étant de droit, sans qu'il ne soit nécessaire de prononcer une astreinte.

7- Sur les intérêts et leur capitalisation

Les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes jusqu'au 10 décembre 2020, date du

jugement d'ouverture du redressement judiciaire, lequel arrête définitivement le cours des intérêts.

La capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière sera ordonnée en application de l'article 1343-2 du code civil.

8-Sur la garantie de l' AGS

L'AGS doit sa garantie dans les conditions et limites prévues aux articles L.3253-6 et suivants du code du travail, notamment dans la limite des plafonds visés à l'article L.3253-17 .

9-Sur les demandes accessoires

Le jugement est infirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile sauf en ce qu'il a débouté la VE. Airport et la société CBS de leur demande respective au titre des frais irrépétibles.

La SELARL [O] MJ prise en la personne de Me [Z] [O] et la SELAFA MJA prise en la personne de Me [I] agissant en leur qualité de liquidateurs judiciaires de la société Connecting Bag Services sont condamnés aux dépens d'appel.

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de M. [U] [H] ainsi qu'il sera dit au dispositif.

La société VE Airport et la SELARL [O] MJ prise en la personne de Me [Z] [O] et la SELAFA MJA prise en la personne de Me [I] [M] en qualité de liquidateurs judiciaires de la société Connecting Bag Services sont déboutés de leur demande respective au titre des frais irrépétibles en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Constate qu'elle n'est pas saisie des critiques émises par la Société VE Airport à l'encontre de la déclaration d'appel du salarié,

Dit sans objet la demande de la SA VE Airport aux fins de dire irrecevables les conclusions n°4 communiquées par le conseil du salarié le 4 décembre 2022,

Dit irrecevables les demandes tendant à voir condamner la société VE Airport à la somme de 10.000 euros d'amende civile et à celle de 5.000 euros de dommages et intérêts en application de l'article 32-1 du code de procédure civile,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté M. [U] [H] de sa demande de rappel de salaires et des congés afférents au titre de l'application du coefficient 236, sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe comme suit les créances de M. [U] [H] au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Connecting Bag Services:

- 12548,97 euros au titre de rappel de salaire en raison de l'application du coefficient 236 depuis le 2 juillet 2012,

-1254,89 euros au titre des congés payés afférents,

Dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation jusqu'au 10 décembre 2020,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière en application de l'article 1343-2 du code civil

Ordonne à la SELARL [O] MJ prise en la personne de Me [Z] [O] et la SELAFA MJA prise en la personne de Me [I] [M] agissant en qualité de liquidateurs judiciaires de la société Connecting Bag Services de remettre à M. [U] [H] , un solde de tout compte, une attestation destinée au Pôle Emploi et des bulletins de salaire conformes au présent arrêt dans un délai de un mois à compter de sa signification, sans qu'il ne soit prononcé d'astreinte,

Dit que la garantie de l'UNEDIC Délégation AGS CGEA IDF EST ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale,

Dit que la garantie de l'AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l'article D. 3253-5 du Code du travail,

Condamne la SELARL [O] MJ prise en la personne de Me [Z] [O] et la SELAFA MJA prise en la personne de Me [I] [M] agissant en qualité de liquidateurs judiciaires de la société Connecting Bag Services à payer à M. [U] [H] la somme de 4000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Déboute la SA VE Airport de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Déboute la SELARL [O] MJ prise en la personne de Me [Z] [O] et la SELAFA MJA prise en la personne de Me [I] [M] agissant en qualité de liquidateurs judiciaires de la société Connecting Bag Services de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Condamne la SELARL [O] MJ prise en la personne de Me [Z] [O] et la SELAFA MJA prise en la personne de Me [I] [M] agissant en qualité de liquidateurs judiciaires de la SAS Connecting Bag Services aux dépens de première instance et d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/04903
Date de la décision : 07/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-07;20.04903 ?
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