Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRET DU 07 JUIN 2023
(n° , 11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07596 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAJEP
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Mai 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F16/07917
APPELANTES
SARL LES TROIS JOYAUX
[Adresse 4]
[Localité 8]
Représentée par Me Bernard VATIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R280
SCI IMMO HORIZON 2000
[Adresse 4]
[Localité 8]
Représentée par Me Bernard VATIER, avocat au barreau de PARIS, toque : R280
INTIMES
Madame [F] [E]
[Adresse 1]
[Localité 8]
Représentée par Me Vincent MILLET, avocat au barreau de PARIS, toque : G0446
Madame [T] [Z]
[Adresse 9]
[Localité 8]
Représentée par Me Vincent MILLET, avocat au barreau de PARIS, toque : G0446
Maître [H] [O] ès qualités de liquidateur judiciaire de la société LAO LANXANG
[Adresse 6]
[Localité 7]
N'ayant pas constitué avocat, signification remise à tiers présent à domicile le 13/01/2021
ASSOCIATION UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST
[Adresse 5]
[Localité 10]
Représentée par Me Eléonore FAVERO, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : 1701
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Avril 2023, en audience publique, les avocats ne s'étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Véronique MARMORAT, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Véronique MARMORAT, présidente
Madame Fabienne ROUGE, présidente
Madame Anne MENARD, présidente
Lors des débats : Madame Sarah SEBBAK
ARRÊT :
- Par défaut
- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- signé par Madame Véronique MARMORAT, présidente et par Madame Sarah SEBBAK, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Madame [F] [E], née le 13 avril 1973 à [Localité 11] (Thailande ), a été embauchée à compter du 1er octobre 2011 en qualité de cuisinière par la société Lao Lanxang ayant comme activités restaurant, salon de thé, plats à emporter, traiteur.
Madame [T] [Z], née le 15 septembre 1971 à [Localité 12] (Laos), a été embauchée à compter du 1er août 2011 en qualité de serveuse par la même société.
Par courrier du 27 mai 2016, la société Lao Lanxang a informé madame [E] et madame [Z] que leurs contrats de travail ont été transférés au sein des sociétés Immo Horizon 2000 et Les Trois Joyaux et les a invitées à se mettre en rapport avec elles.
Par courriers des 1er et 2 septembre 2016, les deux salariées signifiaient aux sociétés Lao Lanxang, Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000 que n'étant plus payées de leurs salaires depuis mars 2016, elles prenaient acte de la rupture de leur contrat de travail.
Le 8 juillet 2016, mesdames [E] et [Z] ont saisi en résiliation judiciaire et en diverses demandes indemnitaires et salariales le Conseil des prud'hommes de Paris.
Madame [E] a saisi en référé le Conseil des prud'hommes de Paris qui, par une ordonnance du 29 juillet 2016, a condamné à titre provisionnel la société Immo Horizon 2000 à lui payer la somme de 6 516,44 euros 'au titre des salaires pour les mois de mars, avril, mai et juin 2016" outre 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
La Cour d'appel de Paris a confirmé 14 septembre 2017 cette ordonnance. Par arrêt du 20 mars 2019, la Cour de cassation a estimé que la société Immo Horizon 2000 avait repris le fonds de commerce, qu'elle avait donné en gérance à la société Lao Lanxang et que le fond n'était pas en ruine au jour de la restitution, de sorte que la Cour d'appel en a exactement déduit que le non renouvellement du contrat de location-gérance avait entraîné le retour du fonds loué au bailleur et que les contrats de travail qui lui étaient attachés s'étaient poursuivis avec ce dernier.
Le 29 décembre 2017, le Tribunal de commerce de Paris a ouvert, à l'égard de la société Lao Lanxang, une procédure de liquidation judiciaire et a fixé la date de cessation des paiements au 7 septembre 2016.
Par jugement en date du 16 mai 2019, le Conseil des prud'hommes de Paris a :
Dit qu'à la date de résiliation du contrat de location gérance, à savoir le 15 février 2016, le fonds de commerce retourne, ainsi que les salariés qui y travaillent, article L 1224-1 du code du travail, aux propriétaires du fonds de commerce, à savoir les sociétés les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000
Mis hors de cause l'association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest
Dit que la prise d'acte de madame [E] produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse
Condamne solidairement les sociétés Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000 à payer à madame [E] les sommes suivantes
Titre
Montant en euros
rappels de salaires de mars 2016 à septembre 2016
congés payés afférents
10 046,18
1 004,62
indemnité de licenciement
1 601,94
indemnité compensatrice de préavis
indemnité compensatrice de congés payés sur préavis
3 258,22
325,82
indemnité pour licenciement abusif
5 000
dommages et intérêts pour réparation du préjudice financier
3 000
article 700 du code de procédure civile
300
Ordonne solidairement aux sociétés Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000 à remettre à madame [E] un bulletin de paie conforme à la présente décision
Déboute madame [E] du surplus de ses demandes
Déboute la société Les Trois Joyaux de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne solidairement les sociétés Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000 aux dépens
Par jugement en date du 16 mai 2019, le Conseil des prud'hommes de Paris a :
Dit qu'à la date de résiliation du contrat de location gérance, à savoir le 15 février 2016, le fonds de commerce retourne, ainsi que les salariés qui y travaillent, article L 1224-1 du code du travail, aux propriétaires du fonds de commerce, à savoir les sociétés les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000
Mis hors de cause l'association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest
Dit que la prise d'acte de madame [Z] produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse
Condamne solidairement les sociétés Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000 à payer à madame [Z] les sommes suivantes
titre
montant en euros
rappel de salaire de mars 2016 à septembre 2016
congés payés afférents
10 046, 18
1 004, 62
indemnité de licenciement
1 656, 25
indemnité compensatrice de préavis
congés payés afférents
3 258, 22
352,82
indemnité pour licenciement abusif
5 000
dommages et intérêts pour réparation du préjudice financier
3 000
article 700 du Code de procédure civile
300
Ordonne solidairement aux sociétés Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000 à remettre à madame [Z] un bulletin de paie conforme à la présente décision
Déboute madame [E] du surplus de ses demandes
Déboute la société Les Trois Joyaux de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Condamne solidairement les sociétés Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000 aux dépens
La société Les Trois Joyaux et la société Immo Horizon 2000 ont interjeté appel de ces décisions le 27 juin 2020.
Par conclusions signifiées par voie électronique le 17 janvier 2020, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, les sociétés Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000 demandent à la Cour de :
A titre liminaire :
Ordonner la jonction des affaires RG 19/7600 et RG19/7596
Réformer les deux jugements entrepris (RG F 16/07917 et RG F 16/07927), et statuant de nouveau
A titre principal :
Dire et juger que les dispositions de l'article L 1244-1 du code du travail sont inapplicables au cas d'espèce, le fonds ayant cessé d'être exploité depuis plus de deux mois avant sa restitution et les locaux étant à l'état de ruine
Reformer les condamnations prononcées à l'encontre des concluantes et rejeter les parties adverses de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions
A titre subsidiaire :
Dire que Trois Joyaux est seule propriétaire du fonds de commerce donné en location gérance en application des dispositions impératives des articles L 144-1 et suivants du code de commerce
Ordonner la mise hors de cause de la société Immo Horizon 2000
A titre infiniment subsidiaire, s'agissant de la responsabilité éventuelle de Trois Joyaux, et dans l'hypothèse ou l'article L 1224-1 serait applicable, juger que :
Les sommes antérieures au 17 mai 2016 correspondent à des salaires et accessoires qui doivent être supportées par les Ags compte tenu de la liquidation judiciaire de la société Lao Lanxang
Dire et juger qu'aucune somme ne saurait être mise à la charge de Trois Joyaux pour la période antérieure au 17 mai 2016
En tout état de cause :
Rejeter toutes les demandes plus amples ou contraires des parties adverses
Condamner l'Ags à les relever de garantie les concluantes
Condamner mesdames [E] et [Z] aux entiers dépens et à payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions signifiées par voie électronique, le 30 décembre 2019 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, madame [E] demande à la Cour d'appel de Paris de :
A titre principal :
Débouter les appelantes de l'ensemble de leurs demandes
Confirmer le jugement sur le principe et le quantum des condamnations à l'exception du quantum de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et fixer celle-ci à la somme de 12 000 euros
A titre subsidiaire, dans l'hypothèse ou la Cour infirmerait le jugement entrepris en ce qu'il a condamné solidairement les sociétés Immo Horizon 2000 et Trois Joyaux, de :
Débouter les appelantes de l'ensemble de leurs autres demandes
Confirmer le jugement de première instance s'agissant du principe des condamnations prononcées
Par conséquent, condamner l'une autre l'autre des sociétés Immo Horizon 2000 et Trois Joyaux à verser à madame [E] les mêmes sommes à l'exception de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et fixer celle-ci à la somme de 12 000 euros.
A titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse ou la Cour infirmerait le jugement entrepris en ce qu'il a constaté le transfert du contrat de travail en application de l'article L 1224-1 du code du travail, de :
Débouter les appelantes de l'ensemble de leurs autres demandes
Fixer au passif de la société Lao Lanxang les créances de madame [E] à l'exception du quantum de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et fixer celle-ci à la somme de 12 000 euros
Déclarer les créances de madame [E] opposables à l'association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest dans la limite de sa garantie légale et de ses plafonds applicables
En toute hypothèse :
Condamner solidairement les sociétés Immo Horizon 2000 et Trois Joyaux à lui verser la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Ordonner solidairement les sociétés Immo Horizon 2000 et Trois Joyaux ou, le cas échéant, à la SCP [O]-Daude de lui délivrer un bulletin de paie conforme, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la date de l'arrêt à intervenir
Condamner solidairement les sociétés Immo Horizon 2000 et Trois Joyaux ou, le cas échéant, de fixer au passif de la société Lao Lanxang les dépens.
Dans ses conclusions signifiées par voie électronique, le 30 décembre 2019 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, madame [Z] demande à la Cour d'appel de Paris de :
A titre principal :
Débouter les appelantes de l'ensemble de leurs demandes
Confirmer le jugement sur le principe et le quantum des condamnations à l'exception du quantum de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et fixer celle-ci à la somme de 12 000 euros
A titre subsidiaire, dans l'hypothèse ou la Cour infirmerait le jugement entrepris en ce qu'il a condamné solidairement les sociétés Immo Horizon 2000 et Trois Joyaux, de :
Débouter les appelantes de l'ensemble de leurs autres demandes
Confirmer le jugement de première instance s'agissant du principe des condamnations prononcées
Par conséquent, condamner l'une autre l'autre des sociétés Immo Horizon 2000 et Trois Joyaux à verser à madame [E] les mêmes sommes à l'exception de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et fixer celle-ci à la somme de 12 000 euros.
A titre infiniment subsidiaire, dans l'hypothèse ou la Cour infirmerait le jugement entrepris en ce qu'il a constaté le transfert du contrat de travail en application de l'article L 1224-1 du code du travail, de :
Débouter les appelantes de l'ensemble de leurs autres demandes
Fixer au passif de la société Lao Lanxang les créances de madame [E] à l'exception du quantum de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et fixer celle-ci à la somme de 12 000 euros
Déclarer les créances de madame [Z] opposables à l'association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest dans la limite de sa garantie légale et de ses plafonds applicables
En toute hypothèse :
Condamner solidairement les sociétés Immo Horizon 2000 et Trois Joyaux à lui verser la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile
Ordonner solidairement les sociétés Immo Horizon 2000 et Trois Joyaux ou, le cas échéant, à la SCP [O]-Daude de lui délivrer un bulletin de paie conforme, sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la date de l'arrêt à intervenir
Condamner solidairement les sociétés Immo Horizon 2000 et Trois Joyaux ou, le cas échéant, de fixer au passif de la société Lao Lanxang les dépens.
Dans ses conclusions signifiées par voie électronique le 28 novembre 2019, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, l'association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest demande à la Cour d'appel de Paris de :
Confirmer le jugement en ce qu'il a constaté le transfert des contrats de travail et prononcé sa mise hors de cause
Débouter les appelantes de leurs demandes de condamnation de l'AGS à relever de garantie les condamnations qui seraient mises à leur charge
Débouter les appelantes de l'intégralité de leurs demandes vis à vis de la société Lao Lanxang et de l'AGS
Condamner les appelantes aux entiers dépens
Sur la garantie de l'AGS :
Dire et juger que s'il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale
Dire et juger qu'en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l'article L 3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens dudit article L 3253-8 du code du travail, les astreintes ou article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie
Dire et juger que la garantie de l'AGS est plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, à un des trois plafonds définis à l'article D 3253-5 du code du travail
Statuer ce que de droit quant aux frais d'instance (dont les dépens) sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'Unédic AGS.
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
MOTIFS
Sur la jonction des deux procédures
En application de l'article 367 du code de procédure civile selon lequel le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire ou juger ensemble, il convient d'ordonner la jonction des affaires RG 19/7600 et RG19/7596 qui ne sont désormais référencées sous le seul numéro de rôle RG19/7596.
Sur le transfert des contrats de travail
Principe de droit applicable :
Selon l'article L 1224-1 du code du travail, lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.
Le transfert se réalise également lorsque sont caractérisés l'existence et le transfert d'une entité économique autonome ayant conservé son identité. L'identité économique autonome se définit comme un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre.
Application en l'espèce
Les sociétés Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000 affirment que le fond de commerce a été volontairement dépecé de ses éléments corporels et incorporels par la société Lao Lanxang et la famille [M].
Ainsi selon elles, s'agissant de la dissipation volontaire des éléments corporels constitutifs du fond de commerce, l'activité aurait cessé en raison de l'enlèvement de l'essentiel des équipements et d'une inondation du fonds, ce qui a rendu impossible l'exploitation du fonds, celui-ci aurait été en ruine au plus tard, à partir du 1er mars 2016, les locaux étant dégradés et les conditions d'hygiène inexistantes, de sorte, qu'après la restitution des clés, la bailleresse a été contrainte d'engager d'importants travaux de réparation pour mettre le local en conformité avec les règles de sécurité les plus élémentaires. Cette ruine matérielle du fonds rendait, selon les sociétés Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000, impossible la poursuite d'activité et partant, le transfert des contrats de travail.
Elles soutiennent également que le nom commercial Lao Lane Xang, qui constituait sa dénomination sociale et sous laquelle le fonds litigieux était exploité, a été appréhendé par le restaurant exploité en face au [Adresse 2] et précisent alors que ce fonds est exploité par la société [M] Frère, qui a pour gérant monsieur [Y] [M], dont le frère n'est autre que le gérant de la société Lao Lanxang. Ainsi, elles affirment qu'à compter de la fermeture du fonds le 1er mars 2016, la clientèle s'est rendue au restaurant 'Lao Lane Xang', situé en face, alors que l'enseigne est un élément constitutif du fonds de commerce.
En effet, elles affirment que la société Lao Lanxang disposait d'un second restaurant situé au [Adresse 3] et exploité sous l'enseigne 'Ruamit' ; restaurant considéré par la presse comme étant une 'extension' du restaurant, objet du fonds. Dès lors, elles considèrent qu'il lui appartenait, dès mars 2016, de transférer ses salariés au sein de cet établissement secondaire situé dans le bâtiment adjacent du fonds litigieux.
Elles affirment également que Lao Lanxang et la société [M] Frères ont dépouillé le fonds de commerce de ses éléments constitutifs, le vidant de sa substance et participant à son état de ruine. Dès lors, en procédant de la sorte, elles considèrent que ces derniers se sont assurés de l'impossibilité pour la bailleresse de poursuivre l'exploitation d'un fonds de commerce en ruine.
Enfin, les sociétés Les Trois Joyaux et Immo Horizon 2000 affirment que la société Lao Lanxang et la société [M] Frères ont dépouillé le fonds de commerce de ses éléments constitutifs, le vidant de sa substance et participant à son état de ruine. Dès lors, en procédant de la sorte, elles considèrent que ces derniers se sont assurés de l'impossibilité pour la bailleresse de poursuivre l'exploitation d'un fonds de commerce en ruine.
Il résulte des pièces versées à la procédure que par acte du 5 février 2004, la société Immo Horizon 2000 met la partie du fonds de commerce consacrée à la restauration située [Adresse 4] à [Localité 8] en location gérance à la société Lao Lanxang qui dans ce cadre juridique embauchera madame [E] et madame [Z]. Le 4 mai 2016, le tribunal de commerce de Paris prononce la résiliation de ce contrat de location gérance par non reconduction de son terme le 14 févier 2016 puis par décision du 4 mai 2016 ordonne l'expulsion de la société Loa Lanxang. Cette société fera l'objet de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire par jugement du 29 décembre 2017 rendu par la même juridiction qui fixera la date de cessation des paiements au 7 septembre 2016.
Il ressort de ce qui précéde et en application de l'article L 1224-1 du code du travail du code du travail, qu'en raison de la résiliation du contrat de location gérance le 14 février 2016, les contrats de travail, éléments du fonds de commerce, sont revenus au propriétaire de ce fonds soit la société Immo Horizon 2000, sans qu'il ne puisse être établi de lien juridique entre ce fonds et la société Les Trois Joyaux, absente au contrat de location gérance du 5 février 2004.
Le procès-verbal d'huissier du 24 mai 2016 n'établit pas un état de ruine mais une dégradation des locaux sans qu'il ne soit justifié de ce état au moment du transfert des contrats de travail soit au 14 février 2016.
En conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a décidé que le transfert des contrats de travail s'est effectué le 14 février 2016 mais de l'infirmer en ce qu'il a considéré que la société Immo Horizon 2000 et la société Les Trois Joyaux étaient employeurs de madame [E] et de madame [Z]. Il y a lieu de mettre hors de cause la société Les Trois Joyaux, la scp [O]-Daude prise en la personne de maître [H] [V], mandataire liquidateur de la société Loa Lanxang et l'association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest.
Sur l'exécution des contrats de travail
Principe de droit applicable :
Aux termes des articles 1103 et 1104 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.
Cette dernière disposition est d'ordre public.
Ces articles s'appliquent en droit du travail, l'article L 1221-1 du code du travail prévoyant que le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun. Il peut être établi selon les formes que les parties contractantes décident d'adopter.
Selon l'article L 3242-1 du code du travail, la rémunération des salariés est mensuelle et indépendante, pour un horaire de travail effectif déterminé, du nombre de jours travaillés dans le mois. Le paiement mensuel neutralise les conséquences de la répartition inégale des jours entre les douze mois de l'année.
Pour un horaire équivalent à la durée légale hebdomadaire, la rémunération mensuelle due au salarié se calcule en multipliant la rémunération horaire par les 52/12 de la durée légale hebdomadaire.
Le paiement de la rémunération est effectué une fois par mois. Un acompte correspondant, pour une quinzaine, à la moitié de la rémunération mensuelle, est versé au salarié qui en fait la demande.
Application en l'espèce
Madame [E] et madame [Z] exposent que le fonds n'était plus exploité depuis le 1er mars 2016 et qu'il appartenait à la société Immo Horizon 2000 en sa qualité d'employeur de procéder au reclassement de ses salariées dans l'un de ses différents établissements ou de procéder, le cas échéant, à leur licenciement.
Il n'est pas contesté qu'après la résiliation du contrat de location gérance et le transfert des contrats de travail, les obligations de l'employeur restaient identiques soit la fourniture d'un travail et le versement d'un salaire ce qui n'a pas été fourni aux salariées alors que la société Immo Horizon 2000 était informé de cette situation comme partie dans les litiges ouvertes devant le tribunal de commerce de Paris et par les courriers adressés les 1er et 2 septembre 2016.
En conséquence, ces manquements sont établis et justifient l'allocation des sommes retenues par le Conseil des prud'hommes aux titres des rappels de salaire de mars 2016 à septembre 2016 outre les congés payés afférents ainsi que les sommes accordées en raison du préjudice financiers subi par les salariés.
En revanche faute de l'établissement d'un préjudice, il convient de confirmer les décisions de rejet prises par les premiers pour le défaut de visites médicales.
Sur la rupture des contrats de travail
Principe de droit applicable :
Aux termes de l'article L 1231-1 du code du travail, le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié ou d'un commun accord.
Les manquements de l'employeur susceptibles de justifier la résiliation judiciaire à ses torts doivent être d'une gravité suffisante. La résiliation judiciaire aux torts de l'employeur produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. Contrairement à la lettre de licenciement, la lettre de prise d'acte ne fixe pas les limites du litige. Ces faits qui pris isolément ne présentent pas de caractère de gravité, sont, par leur accumulation, de nature à avoir dégradé les conditions de travail de l'intéressé
Application en l'espèce
Les manquements constatés ci-dessus justifient que la rupture des contrats de travail soient mises à la seule charge de l'employeur soit la société Immo Horizon 2000, les lettres de prise d'acte des 1er et 2 septembre 2016 étant justifiées sur ces manquements. En conséquence ces ruptures ont les effets de licenciements sans cause réelle et sérieuse.
Il convient en conséquence de confirmer les montants des sommes allouées à madame [E] et madame [Z] aux titres de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, et de l'indemnité pour licenciement abusif justement définies à l'égard des dispositions législatives et réglementaires et aux situations des deux salariées, madame [E] et madame [Z].
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par défaut prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,
ORDONNE la jonction des affaires RG 19/7600 et RG19/7596 qui sont désormais référencées sous le seul numéro de rôle RG19/7596.
CONFIRMER le jugement entrepris sauf en ce qu'il a décidé que le transfert des contrats de travail de madame [E] et de madame [Z] conclus avec la société Lao Lanxang s'est effectué le 14 février 2016 au profit des deux sociétés soit la société Immo Horizon 2000 et la société Les Trois Joyaux.
L'INFIRME sur ce point.
Statuant à nouveau sur ce point,
DÉCIDE que le transfert des contrats de travail de madame [E] et de madame [Z] conclus avec la société Lao Lanxang s'est effectué le 14 février 2016 au profit de la seule société Immo Horizon.
MET hors de cause la société Les Trois Joyaux, la scp [O]-Daude prise en la personne de maître [H] [O], mandataire liquidateur de la société Loa Lanxang et l'association Unédic délégation Ags Cgea Île de France Ouest.
CONDAMNE la société Immo Horizon 2000 à verser à madame [E] et à madame [Z] la totalité des sommes retenues par le Conseil des prud'hommes.
CONFIRME le surplus de la décision.
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la société Immo Horizon 2000 à verser à madame [E] la somme de 300 euros et à madame [Z] la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.
CONDAMNE la société Immo Horizon 2000 aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE