REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 05 JUIN 2023
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/15221 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEH3H
Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Juin 2021 - Tribunal de Commerce de Paris RG n° 2020022117
APPELANTE
S.A.R.L. CONCEPTION RENOVATION AMENAGEMENT
Société à responsabilité limitée au capital social de 20.000 euros,
immatriculé au RCS de Paris sous le numéro 803 524 701,
Prise en la personne de son représentant légal.
Ayant son siège social
[Adresse 1]
[Localité 4]
N° SIRET : 803 524 701
Représentée par Me Jonathan SAADA, avocat au barreau de PARIS
INTIMEE
S.A.S. LOXAM
agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité
Ayant son siège social
[Adresse 2]
[Localité 3]
N° SIRET : 450 776 968
Représentée par Me Philippe JEAN PIMOR de la SELEURL SELARL JEAN-PIMOR, avocat au barreau de PARIS, toque : P0017
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 13 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente
Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Edouard LOOS, Président dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Edouard LOOS, Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.
FAITS ET PROCEDURE
La société Loxam a pour activité la location d'engins de chantier.
La société Conception Rénovation Aménagement (ci-après CRA) a une activité de constructions de maisons individuelles.
La société Conception Rénovation Aménagement a conclu le 9 octobre 2019 avec la société loxam un contrat de location d'une journée d'une mini-pelle 5 tonnes avec 3 godets.
Cet engin et les godets ont été volés dans la nuit du 10 au 11 octobre 2019. La société Loxam a déposé plainte au commissariat de police le 15 octobre 2019.
La société Loxam a facturé à la société Conception Rénovation Aménagement entre le 31 octobre et le 31 décembre 2019 :
- La location de la mini-pelle et des godets (1 facture)
- 15% de la valeur de remplacement à neuf de la mini-pelle et des 3 godets (4 factures).
Les factures sont impayées pour un montant total de 7 143, 11 euros.
Sur la même période, la société Loxam a émis un avoir relatif à la location d'une chargeuse tombée en panne.
Le montant net total de 7 143,11 euros est demeuré impayé.
Par acte du 02 juin 2020, la Sas Loxam a fait assigner la Sarl Conception Rénovation Aménagement devant le tribunal de commerce de Paris afin de la voir condamner à payer les sommes dues.
* * *
Vu le jugement prononcé le 25 juin 2021 par le tribunal de commerce de Paris qui a statué comme suit :
- Déboute la Sarl Conception Rénovation Aménagement de ses demandes,
- Condamne la Sarl Conception Rénovation Aménagement à payer à la Sas Loxam la somme de 7 143,11 euros à titre principal avec intérêt de retard égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque Centrale Européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points à compter du 31 janvier 2020,
- Condamne la Sarl Conception Rénovation Aménagement à payer à la Sas Loxam la somme de 200 euros (5 x 40 euros) à titre d'indemnité forfaitaire de recouvrement,
- Déboute la Sas Loxam de sa demande de dommages et intérêts,
- Condamne la société Sarl Conception Rénovation Aménagement aux dépens et à payer 1 600 euros à la société Sas Loxam en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Déboute les parties de leurs demandes plus amples, autres, ou contraires aux présentes dispositions
- Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement,
- Liquide les dépens à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 74,50 euros dont 12,20 euros de TVA.
Vu l'appel déclaré le 03 août 2021 par la Sarl Conception Rénovation Aménagement,
Vu les dernières conclusions signifiées le 29 octobre 2021 par la Sarl Conception Rénovation Aménagement ,
Vu les dernières conclusions signifiées le 20 décembre 2021 par la société Loxam,
La Sarl Conception Rénovation Aménagement demande à la cour de statuer comme suit :
Vu les articles 1103 et 1104 du code civil ;
Vu l'article 1119 du code civil ;
Vu l'article 1242 alinéa 1 er du code civil ;
Vu les articles 699 et 700 du code de procédure civile ;
- Recevoir l'appel formé par la société Conception Rénovation Aménagement, le déclarer recevable et bien fondé ;
- Infirmer le jugement rendu le 25 juin 2021, par le tribunal de commerce de Paris, en toutes ses dispositions et notamment en ce en ce qu'il a condamné la société Conception Rénovation Aménagement au paiement de la somme de 7 143,11 euros, à titre principal, assorti des intérêts de retard, la somme de 200 euros, à titre d'indemnité forfaitaire de recouvrement et enfin la somme de 1 500 euros, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;
Statuant à nouveau,
- Juger que les dispositions générales et particulières du contrat de location du matériel litigieux, en se comportant les modalités de restitution (article 14) d'une part, et aussi, celles applicables relativement à la facturation (article 12-4), d'autre part, sont inopposables à la société Conception Rénovation Aménagement ;
- Juger que la société Conception Rénovation Aménagement n'est pas responsable du préjudice matériel subi par la société Loxam ;
En tout état de cause,
- Juger que la société Loxam était gardienne du matériel litigieux, au moment de la survenance du sinistre ;
- Juger que la société Loxam ne justifie ni de la réalité ni du quantum de son préjudice ;
En conséquence,
- Débouter la société Loxam de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société Conception Rénovation Aménagement,
Sur les demandes reconventionnelles de la société CRA,
- Condamner la société Loxam à verser à la société Conception Rénovation Aménagement
2 000 euros à titre de dommages et intérêts, pour procédure abusive ;
6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
La société Loxam demande à la cour de statuer comme suit :
Vu les articles 954 et 74 du code de procédure civile ;
Vu les articles 1103, 1104 et 1353 du code civil;
- Dire la Société Conception Rénovation Aménagement irrecevable et en tous cas mal fondés en son appel à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de Paris du 3 août 2021,
Statuant à nouveau :
- Dire la société Conception Rénovation Aménagement irrecevable en sa demande de sursis à statuer,
- Débouter la société Conception Rénovation Aménagement de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- Condamner la société Conception Rénovation Aménagement à payer et porter à Sas Loxam les sommes de :
* 7 143,11 euros à titre principal avec intérêt de retard égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque Centrale Européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points, à compter du 31 janvier 2020,
* 200 euros (5 x 40 euros) à titre d'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, en application des dispositions de l'article L441-10 du code de commerce,
* 1 500 euros à titre de frais non-compris dans les dépens sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la première instance.
-* 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'instance d'appel.
- Condamner la société Conception Rénovation Aménagement aux entiers dépens, dont distraction au profit de la Selarl Philippe Jean-Pimor, Avocat aux offres de droit.
SUR CE, LA COUR
a) Sur le sursis à statuer
La société CRA soutient, au visa des articles 311-1 du code pénal, 2 et 4 du code de procédure pénale, que sa responsabilité pénale ne peut être retenue et que sa demande de sursis à statuer est fondée aux motifs respectifs qu'il n'est pas contesté qu'elle n'est pas pénalement responsable de l'infraction commise à son préjudice et qu'en dépit de l'absence d'informations sur les suites réservées à la plainte déposée par l'intimée, celle-ci peut se constituer partie civile dans le cadre du procès pénal à venir et donc, le premier juge aurait dû surseoir à statuer sur l'action civile.
La société Loxam soutient, au visa des articles 74 et 954 du code de procédure civile, que la demande de sursis à statuer de la requérante est irrecevable aux motifs qu'elle n'est pas reprise dans son dispositif et qu'il s'agit d'une demande nouvelle non présentée devant les premiers juges.
Ceci étant exposé, le dispositif des conclusions de la société CRA ne comporte aucune demande de sursis à statuer. En application de l'article 954 du code deprocédure civile, la cour n'a pas à statuer de ce chef. D'autre part, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, la cour n'estime pas devoir surseoir à statuer au vu du seul dépôt d'une plainte pour vol dont il n'est pas justifié ni même soutenu qu'elle ait donné suite à des poursuites pénales .
b) Sur les demandes principales
La société CRA soutient, au visa des articles 1119, 1242 alinéa 1er, 1231-1, 1353 du code civil et 9 du code de procédure civile, que sa responsabilité civile ne peut être retenue aux motifs que les conditions permettant la mise en 'uvre de sa responsabilité civile ne sont pas réunies. L'intimée ne démontre ni l'existence d'une faute qui lui est imputable, ni le lien de causalité avec le dommage, ni l'existence d'un manquement contractuel. Le régime de la responsabilité du fait des choses n'est pas applicable, dès lors que le matériel litigieux n'était plus sous la garde du locataire. L'infraction est commise antérieurement à l'envoi du contrat de location et postérieurement à l'heure de reprise du matériel par l'intimée. Les conditions générales de location lui sont inopposables dès lors qu'elles ne sont pas reçues et acceptées. Les retours de location ou des bons de reprise ne sont pas des documents pertinents permettant d'attester de l'opposabilité des conditions générales de location.
La société Loxam soutient, au visa des articles 1103, 1353 du code civil et 110-3 du code de commerce, que le contrat et ses conditions générales de location sont opposables à la requérante aux motifs que celle-ci avait connaissance et a accepté ces deux documents contractuels. En matière commerciale, la preuve étant libre, il est démontré que la requérante a consenti au contrat et qu'elle connaît parfaitement ses conditions générales et les a acceptés, en raison des relations contractuelles régulières entre les cocontractantes. Au surplus, il ressort de ses conditions générales que la requérante avait la garde juridique du matériel au moment du vol.
Ceci étant exposé, le fondement des demandes indemnitaires présentées par la société Loxam porte sur les articles 14.2 , 3.1 et 10.1 des conditions générales du contrat de location conclu avec la société CRA.
Il résulte des pièces versées aux débats que le contrat n° 743310802 comportant les conditions spéciales et générales de la location d'une pelle et de trois godets pour la journée du 10 octobre 2019 entre 7 heures et 18 heures ne comporte pas la signature de la société CRA. Si un exemplaire versé aux débats mentionne qu'il a été édité le 9 octobre 2019 à 16H46, aucun document ne justifie de son envoi à la société CRA.
Si un courrier électronique de la société CRA daté du 9 octobre 2019 adressé à la société Loxam porte la mention 'accord' avec indication de l'adresse de livraison , aucune justification du transfert du contrat n'est produite par la société Loxam.
La société CRA est ainsi fondée à soutenir que les condition générales du contrat qu'elle n'a pas signé et dont elle n'a pas eu connaissance lui sont inopposables, nonobstant le fait que le contrat a été exécuté . Il est indifférent que la société CRA ait antérieurement signé avec la société Loxam d'autres contrats identiques portant sur d'autres matériels.
D'autre part le vol aurait été commis dans la nuit du 10 au 11 octobre 2010 alors que la fin de la location a été prévue pour le 10 octobre 2010. Aucune explication n'est fournie sur les circonstances ayant conduit au dépassement de la durée contractuelle et au maintien de la garde juridique par la société CRA .
Il se déduit de ce qui précède que la société Loxam ne peut pas réclamer de la société RCA le paiement de sommes en exécution de stipulations contractuelles dont elle ne justifie pas qu'elles aient été portées à la connaissance de la société CRA et acceptées par cette dernière.
La société Loxam doit être déboutée de se demandes, le jugement déféré étant infirmé.
c) Sur les autres demandes
Au delà de son caractère infondé, la société CRA ne justifie pas en quoi la procédure engagée à son encontre pas la société Loxam présenterait un caractère abusif. Elle doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts présentée à ce titre.
Une indemnité doit être allouée à la société CRA sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
INFIRME le jugement déféré;
Statuant de nouveau :
DÉBOUTE la société Loxam de toutes ses demandes ;
CONDAMNE la société Loxam aux dépens ;
CONDAMNE la société Loxam à payer à la société Conception Rénovation Aménagement la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
REJETTE toutes autres demandes .
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
S.MOLLÉ E.LOOS