La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/06/2023 | FRANCE | N°18/05707

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 01 juin 2023, 18/05707


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 01 JUIN 2023



(n° , 2 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05707 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5SCB



Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2018 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY - RG n° F 17/00210





APPELANT



Monsieur [G] [C] [L]

[Adresse 1]

[Local

ité 4]

Représenté par Me Marie-laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936





INTIMEE



Société MELAVIE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Mme [I] [K], Délégué sy...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 01 JUIN 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05707 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5SCB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Mars 2018 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY - RG n° F 17/00210

APPELANT

Monsieur [G] [C] [L]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Marie-laure BONALDI, avocat au barreau de PARIS, toque : B0936

INTIMEE

Société MELAVIE

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Mme [I] [K], Délégué syndical patronal

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de chambre

Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre

Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Charlotte BEHR.

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

M. [C] [L] a été embauché par la société Melavie, par contrat à durée indéterminée du 20 mai 1998, en qualité d'aide soignant/veilleur de nuit.

Son dernier salaire moyen brut mensuel s'élève à 2583, 74 euros.

Est applicable à la relation contractuelle ' la convention collective unique ' du 18 avril 2002.

Par courrier du 03 février 2015, la société Melavie en la personne de son directeur, a acté les refus du salarié de participer à une formation d'apprentissage des bonnes pratiques professionnelle lors des soins de nursing auprès des résidents.

Par courrier du 13 février 2015, M. [C] [L] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 26 février 2015. Un autre entretien a été signifié par courrier du 24 février pour le 03 mars 2015.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 06 mars 2015, la société Melavie a notifié à M. [C] [L] son licenciement pour faute grave.

Contestant le bien fondé de son licenciement, M. [C] [L] a saisi le conseil de prud'hommes d'Évry par requête du 22 juin 2015.

Par jugement contradictoire du 15 mars 2018, le conseil de prud'hommes a :

-dit que le licenciement de M. [C] [L] repose bien sur une cause réelle et sérieuse,

-débouté M. [C] [L] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

-fixé le salaire mensuel de M. [C] [L] à 2.583,94 euros,

-condamné la SAS Melavie, prise en la personne de son représentant légal, à verser à M. [C] [L] les sommes suivantes :

5.167,00 euros (cinq mille cent soixante sept euros) au titre de l'indemnité de préavis,

516,70 euros (cinq cent seize euros et soixante dix centimes) au titre de congés payés sur préavis,

8.654,56 euros (huit mille six cent cinquante quatre euros et cinquante six centimes) au titre d'indemnité légale de licenciement

avec intérêts au taux légal sur ce sommes à compter du prononcé du présent jugement, soit le 15 mars 2018,

-condamné la SAS Melavie, prise en la personne de son représentant légal, à verser à M. [C] [L] la somme de 1.500,00 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-prononcé l'exécution provisoire du présent jugement sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile,

-mis les dépens afférents aux actes et procédures de la présente instance à la charge de la SAS Melavie, partie défenderesse, y compris les éventuels frais d'exécution par voie légale en application des articles 10 et 11 des décrets du 12 décembre 1996 et du 08 mars 2001 relatifs à la tarification des actes d'huissiers de justice.

Par déclaration notifiée par la voie électronique le 23 avril 2018, M. [C] [L] a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions transmises par la voie électronique le 09 juillet 2018, M. [C] [L] demande à la cour de :

- le recevoir en son appel, l'y déclarer bien fondé.

-infirmer le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes d'Évry le 15 mars 2018 et statuant à nouveau,

-condamner la société Melavie au paiement des sommes suivantes :

dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse : 30.000,00 euros

-confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

-condamner en tout état de cause la société Melavie au paiement de la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

-la condamner aux entiers dépens.

Par ordonnance 23 novembre 2020, le conseiller de la mise en état a constaté l'irrecevabilité des conclusions de l'intimée pour non respect des délais prescrits par l'article 909 du code de procédure civile.

Par arrêt en date du 8 décembre 2021, la Cour a confirmé l'ordonnance déférée.

La Cour se réfère pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties aux écritures susvisées.

L'instruction a été déclarée close le 8 février 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il convient de rappeler que lorsque les conclusions déposées par l'intimé sont déclarées irrecevables, la Cour est saisie par les seuls moyens de l'appelant et ne peut faire droit à la demande de ce dernier que si elle l'estime régulière, recevable et bien fondée conformément aux dispositions de l'article 472 du code de procédure civile. L'intimé dont les conclusions ont été déclarées irrecevables est assimilé à celui qui n' a pas conclu et est réputé s'approprier les motifs du jugement selon les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile.

L'article L. 1235-1 du Code du travail dispose qu'en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure de licenciement suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute existe, il profite au salarié.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

En l'espèce, la lettre de licenciement en date du 6 mars 2015, qui fixe les termes du litige, reproche au salarié les manquements suivants:

- manquements professionnels tenant au non-respect des règles d'hygiène, la mauvaise qualité des soins d'hygiène des résidents, le défaut de prévention des escarres, la mauvaise manipulation de la résidente qui s'est plainte, l'absence d'aide à l'hydratation de cette résidence, la mauvaise réalisation de l'eau de Cologne; la non mise en sécurité du résident;

- le refus de formation pour pallier à ces manquements;

- la transmission sans avoir réalisé l'acte de nettoyage de fauteuil roulant;

- le 'débranchage' des appels malades pour ne pas être dérangé.

Les premiers juges ont retenu que 'il ressort des pièces produites et des explications fournies à la barre que les manquements à l'éthique professionnelle reprochés à M. [G] [C] [L] s'appuient sur de réels faits constatés lors du suivi des contrôles d'accompagnement des personnes âgées dépendantes, notamment lors de la démarche qualité mise en oeuvre le 19 janvier 2015; que la lettre de licenciement reprend point par point les carences et mauvaises pratiques constatées ce jour là; que la tergiversation sur le refus de formation proposée, issue des constats faits sur les pratiques du salarié et substitutive à sanctions, est reprochée au salarié comme ne voulant satisfaire à se plier aux bonnes pratiques nécessaires pour les soins et la prise en charge d'un public délicat; que par ailleurs les transmissions sans réalisation d'acte et le débranchement des sonnettes afin de ne pas être dérangé par les appels figurent aux motifs constitutifs de la faute grave; qu'à l'appui de ses affirmations quant aux manquements professionnels la société n'apporte aucune preuve formelle outre une fiche de suivi non manuscrite et non signée; que les courriers qui se croisent sont sujets à caution dans les rapports entre le salarié et sa direction, notamment en ce qui concerne la formation proposée; qu'aucune pièce ne vient au soutien d'un débranchement de la sonnette'.

Les premiers juges en ont conclu que ' il est toutefois constaté que les éléments reprochés au salarié ont été encadrés et fléchés dans le cadre de la démarche qualité propre à l'établissement; que ceux-ci bien que constituant des manquements valablement reprochés au salarié ne sauraient être constitutifs d'une faute grave au regard des textes'et ont requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse.

M. [C] [L] conteste les griefs évoqués aux motifs que la fiche de suivi à laquelle l'employeur se réfère n'est pas manuscrite et n'est pas signée tant par l'employeur que par lui même, qu'il a expliqué à son employeur que son organisation familiale rendait difficile le suivi d'une formation telle qu'imposée en journée; que le lendemain de l'entretien préalable, il a adressé un courrier à la société Melavie aux termes duquel il acceptait la formation après s'être organisé avec son épouse et enfin que les autres manquements ne sont pas établis faute de production de pièces lisibles ou probantes.

Il produit l'attestation d'une collègue de travail rappelant son importante ancienneté et faisant état de ce qu'il a toujours travaillé correctement et n'a jamais débranché une sonnette, les certificats de suivi d'études d'infirmier, de son diplôme obtenu dans son pays d'origine et de ses courriers de contestation adressés à son employeur.

La Cour relève tout comme les premiers juges qu'aucune pièce ne permet de retenir deux griefs visés dans la lettre de licenciement (débranchage de sonnette et transmission sans accomplissement du nettoyage de fauteuil), qui sont d'ailleurs non datés ni circonstanciés et ne sont étayés par aucun élément.

M. [C] [L] ne conteste pas avoir refusé dans un premier temps la formation proposée suite à la constatation de certains manquements. En effet, il verse la lettre recommandée envoyée par son employeur portant pour date le 3 février 2015 actant son refus de formation.

Aux termes de ce courrier, l'employeur mentionne qu'en raison du constat de manquements le 19 janvier 2015 le salarié a été reçu par l'employeur en présence du délégué du personnel le 27 janvier 2015 et s'est vu reprocher l'insuffisance professionnelle dont il avait fait preuve lors d'un soin de nursing suite à un contrôle. L'employeur lui a alors proposé une formation plutôt que d'opter pour une mesure disciplinaire.

Il s'en évince que l'employeur lui reproche son refus fautif de formation, les autres griefs visés relevant de l'insuffisance professionnelle.

Il résulte en effet de l'article L. 6321-1 du code du travail que l'employeur doit assurer l'adaptation du salarié à son poste de travail, veiller au maintien de sa capacité à occuper un emploi au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. A ce titre, il peut imposer au salarié dans le cadre de son pouvoir de direction et dans l'intérêt de l'entreprise une formation. Il incombe au salarié de justifier d'un motif légitime en cas de refus de suivre la formation prévue, faute de quoi le refus peut s'analyser en une insubordination justifiant un licenciement disciplinaire.

Il était noté dans ce même courrier que le salarié souhaitait faire cette formation mais ne pouvait travailler de jour en semaine compte tenu de ses obligations familiales. Il lui était proposé le 30 janvier 2015 au regard de ses obligations avec ses enfants de venir travailler un week-end sur deux en réduisant son temps de travail la nuit pour rester dans le nombre d'heures réglementaires, modification qu'il refusait également aux motifs que 'c'était au cadre de venir le former la nuit'.

A la date de l'envoi de la convocation à l'entretien préalable fixé au 26 février 2015 puis au 3 mars 2015, le refus du salarié de faire la formation était toujours d'actualité. Ce n'est qu'après l'entretien préalable que celui-ci a changé d'avis et a écrit à son employeur qu'après réflexion il acceptait de faire cette formation. La lettre est datée du 4 mars, soit le lendemain de l'entretien préalable, l'accusé de réception faisant apparaître qu'elle aurait été enregistrée par la poste du lieu de résidence de l'appelant le 5 mars 2015.

La décision de l'employeur d'organiser la formation relevant de son pouvoir de direction, il apparaît que M. [C] [L] ne justifie pas de la persistance de son refus d'effectuer cette formation compte tenu de l'aménagement proposé par l'employeur pour tenir compte tant de ses horaires que de ses obligations familiales. De surcroît, le contrat de travail permettait à l'employeur de modifier le planning des week-ends du salarié. Cette formation, était destinée bien qu'il en ait contesté l'utilité, à lui permettre d'actualiser ou revoir ses pratiques au visa des constatations effectuées.

Il s'ensuit que le refus réitéré de M. [C] [L] de faire une formation dans le cadre de soins prodigués à des résidents âgés pouvant engager la responsabilité de l'employeur, n'était pas légitime. Le changement d'avis exprimé après l'entretien préalable apparaît tardif, ce d'autant qu'il n'est pas possible de constater si l'employeur a eu connaissance de ce revirement avant la préparation et l'envoi de la lettre de licenciement le 6 mars 2015.

Ce refus est en conséquence fautif mais n'empêchait pas le maintien du salarié pendant le préavis.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu que le licenciement est intervenu pour une cause réelle et-sérieuse et a alloué les indemnités de préavis et de licenciement mais a débouté M. [C] [L] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

M. [C] [L] sera condamné aux dépens d'appel et débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en premier ressort,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DÉBOUTE M. [G] [C] [L] de toute autre demande;

CONDAMNE M. [G] [C] [L] aux dépens d'appel.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 18/05707
Date de la décision : 01/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-01;18.05707 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award